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37.22.

A.7 plupart de ceux des Apôtres que l'Ecriture 10. 37 nous rapporte font voir que leurs difputes 13.-17. contre les Juifs, & les inftructions qu'ils donnoient aux Payens, étoient toujours fondées fur la déduction des faits. Il falloit faire fouvenir les Juifs de ce que Dieu avoit fait pour leurs Peres, & de ce qu'il leur avoit promis, pour leur en montrer l'accompliffement: & il falloit enfeigner aux Infideles que Dieu avoit créé le monde; qu'il le gouvernoit par fa providence, & qu'il avoit envoyé un homme extraordinaire pour le juger.

le

Nous voyons la mê e conduite dans les fiecles fuivans. Entre les ouvrages des Peres, nous avons grand nombre d'inftructions pour ceux qui fe vouloient faire Chrétiens. Elles font la plupart fondées fur les faits, & le corps du difcours eft d'ordinaire une narration, de tout ce que Dieu a fait pour genre humain, depuis l'origine du monde De Jufqu'à la publication de l'Evangile. Rien n'eft plus clair que ce que S. Auguftin en a n. écrit, dans le livre de la vraie Religion; & 13 de dans celui qu'il a compofé exprès de la maCatech. niere dont on devoit catechifer les ignorans. Rud, Il parle toûjours de narration: il fuppofe

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toûjours que l'inftruction doit fe faire en racontant des faits, & les étendant plus ou moins, felon leur importance & la capacité du difciple: Et le modéle de Catechifme qu'il donne lui-méme à la fin de ce traité, eft un abregé de toute l'hiftoire de la Religion, mêlé de diverfes reflexions. Il est vrai qu'il ne parle que de l'inftruction des perfonnes raifonnables, qui ayant passé une partie de leur vie hors de l'Eglife, demandoient à être

inftruits de la Religion Chrétienne : il ne parle point des enfans bâtifez; & ni dans ce Pere, ni dans aucun autre, nous ne voïons point de Catechifme pour eux. Cela vient de ce que ceux qui étoient bâtifez en enfance, étoient enfans de Chrêtiens, qui avoient été eux-mémes bien inftruits avant que d'être bâtifez; & qui enfuite avoient grand foin d'inftruire leurs enfans chez eux & de les mener à l'Eglife, où ils affiftoient aux Catechifmes de ceux qui demandoient le Bâtême. Ainfi l'hiftoire de la Religion, & toute la Doctrine Chrêtienne leur étoit tant de fois repetée, & en public & en particulier; qu'ils ne pouvoient manquer de la bien fçavoir, pour peu qu'ils y euffent d'affection. Il ne faut pas douter neanmoins, que l'inftruction des enfans bâtifez, n'ait toûjours commencé d'une autre maniere que celle des Catechu menes plus âgés. Avant que de donner le Symbole à ces derniers & leur expliquer les Myfteres, il falloit les preparer par plufieurs difcours pour s'affurer de leur conversion; & pour leur infpirer la foûmiffion qui eft dûe à l'autorité de l'Eglife: en forte qu'ils, faflent prêts a recevoir fans examen toutes les veritez qu'elle leur propoferoit à croire. Les enfans bâtifez n'avoient pas befoin de ces preparations. Ils avoient dèja la foi: Ils avoient la docilité: non feulement par ia credulité naturelle à leur âge, qui n'eût produit tout au plus qu'une fof humaine; mais par

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grace du Bâtême, qui leur avoit imprimé dans l'efprit l'autorité de Dieu & de fon, Eglife. Ainfi on leur enfeignoit d'abord le Symbole comme nous faifons encore: mais

Concil.

on étoit bien plus foigneux que nous ne fommes de le leur expliquer; & de fortifier leur foi par toutes les inftructions que j'ai marquées, & dans les maisons & à l'Eglife.

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Ileft à croire que cette maniere d'inftruire a duré tant que l'ancienne difcipline de l'Eglife s'eft confervée; c'est-à-dire, jufques vers le neûviéme fiecle: puis que l'on void durer jufques à l'ufage de Catechifer & d'examiner plufieurs fois pendant le Carême ceux que l'on devoit bâtifer à Pâques. Mais enfin, comme on ne bâtifoit prefque plus que des enfans, ces inftructions publiques degenererent en formalitez: & la mifere des têms ayant introduit une grande ignorance, même dans le Clergé, l'inftruction effective Capit. fut fort negligée. L'on fut reduit à ordonan,802 ner en plufieurs Conciles, que les Evêques 6.15 & les Prêtres enfeigneroient aux peuples du Ma moins le Symbole & l'Oraifon Dominicale. gunt. Par-là ils marquoient tout le Catechisme. an.813 Expliquer ou donner le Symbole felon les Can.45 anciens, c'eft catechifer, parce que le Symbole eft l'abregé de toute la Doctrine. En effet, ces Conciles veulent, que l'on envoye les enfans aux écoles pour recevoir cette inftructions: ce qui feroit inutile, s'il ne s'agiffoit que de retenir par coeur ce peu de paroles: & ils veulent les Fidéles apprenque nent le Symbole & l'Oraifon au moins en leur langue vulgaire, afin qu'ils l'entendent ; & en forte qu'ils pûffent l'enfeigner aux autres. Depuis ce têms-là, c'est-à-dire, environ depuis le dixiéme fiecle, on s'eft reduit à cette maniere d'inftruction: & l'on a crû, que pourvû que les Chrêtiens entendiffent

mediocrement le Symbole, ils pouvoient fe paffer, pour la piûpart, de la connoiffance des faits que les anciens étoient fi foigneux de leur raconter. Cependant, quand nous n'aurions pas l'autorité de l'Ecriture, & les exemples de tant de fiecles: il feroit aifé de voir, que la narration & la deduction des faits, eft generalement parlant, la meilleure maniere d'enfeigner la Religion.

On peut à la verité, prouver par des raifons convainquantes, qu'il y a un Dieu Créateur de toutes chofes; qui les conferve & les gouverne par fa providence; que la nature humaine eft corrompuë, que l'ame eft immortelle, & qu'elle ne peut trouver de bonheur en cette vie. Les Peres l'ont fait quelquefois, & le devoient: ayant à convertir les hommes en âge de raifon, & fouvent des Heretiques ou des Philofophes. C'eft de cette efpece de Catechifme dont S. Gregoire de Nyffe nous a donné un excellent modéle, Mais les enfans & la plupart des hommes groffiers & peu attentifs, ne font point capables d'entendre & de fuivre ces raifonnemens. Ceux mêmes qui raifonnent le mieux, ne peuvent arriver à ce qui eft au-deffus de la raifon; comme la Trinité, l'Incarnation, la Prédestination; en un mot, les Mystéres : dont toutefois la connoiffance eft neceffaire, pour nous faire voir ce que nous devons à Dieu. C'eft pourquoi Dieu, qui nous connoît parfaitement, a fondé la Doctrine de fa Religion fur des preuves dont tous les hommes fuffent capables; c'est-à-dire fur des faits: & fur des faits évidens, illuftres, fenfibles; tels que font la création du monde, le peché du

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premier homme, le déluge, la vocation d'Abraham, la fortie d'Egypte.

Afin que la verité de ces faits ne pût être revoquée en doute, par ceux qui ne les auroient pas vûs; Dieu a de têms en têms, rendu témoignage à ceux qui les racontoient par d'autres faits extraordinaires ; c'est-à-dire, par des miracles, tels que ceux de Moïfe, & des Prophetes, & enfin de Jefus-Chrift & de fes Difciples. En forte que pour croire à ceux que Dieu a envoiez, il n'a été befoin que de ce raifonnement fi facile: Il faut bien que ce foit Dieu qui nous parle par ces hommes, puis qu'en fon nom ils reffuscitent des morts, & font d'autres merveilles que lui Joan. feul peut faire. C'eft ainfi que l'aveugle né 9. 33. raifonnoit fur les miracles de Jefus - Chrift: & faifoit le même raiionnement que Nicodéme Docteur en Ifraël.

Joan.

3. 2.

Cette maniere d'inftruire n'eft pás feulement la plus feure & la plus proportionnée à toutes fortes d'efprits, c'eft encore la plus facile & la plus agreable. Tout le monde peut entendre & retenir une hiftoire, où la fuite des faits engage infenfiblement, & où l'ima gination trouve prife: & quoi que plufieurs fe plaignent de leur memoire, elle est toutefois moins rare que le jugement. Delà vient la curiofité pour les nouvelles, l'amour des romans & des fables. Sur tout, ce font les enfans qui en font les plus avides, parce que tour a pour eux l'agrément de la nouveauté: & comme d'ailleurs les perfonnes âgées aiment naturellement à raconter les faits dont ils ont la memoire pleine: rien ne feroit fi facile que d'inftruire les enfans dans la Reli

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