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trouble la paix, détruit la charité, profane les sacremens?

Il y a longtemps, mes très-chers frères, que ce mal est éclos, mais maintenant il prend un nouvel accroissement et de nouvelles forces, parce que cela doit arriver ainsi sur la fin du monde, selon que le Saint-Esprit nous en avertit par l'apôtre : «Dans les derniers jours, dit-il, les temps seront fàcheux; car il y aura des hommes amoureux d'eux-mêmes, superbes, glorieux, avares, blasphémateurs, désobéissans à leurs parens, ingrats, impies, dénaturés, sans foi, calomniateurs, intempérans, inhumains, ennemis des gens de bien, traîtres, insolens, altiers, aimant mieux leurs plaisirs que Dieu, pieux en apparence, mais qui ruineront l'esprit de piété. De ce nombre sont ceux qui s'introduisent dans les maisons, et qui traînent après eux des femmes chargées de péchés et possédées de diverses passions, qui apprennent toujours et ne parviennent jamais à la connaissance de la vérité. Et comme Jannès et Mambrès résistèrent à Moïse 2, eux de même résistent à la vérité. Ce sont des hommes qui ont l'esprit corrompu et une foi dépravée. Mais ils ne feront pas grand progrès; car leur folie sera connue de tout le monde, comme le fut alors celle de ces magiciens. >> Tout cela s'accomplit aujourd'hui, et nous éprouvons maintenant que les hommes et les temps sont tels qu'ils doivent être à la fin du monde. La rage de l'ennemi croissant tous les jours, les hommes sont plus aisés à surprendre; ils sont plus superbes, plus envieux, plus aveuglés de leurs passions, plus impies, plus arrogans, plus querelleurs, plus colères. Que néanmoins la perfidie des autres ne nous ébranle point; mais plutôt qu'elle fortifie notre foi, puisque c'est l'accomplissement des prophéties. Comme quelques-uns commencent à être tels parce qu'il a été prédit ainsi; que les autres aussi se donnent de garde d'eux, puisque cela a été prédit de même, et que Notre-Seigneur a dit : «Prenez garde à vous, vous voyez que je vous ai tout prédit 3.» Évitez, je vous prie, ces sortes de personnes, et fuyez leur entretien comme une chose mortelle et contagieuse, suivant cette parole de l'Écriture: «Remparez vos oreil

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les d'épines, et n'écoutez point une méchante langue 1;» et encore : « Les mauvais entretiens corrompent les bonnes mœurs 2. » Notre-Seigneur nous avertit de fuir ces sortes de personnes «Ce sont des aveugles, dit-il, qui conduisent des aveugles. Or, si un aveugle en conduit un autre, ils tomberont tous deux dans la fosse 3. » Il faut fuir un homme qui est séparé de l'Église quel qu'il soit. Car «un homme comme cela est perverti; il commet un grand péché et se condamne lui-même. Celui-là croit-il être avec Jésus-Christ, qui s'élève contre les prètres de Jésus-Christ, qui se sépare du clergé et du peuple ? Il prend les armes contre l'Église; il combat la disposition de Dieu même. C'est un ennemi de l'autel et du sacrifice de Jésus-Christ. C'est un traître, un impie, un serviteur désobéissant, un fils dénaturé, un faux frère, qui, méprisant les évêques et abandonnant les prêtres de Dieu, ose élever un autre autel, faire une autre prière, profaner la vérité de la victime du Seigneur par des faux sacrifices. Mais il ne sait pas que quiconque va contre ce que Dieu a ordonné, reçoit le châtiment de son audace. C'est ainsi que Coré, Dathan et Abiron, qui voulurent usurper sur Moïse et sur Aaron le pouvoir de sacrifier, portèrent sur-le-champ la peine de cet attentat 5; car la terre s'étant ouverte à leurs pieds les engloutit tout vivans. Et la colère de Dieu irrité ne tomba pas seulement sur les auteurs de la sédition, mais un feu sortant de l'autel en consuma deux cent cinquante autres qui avaient été complices de leur furcur et de leur témérité. Par où l'Écriture nous fait voir que c'est s'attaquer à Dieu mème que de vouloir détruire ce qu'il a ordonné. C'est ainsi que le roi Ozias mettant la main sur l'encensoir, et voulant sacrifier de force contre la loi de Dieu sans avoir égard à la résistance du prêtre Azarias, fut frappé de lèpre sur le front, qui est la partie du visage où sont marqués ceux qui reçoivent la grâce de Dieu. Les enfans d'Aaron de même qui mirent un feu étranger sur l'autel, tombèrent morts sur la place en la présence du Seigneur irrité 7. Or ceux-là les imitent qui, méprisant la tradition divine, courent après

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des doctrines nouvelles et introduisent des traditions humaines. C'est eux que Notre-Seigneur réprend dans son Évangile quand il dit : « Vous rejetez les commandemens de Dieu pour établir vos traditions 1. Ce crime-là est pire que celui de ceux qui sont tombés pendant la persécution; et néanmoins ils sont mis en pénitence, et ils tâchent d'apaiser la colère de Dieu par une pleine satisfaction. Ceux-ci demandent à rentrer dans l'Église, et ceux-là se révoltent contre l'Église. Ceux-ci se peuvent excuser sur la violence qu'on leur a faite, et le crime de ceux-là est tout volontaire. Celui qui est tombé n'a fait fort qu'à lui-même, au lieu que celui qui a fait un schisme ou une hérésie en a surpris plusieurs en les entraînant avec lui. Ici il n'y va que de la perte d'une seule âme, et là plusieurs courent fortune de se perdre. L'un reconnaît au moins sa faute, la pleure, en a regret; et l'autre, fier dans son péché et s'y complaisant, sépare les enfans de la mère, débauche au pasteur ses brebis, et renverse les sacremens divins. Celui qui est tombé n'a péché qu'une seule fois, et l'autre pèche tous les jours. Enfin un apostat souffrant ensuite le martyre peut entrer dans le paradis; au lieu qu'un schismatique qui est tué hors de l'Église, ne peut avoir part aux récompenses de l'Église. Et que personne, mes très-chers frères, ne s'étonne d'en voir parmi les confesseurs mêmes qui s'engagent dans le schisme; car la confession du nom de Jésus-Christ ne nous met pas à couvert des embûches du diable, et ne nous assure pas contre tous les dangers auxquels nous sommes exposés pendant cette vie. Autrement les confesseurs ne tomberaient jamais dans

l'adultère et dans les autres crimes où nous en

voyons avec douleur tomber quelques-uns. Un confesseur, quel qu'il soit, n'est pas plus grand ni plus vertueux que Salomon, ni plus chéri de Dieu. Cependant nous voyons qu'après avoir marché longtemps dans la voie du Seigneur, et obtenu de lui un infinité de grâces, il abandonna cette voie et perdit toutes les grâces qu'il avait reçues. «Dieu, dit l'Écriture, suscita Satan contre Salomon 2, c'est pourquoi il est écrit: «Gardez bien ce que vous avez, afin que personne ne prenne votre couronne 3. » Car Dieu

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ne dirait pas que la couronne de justice peut être ôtée, et il ne menacerait pas de ce malheur, si ce n'était une suite nécessaire de perdre la couronne quand on a perdu la justice. La confession du nom de Jésus Christ est le commencement de la gloire, mais n'en est pas le couronnement; et puisqu'il est écrit «qu'il n'y aura de sauvé que celui qui persévérera jusqu'à la fin,» tout ce qui précède la fin est un degré pour arriver au salut, mais n'est pas le salut. C'est un confesseur; mais le danger est plus grand après la confession, parce que l'ennemi est plus irrité. C'est un confesseur; il se doit donc tenir plus attaché à l'Évangile; puisque c'est par l'Evangile que Notre-Seigneur lui a donné la gloire qu'il possède; car le Seigneur dit : « Celui à qui l'on donne beaucoup, on lui redemandera beaucoup 2, » et l'on exige plus de reconnaissance de celui qui reçoit plus d'honneur. Que personne ne se serve de l'exemple d'un confesseur pour se perdre ; que personne n'apprenne de lui à être injuste, insolent, perfide. C'est un confesseur ; qu'il soit donc humble, doux et retenu, afin que celui qui porte le nom de confesseur de Jésus-Christ, imite JésusChrist qu'il confesse. Car puisqu'il dit : « Celui qui s'élève sera humilié, et celui qui s'humilie sera élevé3; » et que lui-même n'a été élevé par son Père que parce qu'étant la parole, la vertu et la sagesse de Dieu le Père, il s'est humilié sur la terre; puisqu'il nous a recommandé si expressément l'humilité dans sa loi, et que son Père ne lui a donné un nom si excellent qu'en réil aimer l'orgueil ? C'est un confesseur de Jécompense de son humilité, comment pourraitsus-Christ; mais c'est pourvu que dans la suite il ne donne point sujet de blasphémer la majesté de Jésus-Christ. Qu'une langue qui a ni querelleuse, ni séditieuse ; et qu'après avoir confessé Jésus-Christ ne soit point médisante, proféré des paroles glorieuses à Dieu, elle ne lance point de venin contre ses frères et contre les prètres de Dieu. Mais si, après avoir confessé crimes détestables, s'il flétrit la gloire de sa Jésus-Christ, un confesseur tombe en des souille d'ordure et de corruption; en un mot, confession par le déréglement de sa vie, ş'il se si abandonnant l'Église où il a été confesseur.

1 S. Matth., 10, 22.- S. Luc, 12, 48. —3 Ibid., 18, 14. 4 Le nom de Jésus. Philippe, 2, 9.

et rompant le lien de l'unité il trahit lâchement la foi qu'il a professée d'abord, il ne se peut point vanter de sa confession comme s'il était destiné pour la gloire, puisque cela ne servira qu'à accroître ses châtimens; car Notre-Seigneur choisit Judas pour l'un de ses apôtres, et toutefois Judas le trahit ensuite. Mais comme les autres apôtres ne perdirent pas leur foi et leur fermeté pour avoir été abandonnés par ce traître, l'infidélité de quelques confesseurs ne détruit pas la sainteté et la dignité de tous. Le bienheureux apôtre dit dans son épître aux Romains: « Si quelques-uns d'eux n'ont pas cru, est-ce que leur infidélité anéantira l'effet des promesses de Dieu ? Non sans doute ; car Dieu est véritable, comme tout homme est menteur 1. >> La plus grande et la meilleure partie des confesseurs demeure ferme dans sa foi et dans la vérité de la loi du Seigneur, et ceux qui se souviennent qu'ils ont reçu la grâce dans l'Église par la miséricorde de Dieu, ne rompent point la paix de l'Église. Leur fidélité mème est d'autant plus louable qu'étant unis par une même confession avec ceux qui se sont retirés de l'Église, ils ne les ont pas imités dans leur perfidie. Éclairés de la pure et véritable lumière de l'Évangile, ils sont aussi zélés pour conserver la paix de Jésus-Christ, qu'ils ont été généreux pour maintenir sa gloire. Je souhaite véritablement, mes très chers-frères, qu'aucun des fidèles, s'il se peut, ne périsse, et que l'Église, cette bonne mère, ait la joie d'enfermer tous ses enfans bien unis dans son sein. Je le souhaite et vous y exhorte de tout mon cœur. Mais néanmoins si mes conseils salutaires ne sont pas capables de ramener dans la voie du salut quelques auteurs du schisme qui demeurent dans une obstination aveugle et furieuse, que les autres au moins qui se sont laissé surprendre par leur simplicité se retirent du piége où ils sont tombés, qu'ils sortent de leur erreur, et qu'ils rentrent dans le droit chemin. Voici ce que dit saint Paul sur ce sujet : « Nous vous commandons au nom de notre Seigneur JésusChrist de vous séparer de tous les frères qui se comportent mal et qui ne suivent pas ce que nous leur avons enseigné 2. » Et ailleurs : «Que personne ne vous surprenne par de vains dis

1 1 Rom., 3, 3. II. Thess., 3, 6.

cours; car c'est cela qui attire la colère de Dieu sur les opiniâtres1. N'ayez donc point de commerce avec eux. » Il se faut éloigner des pécheurs, ou plutôt il les faut fuir, de peur que si l'on se joint à eux et qu'on marche avec eux dans la voie de l'erreur, on ne devienne complice de leur crime. Il n'y a qu'un Dieu, qu'un JésusChrist, qu'une Église, qu'une foi et qu'un peuple fidèle uni en un même corps par le lien indissoluble de la concorde. L'unité ne peut pas être divisée, et un corps ne subsiste plus quand il est démembré et mis en pièces. Quiconque se sépare du tronc ne peut plus avoir de vie, et perd le fondement du salut. Le Saint-Esprit nous dit dans les psaumes: «Voulez-vous vivre longtemps et heureusement, empêchez votre langue de médire, et vos lèvres de mentir. Détournez-vous du mal et faites le bien; cherchez la paix et travaillez à l'avoir 2. » Up enfant de paix doit chercher la paix et travailler à la maintenir, et il faut que celui qui connaît et aime le lien de la charité s'abstienne de tous les discours qui sont capables de l'altérer. Notre-Seigneur étant proche de sa passion, parmi ses autres enseignemens divins et salutaires nous a laissé celui-ci : « Je vous laisse la paix, dit-il, je vous donne ma paix 3.» Voilà l'héritage que Jésus-Christ nous a laissé. Il nous a promis la jouissance de toute sorte de biens pourvu que nous conservions la paix. Si donc nous sommes les héritiers de Jésus-Christ, demeurons dans la paix de Jésus-Christ. Si nous sommes les enfans de Dieu, soyons doux et paisibles.<« Bienheureux, dit-il, les pacifiques, car ils seront appelés enfans de Dieu 4. » Il faut que les enfans de Dieu soient pacifiques, il faut qu'ils soient doux, simples, unis. Cette union fleurissait parmi les fidèles du temps des apôtres, et l'on voyait entre eux une charité admirable. L'Écriture sainte le témoigne quand elle dit «Toute la multitude de ceux qui croyaient n'agissait que par une même âme et un mème esprit 5; » et encore: «lls persévéraient tous unanimement dans l'oraison avec les femmes, et avec Marie mère de Jésus-Christ et ses frères 6. » C'est aussi pour cela que leurs prières étaient si efficaces, et qu'ils pouvaient s'assurer d'obtenir de Dieu tout ce qu'ils de

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mandaient. Mais maintenant cette union est autant diminuée parmi nous que les bonnes œuvres qui en sont la suite. Alors ils vendaient leurs maisons et leurs héritages, et en donnaient le prix aux apôtres pour le distribuer aux pauvres, afin de s'acquérir un trésor dans le ciel. Mais maintenant nous ne donnons pas seulement la dime de notre revenu, et au lieu que Notre-Seigneur nous commande de vendre notre bien, nous achetons au contraire et l'augmentons. C'est ainsi que la vigueur de la foi s'est éteinte en nous; c'est ainsi que la force des fidèles est languissante. Voilà pourquoi NotreSeigneur, envisageant le temps où nous sommes, disait : «Lorsque le Fils de l'homme viendra, pensez-vous qu'il trouve de la foi sur la terre1?» Nous voyons l'accomplissement de cette parole. Il n'y a plus de crainte de Dieu, plus de justice, plus de charité, plus de bonnes œuvres, plus de foi. Personne ne pense aux choses à venir. Personne ne considère le jour du Seigneur, le jour de la colère de Dieu, les supplices préparés pour les incrédules, les tourmens éternels qui attendent les perfides. Si nous avions de la foi, nous aurions aussi de la crainte; mais parce que nous ne croyons rien, nous ne craignons rien non plus. Que si nous craignions

quelque chose, nous nous en donnerions de garde, et l'éviterions aussi par conséquent. Animons-nous donc autant que nous pouvons, mes très-chers frères, et sortant de l'assoupissement de notre ancienne paresse, veillons à observer les préceptes de Notre-Seigneur. Soyons tels qu'il nous commande d'être, quand il dit : «Que vos reins soient ceints, et vos lampes allumées; et soyez comme des serviteurs qui attendent que leur maître retourne de la noce, afin que lorsqu'il viendra et frappera à la porte, ils lui ouvrent aussitôt. Heureux les serviteurs que le maître à son arrivée trouvera veillans 1. » Il faut que nous soyons ceints, de crainte que, lorsque le jour de combat viendra, il ne nous surprenne embarrassés. Que notre lumière éclate dans nos bonnes œuvres, afin qu'elle nous conduise de la nuit du siècle à la clarté éternelle. Tenons-nous toujours sur nos gardes dans l'attente de l'avénement imprévu de Notre-Seigneur, afin que lorsqu'il frappera à la porte, notre foi veille, et reçoive le prix de sa vigilance. Si nous gardons fidèlement ces avis salutaires, le diable ne nous surprendra jamais endormis, mais comme des serviteurs soigneux et vigilans, nous règnerons éternellement avec Jésus-Christ.

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troupe éclatante des soldats de Jésus-Christ | Lorsque le temps porté par les édits pour re

qui ont rompu par leur fermeté les plus violens efforts de la persécution, et qui étaient prèts à souffrir toutes les rigueurs de la prison et de la mort. Vous ayez généreusement résisté au siècle, braves athlètes de Jésus-Christ. Vous avez donné à Dieu un spectacle magnifique, et un grand exemple à tous les chrétiens. Votre voix a fidèlement confessé Jésus-Christ, et ne s'est point démentie depuis qu'elle a une fois fait profession de croire en lui. Vos mains illustres, qui ne s'occupaient qu'à des œuvres saintes et divines, ont rejeté courageusement des sacrifices impies. Votre bouche sanctifiée par des mets célestes, après avoir reçu le corps et le sang du Seigneur, a eu horreur de se souiller de viandes offertes aux idoles. Votre tête n'a point été couverte de ce voile profane dont on couvrait les têtes captives de ceux qu'on obligeait à sacrifier aux fausses divinités. Un front consacré par le signe de la croix n'a pu souffrir la couronne du diable, et s'est réservé pour celle du Seigneur. Avec quels transports de joie l'Église votre mère ne vous reçoit-elle point maintenant dans son sein au retour du combat? Avec quel contentement et quelle allégresse ne vous ouvre-t-elle point ses portes, afin que vous entriez en troupe, chargés des dépouilles de l'ennemi terrassé! Les femmes mêmes ont part au triomphe des hommes, et elles ont vaincu le monde en vainquant leur sexe. Les vierges l'accompagnent aussi, ornées de l'honneur d'une double victoire; avec les enfans qui ont surmonté par leur courage la faiblesse de leur âge. Après, vient la troupe de ceux qui sont demeurés debout, et qui vous suivent de près dans la gloire de votre triomphe. Ils ont la même fidélité que vous, et le même attachement à la foi. Appuyez sur les fondemens inébranlables des divins préceptes et des lois de l'Evangile, ils ont regardé sans effroi les bannissemens, la perte de leurs biens, et les supplices les plus cruels. On leur donnait du temps pour tâcher d'ébranler leur foi, mais celui qui a renoncé au siècle se moque de tous ces délais artificieux, et celui qui aspire à l'éternité ne s'arrête point au temps. Que personne, mes très-chers frères, ne diminue une gloire qu'ils ont si justement acquise, que personne ne rabaisse malicieusement leurs avantages.

nier la foi est expiré, quiconque dans ce temps n'a point renoncé Jésus-Christ, l'a confessé. Le premier degré d'honneur est de confesser NotreSeigneur quand on est pris; et le second c'est de se retirer prudemment et se réserver pour ce qu'il plaira à Dieu d'ordonner de nous. La première confession est publique; la seconde est particulière. Celui-là demeure victorieux des juges du monde ; et celui-ci, se contentant d'avoir Dieu pour juge, conserve sa conscience pure en ne trahissant point les sentimens de son cœur. L'un témoigne plus de courage, et l'autre plus de prudence. Le premier se trouve prêt lorsque son temps est venu, et le second est peut-être réservé pour un autre temps; et de ce qu'il s'est retiré et qu'il a abandonné ses biens pour ne point renier Jésus-Christ, c'est une marque qu'il l'aurait confessé s'il avait été pris.

Mais parmi le triomphe des martyrs, la gloire des confesseurs, et le courage de ceux qui sont demeurés fermes, il y a une chose qui nous afflige sensiblement. C'est que la fureur de l'ennemi nous a arraché une partie de nos entrailles, et en a terrassé plusieurs d'entre-nous. Que ferai-je ici, mes très-chers frères? j'en suis extrêmement en peine. Que dirai-je, ou de quelle manière parlerai-je? Certes, il est plus besoin de larmes que de paroles pour exprimer notre douleur, pour pleurer nos blessures, pour déplorer la ruine d'un peuple autrefois si nombreux. Car qui serait si dur et si impitoyable, que de demeurer les yeux secs au milieu d'une si grande désolation, et de voir ses frères tombés d'une chute mortelle, sans faire retentir le ciel de ses cris? Je m'afflige avec vous, mes frères, je m'afflige avec vous ; et je ne me console point sur ce que je suis demeuré moimême sain et entier, puisqu'un véritable pasteur ressent plus vivement les plaies de son troupeau que son troupeau lui-même. J'entre dans tous les sentimens de votre cœur, et je partage avec vous le poids de votre tristesse. Je gémis avec ceux qui gémissent, je pleure avec ceux qui pleurent, et il me semble que je suis couché par terre avec ceux que l'ennemi a térrassés. Je suis percé des mêmes traits dont vous avez été percés, et l'épée qui vous a blessés a passé au travers de mes entrailles. Ainsi je ne puis

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