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2) « La question posée à Jésus, s'il est le Roi des Juifs, n'est pas amenée d'une manière pertinente: ce n'est que dans saint Luc qu'elle est motivée par les accusations des Juifs. - Réponse. Cela prouve simplement que les Evangéliste se complètent et s'éclaircissent les uns les autres.

3) << Si l'on conçoit, par le récit de Luc, comment Pilate put adresser à Jésus cette question, on comprend d'autant moins, dans cet Evangéliste, comment, sur la réponse affirmative de Jésus, Pilate put, sans plus ample informé, déclarer aux accusateurs qu'il ne trouvait aucun crime en l'accusé. » Réponse. Nous le concevons parfaitement en lisant le récit plus détaillé de saint Jean, cela nous suffit. Ce qui, si nous n'avions que le récit de saint Luc nous paraîtrait obscur maintenant, ne l'était pas, lorsque saint Luc, écrivait, et que la mémoire des faits était toute récente; et l'Evangéliste pouvait, sans inconvénient, se borner à un récit rapide et sommaire.

<< Mais si, comme le prétend saint Jean, l'interrogatoire se passa dans l'intérieur du prétoire, où aucun Juif ne voulut mettre le pied, qui donc entendit le dialogue du gouverneur avec Jésus et put en garantir la vérité au rédacteur du quatrième Evangile? » Sans recourir à l'inspiration de l'Esprit-Saint, que nos adversaires n'admettraient pas, il suffit de remarquer que, si les Juifs ne pénétrèrent pas dans le prétoire, Pilate ne s'y trouvait pas seul, et y avait son entourage; or, évidemment, ceux qui étaient là présents purent raconter à saint Jean ce qui s'y était passé.

ENSEIGNEMENTS PRATIQUES.

« Ils le garottèrent, le conduisirent au prétoire, et le livrèrent à Pilate. » Les Juifs répudient publiquement le Messie qui vient les sauver, et le livrent aux païens.

« Les Juifs lui dirent: Il ne nous est pas permis de mettre personne à mort. » D'après l'aveu des Juifs, il est donc manifeste que le sceptre est ôté de Judas, et que l'époque où le Messie devait paraître était arrivée.

« Pilate lui dit: Tu es donc le Roi des Juifs? Jésus lui répondit: Vous le dites, je suis Roi; mais mon royaume n'est pas

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de ce monde. » Le royaume de Jésus-Christ ne tire pas son origine de la terre, mais du ciel. Il n'est pas renfermé dans les limites de la vie présente, mais il embrasse l'éternité tout entière. Il ne nous offre pas pour but la jouissance des biens terrestres, que la mort va bientôt nous ravir, mais la possession des biens éternels. Il ne doit s'établir sur la terre qué pour y former des citoyens du ciel; c'est dans le ciel qu'il aura sa perfection; c'est vers le ciel qu'il dirige toutes nos pensées, toutes nos démarches, toutes nos espérances.

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« Je suis venu en ce monde pour rendre témoignage de la vérité; quiconque aime la vérité m'écoute. » - Le mensonge règne dans le monde. Jésus-Christ est le roi de vérité; on peut se fier à ses promesses. Nous devons dire avec Jésus-Christ : Mon royaume, le royaume qui est le but de toutes mes espérances, où je suis appelé à régner un jour, n'est pas de ce monde. Je ne suis qu'un voyageur sur la terre. Jésus-Christ est notre Roi; soyons lui fidèles... « Adveniat regnum tuum. »

Considérons :

PROJETS HOMILÉTIQUES.

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A. JÉSUS DEVANT PILATE.

I. La conduite des Juifs.

3)

Ils y manifestent : 1) leur haine meurtrière contre Jésus-Christ. Ils se hâtent, dès le lever du jour, de conduire Jésus au prétoire, pour satisfaire leur soif de sang: « Adducunt ergo Jesum in prætorium: erat autem manė; » 2) leur hypocrisie : ils craignent de se souiller, en entrant chez Pilate; ils ne craignent pas de verser le sang innocent: « Et ipsi non introierunt in prætorium, ut non contaminarentur. Leur mauvaise foi. Ils ont condamné Jésus-Christ comme blasphemateur; devant Pilate, il n'est plus question de blasphème, mais ils le présentent comme un séditieux, un perturbateur du repos public; ils transforment leur accusation purement religieuse en une accusation politique « Cœperunt illum accusare, dicentes: hunc invenimus subvertentem gentem nostram, etc.; 4) leur impudence. Ils accusent faussement Jésus-Christ du même crime dont ils sont réellement coupables au fond de leur cœur, au moins d'intention et de désir : « Et prohibentem tributa dare Cæsari, etc.; etc.; 4) leur décadence, et leur impuissance. Ils sont tellement tombés, qu'ils sont dépouillés de tout pouvoir politique, et ne possèdent plus même le droit de condamner à mort, ce qui devait bien leur rappeler l'oracle de Jacob: « Dixerunt ei Judæi: nobis non licet interficere quemquam. » leur crime inexpiable. Ils livrent eux-mêmes, au nom de la nation, entre les mains des païens, et dévouent à la mort infâme des criminels et des esclaves, leur Messie, leur Roi, leur Sauveur, leur Dieu, et consomment ainsi la réprobation et la ruine du peuple juif : « Dicentem se

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Christum regem esse. » Détestons la conduite et le crime des Juifs, et prenons la résolution de ne jamais les imiter.

II. La conduite et le caractère de Pilate.

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4) Sa connaissance des hommes. Il n'est pas dupe de l'hypocrisie des Juifs, et reconnaît les motifs honteux qui les portent à calomnier Jésus-Christ, à demander sa mort : « Quam accusationem affertis adversus hominem hunc? » 2) Son équité naturelle. Il ne veut pas être l'instrument aveugle de la haine des Juifs, mais, avant de condamner Jésus, voir les choses de ses propres yeux : « Introivit in prætorium Pilatus, et vocavit Jesum. » 3) - Son incrédulité et son indifférence pour la vérité. Les questions religieuses le laissent complètement indifférent, et, après avoir demandé qu'est-ce que la vérité, il s'en va sans attendre la réponse : « Dicit ei Pilatus: Quid est veritas? Et cùm hoc dixisset, iterùm exivit ad Judæos. » d'imitateurs il trouverait maintenant parmi nous, s'il revenait sur la terre! 4) Sa faiblesse inexcusable. Il reconnaît que Jésus est innocent, et il n'a pas le courage de le mettre en liberté, et de le dérober à la fureur de ses ennemis, comme c'était son devoir : « Et dicit eis: Ego nullam invenio in eo causam. » — Soyons prudents, équitables; fuyons l'indifférence, l'incrédulité, la faiblesse de carac

tère.

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III. La conduite de Jésus-Christ :

Que

1) Il se laisse conduire, sans résistance, devant un juge païen : « Et vinctum adduxerunt eum, et tradiderunt Pontio Pilato. » 2) Il se soumet, en tout cela, à la volonté de son Père céleste : « Ut sermo Jesu impleretur, etc. » 3) Il confesse publiquement et hautement sa dignité messianîque, sa royauté, le but de sa mission, etc. : « Tu dicis, quia rex sum ego: ego in hoc natus sum, etc. » 4) Il garde le silence, et dédaigne une défense inutile, parce qu'il veut mourir pour le salut des hommes : « Et non respondit ei ad ullum verbum, ità ut miraretur præses vehementer. » Efforçons-nous d'imiter la soumission, la douceur, l'obéissance, le courage, l'abnégation de JésusChrist, son dévouement pour les hommes, etc.

IV. Le royaume de Jésus-Christ.

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4) Sa nature. a) Ce n'est pas un royaume de ce monde, un royaume terrestre « Regnum meum non est hujus mundi. » Ce n'est la pas puissance de l'homme, le bras de l'homme, c'est la puissance divine, le bras de Dieu, qui l'a fondé, qui le soutient et le conserve. b) Il ne se propose aucun but terrestre; il tend vers le ciel, et ouvre le ciel aux hommes; c) bien qu'il ne soit pas de ce monde, il est dans le monde, pour le transformer et le sanctifier; d) c'est le royaume de la vérité: « In hoc natus sum..., ut testimonium perhibeam veritati. » - Il a pour but d'enseigner la vérité aux hommes, il exerce son empire sur les cœurs, non par la force, mais par la persuasion, par la foi et la charité. e) Ce royaume paraît maintenant, aux yeux du monde, dans la personne du roi, bien faible, bien méprisable, bien

impuissant: « Si ex hoc mundo esset regnum meum, ministri mei utique decerlarent, ut non traderer Judæis; » mais il renferme en lui la force divine; bientôt il triomphera du monde entier, et il embrassera la terre entière.

2) Ses sujets. Il en est des sujets comme du royaume lui-même. a) Ils ne sont pas, non plus, de ce monde; leurs pensées, leurs affections, leurs espérances ne doivent pas être dirigées vers la terre, mais vers le ciel. b) Pour être de ce royaume, il faut aimer la vérité, écouter sa voix, lorsqu'elle se manifeste à nous par le spectacle de la nature, par la lumière intérieure de notre conscience, par la révélation divine, par la voix d'un sage directeur, etc. : « Omnis quis est ex veritate, audit vocem meam. » c) Mais les cœurs remplis de l'esprit du monde ne reçoivent pas, ne comprennent pas, ne goûtent pas cette vérité, et n'ont pour elle que mépris et indifférence : « Dicit ei Pilatus: Quid est veritas? et cùm hoc dixisset, etc. » d) Ce n'est pas par la vaine science de la philosophie humaine, mais par une humble soumission, et le renoncement à soi-même, que l'on entre en possession de cette vérité divine. e) Les citoyens de ce royaume de la vérité ont la paix avec Dieu, avec eux-mêmes, et avec leur prochain, et règlent leur conduite d'après la parole de Dieu.

B. QUELQUES INDICATIONS HOMILÉTIQUES.

I. Jésus devant Pilate.

Nous y voyons ici, 1) la Synaguogue dans sa décadence, et son impuissance: «< Nobis non licet interficere quemquam. » 2) le paganisme dans sa misère et dans son aveuglement : « Dicit ei Pilatus : Quid est veritas? » 3) L'Eglise, ou le royaume de Jésus-Christ dans sa faiblesse apparente, et en réalité, dans sa force toute divine et sa beauté victorieuse : « Regnum meum non est hujus mundi....., in hoc natus sum, etc. »

2)

II. Impuissanee de la haine des Juifs contre Jésus-Christ. 1) Ils veulent le faire mourir..., ils n'en ont pas le pouvoir. Ils l'accusent comme un séditieux, un agitateur public..., et ils ne trouvent, auprès de Pilate, que défiance et incrédulité. 3) Ils rejettent leur Messie, leur Roi, leur Sauveur..., et ce Roi, rejeté, crucifié, les rejettera, les brisera eux-mêmes, va triompher du monde entier, et soumettre toute la terre à ses lois.

III. Qu'est-ce que la vérité ?

4) C'est ce que demandent encore de nos jours, sans pouvoir y rẻpondre, et souvent, sans se soucier de la réponse, a) le rationalisme, b) le protestantisme, c) l'indifférentisme, d) l'industrialisme et le maté 2) C'est ce que chacun doit se demander avec

rialisme modernes.

un cœur droit et sincère.

IV. « Ego nullam in eo invenio causam. »

C'est ce qu'avouera avec Pilate. quiconque voudra considérer də bonne foi, la doctrine de Jésus-Christ, 2) Sa conduite, 3) ses œuvres, 4) l'Eglise qu'il a fondée et qu'il conserve.

V. Le silence de Jésus-Christ.

« Accusatur Dominus, et tacet ! Et benè tacet, qui defensione non indiget. Ambiant defendi, qui timent vinci. Non ergo accusationem tacendo confirmat, sed despicit non repellendo. » (S. Aug.)

§ CXXI.

JÉSUS ENVOYÉ A HÉRODE.

(L. XXIII, 5-12.)

« Cependant les Juifs, » voulant vaincre l'irrésolution de Pilate, « insistaient avec véhémence,» répétant toutes leurs accusations, « et criaient: Il soulève le peuple par les doctrines » séditieuses « qu'il prêche » partout, qu'il répand » dans toute la Judée, depuis la Galilée, » dont vous connaissez l'esprit remuant, séditieux, « où il a commencé, jusqu'ici même. » Ce serait vous compromettre, ce serait manquer à tous vos devoirs de gouverneur, que de mettre en liberté un homme aussi dangereux.

Pilate, entendant prononcer le nom de Galilée, demanda si cet homme était Galiléen. Dès qu'il sut que Jésus était de la juridiction d'Hérode, » il saisit cette circonstance pour se débarrasser d'une affaire désagréable, qui le mettait dans l'alternative ou de condamner à mort un innocent, ce qui lui répugnait, ou de s'exposer, s'il le relâchait, aux dénonciations des Juifs auprès de l'empereur, « et il le renvoya devant ce prince, Hérode Antipas, tétrarque de Galilée, fils d'Hérode l'infanticide, et lui-même meurtrier de saint Jean-Baptiste, «<et qui, » étant juif de religion, « se trouvait alors à Jérusalem,» pour la fête de Pâques.

« Quand on annonça » à ce prince léger et frivole

M. XXIII. 5. At illi invalescebant, dicentes: Commovet populum docens per universam Judæam, incipiens à Galilæâ usque húc. 6. Pilatus autem audiens Galilæam, interrogavit si homo Galilæus esset. 7. Et ut cognovit quod de Herodis potestate esset, remisit cum ad Herodem, qui et ipse Jerosolymis erat illis diebus.

DEHAUT, L'Evang.-T. IV.

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