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et en Portugal, les hôpitaux, les aumônes et les ateliers de charité, sont, en général, les seuls moyens employés ́à l'égard de la mendicité.

En 1631, Charles-Emmanuel, roi de Sardaigne, défendit la mendicité à Turin et dans son territoire. Son illustre successseur, Victor-Amédee, compléta ses réglemens par l'institution de congrégations charitables dans toutes les villes principales du royaume, et par l'établissement d'hôpitaux généraux destinés à procurer aux mendians du travail, un asile et une instruction morale. Il fut interdit à toute personne de donner des aumônes individuelles, sous peine de cinq livres de Piémont d'amende et du double en cas de récidive, lesdites amendes applicables aux hôpitaux. Les édits de ce prince furent approuvés par une bulle du pape Innocent XII, accordant des indulgences aux membres des congrégations. Le recueil des ordonnances de Victor-Amédée, publié à Turin, en 1717, sous le titre de la mendicità sbandita, par le père Guevarra, de la société de Jésus, renferme, sous le rapport de l'ordre et de la comptabilité, des modèles d'une sage administration (1).

Dans les états du Saint-Siége, la mendicité avait été

enfans incapables de travailler restèrent dans les chambres de leurs père et mère, ou de leurs compagnons, pour les y voir travailler.

On chercha à faire naître l'émulation parmi eux en instituant des récompenses pour la conduite, l'application, l'industrie et l'habileté. On accorda des éloges, des distinctions, des grades, un costume particulier : ce dernier moyen fut un des plus puissans.

Le nombre de ceux qui dìnaient à la maison d'industrie militaire était de 1,000 en été, et de 1,200 en hiver. Le nombre s'éleva quelquefois jusqu'à 1,500, parce qu'il y a des pauvres qui ne venaient que pour dîner. Le comte de Rumford se trouva heureux de voir alors le changement qui s'opéra tant dans le physique que dans le moral des pauvres.

(M. Iluerne de Pommeuse, des colonies agricoles. ) (Voir aussi la Collection des mémoires sur les hôpitaux, prisons, etc., publiée par les soins de M. le comte François de Neufchâteau. )

() Nous avons dù la communication de ce recueil rare et curieux à

proscrite à plusieurs reprises. Pie V, en 1566, fit défense de mendier dans les églises. Grégoire XIII interdit la mendicité dans tout le territoire soumis à sa souveraineté. Sixte V rendit des lois très sévéres contre les mendians valides, et Innocent XII renouvela les décrets de ses prédécesseurs dans une bulle du 20 mai 1693, provoquée sans doute par l'exemple du roi Victor-Amédée. Mais peu à peu ces sages mesures, contrariées par les révolutions politiques de l'Italie, tombèrent en désuétude. L'interdiction de la mendicité s'alliait à des institutions religieuses qui furent supprimées ou privées de leurs dotations. En 1810, l'administration française chercha à employer les mendians valides à des ateliers de charité ou dans des maisons de travail. A son départ, les aumônes redevinrent la seule resource des mendians. Néanmoins, grâce aux innombrables institutions de charité qui existent à Rome, cette ville qui passe pour être le foyer de la mendicité, est loin de nourrir autant de pauvres oisifs que beaucoup de villes renommées par leur opulence et par leur bonne police. On n'y compte guère plus de mendians que dans les principales villes de France. Les villes de Nice, de Gênes, de Pise et de Naples en présentent un bien plus grand nombre, pendant la saison rigoureuse. A Gênes et à Naples surtout, on est offusqué par le nombre et l'importunité des mendians qui poussent quelquefois la hardiesse jusqu'à frapper sur le bras des passans. En Toscane seulement, Léopold est parvenu à proscrire à peu près la mendicité par de sages réglemens basés sur l'obligation du travail.

En Turquie, pays où la charité et l'antique hospitalité se sont conservées, plus peut-être que dans aucune autre contrée, il n'existe de véritables mendians que

l'obligeance de S. Exc. M. le comte de Cessoles, président du sénat de Nice, dont la famille a fondé de précieux établissemens de bienfaisance dans cette ville, et qui s'occupe, avec le zèle le plus éclairé, de l'amélioration du sort de l'indigence.

dans les grandes villes et dans les quartiers des Francs. Il ne paraît pas qu'aucune loi y punisse la mendicité. L'aumône est une obligation de la loi religieuse.

Dans les Etats-Unis d'Amérique, des hospices qui sont à la fois des dépôts de mendicité agricoles, donnent du travail et un asile aux mendians, et semblent destinés à servir de modèles aux autres établissemens du même genre que l'on voudrait fonder. Celui de Baltimore est un vaste édifice composé d'un corps de logis et de deux ailes, capable de recevoir huit à neuf cents personnes, situé à environ une lieue de la ville et qui s'élève sur une ferme d'environ trois cents acres ou arpens, et renferme : 1o une infirmerie, 2o un hôpital pour les femmes en couche, 3o un atelier pour les vagabonds et mendians en état de travailler, 4o un asile et une école pour les enfans, 5o une maison d'aliénés, 6o une école de chirurgie.

Les fonctions de secrétaire, maître d'école, garde-malades, cuisinier, sont remplies par des indigens auxquels on donne une rétribution proportionnée à leur service.

Tout pauvre qui sort de l'établissement sans aucune autorisation, et sans l'avoir défrayé, par son travail, des dépenses qu'il a occasionnées, se rend coupable d'un délit que la loi punit d'une année d'emprisonnement.

On retire à ceux qui se présentent, les vêtemens et objets qu'ils ont sur eux, et on leur donne en échange un habit uniforme jusqu'à leur sortie. On met les enfans en apprentissage à tout âge. Une fois admis dans l'établissement, leurs pères et mères perdent tout droit sur eux et ne peuvent s'opposer à ce qu'ils soient placés, si on peut le faire avantageusement. La maison renferme environ quatre cents pauvres (1), dont la majeure partie a été rẻduite à l'état d'indigence par l'intempérance habituelle. On y compte un quart d'enfans, un quart de vieillards ou

(1) La population de Baltimore est de 63,000 habitans.

d'infirmes et un quart de malades. Les indigens validesont occupés aux travaux de la ferme ou à tisser, tricotter, filer et fabriquer des souliers. Le produit de la ferme a été, en 1826, de 3,971 dollars (environ 22,000 fr.), et celui du travail des ouvriers s'est élevé à pareille somme.

Les dépôts de mendicité de Boston, de Salem, de Harlford et de Providence, sont établis d'après le même système. Les administrations municipales règlent chaque année les subsides au moyen desquels il est pourvu à l'entretien de l'établissement,

CHAPITRE VI.

DE LA LÉGISLATION RELATIVE AUX ENFANS TROUVÉS

EN FRANCE.

Ah! que la pitié parle où se tait la nature !

(DELILLE.)

De tous les sentimens dont l'homme est susceptible, le plus naturel et le plus doux est l'amour des parens pour les enfans dans lesquels ils doivent un jour revivre. C'est une conséquence de la loi suprême qui préside à la conservation de l'univers, et qu'on retrouve même dans les créatures privées d'intelligence, car on sait que les animaux les plus féroces n'abandonnent leur progéniture que lorsqu'elle est en état de se passer de leurs soins. Mais chez les hommes, ce sentiment, comme toutes les affections morales et généreuses, s'altère par le contact des passions et des vices, et par la dégradation du cœur et de l'intelligence.

Ainsi que nous l'avons fait précédemment connaître, dans tous les temps et dans toutes les contrées du monde, on a vu des nouveaux-nés devenir victimes de mœurs féroces, de coutumes barbares et de la superstition la plus insensée. Excepté chez les Hébreux, les Egyptiens et les Thébains, la législation ancienne accordait une puissance absolue et le droit de vie et de mort au père sur les enfans,

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