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CONQUÊTE DE LA TERRE PROMISE. Gabaon (1) ou Macéda, x, les seconds au lac Mérom, xi (2). Il ne restait plus debout contre eux que les redoutables enfants d'Énac, maîtres d'Hébron et des environs. Cf. Num., XIII, 23, 27. Josué acheva, en les terrassant, l'œuvre de la conquête, Jos., XI, 21-23. Elle l'avait occupé près de sept ans. Cf. Jos., XIV, 10. Dans ce laps de temps, il avait triomphé de six nations, gouvernées par trente et un rois ou scheiks, Jos., XII, 24.

425. Le miracle du soleil arrêté.

La bataille de Macéda fut signalée par un grand miracle : l'arrêt du soleil (3). Ce prodige est un des faits de l'histoire sacrée contre lequel on a soulevé le plus d'objections. Le livre de Josué le raconte dans les termes suivants, x, 12: Tunc locutus est Josue Domino, in die qua tradidit Amorrhæum in conspectu filiorum Israel, dixitque coram eis: Sol contra Gabaon ne movearis et luna contra vallem Aïalon. 13. Steteruntque sol et luna, donec ulcisceretur se gens de inimicis suis. Nonne scriptum est hoc in libro justorum? 13. Stetit itaque sol in medio cœli et non festinavit occumbere spatio unius diei. 14. Non fuit antea nec postea tam longa dies, obediente Domino voci hominis et pugnante pro Israel. Cf. Eccli., xvI, 5.

Nous avons quatre questions à examiner au sujet de ce récit 1° à quel moment du jour Josué commanda-t-il au soleil de s'arrêter? 2o de combien de temps le jour fut-il prolongé? 3° par quel moyen Dieu opéra-t-il le miracle?

(1) Sur les raisons pour lesquelles les Israélites tinrent le serment qu'ils avaient fait aux Gabaonites, quoique ils n'eussent juré que sur un faux exposé, voir S. Augustin, Quæst. in Heptat., 1. VI, no xiii, t. xxxiv, col. 781-782.

(2) Pour la description de ces batailles, voir la Bible et les découvertes modernes, 4e édit., 1884, t. III, p.196-203.

(3) A la bataille de Macéda, Dieu intervint aussi en faveur de son peuple au moyen d'une grêle miraculeuse, d'une grosseur extraordinaire, qui fit périr un grand nombre de Chananéens, Jos., x, 11. Quelques interprètes ont pensé qu'il s'agissait dans ce passage d'une pluie de vraies pierres; mais le texte hébreu, la paraphrase chaldaïque; les Septante, la Vulgate, le syriaque, l'arabe, l'entendent de la grêle, lapides grandinis. Le mot lapides signifie grêlons. Voir Glaire, Livres Saints vengés, 2e édit., 1874, t. II, p. 243.

4o quelle réponse doit-on faire aux objections auxquelles il a donné lieu?

426.

- 1o A quel moment du jour Josué commanda-t-il au soleil de s'arrêter?

Ce fut le soir, lorsque le soleil était près de se coucher, que Josué lui ordonna de s'arrêter, puisque la lune était déjà visible, et qu'il ne pouvait d'ailleurs, dans l'ardeur du combat, songer à demander un tel prodige qu'au moment où l'approche de la nuit allait l'empêcher de continuer à poursuivre les ennemis. Quelques interprètes, voulant prendre à la lettre les mots in medio cæli, ont prétendu qu'ils désignaient midi; mais in medio cœli équivaut simplement à in cœlo.

427.

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2o De combien de temps le jour fut-il prolongé?

1° Il est impossible de déterminer au juste de combien de temps le jour fut prolongé : il faut observer que la traduction de la Vulgate, . 14, non fuit antea nec postea tam longa dies, n'est pas littérale; le texte original porte simplement: non fuit sicut dies ista, sans expliquer de quelle manière ce jour mémorable différa des autres jours. Quant au . 13, où nous lisons non festinavit (sol) occumbere spatio unius diei; au lieu de spatio unius diei, l'hébreu porte: diem circiter integrum; ces expressions indiquent un allongement considérable, mais le mot circiter empêche d'en déterminer exactement la durée.

2o Le juif Maimonide, les protestants Grotius et Leclerc, Masius, etc., et, au commencement de ce siècle, les catholiques Jahn et Brentano, ont nié que ce jour eût été plus long qu'un jour ordinaire et n'ont vu dans tout ce récit qu'un langage poétique qu'il ne faut pas prendre à la rigueur de la lettre. D'après eux, Josué exprime le désir que le jour se prolonge pour lui donner le temps d'exterminer ses ennemis, et il en fait, en effet, un si grand carnage, qu'il semble que le jour ait duré réellement vingt-quatre heures. Ces interprètes appuient leur opinion sur l'emprunt que l'auteur de Josué fait, dans ce passage, au livre des Justes, qui était un recueil de poésies. Mais 1° ils sont obligés d'admettre que les . 13

14 (1), sont extraits de ce recueil, ce qui n'est pas vraisemblable, car les Hébreux ne font pas leurs citations après, mais avant l'indication du livre (2). 2o Il est même loin d'être certain que les mots qui précèdent le nonne scriptum est hoc soient une citation, car cette formule, dans la Bible, n'indique pas une reproduction littérale, mais simplement un renvoi aux sources et aux pièces justificatives. Tout l'échafaudage de leur raisonnement croule par là-même, car leur interprétation est inconciliable avec les yy. 13-14. -3° Aussi toute la tradition a-t-elle entendu dans le sens propre le récit de ce miracle, ainsi que le passage de l'Ecclésiastique, XLVI, 5, qui tranche la question: An non in iracundia ejus impeditus est sol, et una dies facta est quasi duo?

428.

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- 3o Par quels moyens Dieu opéra-t-il ce miracle?

Quant aux moyens dont Dieu se servit pour prolonger la lumière du jour, jusqu'à ce que Josué eût achevé sa victoire, on ne peut les connaître avec certitude.

« Le récit biblique mentionne en quelques mots le fait du miracle, mais il ne décrit aucune circonstance particulière qui nous puisse diriger dans le choix d'une explication. Nous ne pouvons donc que hasarder des conjectures.

>> Ou bien 1o Dieu a réellement arrêté le globe terrestre dans sa révolution diurne, ou bien 2o il a fait que le soleil demeurât réellement visible pour Josué tout le temps nécessaire, sans que la terre s'arrêtât.

» 1° Contre la première explication, on objecte que l'arrêt subit de la terre aurait amené un bouleversement universel

(1) 13b indique la seconde partie du 7. 13. On indique par a le premier membre d'un y., par b le second, par c, d, le troisième et le quatrième, s'il y a lieu. Dans les parties poétiques, a, b, c, d, indiquent le premier, le second, etc., membre du parallélisme, comme nous l'expliquerons plus loin, n° 674. Cf. no 592.

(2) IV Reg., XV, 21; xx, 20; xxI, 17; xxIII, 28; II Par., xxvII, 7; xxxII, 32; xxx, 18; xxxv, 27. Un passage, il est vrai, II Reg., 1, 18, semble faire exception; mais la tournure est différente dans le texte hébreu, où au lieu du pronom démonstratif, qui s'applique toujours à ce qui précède et qui se trouve dans les huit passages indiqués ci-dessus, il y a (sans le pronom) hinnéh, voici, qui s'applique à ce qui suit.

des objets terrestres, et une perturbation considérable des corps célestes, particulièrement en jetant la terre hors de son orbite, en troublant le mouvement de la lune. La réponse est bien facile : Celui qui aurait arrêté ainsi la terre dans son mouvement est assez sage et assez puissant pour prévenir et empêcher les suites naturelles de cet arrêt. D'ailleurs l'objection tirée des perturbations des corps célestes est mal fondée, car le mouvement annuel de la terre autour du soleil et le mouvement de la lune autour de la terre sont indépendants de la rotation de notre globe sur lui-même : alors même que la terre cesserait sa révolution diurne, sa translation dans l'espace et celle de la lune n'en seraient point troublées.

>> 2° Pour ceux qui préféreraient la seconde explication, savoir une station apparente du soleil sans arrêt réel de la terre, il faut qu'ils admettent une déviation miraculeuse des rayons solaires pour les amener à éclairer la Palestine. Or, cette déviation, on peut concevoir que Dieu la produise immédiatement en dirigeant par sa toute-puissance, suivant une ligne convenable, la propagation des ébranlements lumineux dans l'espace; ou bien on peut imaginer qu'il emploie pour cet effet des êtres matériels agissant sur ces rayons par réfraction ou par réflexion. On peut faire d'ailleurs beaucoup d'hypothèses différentes sur la nature, l'origine et le mode d'action de ces réfracteurs ou réflecteurs miraculeux.

» En résumé, tout est possible à Dieu dans l'ordre physique; mais il ne lui a pas plu de nous faire connaître comment sa puissance est intervenue dans l'événement dont nous parlent les Saints Livres » (M. Boisbourdin) (1).

429.

4o Réponse aux objections contre le miracle de Josué. Depuis que les progrès de l'astronomie ont fait mieux ressortir combien le miracle opéré à la prière de Josué était extraordinaire, on a essayé d'en révoquer en doute la réalité.

(1) On peut voir de longues explications sur le miracle de Josuė dans Glaire, Les Livres Saints vengés, ire édit., t. II, p. 24-38; 2e édit., 11, p. 254-271.

« Mais, toutes les objections qu'on a imaginées contre la réalité ou la possibilité de ce prodige se réduisent à rien quand on les examine de près.

>> Ainsi 1° l'objection que les annales des autres peuples de la terre sont muettes sur un événement qui aurait dû être remarqué dans tout l'univers, est sans valeur puisque les annales des peuples de cette époque n'existent point et qu'il n'est pas certain que la prolongation du jour ait existé en dehors de la Palestine (1).

» 2o Les lois régulières auxquelles sont soumis les mouvements des astres ne prouvent pas non plus l'impossibilité du miracle. Les lois de la nature sont des règles établies par la volonté libre du Créateur, dont personne ne peut contester la puissance. Est-ce que l'auteur de la nature et des forces qui la régissent pourrait manquer du pouvoir nécessaire pour la diriger à son gré, de telle sorte qu'elle remplisse ses vues et ses desseins?

» 3° Il faut observer du reste que tout en prenant les paroles du texte à la rigueur de la lettre, rien n'oblige à admettre, avec les Pères de l'Église et les anciens théologiens, un arrêt miraculeux du soleil lui-même, mais seulement un arrêt apparent (2), no 428, 2o. L'auteur sacré parle conformément au

(1) Quelques apologistes ont cru trouver des traces d'un jour plus long que les autres dans les écrivains anciens, et dans les écrivains chinois en particulier, mais ces traces sont très douteuses. Cf. du Clot, La Sainte Bible vengée des attaques de l'incrédulité, édit. de 1824, t. I, p. 253 sq.; t. III, p. 387 sq.

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(2) On allègue, contre cette interprétation du texte de Josué, la sentence de condamnation de Galilée par le Saint Office, dans laquelle on lit : « A qualificatoribus theologis qualificatæ fuerunt duæ propositiones de stabilitate solis et de motu terræ, ut infra: Solem esse in centro mundi et immobilem motu locali, est propositio absurda et falsa in philosophia; et formaliter hæretica, quia est expresse contraria Sacræ Scripturæ. Terram non esse centrum mundi, nec immobilem, sed moveri motu etiam diurno: est item propositio absurda, falsa in philosophia, et theologice considerata ad minus erronea in fide. » Apud Bouix, La condamnution de Galilée, Revue des sciences ecclésiastiques, février 1866, page 118. On ne peut nier le fait de la condamnation, quoique le Saint Office n'ait pas formellement adopté les qualifications précédentes, et que la sentence porte seulement; « Sectatus Copernici

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