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3o Comme le Verbe éternel, qui seul pouvait nous donner connaissance de Dieu. (Jean, 1, 1, 18.) « Autrement, dit saint Irénée, nous n'aurions pas même pu apprendre ce qui est propre à Dieu, si notre Maître, le Verbe hypostatique, ne s'était pas fait homme. Personne ne pouvait nous donner connaissance du Père, sinon son propre Verbe (1).

4o Comme l'image de Dieu (Hébr., 1, 3), à laquelle l'homme fut créé. « Que devait faire Dieu,» demande saint Athanase, «< ou que fallait-il, sinon rétablir dans l'homme ce qui est à l'image, afin que par là les hommes pussent de nouveau Le connaître? Et cela comment aurait-il pu arriver si l'image même de Dieu, notre Sauveur Jésus-Christ, n'était pas venu sur la terre? Les hommes ne pouvaient point faire cela, étant créés seulement à l'image. Les Anges ne le pouvaient pas davantage, n'étant pas eux-mêmes les images. Aussi a paru le Verbe même de Dieu, afin qu'étant l'image du Père Il pût recréer l'homme, créé à l'image (2).

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En tout cela se révèle clairement la sage harmonie de toutes les opérations divines. Comme le Père a tout créé par le Fils dans le Saint-Esprit, comme Il prend soin de tout par le Fils dans le Saint-Esprit (3), ainsi II daigna nous recréer par le mème Fils dans le même Saint-Esprit : harmonie évidemment basée sur l'ordre même des personnes de la Trinité consubstantielle.

(1) Contra Hær., V, cap. 1. La même idée se retrouve dans saint Athanase (de Incarn. Dei, n. 11).

(2) De Incarn. Dei, n. 13. Plus loin, dans ce mème ouvrage (n. 20), le saint Père passe brièvement en revue toutes les causes de l'incarnation du Fils de Dieu de la manière suivante: « Nul autre que le Sauveur lui-même, qui, au commencement, a tiré l'univers du néant, ne pouvait donner à notre nature corruptible l'incorruptibilité; nul autre que Celui qui est l'image du Père ne pouvait rétablir l'image de Dieu dans les hommes; nul autre que Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui est la vie même, ne pouvait conduire à l'immortalité notre vie mortelle; enfin nul autre ne pouvait communiquer aux hommes la connaissance du Père et renverser l'iniquité de l'idolatrie que le Verbe, qui régit l'univers, que le vrai Fils unique de Dieu le Père. » (Lect. chr., 1838, II, 132-133.)

(3) Voir plus haut, § 57: Sur la participation de toutes les personnes de la sainte Trinité à l'œuvre de la création, et ensuite § 100.

$127. Motif de la Rédemption et but de la venue du Fils de Dieu sur la terre.

Pourquoi Dieu, en sa triple hypostase, daigna-t-Il nous racheter? Il n'eut pour cela qu'un seul motif, savoir : son amour infini pour nous, pécheurs. « Ce qui fait éclater davantage l'amour de Dieu envers nous, » dit le saint Apôtre, « c'est que, lors même que nous étions encore pécheurs, Jésus-Christ n'a pas laissé de mourir pour nous» (Rom., v, 8); et ailleurs: « Dieu, qui est riche en miséricorde, poussé par l'amour extrême dont Il nous a aimés, lorsque nous étions morts par nos péchés, nous a rendu la vie en Jésus-Christ. . . . pour faire éclater dans les siècles à venir les richesses surabondantes de sa grâce, par la bonté qu'Il nous a témoignée en Jésus-Christ. » (Éph., 11, 4, 5, 7.) En particulier ici se manifesta l'amour infini : 1o de Dieu le Père: « C'est en cela que Dieu a fait paraître son amour envers nous, en ce qu'Il a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par Lui» (I Jean, iv, 9; comp. Jean, III, 16); 2o de Dieu le Fils, qui dit Lui-même : Personne ne peut avoir un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis» (Jean, xv, 13), et qui, en effet, «< comme Il avait aimé les siens, qui étaient dans le monde, les aima jusqu'à la fin » (XIII, 1), et donna sa vie pour eux; 3o de Dieu Saint-Esprit : « C'est par Lui » (le Fils) « que nous avons accès les uns et les autres auprès du Père dans un même Esprit » (Éph., II, 18); et Il nous a sauvés..... à cause de sa miséricorde, par le baptême de la renaissance et par le renouvellement du Saint-Esprit.» (Tite, III, 5.) C'est pourquoi l'œuvre entière de notre rédemption est appelée œuvre de miséricorde et de grâce: « C'est par la grâce que vous êtes sauvés en vertu de la foi; et cela ne vient pas de vous, puisque c'est un don de Dieu » (Éph., II, 8); « la grâce de Dieu notre Sauveur a paru à tous les hommes.» (Tite, II, 11.) Les saints Pères et Docteurs de l'Église s'accordaient à reconnaître, pour cause de la venue du Rédempteur dans le monde, l'amour infini de Dieu envers

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les hommes (1). « Le Fils de Dieu, qui est assis à la droite du Père,» dit par exemple saint Chrysostome, voulut être en tout notre frère. C'est pourquoi, ayant quitté les Anges et les Puissances célestes, Il vint à nous et nous prit. . . . . Il prit notre chair par pure miséricorde pour nous sauver; telle est l'unique cause d'une pareille économie (2). » « O mélange inoui! ô merveilleuse association!» s'écrie saint Grégoire le Théologien; Celui qui est commence d'être; l'Incréé se crée; l'Immense se renferme dans une âme intelligente, médiatrice entre la Divinité et une chair grossière; Celui qui donne la richesse se fait pauvre, pauvre jusqu'à ma chair, pour que je devienne riche de sa Divinité; l'Inépuisable s'épuise, s'épuise pour un peu de temps en sa gloire, afin que je participe de sa plénitude. Quelle richesse de miséricorde (3)! »

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II. Quant au but de la mission et de la venue du Fils de Dieu dans le monde, la sainte Église nous le marque clairement lorsqu'elle nous apprend à dire dans la confession.... qui, pour notre humanité et pour notre salut, descendit du ciel. » Et la sainte Écriture affirme que le Fils de Dieu ne vint réellement sur la terre que dans le but de nous sauver (Luc, XIX, 10), c'est-à-dire : 1o de satisfaire pour nous à la justice éternelle : « Dieu l'a proposé pour être la victime de propitiation, par la foi qu'on aurait en son sang, pour faire paraître la justice qu'Il donne Lui-même en pardonnant les péchés passés » (Rom., 111, 25); 2o de nous purifier des péchés : « Il s'est livré Lui-même pour nous, afin de nous racheter de toute iniquité » (Tite, 1, 14); 3° de nous affranchir de la mort et du pouvoir de Satan : «< Comme donc les enfants sont d'une nature mortelle, composée de chair et de sang, c'est pour cela que Lui-même a pris aussi cette même nature, afin de détruire par sa mort celui qui était le prince de la mort, c'est-à-dire le diable, et de mettre en liberté ceux que la crainte de la mort tenait dans une continuelle servitude pendant leur vie » (Hébr., II, 14, 15);

(1) Athanas. de Incarnat. Dei, n. 1; Gregor. Nyss. contr. Eunom., orat. XII; comp. p. 13, notes 1, 3 et 5.

(2) In Epist. ad Hebr., cap. 2.

(3) Serm. 38 sur l'Épiph.; Œuvr. des saints Pères, шII, 245.

xvii,

4o de rétablir notre union avec Dieu : « Afin que tous ne soient qu'un, comme Vous, mon Père, êtes en moi et moi en Vous, qu'ils soient de même un en Nous » (Jean, XVII, 21); 5o d'éclairer notre raison obscurcie par le péché : « Je ne suis né et ne suis venu dans le monde que pour rendre témoignage à la vérité; quiconque appartient à la vérité écoute ma voix »> (XVIII, 36); » Je suis venu dans le monde, Moi qui suis la lumière, afin que tous ceux qui croient en Moi ne demeurent point dans les ténèbres » (XII, 46); 6o de réformer notre volonté, qui incline facilement au péché, et de la former aux bonnes œuvres : « La grâce de Dieu notre Sauveur a paru à tous les hommes, et elle nous a appris que, renonçant à l'impiété et aux passions mondaines, nous devons vivre dans le siècle présent avec tempérance, avec justice et avec piété » (Tite, 11, 11, 12); et, par conséquent, 7o de nous apprendre de nouveau à glorifier dignement Dieu, qui nous « a prédestinés, par un pur effet de sa bonne volonté, pour nous rendre ses enfants adoptifs par Jésus-Christ, afin que la louange et la gloire en soient données à sa gràce, par laquelle Il nous a rendus agréables à ses yeux en son Fils bien-aimé » (Éph., 1, 5, 6); « Afin que nous soyons le sujet de la gloire et des louanges de JésusChrist, nous qui avons les premiers espéré en Lui » (Ibid., 12); et 8o de nous faire don de la vie éternelle : « Dieu a tant aimé le monde qu'Il a donné son Fils unique, afin que tout homme qui croit en Lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle.» (Jean, III, 16.)

Ce même but de la venue du Fils de Dieu dans le monde fut reconnu et professé par les saints Pères et Docteurs de l'Église. Saint Irénée, par exemple, s'exprimait ainsi : « S'il n'avait pas fallu sauver la chair,, le Verbe divin ne se serait pas fait chair (1). Saint Athanase: « C'est à cause de nous qu'Il est venu; notre péché avait excité à tel point l'amour du Verbe pour l'homme qu'll descendit à nous et que le Seigneur parut parmi les hommes. C'est à cause de nous qu'Il s'est incarné, et c'est pour notre salut qu'Il s'est fait homme et qu'Il est né en

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(1) Advers. Hæres., Iv, cap. 14.

chair d'homme (1).

Saint Grégoire le Théologien : « Pourquoi Dieu prend-Il en notre faveur la nature humaine? Pour que nous soyons tous sauvés. En effet, quelle autre raison pourrait-il y avoir (2)? » Saint Jean Chrysostome: « Étant Dieu, Il ne prit notre chair et ne se fit homme que pour le salut du genre humain (3). » Saint Basile le Grand : « L'économie de Dieu et de notre Sauveur par rapport à l'homme, c'est de le rappeler de son état de chute, et de le ramener en communion avec Dieu de l'état d'éloignement où l'a mis la désobéissance. Si le Christ vint en chair, s'll prescrivit dans l'Évangile des règles de vie; s'il y eut ses souffrances, sa croix, sa sépulture, sa résurrection, c'est afin que l'homme, sauvé par l'imitation de Christ, revînt à son premier état d'enfant de Dieu (4). » Le bienheureux Augustin : « Le Seigneur Jésus-Christ ne vint que pour sauver les pécheurs, pour abolir les souffrances, guérir les plaies, et la médecine n'est plus nécessaire (5). » Saint Grégoire le Grand : « Si Adam n'avait pas péché, le Rédempteur n'aurait pas eu besoin de prendre notre chair (6). » Les mêmes idées se retrouvent dans Didyme d'Alexandrie (7), Ambroise (8), Macaire le Grand (9), Léon le Grand et d'autres (10). Ainsi est complétement refutée la fausse doctrine des Pélagiens et des autres hétérodoxes qui prétendent que le Fils de Dieu serait venu sur la terre et se serait incarné même dans le cas où l'homme ne serait pas tombé (11).

(1) De Incarnat. Dei, n. 4.

(2) Serm. sur la Theol., iv; Œuvr. des saints Pères, 11, 79.

(3) In Genes. homil. III, n. 4; XXIII, n. 6.

(4) Sur le Saint-Esprit, chap. 15; Œuvr. des saints Pères, vii, 282.

(5) Serm. de Verbis Domini, vi. Et ailleurs : « Si homo non periisset, Filius << hominis non venisset. » Serm. CLXXIV, n. 2; cf. n. 8.

(6) In 1 Reg. Exposit., IV, cap. 1.

(7) Ἐγένετο... διὰ σωτηρίαν ἀνθρώπων ὑιὸς ἀνθρώπου. De Trinit., III, 4. (8) « Quæ est causa Incarnationis, nisi ut caro, quæ peccaverat, redimeretur?» (De Incarnat., cap. 6.)

(9) Ἡ ἔλευσις τοῦ Κυρίου πᾶσα διὰ τὸν ἄνθρωπον γεγένηται, τὸν τεθανατωμένον ἐν τάφῳ σκότους ἁμαρτίας... Homil. xxxiv.

(10) Leo, Serm. ш de Pentec.; Tertull. de Carn. Christi, cap. 14; Clem. Alex. Pædag., 1, 1; Origen. in Num homil. xxiv, n. 1; Gregor. Nyss. Catech., cap. 15.

(11) Après les Pélagiens (Cassian. de Incarn. Christi, contra Nestor., 1,*

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