le veux et l'approuve, ainsi que vous le voulez et l'approuvez (1). 4. Souvenez-vous que toute la gloire que vous pouvez rendre à Dieu consiste dans l'exécution de sa volonté, quoi qu'il veuille et demande de vous; car sa volonté est absolument déterminée, par une nécessité immuable, à tendre en toutes choses à l'avancement de sa gloire, et par conséquent faire une chose pour petite qu'elle soit, et en quitter une autre, quelque éclatante qu'elle paraisse, c'est également sa gloire, lorsqu'il le veut et vous l'ordonne ainsi. Ne regardez donc pas si ce que vous faites est considérable en soi, mais seulement si Dieu le veut (2). 5. Persuadez-vous que par cet important exercice vous monterez sûrement au plus haut point de l'amour divin, mais que vous n'y monterez pas tout d'un coup et qu'il y a des degrés par lesquels il faut s'y élever. Jamais personne n'a pu monter d'un seul pas tous les degrés de l'échelle (3). Personne, dit saint Bernard, ne devient parfait tout d'un coup. On n'arrive pas au haut de l'échelle en volant, mais en montant (4). Quiconque veut arriver au faîte de la perfection, doit dresser dans son cœur des degrés spirituels par lesquels il puisse monter, et s'avançant de vertu en vertu posséder en partie celui qui le possède parfaitement (5). (1) Ita pater, quoniam sic fuit placitum ante te. (2) Domine, quid me vis facere ? (3) Nemo unquam repente uno simul passu scalæ gradus ascendere potuit. Joann. Clim., gr 25. (4) Nemo repente fit summus, ascendendo non volando apprehenditur summitas scalæ. S. Bern., serm. I de S. Andr. (5) Quisquis in spirituali exercitio cupit perfectionis culmen attingere, ascensionis sibi in corde spirituales componat ТОМЕ 5. 2 6. Mais si vous voulez réussir dans cette ascension mystique, faites état de monter sans cesse jusqu'à la fin de votre vie, sans vous arrêter jamais; car, comme dit saint Laurent Justinien, le vrai amour ne se contente pas d'un degré, il tâche de monter toujours plus haut et de faire de continuels progrès dans la perfection. Et ce désir ardent de son avancement spirituel fait qu'il estime peu les vertus qu'il a acquises, au prix de ce qu'il en voudrait avoir (1). Ne tenez donc jamais ce discours qui est dans la bouche de plusieurs: Je me contente d'une vie commune, il me suffit de faire mon salut, comme font la plupart des hommes qui ne sont pas tout à fait méchants. Je ne prétends point aux mérites des apôtres, je ne prends point le vol si haut; ce m'est assez si je puis tenir le chemin le plus aisé, le plus battu et aplani (2). Ce n'est pas là le langage des vrais serviteurs de Dieu, ce n'est pas le sentiment des saints qui nous ont frayé le chemin; leur maxime constante était de marcher à grands pas vers l'éternité, sans perdre un seul moment du temps, et comme dit saint Grégoire de Nazianze, ils ne met gradas, per quos de virtute in virtutem proficiens ipsum Deum ex parte comprehendere valeat, à quo plenissimè comprehensus est. S. Laur. Just. in præm. de grad. perfect. (1) Verus enim amor gradu uno contentus non est, ad altiora semper nititur et ad perfectiora indesinenter concupiscit attingere quas habet, non magni pendit virtutes, proficiendi accensus desiderio. S. Laur. Just., de casto connub., сар. 2. (2) Mala est ista vox multorum, sufficit mihi vita communis. Si cum multis salvari potero, satis est. Nolo merita apostolorum, nolo volare per summa. Incedere per planiora contentus sum, Gerson., 3 p., tract, de myst. pract. indust. 4. taient point de bornes à leur avancement et à leur déification (1). Ier ENTRETIEN DU SECOND JOUR. CONNAÎTRE DIEU. PREMIER POINT. Ce degré est le premier et le plus nécessaire de tous dans l'échelle du pur amour. Premièrement, parce que qui connaîtrait Dieu parfaitement, se ferait aussitôt quitte de tous les vices. La claire vue de Dieu rend tous les bienhenreux impeccables; et nous nous éloignons du péché durant cette vie mortelle, à proportion que nous croissons dans la connaissance de Dieu. O mon Dieu! ô mon Seigneur! ôle Dieu de mon cœur! oh! si les hommes vous connaissaient, ils ne vous offenseraient jamais, mais ils brûleraient de votre amour, disait saint Ignace ravi en extase, élevé en l'air et environné de lumières dans les premières ferveurs de sa conversion (2). Secondement, parce que cette haute idée et cette estime de Dieu faciliterait la conquête de toutes les vertus, qui sont les vraies richesses de l'homme'; c'est le Saint-Esprit qui parle par le prophète Isaïe, et qui parle de la science de Dien: La science et la sagesse sont les richesses du salut (5). C'est ainsi (1) Nullum ascensus et deificationis modum agnoscebant. S. Greg. Naz., orat. 2 in Julian. (2) O Deus meus! & Domine mi! ô Dens cordis mei! ô si homines te nossent! numquam te offenderent, sed amarent, (3) Divitice salutis sapientia et scientia. Isa., 33, 6. qu'un saint abbé l'explique dans les conférences de Cassien, lorsqu'il dit que les richesses de notre salut consistent dans la vraie sagesse et dans la science de Dieu (1). Et saint Jérôme le dit encore plus intelligiblement: La connaissance d'un Dieu nous met en possession de toutes les vertus (2). En troisième lieu, parce que cette parfaite connaissance nous porterait bientôt au comble de la sainteté et de l'union avec Dieu; car comme la Iumière du soleil attire les yeux qui sont sains, aussi la connaissance de Dieu, dit saint Maxime, attire à soi sans violence tous les cœurs qui sont purs par le moyen de l'amour (3). C'est pourquoi saint Paul écrivant aux Colossiens, leur dit ces belles paroles: Nous ne cessons point de prier pour vous et de demander à Dieu qu'il vous remplisse de la connaissance de sa volonté, en toute sagesse et intelligence spirituelle, afin que vous vous conduisiez d'une manière digne de Dieu, tâchant de lui plaire en toutes choses portant des fruits de toutes sortes de bonnes œuvres, et croissant en la connaissance de Dieu, et qu'ainsi vous soyez entièrement remplis de force (4). En dernier lieu, cette haute idée de la grandeur de Dieu nous conduirait sûrement au port de la (t) Divitiæ salutis nostræ in vera sapientia et scientia Dei consistunt. Abbas Chæræmon apud Cass., coll. 11, c. 13. (2) Notitia unins Dei omnium virtutum possessio est. (3) Quemadmodum solis lumen sanum oculum ad se pertrahit, sic Dei cognitio puram mentem per caritatem naturaliter ad se allicit. S. Max., cant. I de carit., 32, (4) Non cessamus pro vobis orantes et postulantes, ut adimpleamini agnitione voluntatis ejus, in omni sapientia et intellectu spirituali, ut ambuletis dignè Deo, per omnia placentes, in omni opere bono fructificantes et crescentes in scientia Dei, in omni virtute confortati. Ad Collos. I, get 10. , béatitude; car d'où vient la perte déplorable de tant de pécheurs qui tombent tous les jours dans les abîmes, sinón de ce qu'ils ne connaissent point Dieu, Dieu, dis-je avec saint Augustin, que personne ne perd s'il n'est malheureusement trompé (1). Père juste, le monde ne vous connaît point (2), c'est un aveugle qui conduit des aveugles; ceux qui suivent ses maximes marchent dans les ténèbres et tournent le dos à la lumière, ils ne vous connaissent point et ne veulent pas vous connaître. Vous leur jetez de temps en temps quelque rayon de votre connaissance, mais il ne pénètre pas, il ne fait que passer comme un éclair qui leur fait fermer les yeux. Ah! s'ils vous connaissaient! ah! s'ils savaient ce que vous êtes et ce que vous leur serez dans toute l'éternité! ils changeraient bientôt de vie et sortiraient promptement du chemin de la perdition; mais parce qu'ils ne s'y appliquent pas et ne veulent pas y penser sérieusement, ils s'abandonnent sans retenue à toutes sortes de vices, qui les précipitent enfin dans la damnation éternelle (3). SECOND POINT. Tout ce qui est en Dieu est souverainement grand et mérite que tous les esprits s'occupent à le connaître et à l'admirer. Mais il y a certains attributs dont la connaissance vous est plus nécessaire. C'est pourquoi vous devez les méditer souvent et tâcher d'en augmenter tous les jours l'estime selon le conseil de saint Paul (4.). En voici douze sur lesquels (1) Deus, quem nemo amittit nisi deceptus. (2) Pater juste, mundus te non cognovit. (3) Quia nullus intelligit, in æternum peribunt. Job., 4, 20. (4) Crescite in cognitione Dei. |