Page images
PDF
EPUB

de l'administration publique, comme de l'absence de la véritable charité chrétienne. A Constantinople, cent prytanées, sous le nom d'Inarêts, sont ouverts aux besoins et à l'appétit de la multitude. Il existe aussi, dans cette capitale, des hôpitaux de malades, magnifiques à l'extérieur, mais malpropres, fétides et presque abandonnés. L'usage des couchettes, dont l'exhaussement prémunit contre l'humidité du sol, n'est point admis dans ces établissemens. A Constantinople et à Galata, les malheureux malades sont réduits à chercher le repos sur des nattes de paille négligemment étendues sur le plancher. Il existe aussi des hôpitaux en Egypte, et notamment au Caire; mais une malpropreté dégoûtante et de graves abus trahissent l'ignorance et l'immoralité de l'administration. Dans ces états, la charité publique est étouffée par le fanatisme et l'empire des sens.

En 1818, un hôpital, destiné à offrir un asile aux Européens atteints de la peste et aux voyageurs malades ou blessés, a été inauguré à Alexandrie. Cet établissement a été fondé par environ 100 souscripteurs, pour renfermer 50 malades. Il reçoit d'abondans secours des négocians anglais et français, et perçoit une rétribution par journée de malade. Ses dépenses s'élèvent annuellement à 17,500 fr. Le nombre des malades, dans les années où il n'y a pas de peste, s'élève ordinairement de 250 à 300, sur lesquels, grâces à une excellente administration, il n'y a pas généralement plus de 30 à 40 morts. Puisse cet exemple de la civilisation chrétienne se propager, et porter d'heureux fruits! La charité doit être universelle; mais il n'appartenait qu'au christianisme de l'inspirer.

CHAPITRE IX.

SECOURS A DOMICILE AUX MALADES.

Tantôt, de la bonté que la marche secrète Surprenne l'indigent au fond de sa retraite. (DELILLE.)

CE genre de secours si précieux était moins nécessaire dans les siècles précédens, où les établissemens charitables et les aumônes pouvaient embrasser et soulager toutes les infortunes. Aujourd'hui, quelque nombreux et spacieux que puissent être les hôpitaux et les hospices, ils ne seraient plus suffisans pour recevoir tous les pauvres malades qui y afflueraient, ni surtout assez riches pour subvenir aux frais de leur traitement, si une charité indépendante de l'administration n'en allégeait les charges. Cette insuffisance a donné lieu à des institutions charitables dont le but est de porter des secours à domicile aux pauvres dégèrement malades, aux nourrices et aux ouvriers convalescens. Les administrations de charité, les congrégations religieuses, les associations particulières, sont chargées de ce pieux devoir, qui supplée heureusement à ce que les établissemens hospitaliers ne peuvent accomplir par eux-mêmes, et s'exerce en général sous la surveillance et la direction des médecins des pauvres.

Ce mode de secours produit les effets les plus efficaces. Nous aurons occasion d'examiner ailleurs à quel point il conviendrait de le généraliser.

CHAPITRE X.

DES MAISONS D'ORPHELINS.

Remplacez par vos soins la pitié maternelle :
Conquérez à l'état ces enfans malheureux.
Que l'école des arts soit ouverte pour eux.
Donnez, pour les rejoindre à la grande famille,
Au jeune homme un métier, une dot à la fille.
(DELILLE.)

S'IL est une classe d'infortunés digne d'exciter la pitié et l'humanité, c'est sans doute celle des enfans que la mort a privés de leurs soutiens naturels. A ce titre, les orphelins ont dû être l'objet d'une juste préférence dans l'ordre de la charité. On ignore quel sort leur était réservé dans les temps antérieurs au christianisme. Sans doute, les réglemens de Moïse s'étendaient à leur conservation et à leur entretien; mais, chez les peuples païens, ils durent nécessairement subir la rigueur des lois communes aux malheureux de toutes les conditions.

Depuis l'application des préceptes évangéliques, les secours de la charité chrétienne ne leur ont point manqué. Les premiers, ils ont été admis dans les hospices fondés par la religion, ou recueillis dans des maisons religieuses et par des personnes pieuses. Dans un grand nombre de villes, ils ont été l'objet d'institutions et de fondations spéciales. Partout ils sont reçus dans les établissemens

charitables, placés sous la tutelle de l'administration, et ne sont point confondus avec les enfans trouvés ou abandonnés. Après avoir appris un métier quelconque qui les mette à même de gagner leur vie, ils jouissent en général de leur liberté. Dans quelques états, on destine les garçons à la carrière des armes. A Florence, ceux des deux sexes sont recueillis dans l'Albergo de gli Poperi ou Recluserio. Les jeunes filles y demeurent jusqu'à ce qu'elles trouvent un établissement convenable. Les garçons sont appelés à suivre l'état militaire. Il y a école d'enseignement mutuel, école de dessin, école de musique militaire et de tambours. On y a réuni des ateliers de tailleurs, de cordonniers et de tisserands. Les enfans qui se sont distingués dans l'une de ces professions, obtiennent l'exemption du service militaire, et on leur abandonne le tiers du travail.

CHAPITRE XI.

DES ENFANS TROUVÉS ET ABANDONNÉS.

Or sus, mesdames, voyez si vous voulez délaisser à votre tour ces petits innocens dont vous êtes devenues les mères, selon la grâce, après qu'ils ont été abandonnés par leurs mères, selon la nature.

(Allocution de saint Vincent-de-Paule à une assemblée de charité sous Louis XIII.) J'entends, je reconnais vos lamentables cris, Enfans infortunés, famille illégitime, Que le crime enfanta et qu'immola le crime.... .... Ah! que la pitié parle où se tait la nature!..... (DELILLE.)

Sous l'empire des passions vicieuses, la voix de la nature est étouffée, le cœur se flétrit et se dessèche, toute affection s'y détruit, le sentiment le plus puissant finit par s'éteindre. Lorsque l'immoralité se réunit à la misère, cette alliance impure enfante tous les crimes.

C'est ainsi qu'endurcies par le vice ou vaincues par le besoin, on voit des mères s'éloigner de leurs enfans et les abandonner à la pitié publique. Quelquefois la honte pousse à un crime encore plus grand. Partout ces causes ont produit l'exposition des enfans et l'infanticide.

Parmi les peuples de l'antiquité qui laissaient impuni ce

« PreviousContinue »