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avec Notre-Seigneur. Associez Jésus-Christ à vos biens, afin qu'il vous associe à son royaume. Qui que vous soyez qui pensez être riche en ce monde, vous vous trompez. Écoutez ce que votre Seigneur dit dans l'Apocalypse à ces sortes de personnes : «Vous dites: je suis riche et opulent, et je n'ai besoin de rien; et vous ne savez pas que vous êtes chétif et misérable, pauvre, aveugle et nu. Je vous conseille d'acheter de moi de l'or étincelant pour vous enrichir, de vous couvrir d'une robe blanche pour cacher la honte de votre nudité, et d'appliquer un collyre sur vos yeux pour voir clair 1. » Vous donc qui êtes riches, achetez de Jésus-Christ cet or étincelant afin que, vos souillures étant purifiées par les aumônes comme par le feu, vous puissiez être vous-même de l'or très-pur. Achetez une robe blanche, afin qu'au lieu que vous étiez nu et difforme en Adam, vous soyez revêtu des ornemens éclatans de Jésus-Christ. Et vous, dame de condition qui êtes dans l'Église, frottez vos yeux non des pommades du diable, mais du collyre salutaire de Jésus-Christ, afin que vous puissiez mériter de voir Dieu, en vous le rendant favorable par vos aumônes et votre bonne conduite. Mais je ne m'étonne pas qu'étant telle que vous êtes, vous ne vous servez pas de votre bien à des œuvres de charité. Vos yeux sont tellement peints et noircis que cela forme comme une nuit épaisse au devant d'eux qui les empêche de voir les pauvres. Vous êtes riche, et cependant vous croyez célébrer comme il faut les divins mystères en ne regardant pas seulement le tronc, en venant à l'église sans sacrifice, et en prenant même une partie de celui que le pauvre a offert. Considérez cette Veuve de l'Evangile qui, se souvenant des commandemens de Dieu au milieu de la dernière pauvreté, mit dans le tronc deux deniers, qui étaient tout ce qu'elle avait. Aussi Notre-Seigneur la voyant, et prenant moins garde à son action. qu'à sa volonté, et à la somme qu'elle donnait qu'à celle d'où elle tirait ce qu'elle donnait, dit: «En vérité je vous dis que cette veuve a donné plus que tous les autres; car les autres n'ont donué que de leur abondance, au lieu que celleci a donné de son indigence mème 2. >> Femme heureuse et illustre, d'avoir mérité avant le jour

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du jugement d'être louée de son juge! Que les riches aient honte de leur avarice et de leur peu de foi; voici une veuve et une pauvre veuve qui est libérale. Tout ce que l'on donne c'est pour les veuves et pour les orphelins, et en voilà une qui donne au lieu de recevoir; pour nous apprendre quelles peines sont préparées aux riches, avares, puisque les pauvres mêmes ne sont pas exempts de faire l'aumône. Et pour montrer que c'est à Dieu même que ces charités sont faites, et que quiconque les fait attire sa grâce et en mérite récompense, Jésus-Christ les appelle des dons de Dieu, et dit que cette veuve mit deux deniers dans les dons de Dieu. Ce qui ne sert encore qu'à justifier davantage cette autre parole, que «celui qui secourt le pauvre prête à Dieu à usure 1.» Au reste, mes très-chers frères, que personne ne s'excuse de faire l'aumône sur ce qu'il a des enfans, puisque c'est Jésus-Christ seul que nous y devons considérer, comme nous ayant assuré que c'est lui qui la reçoit, et qu'ainsi ce n'est pas des serviteurs comme nous que nous préférons à nos enfans, mais Notre-Seigneur lui-même2. C'est aussi ce qui lui a fait dire pour notre instruction : «Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n'est pas non plus digne de moi 3.» Nous lisons la même chose dans le Deuteronome pour fortifier notre foi et animer notre amour. «Ceux qui disent à leur père et à leur mère : Je ne vous connais point, et à leurs enfans: Je ne sais qui vous êtes, gardent vos préceptes et vos ordonnances 4. » Car si nous aimons Dieu de tout notre cœur, nous ne devons préférer ni nos parens ni nos enfans à Dieu. C'est pourquoi saint Jean dit dans son épître, que ceux qui ne sont pas charitables ne T'aiment point: «Comment, dit-il, celui qui étant riche voit son frère dans le besoin et ferme ses entrailles à la compassion, peut-il avoir l'amour de Dieu 5?» Car si Dieu récompense avec intérêt les charités qu'on fait aux pauvres 6, et si l'on donne à Jésus-Christ ce qu'on donne aux moindres chrétiens, quelle apparence de préférer les choses de la terre à celles du ciel, et les humaines aux divines??

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Ainsi cette bonne veuve, au troisième livre des Rois, après avoir consumé toutes ses provisions pendant la famine, ayant fait d'un peu de farine et d'huile qui lui restait un pain cuit sous la cendre, qui était le dernier repas qu'elle et ses enfans devaient faire, et Élie étant survenu là-dessus et lui ayant demandé à manger, elle lui en donna sans délibérer, et cette mère qui aimait si tendrement ses enfans, ne lui allégua point pour excuse qu'ils mouraient de faim. Elle fit en la présence de Dieu une action qui lui était extrêmement agréable, et la fit promptement et gaiement; et elle ne donna pas une partie de ce qu'elle avait de trop, mais donna tout du peu qu'elle avait. Ses enfans étaient affamés, et elle les laissa pour nourrir un étranger; et au milieu d'une pauvreté si pressante, elle songea plutôt à soutenir la misère d'autrui que la sienne propre. Elle méprisa la vie de son corps pour conserver celle de son âme. Aussi Élie qui était la figure de JésusChrist, pour montrer qu'il ne laisse point les actions de miséricorde sans récompense, lui dit : « Voici ce que dit le Seigneur : La corbeille de farine et la cruche d'huile ne diminueront point jusqu'à ce que Dieu fasse pleuvoir sur la terre 1.» Ce qui fut fait, et ses vaisseaux furent remplis sans décroître pour récompense de sa charité. Ainsi la mère n'òta point à ses enfans ce qu'elle donna à Élie, mais augmenta au contraire par là le peu de bien de ses enfans. Cependant elle ne connaissait point encore JésusChrist, et n'avait point ouï parler de ses préceptes. Elle n'était point rachetée par sa croix et par sa passion, et elle ne lui donnait point à boire et à manger pour le sang qu'il avait répandu pour elle. Combien donc est coupable un chrétien qui, se préférant soi-même et ses enfans à Jésus-Christ, garde ses richesses et n'en veut point faire part à ceux qui languissent dans la pauvreté? Mais vous avez, dites-vous, plusieurs enfans, et cela vous.empêche d'ètre extrêmement aumônier. Au contraire, c'est ce qui doit vous le rendre davantage; car plus vous avez d'enfans, plus vous avez de personnes pour qui vous devez prier Dieu, dont vous devez racheter les péchés, dont il vous faut sauver les âmes. Et comme à mesure qu'ils sont en plus grand nombre, vous ↑ III. Rois, 17, 14.

êtes obligé de travailler davantage pour les nourrir selon le corps; vous êtes obligé de mème de faire plus de bonnes œuvres pour leur conserver la vie de l'esprit. C'est ainsi que Job ayant beaucoup d'enfans offrait à Dieu beaucoup de sacrifices; et il immolait tous les jours une victime pour chacun d'eux, parce qu'il est impossible que nous ne tombions tous les jours en quantité de fautes. L'Écriture en rend témoignage quand elle dit : «Job, qui était un homme juste et droit, avait sept fils et trois filles, et il les purifiait en offrant pour eux à Dieu autant de victimes qu'ils étaient, et un veau pour leurs péchés 1. » Si vous aimez donc véritablement vos enfans, si vous avez pour eux de l'affection et de la tendresse, travaillez par vos bonnes œuvres à leur attirer les grâces de Dieu. Ne pensez point à ce père infirme et mortel, mais tâchez de leur donner pour père celui qui étant éternel et tout-puissant est le père des enfans spirituels. Faites-le dépositaire des biens que vous gardez pour vos héritiers. Qu'il soit le tuteur de vos enfans, qu'il en soit le curateur, qu'il en soit le protecteur. Un bien mis entre les mains de Dieu ne peut être ni confisqué par le prince, ni ravi par un procès injuste. Une succession est en sûreté quand on la donne. à garder à Dieu. C'est le moyen de pourvoir à ses enfans, c'est le moyen de ménager les intérêts de ses héritiers. L'Écriture sainte nous le déclare en ces termes : « Je suis bien vieux, mais je n'ai jamais vu le juste abandonné, ni ses enfans chercher leur vie. Il donne et prète tout le jour, et sa postérité sera bénite 2. » Et encore: «Celui qui vit bien et sans reproche laissera des enfans heureux après soi 3 » Vous ètes donc un prévaricateur, et non un père, si vous ne procurez les véritables avantages de vos enfans, si votre affection ne va à les conserver pour l'éternité. Mais pour vous qui avez plus de soin d'acquérir les biens de la terre que ceux du ciel, et de donner vos enfans au diable qu'à Jésus-Christ, vous commettez un double crime, et parce que vous ne vous souciez d'attirer sur eux le secours de Dieu, et parce que vous leur apprenez à aimer plus le bien que NotreSeigneur. Ressemblez plutôt à Tobie, et donnez à vos enfans les préceptes salutaires qu'il donna à son Fils, lorsqu'il lui dit : « Écoutez, mon fils, ce 1 Job., 1, 2 Ps., 36, 27. Prov., 20, 7,

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que je vous dis Servez Dieu sincèrement, et tâchez de lui plaire en toutes choses. Recommandez aussi à vos enfans d'être gens de bien et de faire l'aumône, de se souvenir de Dieu et de bénir son nom en tout temps 1. » Et encore : «Mon très-cher fils, ayez Dieu dans le cœur tout le temps de votre vie, et prenez bien garde de ne point violer ses commandemens. Ne cessez ja mais de bien faire, et évitez le mal, et Dieu aura égard à vos bonnes œuvres. Donnez l'aumône de votre bien, et ne refusez aucun pauvre; cela fera que Dieu ne vous refusera rien. Si vous avez beaucoup, donnez beaucoup; si vous avez peu, ne laissez pas de donner de ce peulà. Et ne craignez point quand vous faites l'aumône vous vous amassez un riche trésor pour le temps de la nécessité; car l'aumône délivre de la mort et empêche qu'on n'aille en enfer. L'aumône est un don excellent pour tous ceux qui la font dans la vue de Dieu 2. » Quel est ce don, mes très-chers frères, qui a Dieu même pour témoin! Si les païens s'estiment bien honorés dans les largesses qu'ils font au peuple, de la présence des proconsuls ou des empereurs, et si les préparatifs de leurs spectacles sont d'autant plus grands que les personnes qui y doivent assister sont plus considérables, combien les libéralités des chrétiens sont-elles plus illustres, puisqu'elles ont pour spectateurs un Dieu et son Christ! Combien l'appareil en doit-il être plus magnifique, puisque tous les anges et toutes les puissances des cieux s'y doivent trouver; puisque le prix qu'on remporte n'est pas un chariot ou le consulat, mais la vie éternelle; puisqu'on n'y cherche pas une vaine faveur du peuple, mais qu'on y reçoit un royaume céJeste!

Mais afin de faire plus de confusion à ceux qui possédés de l'amour des richesses ne s'en servent point pour leur salut, et qu'ils rougissent de leur lâcheté, imaginons-nous que le diable, environné des ses esclaves et de ses suppôts, vienne en la présence de Jésus-Christ, et comparant ceux qui sont à lui avec son peuple lui tienne ce discours : Je n'ai point été fouetté ni souffleté pour ceux que vous voyez avec moi; je n'ai point souffert le supplice de la croix ni répandu mon sang pour eux; je ne leur promets

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point un royaume céleste, ni de leur rendre le paradis et l'immortalité; et cependant voyez quels présens ils me font; combien ils sont précieux, combien ils leur coûtent de travail et de dépense! Ils ont engagé ou vendu pour cela tout ce qu'ils avaient de plus cher; et si leur spectacle n'est accompagné d'éclat et de magnificence, on les chasse avec injure et infâmie, et quelquefois même ils courent danger d'être lapidés. Montrez-m'en si vous pouvez parmi ceux qui sont instruits de vos préceptes, et qui doivent recevoir des récompenses célestes pour les biens de la terre, parmi ces riches qui régorgent d'aise et de biens, qui vous fassent des présens de cette sorte, et qui pour vous donner des spectacles aussi magnifiques, engagent et vendent leurs héritages ou plutôt les échangent contre les trésors du ciel. D'ailleurs, dans ces présens que l'on me fait, personne n'est nourri, personne n'est vêtu, personne n'est soulage; tout y est consumé entre ceux qui les donnent et ceux qui les regardent, et toute cette folle dépense se termine à un plaisir d'un instant. Mais vous, vous êtes vêtu et nourri dans vos pauvres, et vous promettez la vie éternelle à ceux qui les assistent; et nonobstant cela à peine vos serviteurs peuvent-ils être comparés à mes esclaves. Que répondrons-nous à cela, mes très-chers frères? Comment défendrons-nous l'avarice et l'inhumanité des personnes riches, qui sont sur ce point dans un aveuglement prodigieux? Quel prétexte alléguerons-nous, nous qui ne voulons pas faire la moindre chose en reconnaissance de ce que Jésus-Christ a souffert la mort et versé son sang pour nous, et qui sommes inférieurs aux esclaves du diable? NotreSeigneur nous a donné des préceptes; il a instruit ses serviteurs de ce qu'ils doivent faire; il a promis des récompenses à ceux qui feront de bonnes œuvres et menacé du supplice ceux qui n'en feront point, et ainsi il nous a appris par avance l'arrêt qu'il doit prononcer un jour. Quelle excuse peut donc aporter celui qui ne fait point l'aumône? de quelle défense se peutil servir? Et puisque le serviteur ne fait pas ce qu'on lui commande, le mattre n'aura-t-il pas droit d'exécuter ses menaces? Car voici de quelle sorte il parle sur ce sujet : «Lorsque le Fils de l'homme, dit-il, viendra dans sa gloire, accompagné de tous les anges, il s'assiéra sur son

trone, et toutes les nations de la terre seront assemblées en sa présence. Il les séparera les uns avec les autres comme un berger sépare les brebis d'avec les boucs, et il mettra les brebis à sa droite et les boucs à sa gauche. Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, vous que mon père a bénis, recevez le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde. Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire; j'ai eu besoin de logement, et vous m'avez logé ; j'ai été nu, et vous m'avez habillé; j'ai été malade, et vous m'avez assisté; j'ai été en prison, et vous m'ètes venus voir. Alors les justes lui diront: Seigneur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim, et que nous vous avons donné à manger; ou avoir soif, et que nous vous avons donné à boire? Quand est-ce que nous vous avons vu saus logement, et que nous vous avons logé; ou sans habits, et que nous vous avons habillé? Et quand est-ce que nous vous avons vu malade ou en prison, et que nous vous sommes venus visiter? Et le Roi leur répondra: Je vous dis en vérité que lorsque vous avez fait toutes ces choses aux moindres de mes frères, c'est à moi-même que vous les ävez faites. Il dira ensuite à ceux qui seront à sa gauche Retirez-vous de moi, maudits, et allez au feu éternel que mon Père a préparé pour le | diable et pour ses anges. Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez point donné à manger ; j'ai eu soif, et vous ne m'avez point donné à boire; j'ai eu besoin de logement, et vous ne m'avez point logé; j'ai été nu, et vous ne m'avez point vêtu; j'ai été malade et en prison, et vous ne m'avez point visité. Et les méchans lui diront nt aussi Seigneur, quand est-ce que nous vous avons vu avoir faim ou soif, ou manquer de loge ment et d'habits, ou être malade et en prison, et que nous ne vous avons point assisté? Et il leur répondra: Je vous dis en vérité qu'autant de fois que vous avez manqué à rendre ces assistances aux moindres de ces petits, vous avez manqué à me les rendre à moi-même. Et alors ceux-ci iront dans les flammes éternelles, et les justes dans la vie éternelle 1.» Qu'est-ce que Jésus-Christ nous pouvait dire de plus puissant? Comment nous pouvait-il exciter davantage aux

1 Matth., 25, 31.

œuvres de miséricorde, qu'en déclarant que tout ce qu'on donne aux pauvres, c'est à luimême qu'on le donne, et que c'est l'offenser que de ne les point secourir, afin que si nous n'étions point touchés de compassion pour nos frères, nous le fussions au moins pour lui; et si nous méprisions les souffrances d'un serviteur, nous pensassions à notre maître qui souffre en celui que nous méprisons? C'est pourquoi, mes très chers frères, tous tant que nous sommes qui avons la crainte de Dieu, et qui foulant le monde aux pieds nous élèvons vers le ciel, travaillons, par l'ardeur de notre foi et de notre zèle et par l'exercice continuel des bonnes œuvres,à acquérir de nouveaux mérites. Revêtons ici-bas Jésus-Christ, afin qu'il nous revête un jour de l'immortalité. Nourrissons-le en ee monde, afin d'être assis en l'autre au banquet céleste avec Abraham, Isaac et Jacob. Semons beaucoup, afin de recueillir beaucoup. Tâchons d'assurer notre salut tandis que nous le pouvons, suivant ce conseil de l'apôtre : « Pendant que nous en avons le temps, dit-il, faisons du bien à tous, mais principalement à ceux qui demeurent dans la maison de foi 1. Et ne nous lassons point de bien faire, car nous ferons la récolte en son temps2. » Considérons, mes trèschers frères, ce que les fidèles faisaient sous les apôtres, lorsque la vertu était encore florissante, lorsque la foi des nouveaux chrétiens était vive et embrasée d'une ardente charité. Ils vendaient alors leurs maisons et leurs héritages, et en donnaient libéralement le prix aux apôtres pour le distribuer aux pauvres ; et par là ils s'acquéraient des demeures éternelles. Leurs bonnes œuvres étaient en aussi grand nombre que leur union était grande. Or comme nous le voyons dans les actes: «La multitude de ceux qui croyaient n'agissait que par une même âme et un même esprit. Personne ne considérait ce qu'il possédait comme lui appartenant, mais toutes choses étaient communes3. » C'est là véritablement devenir enfant de Dieu, c'est imiter sa justice; car tout ce qui est à Dieu est commun à tous les hommes, et nul n'est exclus de ses grâces et de ses bienfaits. Ainsi le jour éclaire également tout le monde, le soleil répand ses rayons partout; la pluie arrose toutes les

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terres, le vent souffle en tout pays, un même sommeil est pour tous, et tous voient la lumière de la lune et des étoiles. Celui donc qui, à l'exemple d'une si belle égalité, partage ses revenus avec ses frères, imite Dieu en quelque sorte. Quelle sera la gloire et la joie des personnes charitables, lorsque Notre-Seigneur, faisant la revue de son peuple, et récompensant selon ses promesses nos mérites et nos bonnes œuvres, nous donnera des biens célestes pour des biens terrestres, des choses éternelles pour des choses passagères, beaucoup pour peu; lorsqu'il nous présentera à son Père, après nous avoir sanctifiés et rendus dignes de lui; lorsqu'il nous communiquera l'immortalité qu'il nous a acquise par son sang; lorsqu'il nous fera rentrer dans le paradis et nous ouvrira le royaume des cieux? Imprimons fortement ces choses dans notre ame; que la foi nous les fasse comprendre; que la charité nous les fasse aimer, et tâchons de les mériter par une suite continuelle d'actions libérales et généreuses. L'aumône, mes très-chers frères, est quelque chose d'excellent et de divin; c'est la consolation des fidèles, le gage de notre salut, le fondement de notre espérance, le

bouclier de notre foi, le remède de nos péchés; c'est une chose grande et aisée tout ensemble; c'est une couronne qu'on remporte dans le temps de la paix et qui est exempte des périls de la persécution; c'est un des plus grands dons de Dieu, nécessaire aux faibles, glorieux aux forts, et utile à tous les chrétiens pour obtenir les grâces du ciel, pour se rendre Jésus-Christ favorable au jour du jugement, et pour mettre Dieu mème au nombre de nos débiteurs. Combattons à l'envi pour remporter cette palme; courons tous dans la carrière de la justice où nous avons Dieu et Jésus-Christ pour spectateurs; et puisque nous nous sommes déjà élevés au-dessus du monde, qu'aucun de ses faux biens ne soit capable de retarder notre course. Si le jour de la mort ou de la persécution nous trouve ainsi dégagés, prompts, et occupés à bien faire, Notre-Seigneur ne manquera point de nous donner la récompense que nous méritons. Il mettra sur notre tête une couronne d'une blancheur éclatante si nous triomphons dans la paix, et y en ajoutera une autre de couleur de pourpre si nous demeurons victorieux dans la persécution.

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DE LA

CONDUITE PRESCRITE AUX VIERGES.

La discipline qui est la gardienne de l'espérance, l'ancre de la foi, le guide du chemin du salut, qui cultive et augmente les avantages d'un bon naturel, et qui est la maîtresse de la vertu, nous fait immuablement demeurer en Jésus-Christ et vivre en Dieu, et nous conduit ensuite aux récompenses célestes qui nous ont été promises. Il est donc aussi avantageux de la suivre que dangereux de la négliger. C'est ce que le Saint-Esprit déclare dans les psaumes: «Gardez la discipline, de peur que le Seigneur ne se mette en colère, et que vous ne périssiez en vous égarant du droit chemin, lorsque sa colère s'allumera tout d'un coup contre vous 1.

1 Psaume 2, 12.

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Et encore: «Mais Dieu a dit au pècheur : pourquoi vous mêlez-vous d'expliquer ma loi et de parler de mon alliance, vous qui haissez la discipline, et qui ne tenez compte de mes paroles 1?» Nous lisons encore, que «< celui qui rejette la discipline est misérable 2. » Et Salomon nous donne ce précepte de sagesse : «Mon fils, ne négligez point la discipline du Seigneur, et ne vous découragez point lorsqu'il vous reprend; car le Seigneur reprend celui qu'il aime 3. » Que si Dieu aime ceux qu'il reprend, et qu'il ne les reprenne que pour les coriger, il n'y a point de doute non plus que les fidèles et surtout les évêques ne haïssent pas, mais

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