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Les Etats de Lorraine étant réversibles à la France, après la mort de Stanislas, ce prince, par un traité, céda au roi son gendre le droit d'imposer et de lever des subsides dans les provinces. Louis XV, d'après cette convention, s'engagea à payer, chaque année, 2 millions au roi de Pologne.

Les trésors doublent en quelque sorte de valeur par l'emploi qu'on sait en faire. Avec ce revenu, avec ces faibles ressources, un génie créateur, le génie du bien, va opérer, en Lorraine, tous les prodiges de la magnificence et de la générosité !..... Ici, l'on regrette d'être condamné au devoir de simple analyste. Comment se décider à abréger, lorsque le cœur, qui compte tous ses bienfaits, trouverait tant de charmes à les décrire !... Qu'il nous soit donc permis de présenter, avec quelques détails, cette longue suite d'actions grandes et généreuses qui ont immortalisé la mémoire du meilleur des princes. Nous le verrons s'occuper tour à tour de toutes les branches de son gouvernement, et répandre ses grâces sur tous les lieux soumis à sa domination. Mais sa capitale ayant fixé ses premiers regards, nous parlerons d'abord des travaux immenses qu'il fit exécuter dans cette ville. Pour en avoir une juste idée, il faut se représenter ce qu'elle était avant le règne de Stanislas.

Nanci, ville capitale de la Lorraine, et long-temps le séjour de ses souverains, ne comprenait d'abord que cette partie nommée aujourd'hui la Ville-Vieille. La nouvelle fut commencée sous le règne du grand-duc Charles V, vers la fin dix-septième siècle. L'une et l'autre s'embellirent beaucoup sous celui de Léopold. Mais son successeur, élevé sur un plus grand trône, ne put suivre ses vastes desseins. Il était réservé à Stanislas d'achever ce grand ouvrage, et de rendre la ville de Nanci une des plus belles de l'Europe.

Toujours dirigé par son cœur, son premier monument est un monument de reconnaissance. Il veut ériger une statue au monarque français, à ce prince qui lui donna un trône, et lui rendit le bonheur. Mais tout ce qui environnera cette image auguste doit être digne d'un tel ornement !.... C'est dans ce but qu'il forma le plan d'une place magnifique.

L'esplanade, située entre les deux villes, n'offrait qu'un terrain brut, irrégulier, occupé par quelques maisons bâties çà et là, sans ordre, sans symétrie. Bientôt ce vaste emplacement s'entoure de superbes édifices, et la statue de Louis XV s'élève au milieu de la place nouvelle.

Deux rues parfaitement alignées, et en face l'une de l'autre, conduisent à cette place; à l'extrémité de chacune d'elles, deux portes sont

construites, la porte Saint-Stanislas et la porte Sainte-Catherine. La place Royale touchait à la Carrière, mais sans communications directes: un are de triomphe les réunit.

A droite, en entrant sur la place Carrière, était l'hôtel de Craon, aujourd'hui le Palais-de-Justice; les bâtimens en face furent remplacés par l'hôtel de la Bourse, exactement semblable au Palais. Le reste de la Carrière se trouvait sans proportion avec ces deux édifices. Le roi voulant rendre cette place parfaitement régulière, fit construire, à ses frais, des façades uniformes à toutes les maisons. Enfin, deux nouveaux hôtels, en forme de pavillons, terminèrent des deux côtés l'alignement.

Pour achever d'embellir cette place, il fallait construire un édifice qui surpassât les autres, mais sans les effacer. On y parvint, et l'ancien péristyle, commencé par Léopold, fut remplacé par un magnifique palais.

Près de la place Royale, au lieu appelé le Potager, on s'empressa de bâtir de superbes hôtels, et le roi voulut encore faire les frais des quatre façades de la place Saint-Stanislas, ou place d'Alliance.

Parmi les nombreux édifices que Stanislas fit construire dans la capitale, et dont nous n'avons pu indiquer que les plus importans, on remarque encore de magnifiques casernes, près la porte Sainte-Catherine; le séminaire Royal des Missions, au faubourg Saint-Pierre, et près de la, l'église de Bon-Secours.

On doit ajouter que le bon prince, n'ayant en vue, dans l'exécution de ses vastes desseins, que le bien, que l'avantage de ses sujets, ne voulut employer, pour ses nombreuses constructions, que des artistes et des ouvriers lorrains, avec l'attention de choisir toujours de préférence les plus malheureux. - « C'est une bonne action, disait-il, de donner du << pain au pauvre qui en manque; mais c'en est une meilleure encore de ne « le lui donner qu'à la fin de sa journée : on l'aura soustrait par-là à deux « grands maux, l'oisiveté et la misère. »

C'est ainsi que Stanislas savait réunir le double avantage d'un bien durable pour l'état et du soulagement actuel pour les malheureux aussi ces hommes reconnaissans, semblaient-ils rivaliser de zèle avec leur maître, et par cette noble émulation on vit en moins de huit années s'élever une cité nouvelle.

Bar, Lunéville, Pont-à-Mousson, Commercy, et tous les principaux lieux enfin de la Lorraine, furent embellis par les soins du roi de Pologne, tandis que plusieurs maisons de plaisance étaient en même temps construites ou réparées.

Quand on considère les immenses travaux que nous venons de décrire, on ne peut se rappeler, sans étonnement et sans admiration, les faibles ressources qui fournissaient à de si vastes entreprises ! Et cependant c'était sans nuire à l'éclat du trône, à l'intérêt des peuples, que Stanislas, par un profond discernement, par un ordre admirable, savait à la fois former de grands desseins et applanir les difficultés de l'exécution.

Mais ce n'était point assez pour le prince d'avoir créé une ville nouvelle, d'en avoir embelli beaucoup d'autres, il fallait, pour satisfaire sa grande âme, que de sages institutions, d'utiles établissemens vinssent assurer le bonheur de ses sujets, ou les consoler dans leurs maux.

L'éducation de la jeunesse fixa d'abord l'attention du monarque. Il mettait au rang des grandes affaires de l'état, le soin de perfectionner l'instruction publique. Des écoles gratuites furent donc établies dans les villes principales de la Lorraine; il y ajouta, pour celle de Nanci, des chaires de mathématiques, de philosophie et d'histoire ; et, afin d'aider au développement de ces connaissances utiles, il forma une bibliothèque publique, la première qui ait été ouverte dans cette province. A ce précieux établissement, il joignit une fondation de prix en médailles de la valeur de six cents livres, destinées à ceux des concurrens qui réussiraient le mieux à traiter les sujets proposés sur les sciences et sur les arts. Dès que les talens eurent commencé à prendre l'essor, Stanislas, pour les diriger plus sûrement vers l'utilité publique, créa une académie nationale.

Appliqué à réparer les abus qui pouvaient compromettre le repos et la fortune de ses sujets, il voulut remédier aux inconvéniens qu'entraînent, pour les malheureux, l'administration de la justice, et fonda, à Nanci, une chambre de consultation gratuite, dont le but était de prévenir les procès, par des avis sages et éclairés. Cette institution paternelle, dont l'histoire n'offre aucun exemple, était particulièrement destinée aux pauvres; mais tous les citoyens, néanmoins, avaient le droit d'y recourir.

Une bourse de secours fut fondée pour les négocians que des pertes inévitables auraient laissés sans ressources; des sommes de mille écus à dix mille francs leur étaient prêtées pour trois années seulement. L'intérêt, de deux pour cent, était réuni au capital et l'augmentait chaque année; ainsi, le temps, qui détruit tout, ne pouvait qu'ajouter à cet acte de bienfaisance.

Une somme de cent mille écus fut destinée à dédommager les cultivateurs des pertes occasionées par la grêle, l'incendie et les maladies épidémiques. Enfin, des greniers d'abondance, établis à Bar et à Nanei, devaient préserver les malheureux des horreurs de la famine, dans les années de disette.

Pour faciliter le commerce intérieur de ses états, Stanislas fit construire des ponts et tracer des routes. Bientôt on vit s'élever de toutes parts des manufactures nouvelles. Pour seconder les efforts de l'industric naissante, des inspecteurs habiles, envoyés par le roi, parcouraient la Lorraine pour indiquer aux artistes, aux artisans en tous genres, des moyens de perfectionnement. Le prince lui-même se plaisait à visiter les nouveaux établissemens, et par ses éloges, ses encouragemens, il redoublait le zèle des entrepreneurs.

Avec lui, ce qui était un bien devenait possible; tous les malheurs étaient réparables, et c'était avec une munificence vraiment royale, qu'il

construites, la porte Saint-Stanislas et la porte Sainte-Catherine. La place Royale touchait à la Carrière, mais sans communications directes: un arc de triomphe les réunit.

A droite, en entrant sur la place Carrière, était l'hôtel de Craon, aujourd'hui le Palais-de-Justice; les bâtimens en face furent remplacés par l'hôtel de la Bourse, exactement semblable au Palais. Le reste de la Carrière se trouvait sans proportion avec ces deux édifices. Le roi voulant rendre cette place parfaitement régulière, fit construire, à ses frais, des façades uniformes à toutes les maisons. Enfin, deux nouveaux hôtels, en forme de pavillons, terminèrent des deux côtés l'alignement.

Pour achever d'embellir cette place, il fallait construire un édifice qui surpassât les autres, mais sans les effacer. On y parvint, et l'ancien péristyle, commencé par Léopold, fut remplacé par un magnifique palais.

Près de la place Royale, au lieu appelé le Potager, on s'empressa de bâtir de superbes hôtels, et le roi voulut encore faire les frais des quatre façades de la place Saint-Stanislas, ou place d'Alliance.

Parmi les nombreux édifices que Stanislas fit construire dans la capitale, et dont nous n'avons pu indiquer que les plus importans, on remarque encore de magnifiques casernes, près la porte Sainte-Catherine; le séminaire Royal des Missions, au faubourg Saint-Pierre, et près de la, l'église de Bon-Secours.

On doit ajouter que le bon prince, n'ayant en vue, dans l'exécution de ses vastes desseins, que le bien, que l'avantage de ses sujets, ne voulut employer, pour ses nombreuses constructions, que des artistes et des ouvriers lorrains, avec l'attention de choisir toujours de préférence les plus malheureux. « C'est une bonne action, disait-il, de donner du << pain au pauvre qui en manque; mais c'en est une meilleure encore de ne « le lui donner qu'à la fin de sa journée: on l'aura soustrait par-là à deux grands maux, l'oisiveté et la misère. »

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C'est ainsi que Stanislas savait réunir le double avantage d'un bien durable pour l'état et du soulagement actuel pour les malheureux aussi ces hommes reconnaissans, semblaient-ils rivaliser de zèle avec leur maître, et par cette noble émulation on vit en moins de huit années s'élever une cité nouvelle.

Bar, Lunéville, Pont-à-Mousson, Commercy, et tous les principaux lieux enfin de la Lorraine, furent embellis par les soins du roi de Pologne, tandis que plusieurs maisons de plaisance étaient en même temps construites ou réparées.

Quand on considère les immenses travaux que nous venons de décrire, on ne peut se rappeler, sans étonnement et saus admiration, les faibles ressources qui fournissaient à de si vastes entreprises! Et cependant c'était sans nuire à l'éclat du trône, à l'intérêt des peuples, que Stanislas, par un profond discernement, par un ordre admirable, savait à la fois former de grands desseins et applanir les difficultés de l'exécution.

Mais ce n'était point assez pour le prince d'avoir créé une ville nouvelle, d'en avoir embelli beaucoup d'autres, il fallait, pour satisfaire sa grande âme, que de sages institutions, d'utiles établissemens vinssent assurer le bonheur de ses sujets, ou les consoler dans leurs maux.

L'éducation de la jeunesse fixa d'abord l'attention du monarque. Il mettait au rang des grandes affaires de l'état, le soin de perfectionner l'instruction publique. Des écoles gratuites furent donc établies dans les villes principales de la Lorraine; il y ajouta, pour celle de Nanci, des chaires de mathématiques, de philosophie et d'histoire; et, afin d'aider au développement de ces connaissances utiles, il forma une bibliothèque publique, la première qui ait été ouverte dans cette province. A ce précieux établissement, il joignit une fondation de prix en médailles de la valeur de six cents livres, destinées à ceux des concurrens qui réussiraient le mieux à traiter les sujets proposés sur les sciences et sur les arts. Dès que les talens eurent commencé à prendre l'essor, Stanislas, pour les diriger plus sûrement vers l'utilité publique, créa une académie nationale.

Appliqué à réparer les abus qui pouvaient compromettre le repos et la fortune de ses sujets, il voulut remédier aux inconvéniens qu'entraînent, pour les malheureux, l'administration de la justice, et fonda, à Nanci, une chambre de consultation gratuite, dont le but était de prévenir les procès, par des avis sages et éclairés. Cette institution paternelle, dont l'histoire n'offre aucun exemple, était particulièrement destinée aux pauvres; mais tous les citoyens, néanmoins, avaient le droit d'y recourir.

Une bourse de secours fut fondée pour les négocians que des pertes inévitables auraient laissés sans ressources; des sommes de mille écus à dix mille francs leur étaient prêtées pour trois années seulement. L'intérêt, de deux pour cent, était réuni au capital et l'augmentait chaque année ; ainsi, le temps, qui détruit tout, ne pouvait qu'ajouter à cet acte de bienfaisance.

Une somme de cent mille écus fut destinée à dédommager les cultivateurs des pertes occasionées par la grêle, l'incendie et les maladies épidémiques. Enfin, des greniers d'abondance, établis à Bar et à Nanei, devaient préserver les malheureux des horreurs de la famine, dans les années de disette.

Pour faciliter le commerce intérieur de ses états, Stanislas fit construire des ponts et tracer des routes. Bientôt on vit s'élever de toutes parts des manufactures nouvelles. Pour seconder les efforts de l'industrie naissante, des inspecteurs habiles, envoyés par le roi, parcouraient la Lorraine pour indiquer aux artistes, aux artisans en tous genres, des moyens de perfectionnement. Le prince lui-même se plaisait à visiter les nouveaux établissemens, et par ses éloges, ses encouragemens, il redoublait le zèle des entrepreneurs.

Avec lui, ce qui était un bien devenait possible; tous les malheurs étaient réparables, et c'était avec une munificence vraiment royale, qu'il

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