Page images
PDF
EPUB

(Mercredi 24 mars 1819.)

(No. 482).

CEuvres de Bossuet, évéque de Meaux, revues sur les manuscrits originaux, et sur les éditions les plus correctes. 11. livraison, comprenant le Discours sur l'Histoire universelle, et la suite des lettres (1).

"Lorsque Bossuet, dit son illustre historien, conçut la première pensée de son Discours sur l'Histoire universelle, il né se proposa d'abord que de donner un abrégé de l'histoire ancienne, pour que M. le Dauphin pat conserver plus facilement le souvenir de ce qu'il en avoit appris. Les réflexions qui devoient en être le résultat étoient réservées pour servir de Préface à ce tableau historique. Mais Bossuet ayant fait lire cette Préface à des amis éclairés qu'il étoit dans l'usage de consulter, ils l'engagerent à donner plus d'étendue à ces réflexions. C'est ainsi que ce qui n'étoit dans le premier plan qu'un accessoire, devint dans l'exécution l'objet principal et important. Ce sont en effet ces réflexions qui ont donné un si grand caractère au Discours sur 'Histoire universelle, Cent trente ans se sont écoulés depuis qu'il a paru; et l'admiration, loin de s'être épuisée, s'accroît chaque jour encore à la lecture de ce magnifique ouvrage.

Une grande leçon a été donnée an monde, et de grandes réputations, des systêmes séduisans dont le danger et là tómérité se cachoient sous le charme de la parole, n'ont på résister à cette terrible expérience. Lois, mœurs, opinions, habitudes, tout a été renversé et détruit. Tout a change de face en Europe depuis que Bossuet a parlé, et Bos suet est resté debout au milieu de tant de ruines. Il semble

(1) Tomes XXXV, XXXIX et XI; prix, pour les souscripteurs, 15 fr. 75 c. A Versailles, chez Lebel; et à Paris, chez Adrien Le Clere.

On vend séparément le Discours sur l'Histoire umiver selle; gros vol. in-8°.; prix, 6 fr. et 8 fr. franc de port. Tome XIX. L'Ami de la Religion et du Ro1.

MY

t

même s'être agrandi dans l'imagination de tout ce que les autres ont perdu dans l'opinion. Il avoit écrit l'histoire de la chute des empires qui l'ont précédé, et en la lisant aujourd'hui, on croit lire le récit prophétique des temps qui l'ont suivi. Au milieu de tant de vicissitudes, au bruit de ce fracas effroyable d'empires et de trônes qui tombent les uns sur les autres, les sages restent immobiles et tranquilles; ils se confient avec Bossuet en cette providence qui n'a promis l'éternité qu'à un seul empire, à la religion.....

» A la vue de ce superbe monument, un cri d'admiration retentit d'un bout de l'Europe à l'autre. Le plan et l'exécution s'élevoient au-dessus de toutes les rivalités nationales, de tous les préjugés de parti et de toutes les différences d'opinions. Ce n'étoit pas un ouvrage de controverse ou de circonstance. On n'y cherchoit pas le foible intérêt d'un point d'histoire, d'une découverte nouvelle dans les arts ou dans les sciences, d'une question de philosophie ou de littérature. Bossuet avoit voulu parler à tous les siècles, à tous les pays, à toutes les communions. Il avoit embrassé dans ce vaste tableau de l'histoire du monde tout ce qui doit exalter l'ame et l'imagination par la grandeur des élémens, la magnificence des images, et la majesté des oracles qu'il avoit puisée dans les livres sacrés. Par une espèce de prodige qui sembloit communiquer à son style l'éclat et les figures du langage des prophetes, il avoit donné à la sagesse et à la raison tous les accens du génie et de l'inspiration. En enchaînant tout l'ordre des événemens qui ont changé si souvent la face du monde, à l'ordre immuable des desseins de Dieu pour l'établissement de la religion, Bossuet donnoit au christianisme la plus auguste des sanctions, et il devoit réunir le suffrage de toute l'Europe, parce qu'alors dans l'Europe tout étoit chrétien ».

Nous ne pouvions sans doute choisir un appréciateur plus élégant et plus judicieux du mérite d'un des chefs-d'œuvre de Bossuet. Nous ne devons point d'ailleurs insister sur les détails d'un onvrage si connu. On sait que Bossuet a divisé son Discours en trois parties; la première partie contenant les époques ou la suite des temps, la seconde partie qui renferme la

suite de la religion, et la troisième consacrée aux révolutions des empires. Dans 150 pages, il retrace rapidement les principaux faits de l'histoire du monde depuis la création jusqu'à Charlemagne, et dans le reste du Discours, il fait voir l'action coustante de la Providence dans les vicissitudes du monde, et la fin qu'elle s'est proposée, savoir l'établissement du christianisme. Il lie l'histoire des empires à celle de la religion. Pendant que vous les verrez tomber presque tous d'eux-mêmes, dit-il, et que vous verrez la religion se soutenir par sa propre force, vous connottrez aisément quelle est la solide grandeur, et où un homme sensé doit mettre son espérance; et c'est par cette conclusion si simple, mais si frappante, que Bossuet termine ce magnifique Discours.

n'a

Le tome XXXV, qui renferme ce Discours, point paru à son rang; mais les souscripteurs ne seront ni surpris ni fâchés de ce retard, quand ils en connoîtront la cause. L'éditeur la fait connoître dans une excellente Notice sur les différentes éditions du Discours, et sur les corrections et additions. que Bossuet y avoit faites. Cette Notice ne peut manquer d'intéresser les bibliographies, et les amis de la gloire de Bossuet sauront gré à l'éditeur de son exactitude et de ses soins pour la perfection d'un si bel ouvrage. On se fera une idée de ses recherches recherches par l'extrait que nous allons donner de sa Notice.

[ocr errors]

Le Discours sur l'Histoire universelle, achevé en 1679, fut publié, pour la première fois, en 168, en 1 vol. in-4°. Il paroît qu'on en fit la même année une contrefacon, in-12, en Hollande. En 1682, il y en eut à Paris une seconde édition, in-12, qui n'est guère qu'une réimpression de la première, avec

M a

[ocr errors]

quelques corrections, et une troisième édition fut encore mise au jour, dans le même format, en 1700. Laissons ici parler l'éditeur:

« Cette édition est la derniere qui ait été donnée du vivant de Bossuet, et qu'il ait revue. Elle differe des précédentes en ce que la seconde partie, qui n'a que treize chapitres dans les deux premières éditions, est divisée en trente chapitres dans la troisième. Le dernier chapitre de l'ouvrage aussi partagé en deux; ce qui donne huit chapitres à la troisième partie, au lieu de sept qu'elle avoit auparavant. L'auteur, en revoyant son livre, y corrigea plusieurs fautes de dates et de citations, retoucha le style en divers endroits, et y fit beaucoup d'additions, principalement sur l'inspiration des livres saints. On a suivi cette édition dans la collection de ses OEuvres; Paris, 1743 et 1748, in-4"., et dans les éditions faites séparément du Discours sur l'Histoire universelle, depuis 1707 jusqu'en 1741. Mais, en 1753, les libraires de Paris, qui avoient le privilége de cet ouvrage, au lieu de continuer à le réimprinier d'après l'édition de 1700, reprirent celle de 1681, et ont persisté à la suivre jusqu'à présent. Les éditions de Didot pour l'éducation du Dauphin; celle que le même imprimeur publia, en 1814, parmi les meilleurs ouvrages de la langue françoise, et autres imprimées avec tant de luxe, où Pon eût dû s'appliquer à donner le texte le plus correct, ne sont pareillement que des copies de la première édition, et on y a onis les additions et les corrections faites par Bossuet dans la troisième, Mais l'abbe Ledieu, son secrétaire, nous apprend que dans les dernières années de sa vie, l'évêque de Meaux ne cessoit de revoir son onvrage. Le fruit de ce dernier travail est un grand nom‐ bre d'alditions importantes, qu'on a entièrement écrites de sa main, et dont le but est de mettre dans un nouveau jour les preuves de l'authenticité des livres saints, et la liaison' qu'ont entre eux l'ancien et le nouveau Testament. Le morceau le plus considérable est, un chapitre entier, le xxıxa. de la seconde partie, avant pour titre : Moyen facile de remonter à la source a la religion, et d'en trouver la vérité dans son principe. Ces fragmens étoient restés jusqu'à nos jours ensevelis dans un profond oubli. Ils furent imprimés pour la premiere fois, sous le titre assez impropre do Fariantes, et

confondues avec les additions faites en 1700, à la fin de l'édition stéréotype d'llerhan, en 4 vol. in-18; Paris, 1806 ».

Mais réléguer ainsi ces additions à la fin, n'étoit point remplir le veu de Bossuet, qui bien évidemmment vouloit qu'elles fussent insérées dans le corps du Discours, puisqu'après chaque morceau il a pris soin de marquer les premiers mots de la phrase suivante. Le nouvel éditeur s'est donc conformé à ses intentions, en insérant les additions aux endroits indiqués dans le manuscrit; cette insertion n'a exigé que la substitution d'un petit nombre de mots marqués par l'auteur même, et la suppression de quelques lignes. L'éditeur a de plus vérifié toutes les dates et confronté les citations, et il termine sa Notice par le tableau des corrections et additions qu'il a fait entrer dans le texte. Parmi les additions, il y en a que Bossuet n'avoit faites qu'après l'édition de 1700, et qui étoient restées jusqu'ici manuscrites. Elles paroissent pour la première fois dans le Discours à la place que l'auteur leur avoit assignée, et l'on peut dire que cette édition est la première qui soit complète, et qui soit donnée dans l'état où Bossuet avoit mis son ouvrage par sa dernière révision.

En 1806, Herhan, publia, en 2 vol. in-18, une. Continuation du Discours sur l'Histoire universelle ;c'est une table chronologique qui commence au couronnement de Charlemagne, et finit en 1661. Il est vrai que Bossuet avoit rédigé cet abrégé en tout ou en partie; les manuscrits qui ont servi à l'impression, et où l'on voit des pages entières et des corrections de sa main, ne permettent pas d'en douter, Mais il faut avouer aussi que ce n'est qu'un canevaş sec et informe, sur lequel illustre prélat se propo

« PreviousContinue »