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12. Or, depuis le temps de Jean-Baptiste jusqu'à présent (g), le royaume des cieux se prend par violence; et ce sont les violents qui l'emportent.

13. Car jusqu'à Jean, tous les prophètes, aussi bien que la loi, ont prophétisé.

14. Et, si vous voulez comprendre ce que je vous dis, c'est luimême qui est cet Élie qui doit venir.

15. Que celui-là entende, qui a des oreilles pour entendre (h,i et j). 16. Mais à qui dirai-je que ce peuple-ci est semblable? Il est semblable ces enfants qui sont assis dans la place, et qui crient

à leurs compagnons,

17. Et leur disent: Nous avons chanté pour vous réjouir, et vous n'avez point dansé; nous avons chanté des airs lugubres, et vous n'avez point témoigné de deuil.

18. Car Jean est venu, ne mangeant ni ne buvant, et ils disent : Il est possédé du démon.

19. Le Fils de l'homme est venu mangcant et buvant, et ils disent Voilà un homme qui aime à faire bonne chère et à boire du vin; il est ami des publicains et des gens de mauvaise vie; mais la sagesse a été justifiée par ses enfants.

20. Alors il commença à faire des reproches aux villes dans

(g) La prédication de Jean-Baptiste avait inspiré un zèle puissant pour le règne du Messie; toutes les imaginations étaient tendues de ce côté. Concluons donc que le narrateur a voulu se faire une autorité du Baptiseur.

(h) Annonce à mots couverts de la fin du mosaïsme.

(i) VERS. 13-15.- Jésus indique ici que, le Messie venu, c'est fini de l'ancienne loi. Mais je regarde ce texte comme une interpolation. Jésus ne fut point un abrogateur du mosaïsme; en cela il différait des messianistes, qui disaient que le Messie venu changerait tout.

() VERS. 7-15.- Phrases incohérentes. Jésus exalte d'abord Jean, le présente comme prophète, dit que c'est Élie, le plus grand des hommes, le précurseur du Christ. Il s'en fait ainsi un instrument; il se le subordonne, malgré qu'il en ait. Aussi, après l'avoir tant exalté, il le ravale; il lui donne la dernière place dans le royaume des cieux. C'est juif.

lesquelles il avait fait beaucoup de miracles, de ce qu'elles n'avaient point fait pénitence (k et l).

21. Malheur à toi, Corozaïn; malheur à toi, Bethsaïde, parce que si les miracles qui ont été faits au milieu de vous avaient été faits dans Tyr et dans Sidon, il y a longtemps qu'elles auraient fait pénitence dans le sac et dans la cendre (m).

(*) On dirait l'apôtre Jean Journet qui, depuis dix ans, maudit le monde de ne pas croire à Fourier.

() VERS. 16-20.- Autre discours qui ne tient au précédent que par une certaine association d'idées. Le siècle est dur; comme qu'on s'y prenne avec lui, il n'écoute rien. Ni Jean, ni Jésus; ni Cabet, ni Fourier; ni rouge, ni blanc ! C'est toujours la même chose! Du reste, ce discours est relatif à l'opposition entre la loi de Moïse et la nouvelle, opposition qui n'éclata qu'après la mort de Jésus.

(m) Reproche de n'avoir point cru aux miracles. On rencontre une contradiction perpétuelle, et aujourd'hui trèsdificile à expliquer, dans la conduite de Jésus relativement à ses miracles. Tantôt il commande de les divulguer, tantôt il le défend. On dirait parfois un sage qui, après une guérison merveilleuse, mais très-probablement naturelle, opérée par ses soins, tantôt évite le bruit, de peur de faire crier au thaumaturge, tantôt cherche précisément à se faire passer pour tel. Quand il s'agit de faire un miracle, Jésus recule; c'est tout simple; quand le miracle est fait, mais encore frais, il défend d'en parler, il craint la vérification... c'est prudent; mais quand les miracles sont anciens, il en réclame le bénéfice; cela semble louche.-Le prédicateur convertisseur s'irrite; dans sa bonne foi religieuse, il maudit les incrédules et les endurcis ; mais cela ne lui ôte pas tout à fait le jugement, et ne l'empêche pas de se comporter avec une singulière prudence. L'ironie ne lui manque pas surtout. Elle éclate à chaque instant. Capharnaum, qui l'a vu naître, qui l'a vu travailler à son établi, refuse de croire; il s'écrie (verset 25): Je te rends grâce, ô mon Père, d'avoir caché ces choses aux

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22. C'est pourquoi je vous déclare qu'au jour du jugement, Tyr et Sidon seront traitées moins rigoureusement que vous.

23. Et toi, Capharnaum, t'élèveras-tu toujours jusqu'au ciel? Tu seras abaissée jusqu'au fond de l'enfer; parce que si les miracles qui ont été faits au milieu de toi avaient été faits dans Sodome, elle subsisterait peut-être encore aujourd'hui.

24. C'est pourquoi je te déclare qu'au jour du jagement le pays de Sodome sera traité moins rigoureusement que toi.

25. Alors Jésus dit ces paroles: Je vous rends gloire, mon Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux prudents, et que vous les avez révélées aux simples et aux petits.

26. Oui, mon Père, je vous en rends gloire, parce qu'il vous a plu que cela fût ainsi.

27. Mon Père m'a mis toutes choses entre les mains, et nul ne connaît le Fils que le Père; comme nul ne connaît le Père que le Fils, et celui à qui le Fils aura voulu le révéler.

28. Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et qui êtes chargés, et je vous soulagerai.

29. Prenez mon joug (n) sur vous, et apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur; et vous trouverez le repos de vos âmes;

30. Car mon joug (n) est doux, et mon fardeau est léger.

CHAPITRE XII (a).

Épis rompus. Culte du sabbat. Main sèche. Douceur du Messie. Possédé aveugle et muet. Blasphèmes des pharisiens. Péché contre le SaintEsprit. Signe de Jonas. Démon rentrant. Mère et frères de Jésus-Christ.

1. En ce temps-là, Jésus passait le long des blés un jour de sabbat; et ses disciples, ayant faim, se mirent à rompre des épis, et à en manger.

sages, et de les avoir révélées aux petits! C'est d'un homme résolu.

(n) Jugum meum. La réforme de Jésus était plus comnode que la loi de Moïse. L'Église romaine a refait tout cela: Moïse a été dépassé par le pape. (Cf. ci-dessus, vers. 16-19.)

(a) Ce chapitre, comme les deux précédents, est tout polé–

2. Ce que les pharisiens voyant, ils lui dirent: Voilà vos disciples qui font ce qu'il n'est point permis de faire au jour du sabbat. 3. Mais il leur dit: N'avez-vous point lu ce que fit David, lorsque lui et ceux qui l'accompagnaient furent pressés de la faim;

4. Comme il entra dans la maison de Dieu, et mangea des pains de proposition, dont il n'était permis de manger ni à lui, ni à ceux qui étaient avec lui, mais aux prêtres seuls?

5. Ou n'avez-vous point lu dans la loi que les prêtres, au jour du sabbat, violent le sabbat dans le temple, et ne sont pas néanmoins coupables?

6. Or, je vous déclare qu'il y a ici quelqu'un plus grand que le temple.

7. Que si vous saviez bien ce que veut dire cette parole : J'aime mieux la miséricorde que le sacrifice (b), vous n'auriez jamais condamné des innocents.

8. Car le Fils de l'homme est maître du sabbat même.

mique. L'opposition au judaïsme y éclate à chaque pas; c'est cette opposition, peu naturelle chez un Juif, qui explique comment le christianisme a pu se réclamer lui-même de Moïse et des prophètes. Seulement la messianité de Jésus en devient plus absurde.

(b) Appel à l'autorité des prophètes, de tout temps peu scrupuleux en matière de cérémonies. Jésus, du reste, n dogmatise point; il se conforme aux croyances de son temps, autant qu'il peut; il admet Moïse, les prophètes, Jéhovah, les anges, la résurrection, etc., tout en inclinant sans cesse à expliquer rationnellement ce qui est susceptible de l'être. Il tergiverse sur l'idée messiaque, et conséquemment sur le personnage qu'il se donne à lui-même, pour deux raisons la première qu'il n'y avait ni sécurité ni possibilité de combattre trop directement l'opinion messiaque; la deuxième que, sentant lui-même l'équivoque qui allait se produire sur son compte, et ne pouvant néanmoins échapper à cette affirmation: Oui, je suis le Christ; car quiconque prêche la réforme est Christ, il sortait d'embarras du mieux qu'il pouvait, à force de prudence, de réserve et de savantes leçons.

9. Etant parti de là, il vint dans leur synagogue,

10. Où il se trouva un homme qui avait une main sèche; et ils lui demandèrent, pour avoir un sujet de l'accuser, s'il était permis de guérir aux jours du sabbat.

11. Mais il leur répondit : Qui sera l'homme d'entre vous qui, ayant une brebis qui vienne à tomber dans un fossé, le jour du sabbat, ne la prendra pas pour l'en retirer?

12. Or, combien un homme est-il plus excellent qu'une brebis? Il est donc permis de faire du bien le jour du sabbat.

13. Alors il dit à cet homme : Étendez votre main. Il l'étendit, et elle devint saine comme l'autre.

14. Mais les pharisiens, étant sortis, tinrent conseil ensemble, contre lui, sur les moyens qu'ils pourraient prendre pour le per

dre.

15. Jésus, le sachant, se retira de ce lieu-là; et beaucoup de personnes l'ayant suivi, il les guérit toutes (c).

16. Et il leur commanda de ne point le découvrir ;

17. Afin que cette parole du prophète Isaïe fût accomplie : 18. Voici mon serviteur que j'ai élu, mon bien-aimé, dans lequel j'ai mis toute mon affection; je ferai reposer sur lui mon Esprit, et il annoncerá la justice aux nations.

19. (d) Il ne disputera point, il ne criera point, et personne n'entendra sa voix dans les places publiques.

20. Il ne brisera point le roseau cassé, et il n'achèvera point d'éteindre la mèche qui fume encore, jusqu'à ce qu'il fasse triompher la justice de sa cause;

21. Et les nations espèreront en son nom.

22. Alors on lui présenta un possédé, aveugle et muet; et il le guérit, en sorte qu'il commença à parler et à voir.

(c) VERSETS 1-15. Satire mordante des tartufes juifs. Ce que Jésus dit (Marc, 11, 27) est encore plus piquant : Le sabbat est fait pour l'homme, non l'homme pour le sabbat. (Cf. M. Droz: Les produits sont faits pour les hommes, non les hommes pour les produits.) — Ici encore, on retrouve l'hésitation de Jésus entre le mosaïsme traditionnel et la réforme.

(d) Accommodation tout à fait opportune. Je fais des miracles, mais je n'en fais pas de bruit. Excellent argument à l'adresse de ceux qui acceptaient l'autorité d'Isaïe et ne' croyaient pas à Jésus.

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