Αn. 1426. Philippe vit renaître ses espérances FRANÇOIS en revoyant ses troupes. Il ne leur acFOSCARI, corda que quelques jours de repos, & LXV. Doge les fit marcher ensuite contre Carma de Venise Milan vont Breffe, Les troupes gnole, qui venoit de s'emparer de la du Duc de porte des Piles, après la plus longue au fecours de: & la plus opiniâtre résistance. Les Géta ville de néraux ennemis, au lieu d'appuyer en arrivant leur armée à la partie de la ville qui n'étoit pas encore soumise, firent la faute d'établir leur camp en face de l'ancienne ville que Carmagnole occupoit. Ils resterent tranquilles dans ce camp, fe contentant de faire chaque jour au Général Vénitien les défis les plus injurieux. Comme ils ne purent attirer Carmagnole au combat, ils firent une faute plus grande encore, ils décamperent & fe répandirent dans le Mantouan, qu'ils faccagerent impitoyablement, en haine de Jean-François de Gonzague, l'un des Alliés de la République, qui étoit avec fes troupes au siége de Bresse. Lignes conftruites Carmagnole les laissa perdre le Carmagnole, temps à ces cruautés inutiles. Il preffoit les attaques, & travailloit de plus en plus à couper les communications. de Venife. / Mais comme, malgré ses soins, il y avoit toujours quelque convoi qui se An. 1426. glissoit furtivement, il entreprit de FRANÇOIS tirer tout autour de la place une dou-LXV. Doge ble ligne de circonvallation & de contrevallation, pratique dont il n'y avoit point encore eu d'exemple, & dont souvent on a fait usage depuis.. Chaque ligne étoit formée par un rempart de terre, d'une hauteur & d'une épaisseur extraordinaire. La terre étoit retenue par des poutres & des folives , avec des fafcines entrelacées. Des tours étoient élevées de distance en distance, & un double foffé rendoit cette enceinte inacceffible. On fut quatre mois à construire cet ouvrage immense, qui embrassoit une circonférence de plus de cinq milles : dès qu'il fut achevé, Carmagnole établit son armée dans l'entre deux des lignes, étant dès-lors bien assuré que la garnison ne recevroit plus de secours.. Mauvaife Généraux de Cet ouvrage avoit été commencé pendant que les Généraux de Philippe conduite des ravageoient le Mantouan. Il fur fini Philippe.. en leur présence, & fans qu'ils fiffent aucun mouvement pour troublen less Cw An. 1426. FRANÇOIS de Venife.. travailleurs. Les subalternes de l'armée ennemie murmuroient tout haut FOSCARI, d'une négligence si coupable. Les GéVenoge néraux prétextoient l'ordre reçu du Duc de Milan, de laisser les Vénitiens se consumer à une dépense si folle, parce qu'on feroit toujours à temps de forcer leurs lignes, quand on le voudroit. Les Historiens de Milan prétendent que l'argent de Venise avoit corrompu ces Généraux.. Belie défense: La garnison, privée de toute comdes afiégés.. munication au dehors, ne cessoit pas de se bien défendre : chaque jour elle livroit, ou foutenoit quelque assaut.. De quatorze cents hommes dont elle étoit composée, il en avoit déja péri près de mille; la faim dévoroit le ref te.. Ces braves foldats demandoient la liberté de députer un Officier à leur Maître, pour obtenir du secours ou la permifsion de se rendre. Carmagnole leur accorda pour cela une tre ve de quatre jours, & redoubla les gardes, afin que rien ne pût entrer dans la ville, ni en fortir. Le quatrieme jour la garnison prit les armes pour s'ouvrir un passage à travers les lignes des Vénitiens; mais l'absence du fecours rendit sa bravoure inutile. An. 1426. de Venise. On frémissoit dans le camp ennemi FRANÇOIS de l'inaction des Généraux de Philip-LXV. Doge pe: on nommoit cette conduite, une lâcheté & une perfidie affreuse: ces Généraux n'en étoient pas moins décidés à ne rien entreprendre, disant, qu'il ne convenoit pas d'exposer le fort de toute une armée, pour sauver une poignée de gens. Peu s'en fallut que l'indignation des Officiers & des. foldats ne dégénérât en une rébellion ouverte. Un des Capitaines osa, con tre l'ordre des Généraux, mener fa troupe contre les lignes, criant à fes camarades de le suivre. Il livra une at-taque audacieuse, qui fut vivement repouffée: il s'y opiniatroit; mais fe voyant seul, il fut obligé de se re tirer.. La garnison abandonna enfin aux La garnison Vénitiens le mur extérieur de la nou- de Breffe ca pitule.. velle ville, que Carmagnole fit rafer fur le champ. Les Forts capitulerent fuccessivement, & le château se rendit le 20 Novembre: Ainfi finit cè fié ge, l'un des plus mémorables de ce An. 1426. fiecle par les travaux immenses des FRANÇOIS affiégeans, & par la constance héroïLXV. Doge'que des affiégés. FOSCARI, Le Duc de de Venife. La perte de cette place fut d'autant Milan envoie plus sensible au Duc de Milan, qu'il à Venise un avoit dépensé des sommes prodigieuincendiaire, ses pour la rendre imprenable. Pen dant que les Vénitiens l'assiégeoient, il avoit eu la lâcheté d'envoyer à Venise un incendiaire, avec ordre de mettre le feu à l'arsenal. Le coupable fut découvert; on l'appliqua à la question; il avoua ses desseins & les ordres qu'il avoit reçus: il fut condamné à être traîné à la queue d'un cheval, ensuite écartelé, & ses membres pendus à un giber. que De tous les Alliés de la Républiles Florentins furent les seuls qui tirerent avantage des embarras du Duc de Milan. A peine les troupes de ce Prince eurent-elles évacué la Tofcane, qu'ils reprirent, sans beaucoup de peine, la plupart des châteaux qu'il leur avoit enlevés. Le Duc de Savoie fit peu de chose.. Les Frégoses tenter |