Quand Pascal disait : « la vraie éloquence se moque de l'éloquence», il ne voulait parler que de cette partie que nous appelons sentiment, inspiration, enthousiasme, laquelle est « un don de la nature, et ne peut venir que d'elle »; de même que le sentiment de l'honnêteté morale ne saurait être le résultat de l'art ou de l'éducation, mais naît du fond même de notre âme douée d'un principe divin que nous appelons raison; et c'est dans ce sens que le même Pascal affirme encore que « se moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher.» (XXXVI. ) Or, de même que ce scrait une folie de conclure de là que la morale et la philosophie rejettent comme inutiles toutes les études auxquelles nous nous livrons à leur sujet; ce serait aussi une déplorable erreur que d'en dire autant de l'éloquence. Repoussant donc une telle interprétation qui ne serait propre qu'à favoriser l'ignorance et à nourrir une présomptueuse vanité, nous suivrons l'exemple de Quintilien et de Cicéron, et ce que ces grands rhéteurs n'ont pas dédaigné de faire dans l'éloquence profane, nous oserons à notre tour, avec moins de talent sans doute, mais avec une bonne volonté égale à la leur, nous oserons le tenter dans l'éloquence sacrée. Désireux de parcourir, pour l'utilité de tous, un aussi vaste champ non point avec la maigreur et la pauvreté des rhéteurs, mais avec la solidité et l'ampleur des doctrines que fournit la philosophie et plus encore la religion; désireux de faire une chose qui ne soit pas trop indigne de l'auguste Mécène qui honore et soutient de son nom cet établissement; éprouvant le besoin de donner aux évêques un gage aussi satisfaisant qu'il nous sera possible des travaux auxquels s'exercent les élèves d'élite de cette académie, l'espoir et l'avenir de leurs diocèses, nous nous sommes appliqués à traiter d'une ma TOME II. 1 nière également éloignée de l'excès de la brièveté et de celui de la prolixité les différentes espèces de l'éloquence sacrée. Avant de prononcer votre sentence, ô lecteur, souvenez-vous que la longueur ou la brièveté ne se doivent pas mesurer sur le nombre des pages, mais bien d'après la proportion qu'elles ont avec les matières traitées. Que si, dans cette partie de l'ouvrage que je vous présente, vous trouvez les différentes espèces de l'éloquence sacrée traitées avec lucidité, et sans qu'il soit utile d'en rien retrancher; si aux préceptes yous voyez se joindre des exemples qui, loin d'attiédir votre volonté et de fatiguer votre esprit, servent au contraire de soulagement à l'un et d'aiguillon à l'autre, et vous fassent goûter çà et là les beautés les plus exquises de nos orateurs classiques; que si, en le lisant, vous croyez avoir l'auteur devant vous, pour résoudre vos doutes, dissiper vos difficultés, et s'il vous conduit sans peine au but désiré : peut-être appellerez-vous courte et facile la voie qu'il vous aura fait parcourir, peut-être ne lui saurez-vous point mauvais gré des travaux et des veilles qu'il a essuyés pour vous introduire dans ce champ fécond où se trouvent réunis les fleurs et les fruits de la prédication apostolique. Prêtez donc l'oreille à la voix qui vous dit : l'éloquence est une grande chose magna res est eloquentia (Sen., Decl. 2); l'art de bien dire s'acquiert par beaucoup de travail, par une étude assidue, par un long exercice, par l'expérience, à l'aide d'une haute sagesse et d'un goût excellent: multo labore, assiduo studio, nimia exercitatione, plurimis experimentis, altissima prudentia, præstantissimo consilio constat ars dicendi. (Quint. Inst. 2.) Ecoutez de préférence encore le Prophète; élevez, pour vous animer, les yeux au ciel où ceux qui enseignent à un grand nombre de leurs frères les voies de la justice, brilleront comme des étoiles dans les perpétuelles éternités : Qui ad justitiam erudiunt plurimos quasi stellæ in perpetuas æternitates. (Dan. 12.) La divinité de la prédication est encore le fondement de cette seconde partie. La première condition nécessaire pour faire utilement le catéchisme est la science: on démontre cette vérité par des preuves intrinsèques et extrinsèques. La seconde est la prudence; elle embrasse la méthode tant générale que particulière de faire le catéchisme. La méthode générale a deux espèces : l'une de maxime, l'autre de fait ou de sentiment; combinées ensemble, elles donnent naissance à une troisième méthode: amples développements de ces diverses manières. La méthode particulière concerne le choix des choses, et distingue trois âges. - La troisième condition est la clarté ; combien elle est nécessaire et comment on l'obtient. La quatrième est la charité; motifs de la mettre en pratique. Exhortation à faire avec zèle le catéchisme. L'éloquence sacrée, disions-nous au commencement de ces leçons, contient la parole de Dieu, manifestée aux hommes on ne peut donc donner le nom d'éloquence sacrée qu'à celle qui est une digne expression de la parole de Dieu. Un principe aussi fécond, si j'ai été assez heureux pour ne le point laisser devenir stérile dans mes mains, a dû sans aucun doute donner une certaine solidité, imprimer une forme divine et sacrée à cette partie qui traite de l'éloquence en général, et que nous avons heureu |