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votre manteau » (Deut., XXII, 12), les Pharisiens, afin d'attirer les regards, affectaient de porter, en guise de bandeau, sur le front, ou comme des amulettes attachées à leurs bras, des membranes de parchemin, sur lesquelles étaient écrits ces préceptes de la loi, et qui étaient renfermées dans une petite boîte de peau noire, de la forme d'un petit quarré, et attachées au moyen de deux courroies. Ils cousaient, dans le même but, à leurs manteaux, d'énormes franges de couleur hyacinthe.

Mais, ce ne sont pas là les seules marques de leur sotte vanité. « Ils aiment, » poursuit le Sauveur, « à être salués dans les places publiques, à occuper les premières places dans les festins, les premiers siéges dans les synagogues. Ils aiment qu'on leur donne le titre de Rabbi,» de Maître, et leur orgueil se repaît de toutes ces futiles distinctions.

3° Application à ses disciples. — Fixant alors les yeux sur les disciples qui l'entouraient : « Pour vous, » leur dit-il, méprisez cette vaine soif de distinction; « ne cherchez point à vous faire appeler maîtres et docteurs, car vous n'avez qu'un maître, » qui est Dieu, à qui vous devez rapporter la gloire de tout ce que vous savez et enseignez, «et vous êtes tous frères, » et, par conséquent, égaux devant Dieu. « Ne cherchez point à vous faire appeler mon Père,» titre que les disciples donnent à leur maître, « car, un seul est votre père, celui qui est dans les cieux. Ne vous faites pas » non plus « appeler docteurs, car vous n'avez qu'un docteur, qui est le Christ, » et vous ne faites que répéter aux autres ce qu'il vous a enseigné le premier. Si la civilité, l'usage, la bienséance, ont recours à ces appellations honorifiques, ne cherchez pas, du moins, à en repaître votre vanité, votre orgueil, à vous en glorifier devant les hommes, mais rapportez

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6. Amant autem primos recubitus in cænis, et primas cathedras in synagogis, 7. et salutationes in foro, et vocari ab hominibus Rabbi. 8. Vos autem nolite vocari Rabbi: unus est enim Magister vester; omnes autem vos fratres estis. 9. Et patrem nolite vocare vobis super terram : unus est enim Pater vester, qui in cœlis est. 40. Nec vocemini magistri : quia magister vester unus est, Christus.

à Dieu tout honneur et toute gloire. « Le plus grand, parmi vous, sera votre serviteur,» se croira établi pour servir les autres : « car, quiconque s'élève, sera abaissé, et quiconque s'abaisse, sera élevé?» Dieu se plaît à élever les humbles, et à confondre les orgueilleux.

4° Les huit anathèmes.- Jésus prononce ensuite huit anathèmes contre les Pharisiens endurcis et hypocrites, comme, au commencement du sermon sur la montagne, il avait prononcé huit bénédictions ou béatitudes, sur les cœurs humbles et dociles à sa voix. Il maudit, a) leur endurcissement volontaire, cause non-seulement de leur damnation, mais encore de celle des autres Juifs qu'ils séduisent par leur mauvaise doctrine et leurs mauvais exemples « Malheur à vous, Pharisiens hypocrites, qui fermez aux hommes le royaume des cieux! » Vous qui, par votre vocation, devriez l'ouvrir aux autres, non-seulement, « vous n'y entrez pas vous-mêmes, » en repoussant opiniâtrément celui qui seul peut vous y introduire, mais de plus « vous n'y laissez pas entrer les autres,» en les empêchant de croire en moi, en leur rendant la loi insupportable et impraticable.

Jésus maudit b) leur honteuse cupidité, se cachant sous le voile de la religion: « Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites, qui dévorez les maisons des veuves,» trompées par votre piété simulée, qui dissipez dans vos splendides festins les sommes que vous leur extorquez, «< en leur vendant chèrement vos longues prières, » et abusez ainsi indignement des choses saintes pour satisfaire votre avarice: « vous recevrez pour cela un jugement » une condamnation<< doublement sévère, » et pour votre avarice et pour votre hypocrisie.

Il maudit c) leur faux prosélytisme, qui n'aboutit

11. Qui major est vestrûm, erit minister vester. 12. Qui autem se exaltaverit, humiliabitur, et qui se humiliaverit, exaltabitur. 13. Væ autem vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ: quia clauditis regnum cœlorum ante homines: vos enim non intratis, nec introeuntes sinitis intrare. 44. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ : quia comeditis domos viduarum, orationes longas orantes: propter hoc amplius accipietis judicium.

DEHAUT. L'Evang. - T. IV.

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qu'à rendre les hommes pires qu'ils sont eux-mêmes : «Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites, qui courez les mers et la terre pour faire un proselyte, » pour convertir un païen au judaïsme, « et qui, quand il l'est devenu, en faites deux fois plus que vous un fils de l'enfer à cause des excès horribles où le portent les mauvais exemples de votre vie, et les maximes pernicieuses de vos doctrines; car les vices s'imitent plus facilement que les vertus, et, dans la voie du mal, les disciples ont bientôt surpassé leur maîtres.

Il maudit d) leur mauvaise casuistique, leurs fausses interprétations de la loi de Dieu. «Malheur à vous, guides aveugles, » qui corrompez la loi de Dieu par vos interprétations mensongères, et la faites servir à votre avarice, « qui» ne craignez pas de « dire: Quiconque jure par le temple, ce n'est rien, » et on peut violer ce serment en sûreté de conscience, sous prétexte que la où le nom de Dieu n'est pas explicitement, ou du moins implicitement invoqué, il n'y a pas de serment véritable, ni l'obligation rigoureuse de tenir sa promesse; « mais quiconque jure par l'or du temple, » attendu que cet or, consacré à Dieu, n'existe que pour lui, ne peut être employé à aucun usage profane, etc.., « il est lié par son serment, » et obligé d'accomplir son vou. « Insensés et aveugles! que doit-on estimer le plus, l'or, ou le temple qui sanctifie l'or? » et comment pouvez-vous préférer l'argent au temple de Dieu? Malheur à vous, « qui dites encore: Quiconque jure par l'autel, ce n'est rien; » car l'autel, les bois, les pierres qui le composent, ce n'est pas Dieu; « mais quiconque jure par l'offrande déposée sur l'autel, doit ce qu'il a juré, » mettant ainsi bien plus de prix aux dons qui vous sont faits qu'à l'honneur et à la gloire de Dieu! « Aveu

15. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ: quia circuitis mare et aridam, ut faciatis unum proselytum; et cùm fuerit factus, facitis eum filium gehennæ duplo quàm vos. 16. Væ vobis, duces cæci, qui dicitis: Quicumque juraverit per templum, nihil est; qui autem juraverit in auro templi, debet. 17. Stulti et cæci : Quid enim ma. jus est, aurum, an templum quod sanctificat aurum? 18. Et qui cumque juraverit in altari, nihil est quicumque autem juraverit in dono, quod est super illud, debet.

gles que vous êtes, lequel doit-on plus estimer, l'offrande ou l'autel qui sanctifie l'offrande? Celui donc qui jure par l'autel jure par lui, et par tout ce qui est dessus. Et quiconque jure par le temple jure par lui, et par celui dont il est la demeure. Et celui qui jure par le ciel, jure par le trône de Dieu, et par celui qui y est assis (a). » Toutes ces vaines et subtiles distinctions ne servent qu'à vous former une fausse conscience, à duper les hommes simples et sans défiance, à consacrer et autoriser le parjure (Voy. § LXII.)

Jésus maudit e) l'importance qu'ils attachent à des pratiques minutieuses, tandis qu'il violent les préceptes les plus importants. « Malheur à vous, Scribes et Pharisiens hypocrites, qui payez » scrupuleusement dime» des moindres herbes de vos jardins, telles que << la menthe, l'aneth, le cumin, » bien que vous n'y soyez pas rigoureusement obligés, « mais qui ne tenez aucun compte des points les plus graves de la loi, la justice, la miséricorde et la foi. Ce sont là les choses qu'il fallait » par dessus tout et en premier lieu « pratiquer, sans néanmoins omettre les autres. »« Guides aveugles, qui passez au filtre » le vin que vous buvez, de peur d'avaler « un moucheron, » et de contracter par là quelque souillure, « et qui avalez un chameau;» qui vous assujettissez scrupuleusement aux pratiques les plus minutieuses, et qui avez la conscience énormement large, à l'égard des prévarications les plus graves. « Malheur à vous, qui nettoyez » scrupuleusement « les

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49. Cæci quid enim majus est, donum, an altare quod sanctificat donum? 20. Qui ergo jurat in altari, jurat in eo et in omnibus quæ super illud sunt; 24. Et quicumque juravit in templo, jurat in illo, et in eo qui habitat in ipso; 22. Et qui jurat in cœlo, jurat in throno Dei et in eo qui sedet super eum. 23. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ: quia decimatis mentham, et anethum, et cyminum, et reliquistis quæ graviora sunt legis, judicium, et misericordiam, et fidem. Hæc oportuit facere, et illa non omittere. Duces cœci, excolantes culicem, camelum autem glutientes.

24.

(a) Schebuoth, fol. 34. « Quia præter Deum, cœli et terræ creatorem, exstat etiam ipsum cœlum ac tellus, indubium esse debet, quod is qui per cœlum jurat, aut per terram, non juret per eum, qui hæc creavit, sed per ipsas has res creatas. » - Ovid. « Jurat judæus per sceptrum, sceptrum non putat esse deos. »

dehors de la coupe » où vous buvez, « et du plat » où vous mangez, qui observez strictement toutes les ablutions légales,« mais qui, au dedans, êtes pleins de souillures et de rapines. Pharisiens aveugles, purifiez d'abord le dedans de la coupe et du plat, afin que le dehors soit pur. » A quoi vous serviront toutes vos purifications légales, qui ne sont que le symbole de la pureté intérieure, si votre âme est souillée et impure? (Voy. S LXII). Encore une fois, « malheur à vous, Scribes et Pharisiens, car vous ressemblez à des sépulcres blanchis (b) qui, au dehors, plaisent aux yeux des hommes, mais, au dedans, sont pleins d'ossements de mort et de toute sorte de pourriture. Ainsi, au dehors, vous semblez justes aux yeux des hommes, » qui ne voient que l'extérieur; « mais, au dedans,» aux yeux de Dieu, qui voit tout, « vous êtes pleins d'hypocrisie et d'iniquité. »

Jésus maudit f) leur haine et leurs persécutions contre les prophètes et les envoyés de Dieu. « Malheur à vous, comédiens, qui bâtissez, » non par piété, mais par ostentation. « des tombeaux aux prophètes, et qui ornez les monuments » érigés à la mémoire « des justes, en disant: Si nous eussions vécu aux jours de nos pères, nous n'aurions point versé avec eux le sang des prophètes.»- Hypocrites, « vous témoignez vous-mêmes. » en les appelant vos pères, « que vous êtes bien les » dignes « fils de ceux qui ont tué les prophètes; » en même

25. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ : quia mundatis quod de foris est calicis et paropsidis: intùs autem pleni estis rapinâ et immunditiâ. 26. Pharisae cæce, munda prius quod intùs est calicis et paropsidis, ut fiat id, quod deforis est, mundum. 27. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ: quia similes estis sepulcris dealbatis, quæ a foris parent hominibus speciosa, intùs vero plena sunt ossibus mortuorum, et omni spurcitiâ; 28. Sic et vos a foris quidem paretis hominibus justi; intùs autem pleni, estis hypocrisi et iniquitate. 29. Væ vobis, Scribæ et Pharisæi hypocritæ: qui ædificatis sepulcra prophetarum, et ornatis monumenta justorum. Et dicitis: Si fuissemus in diebus patrum nostrorum, non essemus socii eorum in sanguine prophetarum. 31. Itaque testimonio estis vobismetipsis, quia filii estis eorum qui prophetas occiderunt

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30.

(b) Les Juifs, dans la crainte qu'on ne se souillât en touchant un tombeau, les blanchissaient au dehors, afin qu'on les distinguât.

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