Page images
PDF
EPUB

les haines d'une résidence en commun. Ne dis pas: Il y a une maison qui vient de mon père et de ma mère dont les noms sont dans la maison funéraire; (car) tu tombes en partage avec ton frère, et ta part à toi ce sont les dépendances. » Comme on le voit, M. Chabas a bien saisi le sens général et sa traduction donne une idée passablement exacte de la maxime égyptienne: il n'y a que des nuances de détail. Cependant je ne crois pas que la phrase

[ocr errors]

veuille dire: tu réussiras à

supprimer les haines d'une résidence en commun; le mot MAD commence une proposition subordonnée et j'ai exprimé cette relation par si. De plus dans la dernière phrase, la première proposition est la subordonnée et la proposition principale commence par qui est ici non pas le verbe subordonné, mais le verbe substantif. En effet, on ne peut traduire : tu tombes en partage avec ton frère étant ta part les dépendances; car la logique s'y oppose; mais c'est parce qu'on est partageant avec son frère, que les greniers deviennent une part. Je serais même assez porté à croire que le pluriel qui se trouve indiqué après n'est que le suffixe marquant la relation par une forme participiale et que le scribe a orthographié de la sorte ici.

s

Rien n'était plus commun en Égypte que l'indivision des propriétés immobilières quand il s'agit de maison. Les œuvres coptes nous montrent que souvent une maison était laissée indivise et occupée par les divers héritiers: les papyrus coptes du musée de Boulaq publiés par M. Revillout en fournissent une preuve péremptoire'. C'est, à mon sens, le sujet de la maxime en discussion. Le moraliste égyptien prévient celui auquel il s'adresse de se batir une maison, s'il se trouve dégoûté de la vie en commun dans une habitation indivise. Il ne faut pas

1. Cf. REVILLOUT, Actes et contrats des musées égyptiens de Boulaq et du Louvre, passim.

s'attarder à la pensée qu'on possède une maison où l'on a une part, du fait d'être héritier de son père et de sa mère; car, si l'on en vient à faire un partage qui fera cesser l'indivision, on aura des greniers, ou des dépendances, pendant qu'un frère se verra maitre de par le sort de la partie habitable. On voit donc que si cette coutume d'indivision dans la succession des parents, pour ce qui regardait les maisons, subsistait à l'époque copte, elle n'était pas moins existante dans l'ancienne. Égypte, tout au moins vers la xxIIo ou la xxii dynastie.

[merged small][ocr errors][ocr errors][subsumed][ocr errors][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small]

Mon Dieu m'ayant accordé que tu aies des enfants, (le cœur) de ton père les connaît: or, quiconque a faim est rassasié dans sa maison, je suis son mur qui le protège : ne fais point des actions où (tu montrerais) que tu n'as pas de cœur, car c'est mon Dieu qui donne l'existence'.

1. Mot à mot: Ayant donné à moi mon Dieu que soient à toi des enfants,... ton père les connaît; or, ayant faim homme quiconque, il est rassasié dans sa maison (à ton père): je suis ses murs le recouvrant: ne fais point des actions n'étant point ton cœur, étant mon Dieu donnant l'existence (ou les biens).

Cette maxime a été divisée en deux par mes devanciers: j'avais d'abord fait de même; mais la réflexion m'a montré que si je la divisais en deux maximes plus courtes, il n'y avait aucune possibilité de donner à la première de ces deux parties une forme quelconque assez générale où l'on put voir un précepte. La première partie est en effet purement affirmative: elle constate une suite de faits qui n'ont aucune apparence de généralité, mais qui se rapportent tous au même personnage. La seconde au contraire commence par une prohibition qui se rapporte évidemment aux derniers mots de la première partie. J'expliquerai comment j'ai été amené à ce sens en démontrant que les traductions qui ont été données d'abord ne se peuvent point soutenir.

M. de Rougé a ainsi traduit les deux maximes que j'ai réunies après avoir rattaché les premiers mots à la fin de la maxime précédente: « Tu as des enfants: le cœur de ton père les connaît; si l'un d'eux a faim, il le nourrit dans sa maison. » Les derniers mots de cette première maxime n'ont pas été traduits par cet illustre savant. Mais, je le demande, où y a-t-il une intention morale quelconque dans cet énoncé dephrases qui se suivent? Je ne saurais en voir. M. de Rouge traduit ainsi la deuxième partie : « Ne rends pas indigent celui qui dépend de toi ; c'est ton Dieu qui donne les biens. >> Pour revenir à la maxime qui précède, je ferai observer que ne veut pas dire maison, mais lieu où l'on conserve, comme grenier. En outre s'il fallait adopter ce sens, il faudrait supposer dans la langue égyptienne une tournure de phrase dont elle n'est pas susceptible, car il faudrait traduire ainsi cette phrase:

le mot

[ocr errors][merged small]

de maison, donné ton Dieu. Jusqu'à présent on n'a pas trouvé une seule phrase construite sur ce modèle, et tout porte à croire qu'on n'en trouvera jamais, la langue étant réfractaire à une semblable syntaxe. En outreje ferai observer

que pour traduire par donné ton Dieu les mots

comme l'ont fait tous les traducteurs de cette phrase, il ne faut ne tenir aucun compte du suffixe qui se trouve accompagnant le mot et qu'il faut prendre le mot

pour le pronom de la deuxième personne. Mais, quoique ce papyrus renferme d'assez nombreuses fautes. que j'ai fait remarquer d'ailleurs, nous n'avons pas encore trouvé d'exemple de l'emploi d'un suffixe ajouté au verbe sans raison; et il faut bien voir un suffixe dans le signe

pcar le nom d'agent de est formé d'une autre manière.

Le mot ▲, en copte est susceptible, comme tout verbe actif égyptien, de s'agglutiner les suffixes, par conséquent nulle impossibilité de ce côté; on trouve en coрte THT et TAAT. Pour le mot je sais très bien qu'on le trouve souvent écrit abusivement pour le suffixe de la seconde personne; mais il me semble que je devais tout d'abord tenter de traduire avec le suffixe de la première personne, d'autant plus que le verbe avait ce même suffixe. Or le sens obtenu ainsi, sans violenter le texte, me semble bien préférable à celui que l'on obtient en considérant le mot comme une faute et en le réduisant à, sans compter que le pronom de la première personne, à l'état absolu, se retrouve plus loin

Avançant plus loin, je ferai observer que

veut dire tous les hommes, ou tout homme, tout individu, et non pas l'un d'eux, comme a traduit M. de Rougé '. De même je ne crois pas que M. de Rougé ait lu

[ocr errors]

سلسل

[ocr errors]

car il a traduit: « Ne rends pas indigent celui qui dépend de toi. » Je ne peux pas même voir comment il a lu.

On retrouve à la fin de cette maxime le mot après 7, Dieu; je ne peux savoir comment c'était le Dieu de tel

[merged small][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

homme, plutôt que celui de tel autre qui donnait l'existence : il reste là quelque chose que je ne m'explique pas très bien, à moins qu'il n'y faille voir une assurance de dévotion particulière, ou encore que ce ne soit un reste de fétichisme mal disparu. Wy sex

[ocr errors]

M. Brugsch, qui a déjà fait rentrer dans la maxime précédente les premiers mots de celle-ci, a donné la traduction suivante de ce texte : « Les enfants de ton père savent que, lorsque quelqu'un avait faim, il le rassasiait dans sa maison, car son mur n'était pas fermé. Ne sois pas sans cœur, car Dieu est le donateur de ce qui existe. » La dernière partie de cette traduction est bonne; mais je ne saurais en dire autant de la première. M. Brugsch ne tient pas compte de la lacune qui existe entre le mot et le mot

qu'un

lacune qui est trop considérable pour n'y voir d'autant plus qu'il reste encore quelque dessin d'un signe allant de haut en bas, ce qui ne peut être le cas pour www, J'ai adopté le sentiment de M. de Rougé dans ma traduction; mais ce point n'est pas certain. Entre outre le mot

www

ne sert pas à relier deux propositions dont la seconde dépend de la première; mais il se place en tête d'une proposition, comme notre mot or. Je pense que M. Brugsch a entendu sa maison, ainsi que je l'ai fait, et qu'il a compris la maison du père. Quant à la dernière partie de la phrase, la traduction qu'il propose est impossible grammaticalement; le texte ne contient pas en effet son mur, mais ses murs ୪ et le proLinin nom suffixe qui devrait être celui de la troisième personne du pluriel est celui de la troisième personne du singulier. Il faut donc faire de ce dernier le régime du verbe, et non le sujet, comme l'a fait M. Brugsch. Le mot ne signifie pas fermer, et au passif être fermé, mais couvrir, vêtir, et au passif être couvert, étre vêtu: c'est d'ailleurs le sens du mot

« PreviousContinue »