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l'ange du Seigneur préside aux eaux et qu'il les agite pour le salut des hommes, puisque le mauvais ange se sert du même élément pour leur perte. S'il paraît étrange que l'ange intervienne à cet effet admirable des eaux, l'exemple de ce qui arrivait autrefois suffit pour lever tout scrupule. Un ange descendait du ciel et remuait l'eau de la piscine probatique qu'on appelait en hébreu bethsaïde1. Les malades attendaient cette agitation pour recouvrer leur santé; le premier qui descendait dans ces eaux ainsi agitées était infailliblement guéri. Ce remède corporel était une figure du remède spirituel que nous recevons, comme il arrive assez ordinairement que les choses matérielles nous élèvent à la connaissance des choses spirituelles.

La grâce de Dieu s'étant répandue ensuite plus abondamment sur les hommes, les eaux ont reçu une plus grande vertu et l'ange un plus grand pouvoir. Ce qui guérissait autrefois les corps guérit aujourd'hui les âmes; ce qui procurait une santé temporelle nous procure le salut éternel; et ce qui autrefois ne délivrait qu'un seul homme chaque année en délivre aujourd'hui une infinité en effaçant le péché; car dans le baptême la coulpe est remise, et la peine l'est aussi. C'est ainsi que l'homme rentre dans l'amitié de Dieu, en devenant semblable à ce premier homme qui fut autrefois créé à l'image de Dieu. L'image se rapporte à l'original, qui regarde l'éternité. C'est alors que l'homme recouvre cet esprit saint qu'il avait reçu au commencement par le souffle de Dieu, mais qu'il perdit ensuite par sa désobéissance.

Je ne veux pas dire que les eaux nous donnent le Saint-Esprit, mais l'eau à laquelle l'ange préside, nous purifiant de nos crimes, nous prépare à le recevoir cet Esprit saint. Nous avons encore de ceci une figure qui avait précédé le baptême- sacrement. Car comme Jean fut le précurseur du Seigneur en lui préparant ses voies, de même l'ange préposé au baptême dirige les voies au Saint-Esprit par le moyen de l'eau qui lave et qui efface le pé. ché mais avec la profession de foi que nous faisons, et qui est scellée du sceau du Père et du Fils et du Saint-Esprit, que nous prenons

1 Joan., 5.

tous trois à témoin 1. Car si un témoignage est établi sur la parole de trois témoins, combien plus notre espérance est-elle solidement établie sur le nombre des trois personnes divines, puisque nous avons ainsi pour garans de notre salut les mêmes qui sont les cautions de notre foi? Notre profession de foi et la promesse du salut étant donc engagées sur les trois divines personnes qui en répondent, il faut nécessairement qu'on fasse mention de l'Église ; car là où se trouvent le Père, le Fils et le Saint-Esprit, là se trouve aussi l'Église, qui est le corps mystique des trois personnes divines.

VI. Au sortir du bain salutaire on fait sur nous une onction sainte, suivant l'ancienne cérémonie où l'on avait coutume de prendre de l'huile renfermée dans une fiole pour en oindre ceux que l'on consacrait au sacerdoce. C'est ainsi qu'Aaron fut sacré par son frère Moïse 2. C'est de même aussi que Jésus est appelé Christ, du mot chrême, qui marque l'onction par laquelle Dieu le Père l'a rempli de son esprit saint; suivant ce qui est rapporté dans les Actes: «Ils se sont véritablement assemblés en cette ville contre votre saint Fils, que vous avez oint 3. » Ainsi l'onction que nous recevons se fait à la vérité sur la chair; mais son effet se répand dans l'âme. De même l'action du baptême est extérieure, puisqu'il n'y a que le corps qui soit plongé dans l'eau: mais l'effet en est tout spirituel, puisque nous sommes purifiés de nos péchés.

VII. Après cela on nous impose les mains en invoquant et attirant sur nous le Saint-Esprit par la prière qui accompagne cette sainte cérémonie. Nous avons une figure authentique de ceci dans l'Ancien Testament. Le patriarche Jacob ayant fait venir deux de ses petits-fils, Ephrem et Manassès, tous deux enfans de Joseph, les bénit en mettant et croisant ses mains sur leurs têtes. On peut dire qu'en croisant ainsi ses mains, il représenta par avance la forme de Jésus-Christ en croix : cc fut comme un présage de la bénédiction que nous devons recevoir ensuite par Jésus-Christ.

VIII. C'est donc alors que l'Esprit très-saint descend volontiers du sein du Père sur les corps ainsi purifiés et bénis il se repose sur les

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caux du baptême, comme s'il reconnaissait son ancien trône. Il descendit de même sur notre Seigneur sous la figure d'une colombe1. Il voulait nous faire ainsi connaître son caractère par la simplicité et l'innocence de cet oiseau aimable et doux : car on assure que les colombes n'ont point de fiel. C'est pour cela que JésusChrist dit à ses disciples: «Soyez simples comme les colombes 2. » Ainsi après le déluge, qui lava les iniquités des hommes, la colombe, sortie de l'arche et revenue ensuite avec une branche d'olivier, annonça la paix au monde en faisant entendre que la colère de Dieu était apaisée (on sait que parmi les gentils l'olivier est aussi le symbole de la paix); de même aussi tôt que notre terre, c'est-à-dire notre corps terrestre a été lavé de ses anciens péchés dans les eaux salutaires du baptême, le Saint-Esprit, cette céleste colombe, vole sur nous en nous apportant la paix de Dieu. Elle descend du ciel, comme elle sortit jadis de l'arche, qui était la figure de l'Église. Mais le monde s'est souillé ensuite de nouveaux crimes, et c'est pour cela qu'il doit être purifié de nouveau par le feu, aussi bien que l'homme, qui retombe dans de nouveaux péchés après son baptême. Ce que je dis ici en passant, les pécheurs doivent l'écouter comme un avis salutaire que je leur donne.

IX.Voyez donc combien d'avantages du côté de la nature, combien de priviléges du côté de la grâce, combien de cérémonies solennelles, combien de témoignages et de figures ont annoncé de tout temps le sacrement et la vertu admirable de l'eau. En premier lieu lorsque le peuple d'Israël sortit de la captivité d'Égypte, comment évita-t-il les poursuites de Pharaon?? Ce fut en traversant les eaux de la mer Rouge: mais les mêmes eaux engloutirent ce roi avec toute son armée. Quelle figure plus manifeste du sacrement de baptême ? Les nations sont délivrées de l'esclavage du siècle; et le démon, cet ancien tyran, perd son orgueilleux pouvoir dans les eaux. En second lieu l'eau, d'amère qu'elle était, redevient douce dès que Moïse la touche avec une branche de bois. Le bois de cette branche représentait la croix, à laquelle Jésus-Christ a été attaché pour convertir, par sa vertu divine, en des eaux salutaires des

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eaux autrefois insipides et empoisonnées : ces eaux salutaires sont les eaux du baptême. Elles étaient encores figurées par l'eau que Moise fit miraculeusement sortir de la pierre, et qui accompagnait le peuple d'Israël1. Or, si cette pierre était Jésus-Christ, il est hors de doute que les eaux du baptême sont bénies en JésusChrist 2.

Pour nous confirmer davantage dans la foi du baptême, considérons encore l'estime spéciale que Dieu et son Fils font de l'eau. Il semble que cet élément accompagne toujours Jésus-Christ. D'abord il est baptisé lui-même dans les eaux du Jourdain3. Les premiers essais qu'il fait de son souverain pouvoir, c'est lorsqu'il change l'eau en vin aux noces de Cana1. Lorsqu'il enseigne les peuples, il invite tous ceux qui ont soif à venir boire de cette eau éternelle, qui n'est autre que lui 5. Autre part il déclare qu'un verre d'eau donné pour l'amour de lui est une œuvre de charité qui ne serâ point sans récompense 6. Il se délasse aux eaux du puits de Jacob 7; il marche sur les eaux; il traverse souvent le lac de Génézareth; il verse de l'eau dans un bassin pour laver les pieds de ses disciples. Enfin, le témoignage du baptême persévère jusqu'à la passion. Lorsque cet Homme-Dieu est condamné à la mort, l'eau intervient à cette condamnation, et c'est quand Pilate se lave les mains en abandonnant Jésus-Christ à la fureur des Juifs9. Enfin, lorsqu'il est blessé après sa mort, il sort de l'eau dé

son côté.

X. Jusqu'ici nous avons parlé, autant que notre capacité médiocre l'a pu permettre, de tout ce qui peut servir de fondement à la sainteté du baptême. Je vais maintenant poursuivre, le moins mal que je pourrai, ce qui reste à expliquer touchant la nature de ce sacrement. Voici d'abord des questions à quoi il faut répondre. La première fut proposée par le Sei gneur lui-même aux pharisiens, à l'occasion du baptême que Jean prêchait 10. Le baptême de Jean, leur demanda-t-il, était-il céleste, ou terrestre ? Ils n'eurent garde de rien répondre: ils étaient embarrassés, parce qu'ils ne voulaient pas croire ce qu'il fallait. Pour nous,

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nous pouvons décider, selon les règles de notre foi, que le baptême de Jean était divin, en ce que Dieu l'avait commandē; mais sans y avoir attaché aucune vertu surnaturelle. Car l'Ecriture nous apprend que Dieu avait à la vérité envoyé Jean pour baptiser; mais quant à la nature de ce baptême, il n'y avait rien qué d'humain. Par lui-même il ne produisait point la grâce; il disposait seulement l'homme à la recevoir par le moyen de la pénitence, qui est au pouvoir de l'homme. Les pharisiens, et les docteurs de la loi, n'ayant pas voulu croire, ne firent point aussi pénitence. S'il est donc vrai qué cette pénitence était seulement quelque chose d'humain, il faut nécessairement que le baptême fût de même condition. Autrement s'il edt été céleste, il aurait donné le Saint-Esprit et la rémission des péchés; mais il n'y a que Dieu qui remette les péchés, et qui donne le Saint-Esprit. D'ailleurs le Seigneur déclarait lui-même qu'avant qu'il fût retourné à son Père le Saint-Esprit ne descendrait point1. Or ce que le maltre ne donnait point encore, pensez-vous que le serviteur pût le donner?

Nous trouvons en effet dans les Actes des apôtres que ceux qui avaient reçu le baptême de Jean n'avaient pas reçu le Saint-Esprit, dont ils n'avaient pas même entendu parler 2. Par conséquent ce qui ne produisait pas des effets célestes n'était point céleste. Puisque d'ailleurs ce que Jean avait reçu de céleste, c'est-à-dire l'esprit de prophétie, vint tellement à lui manquer, après que toute la plénitude du SaintEsprit fut passée dans le Seigneur, que ne connaissant presque plus celui dont il avait annoncé l'avènement prochain, il lui envoya demander s'il était véritablement le Messie qui devait venir3. Ce baptême de la pénitence ne faisait donc que disposer à la rémission et à la sanctification qu'on devait obtenir ensuite par JésusChrist; car quoique Jean prêchât le baptême de la pénitence pour la rémission des péchés, cela ne doit néanmoins s'entendre que d'une rémission future. La pénitence précède, la rémission ne vient qu'après, et c'est ce qui s'appelle préparer la voie. Or celui qui prépare n'est pas le même que celui qui achève; il dispose seulement, afin qu'un autre mette la

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dernière main. Jean avoue lui-même que ce qu'il faisait n'était point céleste; cela n'appartenait qu'à Jésus-Christ. « Celui qui vient de terre, disait-il, parle un langage terrestre; mais celui qui vient d'en haut est au-dessus de tous1.» Enfin il déclaré que pour lui il ne donne qu'un baptême de pénitence; mais qu'il viendrait bientôt un autre plus grand que lui, qui baptiserait dans le Saint-Esprit et dans le feu2; c'est-à-dire que comme les vrais fidèles sont purifiés par le baptème d'eau pour leur sanctification, de même les hypocrites et les infidèles recevront un baptême de feu pour leur condamnation.

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Quelqu'un dira peut-être le Seigneur est venu sans qu'il ait néanmoins baptisé; car nous lisons, lisons, «< ce n'était pas cependant Jésus qui baptisait, c'étaient seulement ses disciples 3. » Il semble pourtant qu'il avait été prédit par Jean que Jésus baptiserait lui-même de ses propres mains. Je réponds que les paroles de Jean doivent être entendues selon une manière de parler assez commune. On dit, par exemple, l'empereur a publié un édit; le gouverneur a fait souffrir la flagellation à un tel. Est-ce que l'empereur publie lui-même ? est-ce que le gouverneur donne lui-même les coups ? Le maître est toujours censé agir, lorsque ses gens exécutent ses ordres. C'est de la même sorte qu'il faut expliquer ces paroles: Il vous baptisera, c'est-à-dire vous serez baptisés ou par lui ou en lui. Quelques autres seront encore surpris que Jésus-Christ ne baptisât pas luimême; mais quel aurait pu être son baptême ? Eût-ce été celui de la pénitence? Qu'aurait-il eu affaire de précurseur? Eût-ce été un baptême pour la rémission des péchés ? Mais il ne lui en coûterait qu'un mot pour les remettre. Eût-ce été un baptême administré en son propre nom? Il prenait trop de soin de se cacher sous le voile de l'humilité. Enfin, aurait-il baptisé dans le Saint-Esprit, lorsque cet Esprit n'était pas encore descendu du Père; ou au nom de l'Église, quand les apôtres n'avaient pas encore commencé de la former ? C'étaient donc les apôtres qui baptisaient en qualité de ministres de Jésus, ainsi que son précurseur l'avait fait auparavant ; et ils ne conféraient que

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le baptême de Jean; on ne doit pas s'imaginer qu'ils en donnassent un autre; car il n'y en a point d'autre que celui que Jésus-Christ institua ensuite, et qui ne pouvait encore alors être administré par les disciples, puisque le Seigneur n'était point parvenu au plus haut degré de sa gloire, et qu'il n'avait pas encore établi l'efficacité du baptême sur sa passion et sur sa résurrection. Or notre mort ne devait être détruite que par sa passion, et notre vie rétablie que par sa résurrection.

Nous ne pouvons ignorer d'ailleurs que nul ne saurait être sauvé sans le baptême; c'est le Seigneur qui nous le déclare lui-même par ces paroles «Nul ne peut obtenir la vie, s'il ne renaît de l'eau 1.» Là-dessus, certains esprits pointilleux ou téméraires proposent cette question S'il est certain que sans le baptême il n'y a point de salut, comment est-ce que les apôtres ont pu être sauvés? car nous ne trouvons point qu'ils aient été baptisés dans le Seigneur, excepté saint Paul. De plus, si le seul Paul entre les apôtres a reçu le baptême de Jésus-Christ, il faut ou que ceux qui n'ont pas reçu ce baptême soient condamnés pour vérifier l'oracle du Sauveur, ou que cet oracle soit faux s'ils ont été sauvés sans le baptême. Dieu m'est témoin que j'ai entendu des gens raisonner de la sorte et je l'affirme, afin qu'on ne me croie pas assez bizarre pour imaginer ou supposer de gaieté de cœur des difficultés, pour satisfaire une démangeaison d'écrire, et pour avoir le stérile plaisir d'exciter des scrupules dans les autres.

Je m'en vais donc répondre le mieux qu'il me sera possible à ceux qui nient que les apôtres aient été baptisés. Je dis d'abord : s'il est vrai, comme il paraît incontestable, que les apôtres avaient reçu le baptême humain de Jean, ils souhaitaient sans doute de recevoir le céleste baptême de Jésus-Christ, puisque ce divin Sauveur avait déclaré qu'il n'y a qu'un baptême, lorsqu'il dit à Pierre, qui se refusait de se laisser laver les pieds : «Celui qui est une fois sorti du bain 2 » n'a pas besoin d'y rentrer une seconde. Certainement il n'aurait point parlé de la sorte à un homme qui n'aurait pas été baptisé; et c'est une nouvelle preuve contre

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ceux qui prétendent que les apôtres reçurent le baptême de Jean, afin de pouvoir rejeter le baptème de Jésus-Christ. Est-il croyable que la voie du Seigneur, c'est-à-dire le baptème de Jean, n'ait pas été préparée à ceux qui étaient eux-mêmes destinés à montrer la voie du Seigneur à tout l'univers? Jésus-Christ, tout impeccable qu'il était, a voulu néanmoins être baptisé, et des pécheurs n'auront pas besoin de l'être!

Cependant, répliquera-t-on, n'est-il pas vrai que plusieurs n'ont pas été baptisés ? J'en conviens, mais ce ne sont pas assurément les disciples de Jésus-Christ: ce sont tout au plus les ennemis de la foi, entre autres les scribes et les pharisiens; d'où je tire cette conséquence, que si les adversaires de Jésus-Christ n'ont pas voulu recevoir le baptème, ses amis l'ont véritablement reçu, pour ne pas imiter la folle sagesse de ses ennemis. Depuis surtout que Jésus-Christ leur maître eût rendu un si glorieux témoignage de Jean par ces paroles : « Entre les enfans des femmes, il n'en a pas paru de plus grand que Jean-Baptiste 1. »

Quelques autres disent que les apôtres furent suffisamment baptisés, lorsque étant dans la barque ils furent couverts des flots de la mer2; que Pierre lui-même fut assez plongé lorsqu'il marcha sur les eaux du lac de Génézareth3. Pour moi, je pense au contraire qu'il y a bien de la différence entre être couvert d'eau par la violence d'une tempête, et être lavé par un acte de religion. Cette barque au reste n'était qu'une figure de l'Église, qui est agitée dans la mer de ce monde par des tourmentes continuelles; c'est-à-dire par les tentations et les persécutions tandis que le Seigneur semble dormir tranquillement, jusqu'à ce que, éveillé enfin par les prieres des saints, il apaise les flots du siècle et calme la crainte des siens.

Enfin, que les apôtres aient été baptisés d'une manière ou d'une autre, ou qu'ils aient vécu jusqu'à la fin sans baptème, il suffit de savoir que c'est nous en particulier que regarde cet oracle de Jésus-Christ qui nous fait entendre dans la personne de Pierre qu'il n'y a qu'un baptême. Du reste, c'est témérité que de vouloir nous ériger en juges du salut des apôtres.

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Comme si la grâce de leur vocation et le privilége d'avoir été ensuite les amis inséparables de Jésus-Christ n'aurait pas pu leur tenir lieu de baptême; d'autant plus qu'ils étaient les disciples chéris de celui qui promettait le salut à tous ceux qui croyaient en lui: «Votre foi, disait-il, vous a guéri1. » Et ailleurs : «< Vos péchés vous sont remis 2, » disait-il à un autre qui avait la foi, mais qui sans doute n'avait pas reçu encore le baptême. Si cette grâce de rémission a manqué aux apôtres, je ne comprends pas comment la foi des autres aura été plus efficace que la leur. L'un abandonne son bureau des fermes au premier mot que lui dit le Sauveur 3; l'autre renonce à son père, à sa barque et au métier qui le faisait vivre; enfin cet autre 5, qui ne retourna pas même ensevelir son père, obéit à la voix de Jésus-Christ avant même qu'il lui eût entendu dire : « Celui qui me préfère son père ou sa mère n'est pas digne de moi 6. »

XIII. Quelques-uns, également audacieux et impies, proposent encore plusieurs questions. Si la foi, disent-ils, suffit, le baptême n'est donc pas nécessaire. Or Abraham devint agréable à Dieu sans autre sacrement que celui de la foi. Je réponds: les lois postérieures prévalent à celles qui ont précédé. Supposons qu'on ait pu être sauvé par la foi seule, avant la passion et la résurrection de Jésus-Christ; mais quand on nous a imposé une nouvelle obligation de croire en sa nativité, en sa passion et en sa résurrection, il a été ajouté en même temps un nouveau sacrement. C'est le baptème, qui est comme le sceau de notre foi et comme un ornement dont est revêtue cette vertu, laquelle était autrefois une foi nue, et ne pouvait rien sans l'observation de la loi. Or la nécessité du baptême a été imposée, et la forme en a été prescrite. «Allez, dit le Seigneur aux apôtres, enseignez toutes les nations; baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit 7.» Cette loi est clairement confirmée par cet autre arrêt définitif: « Nul ne peut entrer dans le royaume des cieux s'il ne renaît de l'eau et du Saint-Esprit 8.» Paroles qui nous marquent indubitablement la nécessité du baptême. Depuis

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cet oracle, tous ceux qui commencèrent d'entrer au nombre des fidèles furent baptisés. Dès que Paul eut cru, il reçut le baptême. Le Seineur le lui avait recommandé dans le temps qu'il le rendit aveugle. «Levez-vous, lui ditil, entrez dans Damas, et là on vous apprendra ce que vous devez faire 1, >> c'est-à-dire que vous devez recevoir le baptême. C'était la seule chose qui manquait à Paul; car du reste il avait assez appris et suffisamment cru que Jésus de Nazareth était le fils de Dieu.

XIV. A propos de l'apôtre saint Paul, on propose de nouvelles difficultés sur ce qu'il dit : «Le Seigneur ne m'a pas envoyé pour baptiser2. >> Peut-on s'imaginer que l'apôtre parlant de la sorte prétendit détruire le baptême, et ne baptisa-t-il pas lui-même Caïus, Crispus et toute la famille d'Étienne 3? D'ailleurs, quand JésusChrist n'aurait pas envoyé Paul pour baptiser, ne savons-nous pas qu'il avait commandé aux autres apôtres de le faire? Enfin saint Paul n'écrivait de la sorte aux Corinthiens que par rapport à ce qui se passait alors parmi eux. On lui avait appris qu'ils en étaient venus à des schismes et à des divisions: «Je suis à Paul,» disait l'un; « je suis à Apollo,» disait l'autre. C'est pour cela que cet apôtre, amateur de la paix, pour ne point paraitre partisan des uns plutôt que des autres, dit qu'il n'a point été envoyé pour baptiser, mais pour prècher; car il faut commencer par prêcher et ensuite baptiser. Or, celui qui a eu le pouvoir de prêcher a pu aussi baptiser.

XV. Je ne sais si l'on attaque le baptême par d'autres sophismes également frivoles.Quoi qu'il en soit, je vais reprendre ce que j'avais omis ci-devant, pour ne pas laisser les principales questions indécises. Il n'y a qu'un seul baptême, comme nous l'apprenons par l'Évangile de Jésus-Christ et par les épîtres de l'apôtre : « Un seul Dieu, un seul baptème, une seule Église3. Cet unique et véritable baptême se trouve seulement parmi nous; mais pour ce qui regarde les hérétiques, il faut examiner ce qu'on doit observer avec eux : la chose est de notre compétence. Or les hérétiques n'ont point de part à notre discipline; dès qu'ils sont séparés de notre communion, nous devons les regarder

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Act., 9. — I. Cor., 1. — 3 Ib. — * Ib.— 3 Ephes., 4.

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