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Le psaume 2 est un véritable édit de Jéhovah, publié par David, par lequel, aussi loin que s'en étende le retentissement, il est enjoint à tous de reconnaître que David est devenu l'héritier du Royaume, non plus seulement par faveur et par grâce, mais par droit de naissance, EN QUALITÉ DE FILS:

« Pourquoi les nations agissent-elles bruyamment? Pourquoi les peuples méditent-ils ce qui est vain?

« Des rois de la terre se lèvent; des princes se consultent ensemble.

« Brisons leurs liens (disent-ils); rejetons de dessus. nous leurs chaînes.

« Mais Il rit, Celui qui habite dans le ciel; le Seigneur se moque d'eux.

« Alors il leur parle dans sa colère; et dans sa fureur il porte parmi eux l'épouvante.

« C'EST MOI (dit-il), QUI AI SACRÉ MON ROI SUR Sion, ma MONTAGNE SAINTE. »

« Et moi, David, je publie l'ordonnance. Jéhovah m'a dit : «TU ES MON FILS, MOI JE T'AI ENGENDRÉ AUJOUR

D'HUI. >>

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Demande-moi, et je te donnerai des nations pour

héritage, et les limites de la terre seront ta posses

sion. >>

"Tu les briseras avec un sceptre de fer; tu les met

tras en pièces, comme on brise le vase du potier. »

<< Et maintenant, rois, comprenez; humiliez-vous, juges de la terre.

<< Servez Jéhovah avec crainte, et ne vous réjouissez qu'avez tremblement.

« Rendez hommage au FILS (72), de peur qu'il ne s'irrite et que vous ne périssiez sur la voie. Quand soudain sa colère s'enflamme', heureux ceux qui se confient en lui. »

Si l'on jugeait de ce qu'était alors la nation juive par ce qu'elle a été depuis; si l'on faisait remonter jusqu'à cette époque sa fidélité exemplaire à un Dieu unique, on devrait incliner à croire que la publication d'un tel écrit n'a pu être suivie d'une prise de pos session tant soit peu sérieuse de la qualité que David s'y donne. Mais il faut se rappeler que le monothéisme de ce peuple était alors aussi hésitant qu'il s'est montrẻ ferme et inaltérable plus tard. La versatilité et l'indifférence presque générales enlevaient donc aux paroles et aux actes du roi une grande partie de leur gravité.

A part ces quelques représentants d'une orthodoxie encore mal définie que nous avons déjà signalés, la masse de la nation devait s'inquiéter assez peu de ce qui se passait entre Jéhovah et son messie, et il n'y a pas beaucoup d'intérêt à se demander aujourd'hui ce que les contemporains de David pensaient de ses essais

de divinisation. Il nous importe peu en vérité de savoir à quel point ses ennemis s'émouvaient de ses menaces et ses amis de ses promesses : quant aux menaces, elles correspondaient si bien à telle ou telle occasion connue d'irritation et de rancune et en marquaient si exactement les degrés; elles étaient devenues, d'ailleurs, si contradictoires entre elles par le luxe intempérant de leurs détails, qu'elles avaient dû, ce semble, cesser dès longtemps de préoccuper ceux qui en étaient l'objet. Pouvaient-ils, en effet, s'effrayer beaucoup de se voir condamner, suivant les dispositions changeantes de l'imagination royale, tantôt au simple anéantissement, seule destinée connue de leurs pères, tantôt à la persistance de la sensibilité de leur chair en proie aux vers du sépulcre, tantôt à la transformation de

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cette chair en une sorte d'asbeste animé, éternellement exposé aux cruelles atteintes du feu? Si les abondants produits de cette imagination parvenaient à trouver créance en quelques esprits, c'était plutôt sans doute parmi ceux qui se voyaient appelés par le roi à prendre part à l'héritage éternel dont il se disait investi. Nous l'avons vu, en effet, affecter en dernier lieu d'associer à ses rêves d'immortalité ceux de ses sujets qui lui resteraient fidèles. Mais il est bien évident que ce n'est que du temps seul et des lentes modifications qu'il opère, que ces idées étranges ont pu recevoir leur consécra

tion; et c'est bien moins en raison de leur intérêt contemporain que de celui qu'elles devaient acquérir plus tard, qu'il convient de retracer ici le tableau abrégé des destinées diverses que le fils de Jéhovah promettait aux élus et aux maudits de son Père 1.

<< Heureux l'homme qui ne s'est point laissé aller à suivre le conseil des impies (y), qui ne s'est point arrêté dans la voie des pécheurs (IND), et qui ne s'est point assis dans la chaire des libertins (□)... II sera comme un arbre qui est planté proche le courant des eaux, lequel donnera son fruit dans son temps, et dont la feuille ne tombera point; toutes les choses qu'il fera auront un heureux succès. Il n'en est pas ainsi des impies (2); ils sont comme la poussière que le

1. Afin de faciliter les vérifications, nous suivrons dans les passages que nous allons citer l'ordre même des psaumes (selon le canon chrétien), et nous adopterons, ici seulement, la traduction qui est dans toutes les mains, c'est-à-dire celle de Sacy. Il est fort douteux que ces fragments soient tous de David; ce qui est bien certain, c'est que tout ce qui a concouru à former ce cycle littéraire lui appartient en réalité de près ou de loin, en tant que procédant uniquement d'idées qui lui sont propres.

2. Donnons une fois pour toutes l'idée du genre d'inexactitude qui caractérise cette traduction. Le mot y traduit ici par «<impies, »> veut proprement dire « perturbateurs. » Le mot N s'adresse à cette espèce particulière de pécheurs qui donnent de l'inquiétude aux souverains, parce qu'ils ne savent pas demeurer en repos. Enfin veut dire «persifleurs, » et non pas « libertins. » Le mot p que Sacy traduit plus bas par «ressusciteront, » ne signifie probablement que « se lèveront, résisteront. >>

vent emporte de dessus la face de la terre. C'est pourquoi les impies ne ressusciteront point (p) dans le jugement, ni les pécheurs dans l'assemblée des justes. » (Ps. 1.)

((...

<«< Que votre main s'appesantisse sur tous vos ennemis; que votre droite se fasse sentir à tous ceux qui vous haïssent. Vous les embraserez comme un four ardent, au temps où vous montrerez votre visage; la colère du Seigneur les jettera dans le trouble et le feu les dévorera.» (Ps. xx.) Que je ne sois pas semblable à ceux qui descendent dans la fosse. Le Seigneur est mon aide et mon protecteur; mon cœur a mis en lui son espérance, et j'ai été secouru; ma chair même a refleuri. C'est pourquoi je le louerai de tout mon cœur. Le Seigneur est la force de son peuple, et le protecteur qui sauve son Christ1 en tant de rencontres. Sauvez, Seigneur, votre peuple; bénissez votre héritage; conduisez-les et élevez-les jusque dans l'éternité. » (Ps. XXVII.)

«Le Seigneur est proche de ceux dont le cœur est affligé; il sauvera les humbles d'esprit. Le Seigneur garde exactement tous leurs os; un seul de ces os ne pourra être brisé.» (Ps. XXXIII.)

<< Vous sauverez, Seigneur, et les hommes et les

1. Christ, messie, oint, nous avons dit que tous ces mots sont synonymes. Sacy, tout pénétré du sens prophétique qu'il attribue à ce passage, veut rendre ce sens encore plus net, en employant ici le mot qui n'a eu depuis qu'une seule application.

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