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Terre Sainte, l'avait doué de talents militaires (1). Plusieurs commentateurs pensent que ce fut à la suite de la victoire qu'il remporta sur les Amalécites, grâce à la protection divine, que Moïse changea le nom du vainqueur, ywm, Hôschêâ', Osée, en yw, Yehôschoua', Josué, Num., XIII, 9, 17; mais le premier nom n'est probablement qu'une contraction ou abréviation du second. Quoi qu'il en soit, il mérita de porter à l'avance le nom du Sauveur, parce que lui aussi devait sauver son peuple et être par là la figure du véritable Sauveur, du véritable Jésus (2).

2o Dieu le choisit pour succéder à Moïse dans la conduite de son peuple, Num., xxví, 18-23. Il était digne de ce choix, moins encore par sa vaillance que par la grandeur de sa foi, qui s'était manifestée clairement à Cadèsbarné, où il avait montré avec Caleb autant de fermeté et de confiance en Dieu que de présence d'esprit, lorsque les Hébreux, en entendant le récit des espions envoyés dans la terre de Chanaan, désespéraient de s'emparer d'un pays dont les habitants étaient très forts, Num., XIV, 6-9. Cette fidélité lui mérita la faveur d'entrer, ainsi que Caleb, dans la Terre Promise, ce qui fut refusé, sans exception, à tous les autres Israélites qui avaient quitté l'Égypte à l'âge de vingt ans et au-dessus, Num., XIV, 30, 38.

3o Avant que Dieu l'eût rempli de son esprit, quoique il fût plein de cœur et de courage, Num., xxvii, 18, il n'avait ni l'initiative et la hardiesse qui conviennent à un conquérant, ni la largeur de vues requise dans un chef, Num., XI, 28-29. Mais quand il eut reçu sa mission, par l'imposition des mains de Moïse, Num., XXVII, 18-23; Deut., XXXI, 14, 23, il devint un homme nouveau et remplit parfaitement les desseins de la Providence sur sa personne. Le peuple se montra plus docile à sa voix que la génération précédente ne l'avait été à celle de son prédécesseur; la vie nomade du désert

(1) Ex., XVII, 9-13; Jos., VIII, 1-26; x, 9-43, etc.

(2) Cf. Heb., IV, 8, passage qui insinue que Josué est l'image de Notre-Seigneur. Voir aussi Bossuet, Elévations sur les mystères, IXe semaine, x élévat., Œuvres, éd. Lebel, t. VIII, p. 243-244.

l'avait habitué enfin à l'obéissance; il célébra la circoncision et la Pâque, et exécuta tous les commandements qui lui furent donnés.

4o Dieu soutint d'ailleurs Josué dans son œuvre, comme il avait fait pour Moïse, et dès le passage du Jourdain, il le rendit grand devant tout Israël, Jos., III, 7. Les miracles qu'il fit en sa faveur sont considérables; il les multiplia pour l'établissement des Hébreux dans la Terre Promise, comme il les avait multipliés pour la sortie d'Égypte. Les prodiges accomplis à cette époque diffèrent cependant de ceux de l'Exode en ce qu'ils ont pour objet principal, en quelque sorte, de mettre le peuple en train et de lui donner le courage et la confiance dont il a besoin pour agir: après avoir pris miraculeusement Jéricho, il doit prendre Haï par la ruse et par la force (1); après avoir vaincu miraculeusement les rois du sud de Chanaan, il ne triomphe des rois du nord que par les armes.

5° On peut aussi observer que les miracles de Josué ne se lient pas aussi étroitement à sa personne que ceux de l'Exode à la personne de Moïse : c'est la parole, la main et la verge du libérateur d'Israël qui amènent les plaies sur l'Égypte et fendent les flots de la Mer Rouge; c'est au contraire l'arche d'alliance qui sépare en deux les eaux du Jourdain, III, 1113; Iv, 18; c'est l'arche, ce sont les trompettes des prêtres qui font tomber les murs de Jéricho, quoique l'ange ait apparu à Josué, l'épée hors du fourrreau, v, 13-15. Il accomplit cependant par sa parole un des plus grands miracles de l'Ancien Testament, l'arrêt du soleil à la bataille de Gabaon, X, 12-14. Enfin, Josué ne jouissait pas d'un pouvoir aussi complet que Moïse : il fut placé, en quelque manière, sous la dépendance du grand-prêtre, quand il reçut l'autorité sur Israël, Num., XXVII, 21, et ce fut avec lui qu'il partagea entre

(1) Cur præcepit Deus ut prius struerent insidias contra Ai? - Docet uti quoque debere inventis humanis, qui confidunt auxilio divino. Postquam enim solo tubarum sono primam urbem ceperant, merito sane discunt certare et labori incumbere, et suppetias divinas exspectare.» Théod. Cyr., Quæst. x1 in Jos., t. LXXX, col. 471.

les tribus la Terre Promise, après la conquête, Jos., XIX, 51. 6o Selon Josèphe, il avait quatre-vingt-cinq ans quand il succéda à Moïse (1). Il mourut à l'âge de cent dix ans et fut enterré à Thamnathsaré (2).

420. - Entrée dans la Terre Promise.

L'entrée dans la Terre Promise était d'une exécution très difficile pour un peuple envahisseur; elle était même humainement impossible aux Hébreux : ils n'avaient aucun moyen de franchir le Jourdain, qui leur barrait le passage, car il n'existait aucun pont sur ce fleuve, et une aussi grande multitude, encombrée de femmes, d'enfants et de troupeaux, ne pouvait le passer ni à gué ni en bateau. Après l'avoir traversé, leur situation devait être encore extrêmement périlleuse ils manquaient d'armes pour l'attaque comme pour la défense; et, ce qui pis est, ils manquaient de vivres et d'approvisionnements. Dieu vint miraculeusement à leur secours; il fit remonter les eaux du Jourdain vers leur source, et tomber devant l'arche les murs de Jéricho; en rendant ainsi les Israélites maîtres d'une partie du territoire, il leur fournit le moyen de se procurer des subsistances, quand la manne cessa de pourvoir à leurs besoins.

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421. Passage du Jourdain.

Le Jourdain était la plus large rivière que les Hébreux eussent rencontrée depuis qu'ils avaient quitté les bords du Nil. Lorsqu'ils arrivèrent sur ses rives, on était au moment de sa plus grande crue, « à l'époque de la moisson des orges, » en avril ou en mai, Jos., III, 15; iv, 19; v, 10; cf. I Par., XII, 15. Sa largeur est alors de près d'une demi-lieue. Dieu dessécha son lit comme il avait desséché celui de la Mer Rouge. Dès que les prêtres portant l'arche sainte eurent mis les pieds dans l'eau, le courant s'arrêta, et les flots qui arrivaient s'accumulèrent au-dessus d'eux, depuis Adom,

(1) Josèphe, Ant. jud., V, 1, 29.

(2) Jos., xxiv, 29-30. Sur son tombeau, qu'on croit avoir retrouvé de nos jours, voir La Bible et les découvertes modernes, t. III, p. 195-206.

localitée inconnue qui n'est nommée qu'ici, jusqu'à Sarthan, près de l'embouchure du Jabbok, III Reg., vii, 46, plus de dix lieues en amont.

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Quand les Israélites eurent traversé le fleuve, leur marche en avant fut arrêtée par une place imprenable, Jéricho. C'était une des villes les plus importantes de la Palestine, la seule ville digne de ce nom située dans la vallée du Jourdain; - à cause de sa dépression profonde, cette vallée est presque inhabitable, et n'a jamais vu fleurir de cité populeuse et commerçante. Jéricho est la clef de la terre de Chanaan, pour l'envahisseur qui franchit le fleuve au-dessus de la Mer Morte, parce qu'elle est située à l'entrée des principaux défilés qui conduisent de la vallée du Jourdain dans l'intérieur de la Palestine, au sud-ouest, vers le mont des Oliviers qui commande Jérusalem; au nord-ouest, vers Machmas qui commande l'approche de Haï et de Béthel. A l'ouest s'élèvent les montagnes blanches et dentelées de Juda, formées de rochers calcaires, perforées de nombreuses cavernes où s'étaient sans doute réfugiés les espions renvoyés par Rahab de Jéricho. Elles portent aujourd'hui le nom de montagne de la Quarantaine, parce que c'est là que la tradition place la scène du jeûne de Notre-Seigneur. La ville est à l'est, dans un des endroits les plus fertiles et les plus riants de la Palestine, grâce à l'ouadi Kelt, et aux deux fontaines. connues aujourd'hui sous le nom de Duk, cf, I Mac., xvi, 15, et du Sultan ou d'Élisée, IV Reg., 11, 19. Partout où il y a de l'eau en Orient, règne en même temps la fécondité. La ville était bâtie au pied des collines, à l'endroit où jaillissent ces sources. Elle possédait une riche forêt de palmiers dont le dernier survivant a disparu depuis 1838. La plaine était couverte de blé. Jéricho avait donc pu richement s'approvisionner. Elle était de plus entourée de hautes et fortes murailles. Mais ces remparts tombèrent miraculeusement levant les Hébreux, accomplissant tout autour les cérémoaies que Dieu leur avait prescrites, vi.

423.

Fausseté de l'explication naturelle du passage du Jourdain et de la prise de Jéricho.

On a voulu expliquer naturellement le passage du Jourdain comme la prise de Jéricho. Ces explications sont en contradiction formelle avec les textes qui font tomber les murailles de la ville devant l'arche et aux sons des trompettes sacrées, III, 7-17; vi. « On a essayé, dit M. Munk, Palestine, p. 221, de donner différentes explications du récit merveilleux de la prise de Jéricho, que les croyants se sont obstinés à prendre à la lettre et que les sceptiques ont cru devoir tourner en ridicule, mais qui est emprunté sans doute à un antique poème. Les uns ont supposé un tremblement de terre qui aurait fait crouler les murs; d'autres ont pensé que Josué avait fait miner les murs et que les promenades inoffensives autour de la ville avaient pour but de masquer les opérations. L'hypothèse la plus probable me paraît être celle d'un assaut auquel le son des trompettes et le cri de guerre avaient servi de signal. Dans le langage poétique de la tradition, on a pu dire que les murs de Jéricho s'écroulèrent au son retentissant des trompettes de guerre. » Si cette explication était vraie, le récit du livre de Josué serait un mensonge. Il suffit de lire le chapitre vi, pour se convaincre qu'il est inconciliable avec cette interprétation et que l'auteur entend bien raconter un miracle, humainement inexplicable; de même qu'en lisant le chapitre II, on est convaincu que le narrateur n'a pas voulu parler d'un passage à gué du fleuve, comme l'insinue M. Munk, ¿bid., p. 220, et comme l'ont soutenu plusieurs rationalistes, mais d'un passage miraculeux.

424.

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Conquête du sud et du nord de la Palestine.

Josué se rendit maître de toute la terre de Chanaan par une série de batailles et de sièges successifs, dans lesquels la protection divine fit plus que la valeur d'Israël. Pour résister plus efficacement aux envahisseurs, les rois chananéens du sud d'abord, puis ceux du nord, se coalisèrent ensemble, mais ils furent vaincus les uns et les autres, les premiers à

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