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qui vécurent et enseignèrent avant le concile d'Éphèse et celui de Chalcédoine. Tels sont les témoignages de saint Ignace le Théophore : « Le seul médecin du corps et de l'âme, engendré et non engendré, s'étant montré Dieu dans la chair et véritable vie dans la mort, provenu de Marie et de Dieu, d'abord participant, puis non participant à la souffrance, c'est Jésus-Christ Notre-Seigneur (1); » de Tertullien : « Nous voyons une double nature non confondue, mais réunie dans la seule personne du Dieu et homme Jésus (2);: de saint Athanase le Grand : « Il (Christ) est Dieu parfait et homme parfait, unique par unité d'hypostase et de deux et en deux natures (3); }) - de saint Éphrem : « Je professe le seul et même comme Dieu parfait et homme parfait, en deux natures réunies hypostatiquement et personnellement, reconnues inséparablement, sans confusion ni changement; qui s'est revêtu d'une chair animée par une àme raisonnable et pensante, et qui nous est devenu semblable à tout, hormis le péché ; le seul et même est... Dieu et homme, parfait Dieu et parfait homme, un en deux natures, et dans les deux un (4); >>-de saint Grégoire le Théologien : « Nous ne séparons pas en Lui (Christ) l'homme et la Divinité; nous enseignons qu'un seul et même auparavant non homme, mais Dieu et Fils unique, éternel, n'ayant ni corps ni rien de charnel, et ensuite homme aussi, accepté pour notre salut, soumis à la souffrance en sa chair, impassible en sa Divinité, borné selon le corps, non borné selon l'esprit; un seul et même, — terrestre et céleste, visible et invisible, renfermé dans un lieu et non renfermé dans un lieu, pour que tout l'homme et Dieu recréat tout l'homme déchu (5); »-d'Augustin : «< d'Augustin: « Jésus-Christ, Fils

(1) Ep. aux Eph., vi; Lect. chr., 1821, 1, 34; comp. chap. 20, p. 41. (2) Adv. Prax., cap. 27.

(3) In Annunt. Deiparæ, n. 2, Opp., t. II, p. 399; cf. contra Arian. oral. in, n. 31, 32.

(4) Serm. sur la Transf. du Seigneur; Œuvr. des saints Pères, xm, 158-159. (5) Lettr. à Cled., 1; ibid., IV, 197. La même idée est exprimée par saint Grégoire de Nysse : Δύο γὰρ πράγματα περὶ ἓν πρόσωπον ὁ τῆς γραφῆς γεγενῆσθαι φησί. Παρὰ μὲν Ἰουδαίων τὸ τάφος, παρὰ δὲ τοῦ Θεοῦ τὴν τιμήν (Contra Eunom. orat. iv, p. 583, éd. Morel.) par Didyme d'Alex. (de Trinit., 11, 6); Hilaire (de Trinit., x, 52).

de Dieu, est Dieu et homme : Dieu, parce qu'Il est le Verbe de Dieu et que « le Verbe était Dieu » (Jean, 1, 1); homme, parce que le Verbe a pris une àme raisonnable et un corps dans l'unité de personne; » et plus loin : « Lui seul est Fils de Dieu et en même temps Fils de l'homme; Lui seul est Fils de l'homme et en même temps Fils de Dieu. Il n'y a pas deux Fils de Dieu, Dieu et l'homme, mais un seul Fils de Dieu, Dieu sans commencement et homme avec commencement: voilà Notre-Seigneur Jésus-Christ (1). »

D. La saine raison elle-même, fondée sur les principes de la théologie, ne peut s'empêcher de reconnaître que l'hérésie de Nestorius, qui divisait Jésus-Christ en deux personnes, ren-. verse complétement le mystère de l'Incarnation et de la Rédemption. Si la divinité et l'humanité en Christ n'étaient pas réunies en une seule hypostase, mais formaient deux personnes séparées; si le Fils de Dieu n'était uni avec le Christ homme que moralement et non physiquement, et habitait en Lui comme dans Moïse et les autres prophètes, l'Incarnation n'a point eu lieu, et l'on n'en saurait dire : « Le Verbe fut chair, » ni « Dieu a envoyé son Fils formé d'une femme; » Car alors le Fils de Dieu n'a point été formé d'une femme, Il n'a point pris la chair humaine; mais ce n'est qu'extérieurement qu'Il s'est rapproché de l'homme Christ, né d'une femme. D'un autre côté, si ce n'est pas le Fils de Dieu qui pour nous a souffert et est mort sur la croix, en sa chair, prise par Lui dans l'unité de son hypostase, mais simplement l'homme Christ, n'ayant rien de plus qu'une union morale avec le Fils de Dieu, notre rédemption n'a pas même pu s'accomplir,- parce qu'un homme borné, quelle que soit d'ailleurs sa sainteté, est incapable de donner une satisfaction suffisante à la justice infinie de Dieu pour les péchés de tout le genre humain. Or, en sapant ainsi le mystère de l'Incarnation et le mystère de la Rédemption, l'hérésie de Nestorius sapait par là même tout l'édifice de la foi chrétienne.

(1) Nous citons ici les paroles d'un ouvrage composé par Augustin avant l'apparition de l'hérésie de Nestorius, nommément de l'Enchirid. ad Laurent., cap. 35.

§ 138. Mode de l'union hypostatique des deux natures en Christ.

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Comment les deux natures en Jésus-Christ, la nature divine et la nature humaine, se sont-elles unies en une seule hypostase, nonobstant toute la différence qui existe entre elles? Comment Christ, étant Dieu parfait et homme parfait, n'est-Il néanmoins qu'une seule personne?« C'est,» selon la Parole de Dieu, « quelque chose de grand que ce mystère de piété (I Tim., III, 16), et par conséquent d'incompréhensible pour notre raison. Mais, autant que ce mystère est accessible à notre foi, la sainte Église, en s'appuyant sur la même Parole de Dieu, nous enseigne qu'en notre Sauveur les deux natures étaient unies: 1o d'un côté -- « sans confusion (acuút) et invariablement, ou sans changement » (άτρénτws), contre la fausse doctrine des monophysites, qui confondaient en Christ les deux natures en une seule ou admettaient en Lui le changement de la Divinité en chair; et 2o, d'un autre côté, « indivisiblement » (ἀδιαιρέτως) et « inséparablement » (azpiors), contre l'erreur des Nestoriens, qui divisaient en Christ les deux natures, et d'autres hérétiques, qui niaient que ces natures fussent unies constamment et sans interruption. (Voy. le dogme du concile de Chalcédoine.)

A.. Les deux natures étaient unies en Christ, 1° sans confusion, c'est-à-dire qu'elles n'étaient pas confondues ni mêlées l'une avec l'autre, de manière à former une nouvelle, une troisième nature, mais qu'elles restaient l'une et l'autre dans la personne du Sauveur comme deux natures différentes; 2o invariablement ou sans changement, c'est-à-dire que ni la nature divine n'était changée en nature humaine, ni la nature humaine changée en nature divine, mais que l'une et l'autre demeuraient entières dans la personne du Sauveur. (Prof. orth., p. 1, rép. 38.) Cette vérité de l'intégrité parfaite et de la différence des deux natures en Christ, même après leur union hypostatique, résulte avec évidence :

I. — De tous les témoignages de la sainte Écriture précédemment examinés, dans lesquels, d'une part, sont attribuées à

Jésus-Christ la nature divine, les perfections et les actions divines, avec le nom de Dieu, et, d'autre part, Lui est attribuée également la nature humaine, avec ses qualités et ses actions, et le nom d'homme. Mais, si en Christ la Divinité et l'humanité étaient confondues ou mêlées l'une avec l'autre, Il ne fut ni Dieu parfait ni homme parfait, et l'on ne pourrait Lui attribuer ni la nature divine ni la nature humaine, mais seulement une nouvelle nature formée de la fusion ou du mélange des deux, avec de nouvelles qualités et de nouvelles différences (1). De mème, si, dans l'hypostase de Christ, ou la Divinité s'était changée en humanité, ou l'humanité transformée en Divinité, en étant absorbée par la dernière, on ne pourrait attribuer à Jésus-Christ qu'une seule de ces deux natures, qui serait restée intégralement, et non point l'autre, qui aurait été anéantie et dépouillée de ses qualités.

II. - Des décrets et des témoignages d'abord, de tous les conciles œcuméniques et provinciaux et des Docteurs de l'Église, qui défendirent et prouvèrent contre de nombreux hérétiques la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ (2); ensuite, de tous les conciles et Docteurs de l'Église, qui défendirent et prouvèrent contre les hérétiques la véritable nature humaine de Jésus-Christ (3); enfin, du décret clair et précis du concile de Chalcédoine, contre les monophysites directement, sur la réunion, sans confusion ni changement, des deux natures en JésusChrist; de même que des témoignages de tous ceux des Docteurs

(1)« Un corps composé de quatre éléments n'est nommé ni consubstantiel avec le feu, ni feu, ni eau, ni terre, ni consubstantiel avec aucun de ces éléments. Par conséquent, si, comme le pensent les hérétiques, après l'union des deux natures, Christ devint d'une nature composée, dans ce cas, d'une nature simple il s'est changé en une nature composée, et n'est plus consubstantiel ni avec le Père, dont la substance est simple, ni avec la mère, qui n'est pas composée des substances divine et humaine. Alors Jésus-Christ n'appartient ni à la Divinité ni à l'humanité. » (Maxim. le Conf., Epist. ad Joann. Cubic., Opp., 11, p. 279, ed. Combefis., 1675; J. Damasc., Expos., etc., III, 3, p. 140-141.)

(2) Voir plus haut, p. 58, notes 3 et 4; p. 59, notes 1 à 4; p. 60, notes 1 à 5, et les textes.

(3) Voir p. 67, note 1; p. 68, notes 1 à 3; p. 69, notes 1 à 4; p. 70, notes 1 à 4; p. 71, notes 1 à 4; p. 72, notes 1 à 3; p. 73, notes 1 à 3; p. 74, hote 1.

de l'Église qui ont écrit sur ce dogme à l'époque du concile de Chalcédoine ou depuis (1). Au reste, même avant ce concile, les saints Pères et Docteurs de l'Église professaient non moins clairement en Christ deux natures entières et différentes, sans ombre de mélange ou de changement. Par exemple :

Saint Hippolyte s'exprimait ainsi : « Dieu le Verbe se fit pour nous homme parfait, sauf le péché.... pour nous Il prit la limitation de la chair naturelle, mais sans éprouver aucun changement. Et, en étant un par nature avec Dieu le Père, Il ne devint pas identique avec la chair par amoindrissement; mais Il resta aussi illimité qu'Il l'était avant d'avoir pris la chair, et au moyen de la chair Il opéra par la Divinité ce qui est propre à la Divinité. Par sa double action, divine et humaine, Il se montra à la fois Dieu et homme: Dieu infini, homme borné, gardant en plein l'une et l'autre nature, avec les actions appartenant à l'une et à l'autre, ou, ce qui revient au même, avec l'attribut essentiel à chacune d'elles (2). »

Saint Athanase le Grand : « On doit reconnaître Christ comme Dieu parfait et homme parfait; non point pourtant en ce sens que la perfection divine (ou la nature parfaite) se soit changée en perfection humaine, idée impie; ni en cet autre sens que les deux perfections (les natures parfaites) soient professées à part, idée étrangère à la piété... mais dans le sens d'une existence complète, pour qu'il n'y ait qu'un seul et même, l'un et l'autre parfait en tout, Dieu et homme (3).

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Saint Éphrem le Syrien « La Divinité et la chair restent en une seule hypostase et en une seule personne, inséparablement et sans confusion... Quiconque sépare en Lui les natures sera séparé de son royaume, et quiconque les confond sera privé de la vie (4).

(1) Savoir : saint Léon le pape, saint Cyrille d'Alexandrie, Théodoret et Augustin, saint Maxime le Confesseur, J. Damascène et autres.

(2) De Theolog. et Incarn., contr. Beron. et Helic., n. 2, 4; cf. n. 8: "Oλ05 Θεὸς ὁ αὐτὸς καὶ ὅλος ἄνθρωπος ὁ αὐτὸός.

(3) Contra Apollinar., 1, n. 16; cf. In Ps. XXI, 24: Els ráp éσtiv ó Xploròs ἐκ δύο τῶν ἐναντίων, τέλειος Θεὸς καὶ τέλειος ἄνθρωπος. (Apud Galland., v, 203.) (4) Serm. sur la Transf. du Seigneur; Œuvr. des saints Pères, xm, 154; comp. 158-159.

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