du premier siècle, celui des Nazaréens, par exemple, ont été moins défigurés que ceux du second, ceux du second moins que ceux du troisième; le lecteur comprendra la valeur d'un pareil fait. Nous avons donc trouvé dans la réunion de ces documents et dans leur comparaison une deuxième histoire de Jésus; 3o La vie de Jésus-Christ par les témoignages des Juifs eux-mêmes. En réunissant ce que le Talmud et les anciens écrits des Juifs nous ont conservé sur Jésus d'une part, et ce que les Pères des premiers siècles nous ontappris de leurs accusations contre les chrétiens de ce temps-là de l'autre, on voit qu'ils sont loin d'avoir perdu la mémoire de ce qui arriva en Judée du temps de Notre-Seigneur. Par cette juxta-position de documents, nous apprenons d'eux le lieu de la naissance de Jésus-Christ, sa fuite en Égypte, les merveilles de sa vie et toutes les principales circonstances de sa passion. Ces récits, sans doute, sont assaisonnés d'injures et d'anachronismes, car depuis que les Hébreux ont manqué à leur mission, ils ont cessé d'être un peuple de bonne foi. Ils ne savent plus écrire l'histoire, mais Dieu a permis qu'ils en aient écrit et dit assez pour nous éclairer parfaitement sur la réalité des faits racontés dans les Évangiles ; 4o Il y a aussi une histoire de Jésus-Christ racontée par les païens. Celle-ci est connue déjà de la plupart des lecteurs. Les témoignages en sont courts, mais péremptoires. Nous n'avons pas à les apprécier ici; 5o Une cinquième histoire de Jésus-Christ se compose de deux sortes de témoignages qui se tiennent par la main. C'est la géographie et l'archéologie. La vue des lieux, l'histoire et l'authenticité des reliques attestent la véracité de certains faits de la vie, de la mort, de la résurrection de Jésus-Christ; l'existence et la provenance de certains objets qui remontent à lui et aux apôtres, sont demeurées connues et incontestables pendant plusieurs siècles, et même quelques fragments de ces objets sont parvenus jusqu'à notre temps. Qu'on le sache bien, nous avons été réservé en cette matière. Nous n'avons nullement besoin de prouver l'authenticité de toutes les reliques qui ont la prétention de remonter au premier siècle. Il suffit que nous ayons des témoignages historiques et irrécusables pour prouver l'existence d'un grand nombre d'objets qui ont servi à Jésus-Christ et qui existaient encore du temps de Constantin, à la paix de l'Église; tout le reste nous importe beaucoup moins. Nous sommes sûrs que le lecteur trouvera que ces faits réunis nous apprennent à leur manière une grande partie de la vie de Jésus-Christ et ses principales merveilles, sans laisser aucun doute dans l'esprit; 6. Nous avons encore une sixième vie de Jésus-Christ. C'est un cinquième Évangile qu'on pourrait appeler canonique et qui vient doubler saint Mathieu, saint Luc, saint Marc et saint Jean. On a dit et redit de notre temps que les Évangiles n'avaient reçu leur rédaction qu'à la fin du no siècle. C'est une manœuvre de l'érudition perfide de plusieurs savantscontemporains, qui essaient de mettre une période de temps assez longue entre la composition des écritures canoniques et le moment où se passèrent les événements racontés, afin d'avoir un prétexte de supposer que le mythe, l'exagération et la fable ont pus'y glisser dans l'intervalle. Cette prétention est déjà ruinée par le seul fait que toute l'antiquité a cru que les Évangiles ont été composés par les apôtres et les évangélistes. Les noms qu'ils portent et qu'ils n'ont jamais cessé de porter, l'aveu même des païens et en particulier de Julien sur ce point, sont décisifs et forment une condamnation de cette infâme hypothèse dont les auteurs ne peuvent se relever. Mais voici une démonstration palpable de l'absurdité de cette machination historique. Nous avons recueilli avec une longue et persévérante patience tous les textes des quatre Évangiles disséminés dans tous les saints Pères qui ont écrit avant la clôture du no siècle. Quelques-uns de ces auteurs sont encore du premier siècle, plusieurs du commencement, et le plus grand nombre de la fin du 119. Nous ferons cette remarque sur les saints Pères qui écrivaient à la fin du 11o siècle, qu'en citant les Évangiles, ils mentionnent que ces Évangiles ont été réellement rédigés par les apôtres Mathieu, Jean, et les deux autres évangélistes. Les citations des écrivains antérieurs démontrent d'ailleurs qu'il en est ainsi. Nous remarquerons en second lieu que nous ne prenons ces citations que dans des écrits dont on ne peut pas récuser l'authenticité, comme on le verra en son lieu. Or, dela réunion de ces textes nous avons formé un nouvel Évangile, ou plutôt nous avons reproduit les quatre Évangiles presque dans toutes leurs parties, de telle sorte au moins que les quatre versions réunies présentent à peu près un texte aussi abondant que ce que nous appelons une harmonie des quatre Évangiles. Ces témoignages sont distribués comme dans les textes de saint Mathieu, saint Luc, etc., par ordre de chapitres et de versets. Sans doute le lecteur attentif remarquera que la traduction latine du texte grec des Évangiles que nous citons, n'est pas ordinairement mot pour mot conforme au texte latin de la Vulgate. Les Pères latins dans leurs citations faisaient eux-mêmes la traduction tout en citant les passages. Mais il est impossible de ne pas reconnaître la rédaction définitive des Évangiles dans les citations, même dans celles de saint Clément pour ses œuvres les plus authentiques. Il ressort donc de ces rapprochements, de cet ensemble de citations, unmonument qui se dresse contre les agresseurs malavisés de ce temps, lesquels se réjouissaient de pouvoir affaiblir l'autorité de nos saints Évangiles; ce monument les confond et les réduit au silence. Nous répétons que nous n'avons puisé nos citations qu'en lieu sûr et dans des écrits reconnus de tout temps pour appartenir aux auteurs auxquels on les attribue, comme saint Clément, Hermas, etc. Nous ne nous sommes pas servi des Clémentines, ni des autres livres de saint Clément qui ont passé par des mains corruptrices du texte primitif. Cependant, à vraj dire, on aurait quelque droit de le faire, car il est très-présumable que les mutilateurs ont respecté les citations prises dans le texte sacré; et d'ailleurs les modifications faites aux œuvres apocryphes de saint Clément, remontent à une haute antiquité, à un temps assez voisin de ce successeur desaint Pierre. Quoiqu'il en soit, nous n'en avons pas usé, afin de rester complétement en règle en face de la critique. Nous avons d'un autre côté admis les citations qui se trouvent dans les œuvres de saint Denys l'Areopagite, mais c'est à bon droit, parce que nous avons solidement établi, croyons-nous, que ces œuvres sont vraiment du glorieux disciple du grand Paul, et nous ne pensons pas qu'il puisse être permis dorénavant d'avoir un autre sentiment, sur ce temps, qu'au moyen âge et dans la primitive Église. On sait maintenant que la réaction contre l'Aréopagite, il y a trois siècles, était une déloyale habileté des novateurs, qui a trouvé quelques imprudents complices dans les rangs catholiques. Mais le temps de la réhabilitation est venu. Quelques versets seulement ont été pris dans la lettre encyclique des prêtres et des diacres d'Achaïe. Ceux à qui cette citation plairait peu, à cause des difficultés que certains savants ont soulevées à l'occasion de l'authenticité de cette pièce, nous leur dirons: supprimez-là. Cette légère soustraction à notre travail laisse subsister l'effet produit. Mais nous donnons le conseil à ces austères critiques de vouloir bien réviser les jugements portés contre l'authenticité de ce document. Après avoir examiné les pièces, il nous a paru que les plus graves difficultés disparaissaient et qu'il ne restait que les signes de la garantie de son origine. La question est bien posée et bien résumée dans le t. II de la Patrologie grecque de M. Migne, col. 1198. Nous ne pouvons signaler que quelques considérations les plus importantes. Repoussons d'abord quelques objections. Florentin a fait une grosse difficulté avec cette phrase de saint Jean Chrysostome: Les sépulcres de Pierre, de Paul, de Jean, de Thomas, sont connus, mais ceux des autres ne le sont pas. Lequien a parfaitement répondu qu'au temps de saint Chrysostome, le tombeau de saint André en Achaïe n'existait plus depuis le moment où Constantin avait rapporté les restes de ce saint apôtre à Constantinople. Mais la plus forte objection vient du mot Τρίας, la Trinité, dont se servent les rédacteurs. On a dit que cette expression n'était pas encore d'usage alors. Cette difficulté qui a paru très considérable aux yeux de plusieurs savants, nous paraît des plus faibles. Quoi ! on ose dire que personne ne s'est servi de ce mot dans les premiers siècles! mais il ne nous reste qu'une faible portion des écrits de l'âge apostolique, de l'âge qui l'a immédiatement suivi. Où sont les œuvres complètes de Papias, d'Aristide, d'Hégésippe, d'Aristide, de Pellée, etc. Et d'ailleurs, on trouve ce mot dans Denys d'Alexandrie, Grégoire de Néocésarée, Origène qui est plus ancien qu'eux, Clément d'Alexandrie qui est plus ancien qu'Origène, Théophile d'Antioche; et parmi les Latins, il faut ajouter deux témoignages des plus anciens, celui de Tertullien et celui des actes authentiques de saint Fructueux. Il est visible que dans le premier siècle et au commencement du second, quand on parlait de la sainte Trinité, on nommait les trois personnes divines comme dans la formule du baptême. Le mot Trinité est l'abrégé de ces trois divines expressions. On s'en est sans doute servi quelquefois alors, mais l'usage général était de prononcer le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il est naturel qu'ensuite l'expression abrégée et plus rapide ait bientôt cherché à prévaloir pour la facilité du dis cours. On a aussi argué contre cette lettre de ce qu'il y est dit que le SaintEsprit procède du Père et demeure dans le Fils. On a légitimement répondu que ce n'était pas une erreur. Cette formule n'est pas la plus heureuse pour exprimer ce dogme, néanmoins elle ne contient pas l'erreur des Grecs plus modernes. D'ailleurs les prêtres et les diacres d'Achaïe ne sont pas donnés pour un concile général. Voici une nouvelle objection. Pourquoi placer une ville d'Édesse en Achaïe, puisqu'il n'y a eu qu'une seule ville de ce nom en Arménie ? et pourquoi en faire une préfecture, et, bien plus, une royauté? Αιγεα του βασιλεως Εδεσσανων. Nous ne nous arrêtons pas à refuter ces erreurs qui restent sur le compte des expressions et non du monument. Il y a eu vraiment deux Édesse, et celle d'Achaïe était célèbre par les tombeaux des rois de Macédoine, selon Jean Cantacuzène. Quant au nom de roi qui lui est donné, c'est une figure. Est-ce que les préfets n'étaient pas de vrais rois qui avaient même trop de pouvoir? Le dictionnaire d'Hesychius donne à ce mot des sens, qui justifient nos diacres. Une objection plus spécieuse consisterait à dire que l'Achaïe et la Macédoine où se trouvaient Édesse formaient deux provinces différentes. Mais nous apprenons de Tacite (Ann., I., c. 80), qu'au moins une fois, et à cette époque même, elles ont été soumises à un seul proconsul. La ville de Patras, que la lettre des diacres désigne comme le lieu de la passion de saint André, était dans sa juridiction; et comme les proconsuls se transportaient tour à tour dans les différentes villes de leur ressort, il était naturel qu'Égée se trouvât à Patras où il vint sévir contre les chrétiens convertis par l'apôtre. Maintenant que nous avons déblayé le terrain occupé par les objections, voyons les motifs que nous avons de considérer cette lettre comme étant vraiment du temps et des témoins oculaires qui nous ont laissé ce rapport. Gallandier a réuni le témoignage de trente-sept auteurs, en remontant jusqu'à saint Jean Damascène, qui, en parlant de saint André, ont visiblement emprunté quelques traits, quelquefois plusieurs fragments à cette encyclique. Les uns se sont conformés à ce qu'elle dit du lieu du supplice, les autres ont nommé Égée, ceux-là ont pris quelque chose du magnifique dialogue entre l'apôtre et le proconsul. On voit que tous ont supposé véridique cette narration, et l'Église elle-même l'a honorée de son suffrage en admettant des passages dans l'office de saint André. Il n'y a rien dans la pièce qui ne soit en harmonie avec l'époque de l'événement raconté. Il y en a eu plusieurs exemplaires grecs qui ont le plus grand air de haute antiquité, et ces exemplaires étaient conformes aux citationslatines qu'en avaient faites longtemps auparavant les écrivains latins. Il nous paraît donc qu'on ne pourrait pas sans in justice faire mauvais accueil à la lettre des prêtres et des diacres d'Achaïe, et nous serons spécialement autorisé à y puiser des renseignements sur la mort de l'apôtre saint André. De même que dans l'Ancien Testament, nous n'avons rien emprunté au livre de la vie et de la mort des prophètes qui se trouve dans les œuvres de saint Épiphane, parce que l'authenticité en est trop suspecte, ni à la littérature arabe proprement dite, parce qu'elle manque de critique; de même pour le Nouveau Testament, nous nous sommes abstenu rigoureusement des écrits sur lesquels pèse une forte suspicion, ou qui sont condamnables à la seule lecture pour un homme |