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C. PRINCIPALES CIRCONSTANCES DE LA RUINE DE JÉRUSALEM.
AVIS DONNÉS AUX FIDÈLES,

Après avoir exposé les signes précurseurs de la ruine de Jérusalem, Jésus donne à ses disciples le signe caractéristique qui doit annoncer l'arrivée prochaine de cette catastrophe, et être pour eux comme un signal, pour se mettre en sûreté par une prompte fuite. • Lorsque vous verrez une armée étrangère assiéger Jérusalem,» déployant autour de la cité sainte ses étendards souillés d'emblèmes idolâtriques (ce qui eut lieu sous la conduite de Sestius, trois ans avant qu'elle fût ravagée par Titus; « lorsque vous verrez l'abomination de la désolation présente dans le lieu saint, suivant la prédiction du prophète Daniel (Ix, 27), » que des zélateurs fanatiques transformeront le saint temple en une place d'armes, y commettront les plus détestables impiétés, le rempliront de sang et de carnage, jusqu'à laisser sur le pavé 8,500 cadavres (Voy. Josèp., His. jud., VI, 5; VI, 1), « que celui qui lit entende; alors, que ceux qui sont dans la Judée fuient vers les montagnes, » (pour chercher un refuge dans les cavernes et recoins cachés qu'elles renferment en abondance, ou pour se retirer à Pella, située dans la Pérée, au delà du Jourdain, comme le firent en effet les disciples de Jésus-Christ); « que ceux qui sont au milieu du pays se retirent » et s'expatrient, « et que ceux qui sont dans les régions voisines n'y entrent point. Que celui qui est sur la plate-forme du toit ne descende point dans la maison pour y emporter quelque chose, » mais qu'il se hâte de s'échapper par l'escalier extérieur, « et que celui qui est dans les champs ne descende point, » ne retourne point

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L. Cùm autem videritis circumdari ab exercitu Jerusalem, tunc scitote quia appropinquavit desolatio ejus. Mt. 15. Cùm videritis abominationem desolationis, quiæ dicta est à Daniele propheta, stantem in loco sancto, qui legit intelligat. L. 24. Tunc, qui in Judæâ sunt, fugiant ad montes et qui in medio ejus, discedant; et qui in regionibus, non intrent in eam. Mt. Et qui in tecto, non descendat tollere aliquid de domo suà 18. Et qui in agro, non revertatur tollere tunicam suam.

DEHAUT. L'Evang.-T. IV.

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chez lui,« pour chercher un vêtement: car ces jours seront des jours de vengeance, où tout ce qui est écrit, » tout ce que les prophètes ont prédit, « doit s'accomplir. Malheur donc aux femmes enceintes, et à celles qui seront nourrices en ces jours-là, » et à qui leur situation ne permettra pas de prendre la fuite et de s'exposer aux fatigues d'un long voyage! « Priez Dieu que votre fuite n'arrive point en hiver, » où les voyages sont si pénibles, « ni pendant le sabbat, » où la crainte superstitieuse de violer la loi qui défend les longs voyages (Ex. XIV, 29, les Juifs ne croyaient pas qu'il fût permis de faire, ce jour-là, plus de 2,000 pas), pourrait les arrêter, ou du moins, les inquiéter et les tourmenter, bien qu'au fond, la nécessité de défendre sa vie fût pour eux, une excuse suffisante. L'histoire ecclésiastique nous apprend qu'en effet les premiers fidèles, dociles aux avertissements du Sauveur, se réfugièrent à Pella, au delà du Jourdain, dans le royaume d'Agrippa, ami des Romains, où les alarmes de la guerre n'avaient pas pénétré (Voy. Eus., Hist. eccl., III, 5). - Cette profanation du lieu saint, cette « abomination de la désolation, » prédite par Daniel, doit, suivant les Saints Pères, se renouveler à la fin des temps, lorsque l'Antechrist se fera adorer à la place de Dieu, dans le temple saint.

2) Jésus nous trace ensuite le tableau effrayant de la catastrophe elle-même. « Il y aura, en ces jours-là, dit-il, « une tribulation telle qu'il n'y en a point eu de semblable depuis que Dieu a créé le monde, jusqu'à ce jour, et qu'il n'y en aura jamais, » du moins, avant la dernière catastrophe qui doit mettre fin au monde, et où ces paroles recevront leur accomplissement dans toute leur étendue. « Grande sera, en effet, la détresse de ce pays, et grande sera la colère de Dieu, contre ce

sunt.

L. 22. Quia dies ultionis hi sunt, ut impleur omnia quæ scripta L. 23. Væ autem prægnantibus et nuientibus in illis diebus. - Mt. 20. Orate autem ut non fiat fuga vestra in hieme, vel sabbato - 21. Erit enim tunc tribulatio magna, qualis non fuit ab initio mundi. usque modo, neque fiet. - L. Erit enim pressura magna super terram, et ira populo huic.

peuple » rebelle et déïcide. Ceux qui se trouveront alors rassemblés à Jérusalem, des quatre coins du monde, « tomberont sous le tranchant du glaive ou seront emmenés captifs chez toutes les nations, et Jérusalem » elle-même sera détruite de fond en comble, et « foulée aux pieds par les païens» qui y introduiront leurs idoles immondes, et cette ville coupable restera sous le joug honteux des infidèles « jusqu'à ce que les temps des nations soient accomplis, » jusqu'à l'époque où les Juifs se convertiront, et reconnaîtront celui qu'ils avaient renié. « Et si le Seigneur, » se laissant fléchir aux prières de mes disciples, « n'avait abrégé ces jours,» en favorisant les armes des Romains (Tite lui-même, étonné de ses succès, s'écriait : Evidemment, c'est Dieu lui-même qui a combattu avec nous: « Planè Deo adjuvante pugnavimus. » Jos.), et s'il n'avait adouci la rigueur de ses jugements, « nulle chair ne serait sauvée,» aucun Juif n'aurait échappé à la destruction, qui aurait enveloppé mes disciples eux-mêmes; « mais il les a abrégés à cause de ses élus,» — Jésus-Christ est bien ici le Prophète par excellence, le Prince des prophètes, aux yeux duquel l'avenir n'a pas de secrets. Un historien n'aurait pu décrire avec plus d'exactitude cette horrible catastrophe, dont nous lisons encore avec épouvante les tristes détails dans l'historien Josèphe, cette dispersion et cette persistance du peuple déïcide dans son incrédulité, dont nous voyons nousmêmes sous nos yeux l'accomplissement littéral.

D. PREDICTION DE LA FIN DU MONDE ET DU DERNIER AVÉNEMENT DE JÉSUS-CHRIST.

(Mt. XXIV, 23-42; Mr. XIII, 21-32; L. xx1, 25-33.)

Jésus-Christ prescrit de nouveau à ses disciples la vigilance, et recommande, non-seulement de se préserver, par la fuite, de la ruine temporelle, mais surtout

24. Et cadent in ore gladii; et captivi ducentur in omnes gentes, et Jerusalem calcabitur à gentibus: donec impleantur tempora nationum. Mt. Et nisi breviati fuissent dies illi, non fieret salva omnis caro: sed propter electos breviabuntur dies illi.

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de se garder de la séduction spirituelle. « Que si alors » je le répète, après ces jours de désolation, et surtout vers la fin des temps, à l'approche de mon dernier avénement, « quelqu'un vous dit : Le Christ est ici, ou il est là, ne le croyez point: car il s'élèvera de faux christs,» de faux messies, des imposteurs qui voudront substituer leur enseignement au mien, qui s'arrogeront une mission céleste, qu'il n'ont pas reçue, qui, usant de prestiges diaboliques (Bar-Cochébas, Simon le magicien, l'Antechrist, etc.), « feront de grands prodiges, de manière à séduire, s'il se pouvait, » si Dieu ne veillait pas sur eux, « les élus eux-mêmes. Vous donc, soyez en garde, et rappelez-vous que je vous ai avertis d'avance de toutes ces choses. Si donc on vous dit : Le voici dans le désert (Voy. Apost., XXI, 38), ne le croyez point. Si l'on vous dit : Le voici dans le lieu le plus secret de la maison,» dans quelque conciliabule clandestin, « ne le croyez point davantage; » car, tout ce qui n'est pas fondé sur mon enseignement, sur l'enseignement de l'Eglise que je dois établir, ne mérite aucune créance. Quiconque se cache dans les ténèbres ne peut être qu'un faux messie, car quand le Fils de l'homme descendra de nouveau sur la terre pour juger les hommes, il le fera d'une manière éclatante et visible à tous les yeux, on n'aura pas besoin de demander où il est. « Comme l'éclair part de l'Orient, et soudain apparaît à l'Occident, ainsi en sera-t-il de l'avénement du Fils de Dieu. » L'éclair n'a pas besoin d'envoyés ni de messagers pour annoncer sa venue, même pour ceux qui restent enfermés dans leurs maisons; par sa seule présence, il éclaire, il éblouit ceux qui sont sur la terre; c'est ainsi que la gloire du Fils de Dieu, descendant sur les nuées pour juger les hommes, se manifestera à tous les yeux (S. Chrysost.)

Mr. 23. Vos ergo videte: ecce prædixi vobis omnia. 24. Surgent enim pseudochristi, et pseudoprophetæ ; et dabunt signa magna et prodigia, ità ut in errorem inducantur (si fieri potest) etiam electi.

26. Si ergo dixerint vobis: Ecce in deserto est, nolite exire; ecce in penetralibus, nolite credere. 27. Sicut enim fulgur exit ab Oriente, et paret usque in Occidentem; ita erit et adventus Filii hominis.

« Là où est le corps, » là où est le cadavre en décomposition, « là se rassemblent les aigles, » les vautours (a), pour le dévorer. Lorsque la méchanceté des hommes sera portée à son comble, lorsque leurs péchés appelleront sur leurs têtes la vengeance céleste, que le genre humain tout entier ne sera plus qu'un cadavre infect et pourri, qui appelle vers lui la vengeance divine, comme une charogne appelle les oiseaux de proie, alors le Fils de l'homme descendra du ciel pour juger les hommes (b).

Les versets qui suivent s'appliquent uniquement à la fin du monde et au dernier avénement de Jésus-Christ, et la figure a disparu devant la réalité qu'elle repré

sente.

1o Jésus commence par en décrire les principales circonstances, à savoir: a) des prodiges dans le ciel et sur la terre. Il faut que toute la nature, souillée par le péché, soit purifiée, renouvelée à son tour. Soumise malgré elle à l'injure du péché, il faut qu'elle soit délivrée et qu'elle serve elle-même d'instrument à la vengeance du Seigneur. Après ces jours de tribulation, il y aura des signes dans le soleil, dans la lune et dans les étoiles, et,

28. Ubicumque fuerit corpus, illic congregabuntur et aquilæ. - Mt. 29. Statim autem post tribulationem dierum illorum, L. XXI. 25. erunt signa in sole, et luna, et stellis;

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(a) Les aigles ne recherchent pas les cadavres, mais le vultur percnopterus, très-avide des cadavres (Si vultur es, cadaver exspecta. Sen.), était classé par les anciens dans la famille des aigles auxquels il ressemble beaucoup.

(b) Ce verset énigmatique est devenu la croix des interprètes. Il en est (Dom. Calmet, par ex.), qui entendent par le cadavre, Jérusalem, et par les aigles, les armées romaines. Mais il n'est pas ici question de la ruine de Jérusalem, mais du dernier avénement de Jésus-Christ. Le plus grand nombre des interprètes, à la suite de Maldonat, entendent le cadavre, de Jésus-Christ, et les aigles de tous, les hommes. Le Sauveur aurait voulu dire: De même qu'il n'est pas nécessaire de désigner aux aigles le cadavre dont ils veulent faire leur proie, mais qu'ils le trouvent bien d'eux-mêmes, de même, il ne sera pas nécessaire de dire aux hommes où je suis, car personne ne pourra échapper à ma présence. Mais, il nous semble bien inconvenant de comparer Jésus-Christ, apparaissant sur les nuées plein de gloire et de majesté, à une charogne corrompue. Nous croyons, avec un grand nombre d'interprètes modernes (Bisping, Kirkemaker, Meyer, Hengstenberg, etc.), que Jésus-Christ a voulu exprimer avec énergie, par cette comparaison, la nécessité et l'universalité du jugement. De même que le cadavre appelle les oiseaux de proie, la corruption des hommes appelle sur eux la vengeance divine.

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