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biguités de la science chrétienne 1; nous voulons parler de saint Maxime, qui disait:

« Que je voie et que je vénère Dieu emphanisé, c'est-à-dire » apparaissant, dans notre mémoire 2. >>

Mais enfin ne serait-il pas possible d'arriver à quelque accord sur la question philosophique de l'origine de nos connaissances, non-seulement avec les catholiques, mais encore avec les philosophes, nos communs adversaires? Nous le croyons, si l'on voulait bien distinguer deux questions que l'on confond, et qui sont pourtant bien différentes. Il y a là en effet une question de pratique et une autre de métaphysique. La question pratique est celle qui concerne les vérités nécessaires à croire et à pratiquer, qui sont enseignées en philosophie. L'origine de celles-ci est précisée par Clément d'Alexandrie, en ces termes, d'après M. l'abbé Cognat:

« Sans enseignement, il n'est point de science, et à plus forte >> raison point de gnose; mais l'enseignement suppose un maî>> tre. Cléanthe reconnaît pour maître Zénon, Théophraste Aris» tote, Métrodore Epicure, Platon Socrate. Remontant jusqu'à » Pythagore, Phérécide, Thalès et les premiers sages, je m'ar» rête pour demander quel fut leur maître. Me répondrez-vous: » les Egyptiens, les Indiens, les Babyloniens, les Mages; je >> vous demanderai de nouveau qui ceux-ci ont eu pour maître? » Enfin, je vous conduirai jusqu'au premier homme, et encore » une fois je vous demanderai quel fut son maître? Un autre » homme? Il n'y en avait pas 3. Un ange? Mais les anges, >> comment auraient ils pu leur parler, puisque leur langage' » n'est pas de ceux que perçoit l'oreille de l'homme... Au reste, » les anges, nous le savons, n'étant eux-mêmes que des créatu» res, les anges et les principautés ont, à leur tour, eu besoin >> d'un maître.-Reste donc la Sagesse elle-même, comme l'appel» lent les prophètes, le Conseiller de Dieu, le Verbe, le Maître ' Voir la série de ses ouvrages au no de février, ci-dessus, p. 163.

2 Ως Θεόν κατὰ τὴν μνήμην δι ̓ ὑμῶν ἐμφανιζόμενον, καὶ ὁρῶν καὶ αἰδούμενος. (Lettre vir dans ses œuvres. Patrol. grec., t. 91, p. 433.)

3 Le texte dit: « Ils n'avaient pas encore été instruits : ovdéñw yàp μeμałýxe

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• En tant qu'anges, xx0ò άyyzdλo, ajoute Clément, car il sait bien qu'ils ont souvent revêtu une forme humaine, et qu'ainsi ils ont pu parler à l'homme.

» de toute créature, qui dès le commencement du monde a parlé 1 » de diverses manières et enseigné de plusieurs façons2. C'est » donc à bon droit qu'il a dit : « N'appelez personne votre maî · » tre sur la terre3... » De même donc que toute paternité dé» rive de Dieu créateur, ainsi c'est du Seigneur que découle 4 » la connaissance des choses bonnes et honnêtes, tant la con» naissance qui justifie par elle-même que celle qui conduit et » aide à la justification 5.

Nous acceptons complètement ce programme, et nous l'offrons à tous nos adversaires. Il est renfermé dans ces mémorables paroles: « De l'enseignement vient la connaissance et » la science: ἐκ μαθήσεως ἡ γνῶσις καὶ ἡ ἐπιστήμη.» Avec Clément nous dirons : « Vous voyez d'où la philosophie a ses ori»gines, ses prises, ses anses, selon la rigueur de l'expression: » ὁρᾷς ὁπόθεν ἔχει τὰς λάβας ἡ Φιλοσοφία ἡ ἀληθής » Ce texte, néglige par M. Cognat, nous semble pouvoir être adressé à chacun des professeurs de philosophie.

Cet enseignement comprenant plusieurs vérités, qui n'étaient pas dues à la nature humaine, a dû être extérieur et positif. Dieu l'a donné sous une forme corporelle quelconque, selon l'expression de saint Augustin". Cet enseignement était complet; il contenait « non-seulement la connaissance qui justi>> fie, mais encore celle qui conduit et aide à la justification,» selon la propre expression de Clément, c'est-à-dire qu'elle était complète et contenait tout ce que l'homme devait alors croire ou faire pour être sauvé. Cet enseignement a été transmis par Adam à ses fils, et par ses fils et ceux de Noé, à tous les peuples.

Voilà sur quoi il nous semble que l'on pourrait être d'accord.

1 A enseigne et parachevé : πεπαίδευκέ τε καὶ τελείοῖ.

2 Multifariam multisque modis olim Deus loquens patribus in prophetis (Heb. 1, 1).

3 Vos autem nolite vocare Rabbi: unus est enim magister vester... Quia magister vester unus est Christus (Matth. XXIII, 8, 10).

Le texte ne dit ni dérive, ni découle, mais remonte, åvarpiɣeɩ, recurrit.
Stromates, 1. vi, c. 7. Patrol. grec., t. ix, p. 280.-
Dans M. Cognat,

p. 173.

• In aliqud specie corporali. Voir tout le texte dans les Annales, t. vi, p. 110; répété t. vin, p. 381, et t. xvi, p. 376 (4a série).

Quant à savoir ce qu'Adam aurait pu savoir, s'il n'avait pas été instruit de Dieu; quant à ce que les philosophes auraient pu savoir, s'ils n'avaient pas été instruits par les fils de Noé... comme cet état n'a jamais existé, nous ne croyons pas qu'il soit nécessaire de s'en occuper.

Reste maintenant la dernière question, la question métaphysique, celle de l'état primitif de l'âme humaine ; si elle est table rase, ou si elle a les idées innées. Celle-ci doit être soigneusement séparée, de manière que jamais elle n'influe sur la question pratique; quel que soit le sentiment que l'on adopte, avoir cependant présent à la pensée que l'on peut dire avec le concile de Périgueux, approuvé à Rome :

« La Raison habituelle, c'est-à-dire la Nature raisonnable » elle-même, précède la foi habituelle 1. »

Mais comment cette nature raisonnable entre-t-elle en exercice, et devient-elle apte à voir l'emphase de Dieu en nous; il faut dire encore avec la Congrégation de l'Index:

« L'homme tel qu'il naît aujourd'hui a besoin, pour acqué>> rir le plein exercice de la raison, d'un secours intellectuel » extérieur 2. >>

Nous finirons par les paroles suivantes d'un grand saint et d'un grand philosophe, sans prétendre en faire aucune application personnelle :

« Quand je vois cette maladie de langue qui sévit à notre » époque, ces sages d'un jour, ces théologiens d'un tour de » main3, auxquels il a suffi seulement de vouloir pour avoir » la sagesse, je suis pris du désir d'une philosophie supérieure, » et comme Jérémie, je cherche une retraite profonde, et je » désire commercer seul avec moi-même; car rien ne me » paraît plus désirable, que si, après avoir comprimé mes sens, » placé hors du monde et de la chair, ne touchant à rien des » choses humaines, si ce n'est dans le cas de la plus grande né» cessité, m'entretenant avec moi-même et avec Dieu, je pouvais » couler une vie élevée au-dessus des choses visibles, portant

Voir tout le texte dans les Annales, t. xvi, p. 408 et 415 (4a série). ' Voir tout le texte dans les Annales, t. 1, p. 294 (5° série).

3 Par élévation de main, par suffrage.

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» toujours en moi-même les pures et divines EMPHASES, sé» paré de toutes les choses terrestres et périssables, étant et de» venant toujours le miroir pur de Dieu et des choses divi» nes... Mais prendre le soin des âmes, ou vaquer à la théolo»gie, avant d'avoir vaincu le poids terrestre qui nous tire en » bas, je ne crois pas que ce soit sans danger 1. »

Dans le prochain cabier, nous parlerons de la partie où M. l'abbé Peltier réfute M. le chan. Lupus.

A. BONNETTY.

· Καὶ ἀεὶ τὰς θείας ἐμφάσεις καθαρὰς ἐν ἑαυτῷ φέρων, etc. Saint Grégoire de Nazianze, Discours xx°, dans Patrol. grec., t. 35, p. 1065. '

Tradition catholique.

COURS COMPLET DE PATROLOGIE,

Ou bibliothèque universelle, complète, uniforme, commode et économique de tous les saints Pères, Docteurs et Écrivains ecclésiastiques, tant grecs que latins, tant d'Orient que d'Occident. 2o partie : PÈRES GRECS,

depuis S. Barnabé jusqu'à Photius (860) inclusivement.

(Voir le précédent article au no 14, ci-dessus, p. 160.) TOME XCII Suite. (Voir le no précédent, ci-dessus p. 164). 226. GEORGE PISIDA, diacre de Constantinople, en 630. Ses œuvres d'après l'édition de Bekker. Bonn, 1837.-1. Préface des éditeurs.—2. Préface de l'édition de 1777, donnée par J. M. Quercius, sur la vie et les écrits de Pisida 3. Préface de Bekker. - 4. Avertissement de Quercius sur l'ouvrage suivant. – I. De l'expédition d'Héraclius contre les Perses, en vers grecs, en 3 livres, avec traduction et notes. II. De l'invasion et de la défaite des Barbares, ou récit de la guerre qui eut lieu sous les remparts de Constantinople entre les Avares et les Grecs, avec une préface de Quercius et notes. — III. L'héracléide, ou défaite totale de Chosroès, roi des Perses, avec préface de Quercius et notes, en 2 livres. IV. L'hymne acathiste, ou qui se chante debout en l'honneur de la sainte Vierge pour la remercier de la délivrance de Constantinople.-6. Notes explicatives de Quercius, où l'on trouve :- 7. Une leçon attribuée à Nicéphore Calliste, pour la fête où l'on chante cette hymne. - 8. Un récit circonstancié du miracle qui eut lieu pour la délivrance de Constantinople des attaques des Perses et des Barbares. — V. Poëme sur la sainte résurrection de N. S. JésusChrist.-9. Préface très-étendue où il est traité des auteurs édités, ou encore manuscrits qui ont traité de l'Hexameron, et des opinions de Pisida sur le monde. VI. Hexameron, ou l'œuvre du monde, en 1910 vers. — 19. Scholies de Morel.· VII. De la vanité de la vie. -VIII. Contre l'impie Sévère, avec une longue introduction sur cet hérétique, et notes explicatives. - IX. Vie, institution et combat de saint Anastase, qui souffrit le martyre en Perse, avec préface et notes, en prose. - X. 185 fragments d'ouvrages perdus.

1. Index sur la préface de Ducange à la Chronique paschale. 2. Index des mots grecs demi-barbares de la Chronique. — 3. Index des ouvrages historiques de Pisida.

TOME XCIII, comprenant 1748 col. 1860. Prix: 12 fr.

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227. OLYMPIODORE, diacre d'Alexandrie, vers 650.-1.Notice de Fabricius. -2. Autre de de Magistris. — 3. Préface de Fabricius sur l'ouvrage suivant: I. Sur le bienheureux Job. II. Fragment sur les proverbes de Salomon.

IV. Fragments sur Jérémie. VI. Fragments sur Baruch. — VII. Frag. - VIII. Fragments sur saint Luc.

III. Commentaires sur l'Ecclésiastique.
V. Fragments sur les lamentations.
ments sur la lettre de Jérémie.

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