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et vivant de leur nourriture. Suivant l'axiome si vis pacem, para bellum, pour conserver la paix, il mettait l'armée sur un pied formidable.

L'activité d'Adrien s'étendit à toutes les provinces. Il les visita les unes après les autres, l'ouest d'abord, l'orient ensuite, voyageant la plupart du temps à pied, sans pompe, entouré seulement de quelques jurisconsultes ses voyages durèrent, sauf quelques interruptions, 11 années, de 121 à 132. Mais en voyant ainsi toutes choses par lui-même, il put connaître les besoins réels des pays, corriger les abus, punir les coupables, supprimer les charges inutiles, et changer beaucoup pour améliorer. Ces voyages, qui ne coûtaient rien aux provinces, leur profitaient, car il laissait partout des marques de sa munificence. Nombre de villes furent décorées par lui de monuments splendides, comme Nîmes, où

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il éleva peut-être les arènes en l'honneur de Plotine, Athènes, où il passa deux hivers, Alexandrie, et Rome qui lui doit son château Saint-Ange (Moles Adriani) et le pont qui

4. D'après un fragment d'insaription trouvé dans les arènes de Nîmes, la construction de cet amphithéâtre daterait de la seconde moitié du Ie siècle. Il n'est pas le plus grand, mais un des mieux conservés et des mieux construits; son grand axe a 133,07, le petit 101",40, sa hauteur 21",32; l'épaisseur des constructions est de 31,53. Ce massif renferme 5 galeries de circulation, des aqueducs, des salles et 162 escaliers principaux conduisant à 35 rangs de gradins d'où la vue plonge sur l'arène; un mur (podium), de 2,69 d'élévation séparait les spectateurs des combattants. Une première précinction de 4 rangs de gradins était réservée aux magistrats et notables de la ville; une seconde de 11 rangs aux chevaliers; une troisième de 10 rangs aux simples citoyens; une quatrième de 10 aussi au bas peuple et aux esclaves. 24 000 spectateurs pouvaient y trouver place. Le Colisée, à Rome, avait 50 rangs de gradins, 54 mèt. de circonférence extérieure, et 51 de hau

réunit cette forteresse à la ville'. Il en fonda quelques-unes comme Andrinople en Thrace, et Antinoopolis en Égypte; et dans plusieurs, il accepta le titre d'une charge municipale. A Athènes, il fut archonte, à Naples, démarque, à Italica, magistrat quinquennal. Aussi, les inscriptions, les médailles, qui cette fois ne sont pas mensongères, l'appellent le restaurateur de l'empire, restitutor orbis. S'il montra une vanité déplacée en voulant briller dans toutes les sciences et dans tous les arts; s'il écrivit des poëmes, des ouvrages d'histoire et d'éloquence, on ne saurait lui reprocher ces distractions élevées, et des goûts qui l'engagèrent à protéger les arts, et à favoriser par des établissements publics l'instruction de la jeunesse. Il n'oublia, dans ses encouragements, ni le commerce, ni l'industrie, pas même les esclaves, qu'il rendit justiciables des seuls tribunaux et non plus des caprices et de la colère de leurs maîtres. Les Ergastula furent fermés. Mais il ne vit pas plus que Trajan ce qu'il y avait d'odieux à faire mourir des hommes dont le seul crime était de renoncer aux impuretés de la religion officielle. Au lieu d'arrêter la persécution, il se contenta de défendre qu'on mît les chrétiens à mort sans accusation juridique (126).

La paix, l'ordre, le bien-être que l'empire dut à ce prince, firent oublier ses faiblesses coupables, ses mœurs, qui ne valaient pas mieux que celles de son temps, l'influence qu'il laissa prendre sur lui à Antinous, dont il fit un dieu, et aussi

teur. L'arène était iongue de 93 mèt. et large de 59; 80 000 spectateurs y trouvaient place. L'amphithéâtre de Vérone avait, sur son plus grand diamètres 154 mèt., sur le petit 123. L'épaisseur des constructions est de 39 mèt., l'élévation de 30 mèt.; celui de Capoue 171,54 pour le plus grand diamètre, 443,33 pour le. petit, 31,83 pour l'épaisseur des constructions. On trouve encore des ruines d'amphithéâtre à Albano, Otricoli, Rimini, Bologne, Poestum, Pola (très-grande dimension), Tarragone, Arles, Saintes, Bordeaux (le palais Gallien. Il y en avait à Lyon, à Paris, et on a constaté qu'il y en avait eu dans 34 autres villes de France. Quelle boucherie d'hommes se faisait chaque année dans l'empire romain!

1. Près de Tibur il se construisit une villa célèbre où l'on voyait la reproduction des lieux et des monuments qui l'avaient frappé dans ses voyages, le Lycée, l'Académie, la valléc de Tempé, etc.

son caractère irascible qui le rendit plusieurs fois cruel. Le célèbre constructeur du pont de Trajan, Apollodore de Damas, paya de sa vie un jugement trop sincère sur les talents d'Adrien comme statuaire. Dès les premiers jours de son règne, quatre consulaires, accusés de conspiration, et parmi eux Corn. Palma, et le Maure Lusius Quietus que Trajan avait songé à choisir pour son successeur, furent condamnés et exécutés. Sur la fin de sa vie, lorsqu'il eut adopté Ælius Verus, et à la mort de celui-ci, Titus Antoninus, les complots ou ses soupçons recommencèrent. Son beaufrère, Servianus, périt avec son petit-fils; peut-être d'autres victimes encore succombèrent. Aussi le sénat, irrité d'ailleurs contre un prince qui faisait tout par lui-même, hésita longtemps lorsqu'il fut mort à Baïes, le 12 juillet 138, s'il ne condamnerait pas sa mémoire. La justice, cependant, et les pieuses prières d'Antonin, l'emportèrent.

Antonin le Pieux (138-161); paix profonde.

Les ancêtres d'Antonin étaient originaires de Nîmes; établis à Rome, ils y avaient rempli les plus hautes charges. Antonin lui-même, distingué par Adrien, avait reçu de ce prince l'administration d'une partie de l'Italie, plus tard le proconsulat d'Asie, et il avait enfin été adopté par lui à la condition qu'il adopterait à son tour M. Aurélius, et le fils d'Elius Verus, Lucius. Sous son règne de 23 années (138-161), l'empire jouit d'une paix profonde, due autant à ses vertus qu'à sa modération et au gouvernement habile de son prédécesseur, qui avait écarté pour quelque temps les causes de désordre. Sa renommée s'étendit si loin que les princes de l'Inde, de la Bactriane et de l'Hyrcanie, le choisirent pour arbitre dans leurs querelles : ses contemporains reconnaissants lui donnèrent le beau surnom de Père du genre humain. Il n'éleva jamais aux charges publiques que des hommes expérimentés et justes, et il les laissait mourir dans leurs places, quand il ne pouvait les remplacer par de plus habiles. Une sage économie dans l'administration financière lui donna les moyens de fonder d'utiles institutions;

par exemple, deux lieux de refuge où les filles orphelines. furent élevées sous la protection de l'impératrice Faustine, et des traitements pour les professeurs instruits qu'il établit, non plus seulement à Rome comme Vespasien, mais dans les grandes villes des provinces. Il put aussi venir au secours des cités frappées par quelque fléau, comme Rome, Antioche, Narbonne et Rhodes, désolées par des incendies ou des tremblements de terre. La richesse d'un prince, disait-il, est la félicité publique. Lui-même, il vivait simplement, accessible à tout le monde, et prêt à faire droit à toutes les réclamations. Deux conspirations furent découvertes contre lui : les deux chefs seuls périrent. Une apologie du christianisme, composée par le philosophe Justin, et présentée à l'empereur, valut aux chrétiens, déjà nombreux à Rome et dans les provinces, tolérance et protec

tion.

Antonin ne fit aucune guerre, et ne visita même pas les provinces trop paisibles et trop bien gouvernées pour que sa présence y fût nécessaire. Ses lieutenants livrèrent cependant quelques combats, en Afrique contre les Maures, et sur le Danube, aux Alains et aux Quades. Les Lazes et les Arméniens acceptèrent les rois qu'il leur donna. Les Juifs firent aussi quelques mouvements, et les Bretons essayèrent de détruire le mur d'Adrien.

Un fait qui peint la modération d'Antonin est raconté par Appien. Il vint alors à Rome des députés de peuples barbares qui demandèrent à être reçus sujets de l'empire: on refusa. C'était la politique d'Auguste et d'Adrien, et cette politique avait eu dans le bonheur de 100 millions d'hommes d'assez beaux résultats pour qu'Antonin la suivît. Mais cette paix amenait aussi l'oubli de l'ancienne vertu guerrière; les légions, inactives derrière les remparts de leur camp, ne savaient plus manier les armes ni supporter les fatigues; et il faudra toute la sévérité d'Avidius Cassius pour arracher les soldats, surtout ceux de Syrie, à leur mollesse, pour les déshabituer des bains et des voluptés dangereuses de Daphné, pour faire tomber de leurs têtes les fleurs dont ils se couronnaient dans les festins. »

Marc Aurèle le Philosophe (161-180); attaques des

Germains.

Lorsque Antonin se sentit mourir, il fit porter la statue d'or de la Victoire dans l'appartement de son fils adoptif, Marcus Aurélius Antoninus, surnommé le Philosophe. Le nouvel empereur prit à tâche de continuer l'administration de ses trois prédécesseurs. Il créa, pour la protection des pupilles, un préteur titulaire, ordonna que la sépulture des pauvres serait faite aux frais de l'État, et fit pour les gouverneurs de province, par la promulgation de l'édit provincial, ce qu'Adrien avait fait pour les préteurs par celle

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de l'édit perpétuel. L'arbitraire était ainsi partout poursuivi et l'unité mise dans l'administration. De nouvelles facilités

1. La Maison Carrée est un rectangle de 25,65 sur 13,45. L'intérieur n'a que 16 mètres de long sur 12 de large, et autant de hauteur. Les murs ont seulement 70 centimètres d'épaisseur. Dix colonnes d'ordre corinthien cannelées forment le péristyle; 20 autres, à moitié engagées dans les parois enveloppent l'édifice. Ce gracieux monument a été imité à Paris, dans des proportions plus grandes, à l'église de la Madeleine.

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