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principe de toutes les defobeiffances que nous commettons contre la loi de Dieu. Nous y en avons deux fortes de peintures bien vives & bien fenfibles; l'une enigmatique & en figures, l'autre fimple & naturelle. Et comme un enfant d'Adam qui veut fe donner à Dieu, doit commencer par fe connoître lui-même en cette qualité, & par confiderer ferieusement tous les vices & toutes les inclinations du peché, qui ont defiguré l'image de Dieu en lui, il ne peut mieux acquerir cette connoiffance qu'en s'étu diant lui-même dans ces deux differens portraits.

Le premier qui eft enigmatique, nous l'avons dans les divers malades, & dans les differentes infirmitez fur lefquelles JESUS-CHRIST a daigné exercer fa misericorde & fa puiffance, en gueriffant ceux qui en étoient atteints.Car les faints Peres nous aprennent que nôtre Sauveur a difpenfé de telle maniere fes bienfaits fur les malades qu'il a gueris, fur les morts qu'il a reffufcitez, & fur les poffedez qu'il a delivrez du demon, qu'en même tems qu'il donnoit, par ces effets merveilleux de fa fouveraine puiffance des preuves évidentes de fa` divinité,

il faifoit voir aux pecheurs les differentes plaies dont leurs ames ont été frapées par le peché d'Adam; la mort du corps & de l'ame qui en eft la peine, & la fervitude deplorable où nous nailsons fous la puiffance de fatan. Ce pouvoir que le Sauveur exerçoit fur les corps, n'étoit qu'une figure & un prelude de celui qu'il étoit venu exercer fur les ames en les delivrant de la mort du peché, & de la tirannie du demon.

Celui donc qui en lifant l'Evangile voudra étudier & connoître ce que c'eft qu'on apelle le vieil homme, l'homme corrompu, un enfant d'Adam, un pecheur dechu de cet état heureux où il avoit été créé; c'est-à-dire, qui voudra connoître fon propre cœur, il le verra dans ces differens malades de l'Evangile. Il verra dans l'avengle né & dans tous les autres, l'aveuglement & l'ignorance où nous naiffons à l'égard de Dieu & de nos devoirs; dans le paralitique, l'impuiffance à tout bien où le peché nous a mis; dans la fievre ardente de la bellemere de faint Pierre, l'ardeur de la concupifcence qui nous brule le cœur ; dans Phemoroiffe, l'habitude des vices charnels; dans le fourd & muet, la furdité

du cœur à l'égard de Dieu & fon impuiffance à avouer les miferes, à louer fon createur; dans l'Hidropique, l'avarice & la cupidité des faux biens, dont l'abondance ne fait qu'en augmenter la foif, & caufer cette enflure de cœur qui eft le vice des riches. Ainfi des

autres.

Mais le fecond portrait du vieil-homme, c'eft-à-dire, des vices & des inclinations corrompuës, qui ne manquent jamais de regner dans nôtre cœur, fila grace de JESUS CHRIST ne nous previent puiffamment; c'est ce que nous voions dans la conduite des Scribes & des Pharifiens, en qui la corruption du cœur humain paroît dans fon naturel & dans toute fa violence. Nous ne pouvons nous empêcher de concevoir de l'indignation contre eux, lorfque nous voions leur orgueil, leur envie, leur jaloufie, leur avarice, leur hipocrifie, leur vanité, leur haine implacable contre celui qui mettoit leurs vices en évidence; l'aveuglement & la dureté de leurs cœurs à la vue des miracles du Sauveur, leur atachement à la fuperftition, leurs attentats contre la loi de Dieu, leur inhumanité & leur rage contre tous ceux qui s'opo

foient à leurs deffeins; en un mot tous les autres vices, & toute la corruption que ces fepulcres blanchis cachoient fous un exterieur religieux, & fous une exaAtitude affectée à obferver certaines pratiques de la loi, & toutes les fauffes traditions qu'ils y avoient ajoûtées. Mais en concevant de l'horreur des mœurs des Pharifiens, prenons garde que nous ne nous flattions mal-à-propos de ne leur pas reffembler au moins en quelque chofe. Nous avons tous dans nous-mêmes le principe de tous ces vices. S'ils ne fe produisent pas pas au-dehors par des effets exterieurs, c'est peut-être par d'autres vices que les Pharifiens n'avoient pas. Enfin fi nous n'avons pas leurs inclinations dans le même degré de malice & de corruption, nous en avons au moins affez pour mettre en danger nôtre falut; & il n'y a peut-être perfonne qui ne foit Pharifien par quelque endroit, & qui ne doive aprehender qu'il n'y ait dans fon cœur quelque chofe du levain de ces hiMatt. pocrites. Malheur, difoit faint Jerôme, malheur à nous, qui avons berité des vices des Pharifiens. C'eft pourquoi quelque affreufe que paroiffe la peinture que vangile nous en fait, il y a à profiter

16.6.

II.

Marc.8.

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pour tout le monde, & chacun doit pren

dre pour

foi cet avertiffement du Sauveur: Aiez foin de vous défendre du levain des Pharifiens.

Luc.22

I.

Pour ce qui eft du portrait du second homme, JESUS CHRIST, le Sauveur du monde, le chef & le modele des Chrêtiens, c'est ce que tous ceux qui font honorez de ce nom glorieux, doivent étudier avec un foin & une aplication digne de celui dont ils doivent porter l'image & la reffemblance. Et en quel endroit de l'Evangile ne le trouveront-ils pas depeint;puifque l'Evangile n'eft autre chofe que JESUS-CHRIST même encore vivant & refpirant dans fa parole,encore operant les œuvres de fa toute puiffance divine, & fouffrant tout ce que peut fouffrir l'infirmité humaine; encore enfeignant fur la terre les veritez du Ciel, & formant pour le Ciel l'Eglife des élûs, étrangere fur la terre ? C'eft pourquoi faint Auguftin ne fait pas difficulté de dire, que nous devons écouter l'Evangile comme le Sur S. Seigneur même prefent, & ne pas dire: Olean. que ceux-là étoient heureux qui le voioient de leurs propres yeux fur la terre! Car plufieurs de ceux qui l'ont vû, l'ont fait mourir; & plufieurs de ceux qui ne l'ont point vû ont cru en lui.

Traité

30.

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