Page images
PDF
EPUB

est défendu d'endurer pour Dieu. Vous élevez des statues à ces héros profanes: vous gravez leurs éloges sur le marbre et l'airain, pour éterniser leur nom, s'il était possible : vous vous efforcez par là de les rappeler en quelque sorte à la vie : le héros chrétien, qui attend de Dieu la véritable récompense, et qui souffre pour lui dans cette espérance, vous le regardez comme un insensé.

Pour vous, dignes magistrats, assurés comme vous l'êtes des applaudissemens du peuple, tant que vous lui immolerez des chrétiens, condamnez-nous, tourmentez-nous, écrasez-nous : votre injustice est la preuve de notre innocence; c'est pourquoi Dieu permet que nous soyons persécutés. Dernièrement, condamnant une chrétienne à ètre exposée dans un lieu infâme plutôt qu'au lion, vous avez reconnu que la perte de la chasteté est pour nous le plus grand des supplices, et plus terrible que la mort

mème.

Mais vos cruautés les plus raffinées ne servent

de rien: c'est un attrait de plus pour notre religion. Nous multiplions à mesure que vous nous moissonnez notre sang est une semence de chrétiens. Plusieurs de vos philosophes ont écrit des traités pour engager à souffrir la douleur et la mort, comme Cicéron ses Tusculanes, Sénèque, Diogène, Pyrrhon, Callinicus: mais les exemples des chrétiens sont plus éloquens que tous les ouvrages des philosophes. Et cette invincible fermeté dont vous nous faites un crime est une instruction. Qui peut en être témoin sans être ébranlé, sans vouloir en pénétrer la cause? Quand on l'a pénétrée, ne vient-on pas se joindre à nous? Ne désire-t-on pas de souffrir pour obtenir la grâce de Dieu, pour acheter au prix de son sang le pardon de ses péchés? Car il n'en est point que le martyre n'efface c'est pour cela que nous vous remercions des arrêts que vous portez contre nous. Mais que les jugemens de Dieu sont opposés à ceux des hommes ! Tandis que vous nous condamnez, Dieu nous absout.

TRAITÉ

DES PRESCRIPTIONS CONTRE LES GENTILS.

I. Les circonstances présentes m'obligent d'avertir qu'on ne s'étonne point ni qu'il y ait des hérésies, car elles ont été prédites, ni qu'elles renversent la foi de quelques personnes, car Dieu ne les permet que pour mettre notre foi à l'épreuve. C'est donc sans fondement que le grand nombre se scandalise de ce que les hérésies font tant de progrès. Eh! que serait-ce s'il n'y en avait point?

II. Lorsqu'une chose est, elle a nécessairement et sa cause finale pour laquelle elle est, et son énergie propre qui en fait l'essence, et sans quoi elle ne peut être. Nous ne sommes pas surpris que la fièvre, ce principe de douleur et de mort pour l'homme, existe ni qu'elle mine le corps humain : telle est sa nature. Par conséquent si nous sommes effrayés que les

hérésies puissent ébranler et mème déraciner la foi, nous devons l'ètre d'abord qu'elles existent; car n'existant que pour produire cet effet, elles ont nécessairement ce pouvoir dès qu'elles existent. C'est parce que nous savons que la fièvre est un mal, et par sa cause finale et par sa nature, qu'elle nous effraie sans nous étonner. Ne pouvant l'extirper, nous faisons tous nos efforts pour nous en garantir. Mais pourquoi nous étonner que les hérésies qui nous brûlent de feux bien plus dévorans, et qui donnent la mort éternelle, puissent avoir de tels effets, au lieu d'empêcher qu'elle ne les aient? C'est uniquement ce dernier point qui dépend de nous.

Au reste elles n'ont de pouvoir qu'autant que nous nous en laissons effrayer: troublés par la

frayeur, nous nous scandalisons; et en nous scandalisant nous nous persuadons que ce pouvoir ne vient que de la vérité. Il serait étonnant sans doute que le mal eût tant de pouvoir, si c'était sur d'autres que sur des hommes faibles dans la foi. Dans les combats d'athlètes et de gladiateurs, le victorieux n'est pour l'ordinaire ni brave ni encore moins invincible; mais il a eu en têteun faible adversaire. Aussi lui en opposet-on un plus courageux ? Le vainqueur est vaincu à son tour. Il en est de même des hérésies; puissantes par notre faiblesse, elles ne peuvent rien sur une foi ferme et solide.

III. Les âmes faibles sont encore entraînées par la chute de certains personnages. Comment, dit-on, des personnes si sages, si fermes, si éprouvées dans l'Église, ont-elles pu passer dans le parti de l'erreur? Ceux qui font l'objection pourraient eux-mêmes y répondre, que ces personnes n'étaient dans le fond rien de tout ce qu'on suppose, puisque l'hérésie les a perverties.

Mais d'ailleurs est-il bien extraordinaire que des hommes d'une vertu à l'épreuve se soient démentis dans la suite ? Saül, distingué parmi tout son peuple, succombe bientôt à la jalousie. David, ce prince selon le cœur de Dieu, est souillé du double crime d'adultère et d'homicide. Salomon, comble des dons de Dieu, rempli de sa sagesse, est plongé dans l'idolatrie par ses femmes. Il était réservé au Fils de Dieu seul de persévérer jusqu'à la fin sans péché. Quoi, si un evêque, si un diacre, si une veuve, si une vierge, si un docteur, si un martyr mème tombe dans l'hérésie, en sera-t-elle plus vraie? Jugeons-nous de la foi par les personnes, ou des personnes par la foi ? Point de sage que le fidèle, point de grand homme que le chrétien, point de chrétien que celui qui aura persévéré jusqu'à la fin.

Homme, vous ne connaissez d'un autre homme que l'extérieur vous croyez ce que vous voyez, vous ne voyez que jusqu'où porte votre vue; l'œil de Dieu seul est perçant. «<<Il lit au fond des cœurs, tandis que l'homme s'arrête à la physionomie1.» Aussi, «Dieu connaît ceux qui sont à lui; il arrache toute plante que son père n'a point plantée 2.» «Il nous fait voir les

[merged small][ocr errors][merged small]

derniers parmi les premièrs; il tient le van dans sa main, pour nettoyer son aire1. » Que la paille légère vole au gré du premier souffle des tentations, le froment en sera plus pur dans les greniers du Seigneur.

N'y eut-il pas même plusieurs disciples du Sauveur qui se scandalisèrent de lui et l'abandonnèrent 2? mais les autres ne lui en restèrent pas moins attachés. Sachant qu'il venait de Dieu, «et qu'il était la parole de vie,» ils l'accompagnèrent jusqu'à la fin, quoiqu'il leur eût laissé la liberté de se retirer s'ils le jugeaient à propos. Ce fut un de ses apôtres qui le trahit; après cela il n'y a pas lieu d'être surpris que son apôtre ait été abandonné par un Phygellus, un Hermogène, un Philétus, un Hymenée. Nous nous étonnons de voir ses églises abandonnées de quelques personnes; mais ce que nous souffrons à l'exemple de Jésus-Christ est ce qui montre que nous sommes chrétiens. «Ils sont sortis d'entre nous, dit son disciple bien-aimé, mais ils n'étaient pas des nôtres. S'ils en eussent été, ils seraient demeurés avec nous 3. »

IV. Souvenons-nous des oracles du Seigneur et de ses apôtres, qui en nous prédisant qu'il y aurait des hérésies, nous ont ordonné de les fuir. Et comme nous ne sommes pas troublés parce qu'il y en a, nous ne devons pas être surpris des suites qu'elles ont, et pour lesquelles il nous est recommandé de les fuir. Le Seigneur nous avertit << qu'il viendra un grand nombre de loups ravissans sous des peaux de brebis 3.» Quelles sont ces peaux de brebis, sinon les dehors du christianisme ? Quels sont ces loups ravissans, sinon des esprits trompeurs, qui se tiennent cachés pour ravager le troupeau de Jésus-Christ? Qui sont les faux prophètes, sinon les docteurs de l'erreur ? Qui sont les faux apôtres, sinon des corrupteurs de l'Évangile ?? Qui sont les antechrists à présent et dans tous les temps, sinon des hommes rebelles à JésusChrist? Il y a actuellement des hérésies qui n'infectent pas moins l'Église du venin de leurs erreurs que l'antechrist ne la déchirera aa jour par les cruautés inouïes de la persécution; avec cette différence que la persécution fait des

[merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]
[merged small][ocr errors]

Il fallait, selon l'apôtre, qu'il y eût des héresies pour faire connaître ceux qui sont à Tépreuve et des fureurs de la persécution et de la séduction de l'hérésie; car saint Paul appelle pas «hommes à l'épreuve» ceux qui abandonnent la foi pour l'hérésie, quoiqu'ils s'efforcent d'interpréter en leur faveur un autre texte du même apôtre qui dit : « Examinez tout, et gardez ce qui est bien 2. » Comme si, après avoir mat examiné, on ne pouvait pas se tromper en choisissant ce qui est mal.

V. Si l'apôtre s'élève contre les schismes et les divisions, qui sont saus contredit des maux, et si immédiatement après il leur joint les hérésies, il témoigne par là qu'il les regarde comme un mal et un mal plus considérable, puisqu'il croit qu'il y a des schismes et des divisions, parce qu'il sait qu'il faut qu'il y ait méme des hérésies.» La perspective d'un plus grand mal lui en rend un plus léger vraisembiable. Il prend de là occasion d'avertir qu'il He faut pas se laisser troubler par les plus fortes tentations, dont le but est de faire connaitre les vertus à l'épreuve, celles que l'hérésie n'a pu ébranler. Enfin si le passage de l'apòtre ne tend qu'à maintenir l'union et à éteindre toutes les divisions, et si les hérésies ne sont pas moins contraires à l'union que les schismes; il s'ensuit manifestement que l'apôtre range les hérésies et les schismes dans la même classe, et qu'il est bien éloigné par conséquent de regarder comme des hommes à l'épreuve ceux qui se sont séparés par l'hérésie; d'autant plus qu'il condamne toute séparation, et qu'il recommande de parler et de penser tous de même, ce que ne permet point l'hérésie.

VI. Ne nous arretons pas davantage sur ce sujet, puisque c'est le même apôtre qui, dans l'épitre aux Galates 3, met l'hérésie au nombre des péchés de la chair, et conseille à Tite de fuir tout hérétique après une première correction, parce qu'il est perverti et condamné par lui-même.» Dans presque toutes ses épitres saint Paul nous inculque qu'il faut éviter les fausses doctrines. Il désigne sous ce nom les hérésies, dont ces fausses doctrines sont le fruit.

[blocks in formation]

Hérésie vient d'un mot grec qui signifie choix, parce que l'hérétique choisit effectivement la doctrine qu'il invente ou qu'il adopte. C'est pourquoi l'apôtre dit que l'hérétique ést condamné par lui-même; car c'est de lui même qu'il a choisi la doctrine qui le fait condamner. Pour nous il ne nous est permis ni d'inventer ni de choisir ce qu'un autre aurait inventé. Nous avons pour auteurs les apòtres du Seigneur, qui eux-mêmes n'ont rien inventé ni choisi, mais qui ont transmis fidèlement à l'univers la doctrine qu'ils avaient reçue de Jésus-Christ. Aussi quand un ange viendrait du ciel nous annoncer un autre Évangile, nous lui dirons anathème. Le Saint-Esprit nous avait prévenus que l'ange séducteur 3 transformé en ange de lumière obsèderait la vierge Philumène 4. C'est lui dont les prestiges ont engagé Apelle à inventer une une nouvelle hérésie.

VII. Ce sont là les doctrines des hommes et des démons, nées de la sagesse profane pour charmer les oreilles curieuses 6. Le Seigneur a traité cette sagesse de folie?, et a choisi ce qui est folie selon le monde, pour confondre la philosophie. La philosophie qui entreprend témérairement de sonder la nature de la divinité et de ses décrets, a fourni matière à cette sagesse profane. C'est elle en un mot qui a inspiré toutes les hérésies. De là viennent les Éons, et je ne sais quelles formes bizarres, et la trinité humaine de Valentin, qui avait été platonicien. De là le dieu bon et indolent de Marcion, sorti des stoïciens. Les épicuriens enseignent que l'âme est mortelle. Toutes les écoles de philosophie s'accordent à nier la résurrection des corps. La doctrine qui confond la matière avec Dieu est la doctrine de Zénon. Parle-t-on d'un dieu de feu; on suit Héraclite. Les philosophes et les hérétiques traitent les mèmes sujets, s'embarrassent dans les mêmes questions: « D'où vient le mal, et pourquoi est-il? d'où vient l'homme, et comment ?» Et ce que Valentin a proposé depuis péu: «Quel est le principe de Dieu ?» A l'entendre, c'est la pensée et un avorton.

Que je plains Aristote d'avoir inventé pour

[blocks in formation]

eux la dialectique, cet art de la dispute, également propre à détruire et à édifier, vrai Protée dans ses systèmes, bizarre dans ses conjectures et dans le choix de ses sujets, contraire à ellemême, sans cesse défaisant tout ce qu'elle vient de faire!

De là ces fables 1, ces généalogies sans fin, ces questions oiseuses, ces discours qui gagnent comme la gangrène, contre lesquels vcut nous prémunir l'apôtre, qui dans son épître aux Colossiens avertit de se tenir en garde contre la philosophie 2.« Prenez garde que quelqu'un ne vous trompe par le moyen de la philosophie, et des discours séducteurs, selon la tradition des hommes, et contre la sagesse du Saint-Esprit.» Il avait été à Athènes, où il avait connu par lui-même cette sagesse profane, qui se vante d'enseigner la vérité qu'elle corrompt, et divisée en plusieurs sectes, qui sont, comme autant d'hérésies, ennemies jurées les unes des autres.

Mais qu'y a-t-il de commun entre Athènes et Jérusalem, l'Académie et l'Église, les hérétiques et les chrétiens? Notre secte vient du portique de Salomon, qui nous a enseigné à chercher Dieu avec un cœur simple et droit. A quoi pensaient ceux qui prétendaient nous composer un christianisme stoïcien, platonicien et dialecticien ?

VIII. Nous n'avons pas besoin de curiosité après Jésus-Christ, ni de recherches après l'Évangile. Quand nous croyons, nous ne voulons plus rien croire au delà. Nous croyons mème qu'il n'y a plus rien à croire.

Je viens à une objection dont les nôtres se servent pour autoriser leur curiosité, et les hérétiques pour nous embarrasser. Il est écrit, dit-on: «< Cherchez et vous trouverez 3. » Faisons attention au temps dans lequel Jésus-Christ dit ces paroles : c'était dans les commencemens de sa prédication, lorsque tout le monde doutait s'il était le Christ, lorsque Pierre n'avait pas encore déclaré qu'il le reconnaissait pour le Fils de Dieu, lorsque Jean, qui en était assuré, venait de mourir. C'est donc avec bien de la raison que Jésus-Christ disait : «Cherchez et vous trouverez,» lorsque, n'étant pas encore il fallait nécessairement le chercher.

[blocks in formation]

Au reste tout ceci regarde les Juifs qui étaier à portée de chercher le Christ: «Ils ont, disaitlui-même, Moïse et Élie ', » c'est-à-dire, la loi les prophètes qui annoncent Jésus-Christ. C'e ce qu'il dit encore plus ouvertement ailleurs «Consultez vos Écritures, dont vous espéré le salut, car elles parlent de moi 2 : » c'est-à-dir «cherchez et vous trouverez. »

Il est évident que la suite du texte s'adress aux Juifs: « Frappez et on vous ouvrira. » Autre fois les Juifs seuls étaient dans l'Église de Dieu d'où ils furent chassés pour leur infidélité. Le gentils au contraire en étaient exclus à un trè petit nombre près, qu'on peut comparer à un goutte d'eau ou à un' grain de poussière. O celui qui a toujours été dehors frappera-t-il où il n'a jamais été ? Connaît-il une porte où il n'a point été admis, par laquelle mème il n'est jamais sorti? Mais celui qui a été introduit et chassé dans la suite, connaît la porte et peut y frapper.

Les paroles suivantes, «demandez et vous recevrez, » conviennent à ceux qui savaient à qui ils devaient demander, et qui avaient de lui des promesses: je veux dire le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, que les gentils ne connaissaient pas plus que ses promesses. C'est pourquoi le Sauveur disait : « Je ne suis envoyé qu'aux brebis perdues de la maison d'Israël 3.» Il ne jetait pas encore aux chiens le pain des enfans; il n'avait pas encore ordonné d'aller chez les gentils.

Ce ne fut qu'après sa résurrection qu'il envoya ses disciples enseigner et baptiser toutes les nations, après qu'ils auraient reçu le SaintEsprit, qui devait bientôt leur apprendre toute vérité, comme il arriva en effet. Si les apôtres, chargés d'enseigner les nations devaient avoir cux-mêmes le Saint-Esprit pour maître, il est bien certain que ces paroles, «cherchez et vous trouverez,» ne nous regardaient point, nous que les apôtres devaient venir chercher pour nous instruire, après avoir été instruits euxmêmes par le Saint-Esprit. A la vérité toutes les paroles de Notre-Seigneur sont pour tous : des Juifs qui les ont entendues elles sont venues jusqu'à nous. Mais comme pour l'ordinaire elles

[blocks in formation]

las regardent directement, elles renferment moins des leçons pour nous que des exemples. IX. Je veux bien ne pas faire valoir tous mes avantages; supposons que ces paroles, «<cherchez et vous trouverez,» s'adressent à tout le monde; on conviendra cependant qu'il faut consulter la raison pour en découvrir le véritable sens. Pour pénétrer les oracles divins, il ne faut pas s'arrêter à la terre: il est nécessaire d'en approfondir l'esprit et l'énergie.

Je commence par poser un principe trèslumineux : c'est que Jésus-Christ a enseigné pour tous les peuples un symbole de foi fixe et invariable, que tout le monde est obligé de croire, et qu'on doit chercher par conséquent pour le trouver et le croire. Mais ce symbole unique et invariable ne demande point des recherches infinies. Cherchez jusqu'à ce que vous trouviez, croyez quand vous aurez trouvé : alors il ne vous reste plus qu'à garder ce que Vous croyez; pourvu cependant que vous croyiez que vous n'avez rien de plus à chercher ni à croire, dès que vous avez trouvé, et que Vous croyez ce qu'a enseigné celui qui vous défend de rien chercher au delà.

Si quelqu'un est incertain de ce que JésusChrist a enseigné, on lui démontrera que la doctrine de notre divin maître ne se trouve que chez nous. Assuré de la force de mes preuves, et craignant que certaines personnes ne donnent une interprétation arbitraire et déraisonnable à ces paroles, « cherchez et vous trouverez, je les préviens qu'elles n'ont rien à chercher au delà de ce qu'elles ont cru devoir chercher.

X. Au reste, toute cette discussion peut se réduire à trois points; la chose même, ou l'objet des recherches; le temps, ou quand il faut chercher; le terme, ou jusqu'à quand. Il faut chercher ce que Jésus-Christ a enseigné, tant que vous n'avez pas trouvé, et jusqu'à ce que vous trouviez. Vous avez trouvé quand vous avez cru, car vous n'auriez point cru si vous n'aviez pas trouvé. Comme vous n'avez cherché que pour trouver, vous ne trouvez que pour croire; en croyant, vous mettez fin à toutes vos recherches; le fruit même de vos recherches, quand Vous l'avez recueilli, vous avertit de vous arrêter. Voilà aussi le terme que vous a marqué celui qui vous ordonne de ne croire, et par consé

quent de ne chercher que ce qu'il a enseigné. Mais si par la raison que les uns ont enseigné une chose, les autres une autre, nous voulons chercher tant que nous pourrons trouver, il faut nous attendre à chercher toujours et à ne croire jamais. Oui, quel sera le terme de mes recherches et de mes découvertes, le point fixe de ma croyance? Chez Marcion? Mais Valentin me crie de son côté : «Cherchez et vous trouverez. » Chez Valentin? Apelle me tient le même langage. Ébiou, Simon, tous en un mot emploient le même artifice pour m'attirer à leur parti. Je ne pourrai donc me fixer nulle part, tant que je suivrai tous ceux qui me crieront: « Cherchez et vous trouverez ; » comme si je ne pouvais trouver en aucun lieu, en aucun temps, ce que Jésus-Christ a enseigué, ce qu'il faut chercher, ce qu'il est néces saire de croire.

XI. C'est sans conséquence qu'erre ainsi de côté et d'autre quiconque n'abandonne rien : on a droit seulement de lui reprocher ses courses vagabondes. Mais si j'ai cru ce que je devais croire en effet, et qu'après cela je m'imagine que je dois chercher encore, j'espère donc trouver quelque chose de plus; or je ne puis l'espérer que parce qu'avec l'air de croire, je ne croyais pas réellement, ou parce que j'ai cessé de croire. Mais si je renonce à la foi me voilà apostat; en un mot, si je cherche, c'est que je n'ai pas encore trouvé, ou que j'ai perdu. Cette femme de l'Evangile avait perdu une de ses dix drachmes: c'est pourquoi elle la cherchait. Mais l'a-t-elle trouvée, elle met fin à ses recherches. Un homme n'avait pas de pain: c'est pour cela qu'il frappait à la porte de son voisin. Dès qu'on lui a ouvert, et qu'on lui a donné ce qu'il demandait, il cesse de frapper 2. Une veuve sollicitait une audience de son juge, qui refusait de l'entendre: dès qu'elle l'a obtenue, elle demeure tranquille 3. Tant il est vrai qu'il doit y avoir un terme à tout, soit qu'on cherche, qu'on frappe, ou qu'on demande. Car << on donnera à celui qui demande, dit JésusChrist; on ouvrira à celui qui frappe, et quiconque cherche trouvera 4. »

[ocr errors]

Faites-y attention, vous qui cherchez tou

[blocks in formation]
« PreviousContinue »