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sentent pas le prix de la vertu de conti» nence; il n'y a que ceux qui en ont reçu "le don. Il y en a qui sont eunuques par la "naissance, il y en a qui le sont par l'injure » qu'on leur a faite, il y en a qui se sont » rendus tels, pour s'assurer le royaume des » Cieux. Que celui qui pourra suivre cette " maxime, la suive." Voilà le second Conseil évangélique, le choix de la vertu opposée à la plus naturelle et la plus forte des passions. Mais cette vertu n'est pas pour tout le monde.

Pour être de dignes enfants de Dieu, il faut porter la bienfaisance, la générosité, la patience au plus haut point. C'est pour cela que Jésus-Christ dit à ses disciples1 : « Je » ne veux pas que vous opposiez jamais au» cune résistance aux méchants. Mais si » quelqu'un vous frappe sur une joue, pré» sentez encore l'autre. Si l'on veut vous » faire un procès pour avoir votre tunique, » donnez encore votre manteau. Si quel» qu'un vous engage à l'accompagner l'es"pace de mille pas, faites-en encore deux " mille avec lui. Aimez vos ennemis, faites» leur du bien, prêtez sans attendre aucun » retour, et votre récompense sera grande, » et vous serez de dignes enfans du Très

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Haut, qui fait sentir les effets de sa bonté aux ingrats même et aux méchants.

La vertu est quelque chose de si respectable et de si beau1, et les récompenses de la vertu sont si magnifiques, que pour l'assurer et la conserver, les grandes ames sont toujours prêtes à faire les efforts les plus héroïques et les sacrifices les plus généreux. C'est à ces grandes ames que Jésus-Christ dit, pour les diriger: « Si quelqu'un veut venir » après moi, il faut qu'il renonce à lui-même, qu'il porte sa croix, et qu'il me suive. Car » celui qui voudra accorder à son ame les » satisfactions qu'elle desire naturellement,

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la perdra; et celui qui les lui refusera à " cause de moi, la sauvera. » Ensuite, pour faire connoître combien l'amour qu'on doit à Dieu, est supérieur à celui qu'on doit aux créatures, il ajoute : « Si quelqu'un, venant

à moi, ne hait pas son père, sa mère, sa » femme, ses enfants, ses frères et ses sœurs,” (c'est-à-dire, n'est pas prêt à s'en détacher, quand les intérêts de Dieu seront en concurrence avec ceux des créatures,) il ne peut pas être mon vrai Disciple.

Enfin, pour faire comprendre avec quelle vigueur on doit sacrifier tout ce qu'on auroit dé plus cher, quand il s'agit d'éloiguer les

* Matth. 15.

●bstacles ou les dangers de la vertu, il em-i ploie les expressions les plus énergiques et les plus fortes, quoique métaphoriques: » Si " votre œil vous scandalise1, dit-il, arrachez "le, et le jetez loin de vous; si votre main "vous scandalise, coupez-la, et jettez-la » loin de vous: si votre pied vous scandalise, » coupez-le aussi-tôt," parce qu'on ne peut acheter à trop haut prix le Royaume des Cieux.

L'Evangile présente encore un grand nombre d'autres maximes semblables à celles. que nous venons de rapporter : Ies unes, sur l'indifférence que les grandes ames doivent avoir pour les choses de la terre, vu ce qui leur est réservé dans le Ciel; les autres, sur le courage avec lequel elles doivent s'abandonner aux soins de la Providence; celles-ci, sur l'aimable candeur qu'on doit porter dans: le commerce de la vie; celles-là, sur la joie avec laquelle on doit supporter les persécutions des méchants. Mais ce que nous avons présenté, suffit bien pour faire juger de la sublime sagesse de ces divins Conseils..

Matth. 5.- 2. Mare, 9+

§. II.

Les Conseils évangéliques sont dignes d'une Religion comme celle de Jésus-Christ.

Si l'on chargeoit MM. les philosophes de tracer le plan d'une Religion qui fût véritablement digne de Dieu, et propre à honorer ses perfections infinies, par les hommages et par les vertus les plus pures, les plus généreuses, et qui caractérisassent mieux les grandes ames: il est très-probable que parmi ces vertus, ils ne mettroient ni la modestie, ni l'humilité, ni la chasteté, ni la continence, ni l'éloignement de tout ce qui flatte les passions humaines. Ils se contenteroient de cette parole vague et fastueuse :

Qu'on soit juste, il suffit: le reste est arbitraire1.

Mais une Religion qui est puisée dans le sein même de Dieu; qui a pour auteur un Homme-Dieu, qui nous donne de si sublimes connoissances des grandeurs de Dieu; une Religion qui nous présente un si grand intérêt, de si hautes récompenses, et qui a pour premier observateur le Divin Législateur lui

Volt. Poème sur la Loi naturelle,

même; une pareille Religion devoit nous proposer des vues bien supérieures à tout ce qui peut éclore des cerveaux philosophiques, et des vertus bien plus pures que celles que voudroient bien adopter et admettre certains raisonneurs, que personne ne mettra sûrement au rang des hommes les plus vertueux.

Il étoit donc digne de cette Religion, dé former des hommes qui en prouvassent la divinité par l'héroïsme de leurs vertus; qui se montrassent supérieurs à toutes les passions humaines, qui fussent pénétrés d'un amour pour Dieu, capable de lui sacrifier le monde, ses honneurs, ses trésors, ses plaisirs, leur sang et leur vie même ; qui fussent tellement remplis du Ciel, qu'ils ne regardassent la terre qu'avec dédain; qui pussent dire avec la même assurance que cet Apôtre tout de feu : « Oui, j'en suis sûr, que ni la » mort, ni la vie, ni les puissances immor" telles, ni celles de la terre, ni le présent, » ni l'avenir, ni aucune créature ne pourront " m'arracher cet amour dont je me sens » brûlé pour mon Dieu, et qui m'est inspiré "par Jésus-Christ. "

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Qu'est-ce que la philosophie nous présentera de comparable à cet héroïsme, à cette générosité, à ces divins transports? Qu, que trouvera-t-on ici qui ne soit pas souverainement digne d'un Législateur Homme-Dieu ?

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