Frankreich. Nr. 10411. tout lieu d'espérer qu'ils y réussiront de même dans l'avenir. Lorsqu'ils se 3. Jani 1891. sont trouvés, sur la question des homarderies, en présence de difficultés qui ne pouvaient être résolues par un accord direct entre les deux pays, ils sont convenus de recourir à un arbitrage comme au seul moyen de mettre un terme au différend. Les motifs invoqués par les Délégués de Terre-Neuve contre le principe d'une loi permanente, ne sauraient être admis, et il est nécessaire de dissiper toute équivoque sur un point si important. Nous avons en effet le plus grand intérêt à être renseignés sur l'exécution des traités après 1893. Le Gouvernement anglais, en présentant son bill, nous avait donné à ce sujet. des garanties qui se trouvent aujourd'hui mises en question et nous ne pouvons accepter la perspective de nous trouver dans deux ans en face de nouvelles difficultés plus graves peut-être que celles dont nous voulons sortir. Si nous avons accepté volontiers les ouvertures que le Cabinet de Londres nous a faites en vue d'un arbitrage, c'était dans l'espérance d'arriver à brève échéance à un règlement durable et à une situation bien définie. Ces intentions ne se trouvent point remplies. Nous en éprouvons un profond regret. Il nous semble, quant à nous, que si les colons de Terre-Neuve acceptent sans arrière-pensée l'arbitrage, ils n'ont aucun prétexte pour se refuser aux demandes du Gouvernement métropolitain. S'ils ont une arrière-pensée, le Gouvernement anglais tiendra, nous en sommes persuadés, à couper court à des revendications contraires aux engagements internationaux et qui ne peuvent que prolonger, de part et d'autre, un état pénible de trouble et d'incertitude. || Dans les circonstances où nous nous trouvons, fort différentes assurément de celles que nous croyions pouvoir espérer, nous ne nous départirons point, le Gouvernement anglais peut en être certain, des dispositions conciliantes, dont nous n'avons cessé de nous montrer animés dans tout le cours de la négociation. Nous ne nous refuserons pas à laisser à la Colonie et au Parlement tout le temps dont ils peuvent avoir besoin et à retarder l'arbitrage dans la mesure qui paraîtra nécessaire au Gouvernement anglais pour arriver à une entente complète sur les moyens d'assurer l'exécution permanente des arrangements intervenus entre les deux Cabinets. | Je vous serai reconnaissant de remettre le plus tôt possible à Lord Salisbury une note conçue dans le sens de la présente dépêche et de lui demander un entretien dans lequel vous voudrez bien en développer et en appuyer les conclusions. Ribot. Nr. 10412 Nr. 10412. FRANKREICH. Frankreich. 8. Juni 1891. Botschafter in London an das französische auswärtige Amt. Derselbe Gegenstand. Londres, le 8 juin 1891. J'ai l'honneur de vous faire connaître que j'ai adressé, à la date d'hier, à Lord Salisbury une note en réponse à sa lettre du 1er de ce mois. || Cette note est rédigée dans le sens que me traçaient vos instructions du 3 juin. Waddington. Nr. 10413. FRANKREICH. Nr. 10413. Derselbe an Dasselbe. Mündliche Frankreich. Verhandlung mit dem englischen Premier über den - 11. Juni 1891. selben Gegenstand. Londres, le 11 juin 1891. Je suis allé hier demander à Lord Salisbury sa réponse à ma lettre du 7 juin. Une discussion assez longue s'est engagée entre nous; Lord Salisbury a d'abord repris la thèse exposée dans sa lettre du 1er juin, à savoir que tant que le Gouvernement anglais se faisait fort d'exécuter ses engagements, nous n'avions pas à nous inquiéter des moyens qu'il jugerait à propos d'employer. Je lui ai répondu que, s'il voulait bien relire ma lettre du 7, il verrait que là n'était pas la question que j'avais soulevée, mais bien de savoir si la résolution votée par la Chambre des communes donnait au Gouvernement anglais seul les moyens permanents de faire exécuter les Traités et l'Arrangement du 11 mars. "Êtes-vous, lui ai-je dit, en mesure de nous donner des assurances formelles à cet égard?" || La question ainsi nettement posée, je l'ai entretenu des tribunaux qu'il s'agirait d'instituer à Terre-Neuve, comme il l'avait déclaré dans son discours à la Chambre des Lords et comme les journaux l'annonçaient quotidiennement. || A ce propos, je lui ai rappelé qu'il m'avait parlé non de tribunaux, mais d'un commissaire jurisconsulte qui accompagnerait le commodore anglais. Je lui ai dit que nul ne pouvait ignorer quel sens la Colonie attachait à l'institution de ces tribunaux et qu'elle entendait que toutes les contestations relatives aux pêcheries leur seraient déférées au lieu d'être tranchées par les commandants de la Station navale ou par la voie diplomatique. "C'est précisément, ai-je dit à Lord Salisbury, ce que nous ne pouvons accepter; si vous établissez ces tribunaux, vous vous désaississez en leur faveur de tout ou partie de la puissance souveraine que vous avez exercée jusqu'à ce jour dans une question internationale. || Entendez-vous, le cas échéant, nous opposer leurs jugements et abriter votre responsabilité sous leurs décisions? | Ce système serait la négation du droit international, tel qu'il a été pratiqué jusqu'ici et introduirait un principe nouveau qui rendrait fort difficile l'exécution des traités. Voilà pourquoi nous ne voulons avoir affaire qu'au Gouvernement anglais seul." || Lord Salisbury, tout en reconnaissant ce qu'il y avait de vrai dans mes observations, m'a répondu que la procédure pour les extraditions fournissait un précédent, puisque la justice de chaque pays statuait sur l'extradition de criminels qui lui étaient étrangers. Je lui ai fait remarquer qu'il n'y avait aucune analogie entre les deux cas: les arrangements pour l'extradition réciproque des criminels sont bilatéraux, ils ont été sanctionnés après de longues et délicates négociations; ici, au contraire, il s'agirait d'imposer à une des parties des juges qu'elle repousse. || Lord Salisbury alors est revenu à son idée d'un commissaire (legal commissioner) chargé d'accompagner le commodore anglais et de l'éclairer de ses conseils. Je lui ai répondu que, si le Gouvernement anglais désirait placer auprès du commandant de son escadre un conseil judiciaire, c'était son affaire, mais que j'étais obligé de Staatsarchiv LVI. 12 Frankreich. Nr. 10413. ramener Sa Seigneurie à la question fondamentale, c'est-à-dire: "Traitons-nous 11. Juni 1891. avec un Gouvernement à qui le Parlement garantit les moyens permanents de faire exécuter les engagements qu'il a conclus, et pouvez-vous me faire une déclaration à cet égard?" || Lord Salisbury a différé sa réponse; il tient à consulter le Chancelier et les conseils légaux de la Couronne. || La conversation s'est terminée par une nouvelle affirmation, de ma part, de la position nette que nous avons prise. "Nous ne voulons avoir affaire qu'au Gouvernement anglais seul, muni de pouvoirs permanents." Waddington. Nr. 10414. Nr. 10414. FRANKREICH. Frankreich. 20. Juni 1891. Frankreich. Auswärtiges Amt an den Botschafter in London. Verletzungen des Modus vivendi in Neufundland. Paris, le 20 juin 1891. Le Ministre de la Marine vient de me faire savoir que plus de trente nouvelles homarderies anglaises functionnent entre Saint-Georges et SainteMarguerite, contrairement aux dispositions du modus vivendi. La Division navale britannique n'est pas intervenue et, d'ailleurs, n'a pas paru jusqu'ici à la côte ouest. || Veuillez signaler, sans retard, à Lord Salisbury ces violations des arrangements existants et lui demander de réitérer d'urgence au Commandant de la station anglaise ses instructions pour l'application du modus vivendi. Il est inadmissible que les habitants de Terre-Neuve puissent méconnaître aussi ouvertement les obligations qui les lient. Nous ne pouvons, de notre côté, et vous le ferez amicalement observer, que renouveler au Commandant Fournier la recommandation de tenir la main à ce que le modus vivendi, consenti par les deux pays, soit exactement observé. Ribot. - Nr. 10415. Nr. 10415. FRANKREICH. Botschafter in London an das französische auswärtige Amt. Derselbe Gegenstand. Englische Erklärung. 22. Juni 1891. Londres, le 22 juin 1891. Je me suis empressé de faire à Lord Salisbury la communication que comportaient vos instructions d'avant-hier. Le Ministre était à Hatfield; il m'a fait savoir par Sir Th. Sanderson que le Gouvernement anglais n'avait pas jugé possible d'envoyer ses bâtiments sur la côte de Terre-Neuve aussi longtemps que ses officiers n'auraient pas de pouvoirs légaux pour faire exécuter le modus vivendi; mais que, depuis plusieurs jours (depuis le vote du Parlement de Terre-Neuve), ces officiers avaient reçu pour instructions de se mettre en route. Sir B. Walker a été autorisé par le télégraphe à se rencontrer avec le Commandant français à l'époque que fixera ce dernier. Des instructions détaillées seront envoyées au Commandant des forces navales anglaises, après le Conseil des Ministres qui doit se réunir demain matin. Frankreich. J'ai prié Lord Salisbury de m'indiquer un rendez-vous pour après-demain. Je Nr. 10415. crois savoir qu'il interprète notre volonté de n'avoir affaire qu'au Gouverne- 22. Juni 1891. ment anglais seul, comme un refus de reconnaître toute autre autorité que celle de la marine anglaise. Je tiendrais à avoir, s'il est possible, demain soir, votre sentiment à ce sujet, pour le cas où, par exemple, le Ministre me demanderait mon avis sur la nomination d'un commissaire spécial, non pas local, mais anglais, devant résider à bord d'un des navires de la station britannique. Waddington. Nr. 10416. FRANKREICH. den Bot- Nr. 10416. Auswärtiges Amt an Frankreich. schafter in London. Die englische Regierung allein 23. Juni 1891. wird verantwortlich gemacht für die Durchführung der Verträge und Abkommen. Paris, le 23 juin 1891. J'ai examiné attentivement la question que vous me posez dans la dernière partie de votre communication d'hier. Nous tenons à ce que le Gouvernement anglais, responsable vis-à-vis de nous de l'exécution des Traités, n'abandonne ni à des tribunaux ni à un commissaire, qui ne relèverait pas directement de lui, le soin d'assurer l'application des actes internationaux relatifs aux pêcheries de Terre-Neuve. Ce qui se passe en ce moment même démontre la nécessité d'une intervention effective et concertée des représentants des deux Gouvernements pour empêcher que les dispositions les plus formelles et les plus claires. du modus vivendi ne deviennent lettre morte. Vous vous souvenez que Lord Salisbury a reconnu lui-même que le Gouvernement anglais avait contracté vis-à-vis de nous une obligation personnelle dont il ne peut se décharger sur personne. Nous ne pourrions toutefois nous opposer à ce que le Commandant de la station anglaise fût assisté d'un commissaire spécial ayant pour mission de l'éclairer de ses avis, s'il était bien entendu que ce commissaire ne sera pas investi d'une autorité propre, mais d'une simple délégation du Gouvernement, et que, par conséquent, ce dernier ne pourra pas se retrancher derrière les avis de son délégué pour décliner les responsabilités qui lui incombent. Je vous autorise à vous exprimer dans ce sens au cours de l'entretien que vous devez avoir avec Lord Salisbury. Ribot. Nr. 10417. FRANKREICH. Botschafter in London an auswärtige Amt. Englische Ansicht zur Sache. Londres, le 24 juin 1891. das Nr. 10417. Frankreich. 24. Juni 1891. Lord Salisbury, avec qui je viens d'avoir un entretien au sujet de TerreNeuve, m'a fait connaître la conclusion à laquelle il était arrivé, après avoir consulté le Chancelier et les conseillers de la Couronne: lorsque le Gouverne Frankreich. Nr. 10417. ment anglais, m'a-t-il dit, déclare à un Gouvernement étranger qu'il a les 21. Juni 1891. pouvoirs nécessaires pour exécuter une convention, ce Gouvernement étranger n'a pas le droit de discuter les moyens d'exécution; une discussion de ce genre aurait des inconvénients de toutes sortes et amoindrirait l'autorité du Pouvoir central. || "Cela dit, a-t-il ajouté, je suis prêt à vous donner officieusement des détails sur l'arrangement que nous sommes à la veille de conclure avec les Délégués de la Colonie et qui deviendra exécutoire après que la sentence arbitrale aura été rendue. || Un des griefs des habitants de Terre-Neuve était que leurs propriétés pourraient être saisies et même détruites par la seule autorité d'un officier de marine, ce qui est contraire à la loi anglaise telle qu'elle est appliquée partout ailleurs. Pour y remédier, nous proposons d'instituer un ou deux juges ou commissaires légaux nommés par la Couronne, sans l'autorisation desquels les officiers de marine ne pourront saisir ou faire démolir une propriété appartenant à un sujet britannique. Il y aura appel de leur décision devant le Conseil privé de la Reine à Londres." "Cette procédure, lui dis-je, cccasionnera de grandes lenteurs; il est, en outre, bien entendu qu'elle ne pourra s'appliquer qu'aux sujets - anglais. Qu'arrivera t-il donc lorsqu'un citoyen français sera en cause? Nous ne pouvons reconnaître des juges de Terre-Neuve". "Là où un Français sera en cause, m'a-t-il répondu, il n'y aura rien de changé, ce me semble: ou bien l'accord s'établira entre les deux commandants, ou bien il faudra avoir recours à la voie diplomatique. Il est certain, d'ailleurs, que, lorsque les arbitres auront rendu leur sentence, beaucoup de difficultés actuelles disparaîtront. Telle est mon opinion personnelle; mais je ne voudrais pas m'engager sur les questions délicates de droit qui peuvent surgir et qui pourront nécessiter une intervention diplomatique." J'ai alors rappelé à Lord Salisbury ma lettre du 7 juin et notre entretien du 11 et je lui ai dit: "Pouvez-vous me donner une réponse précise à la question que je vous ai posée dans ma lettre du 7 juin? Pouvez-vous nous déclarer officiellement que vous avez des pouvoirs complets et permanents pour faire exécuter les traités avec la France et l'Arrangement du 11 mars? Pouvez-vous nous garantir que nous n'aurons affaire qu'au Gouvernement anglais seul?" Il m'a répondu qu'il croyait pouvoir m'écrire une lettre qui nous donnerait satisfaction sur ce point. || Lord Salisbury m'a confirmé que, pour l'exécution du modus vivendi, les instructions nécessaires avaient été expédiées au Commandant de la station navale anglaise. Waddington. Je m'empresse de vous communiquer ci-joint, en copie, la réponse que vient de m'adresser Lord Salisbury au sujet de l'exécution de l'Arrangement du 11 mars. Waddington. |