La revue de Paris, Volume 19

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Bureau de la Revue de Paris, 1912
 

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Page 619 - J'ai envie de voler, de nager, d'aboyer, de beugler, de hurler. Je voudrais avoir des ailes, une carapace, une écorce, souffler de la fumée, porter une trompe, tordre mon corps, me diviser partout, être en tout, m'émaner avec les odeurs, me développer comme les plantes, couler comme l'eau, vibrer comme le son, briller comme la lumière, me blottir sur toutes les formes, pénétrer chaque atome, descendre jusqu'au fond de la matière, — être la matière...
Page 866 - Même chose dans l'art, la passion ne fait pas les vers, et plus vous, serez personnel, plus vous serez faible. J'ai toujours péché par là, moi ; c'est que je me suis toujours mis dans tout ce que j'ai fait...
Page 636 - Il me semble que je suis devenu une statue sur les bords du fleuve du temps, que j'assiste à quelque mystère d'où je vais sortir vieux ou sans âge... Je me sens anonyme, impersonnel, l'œil fixe comme un mort, l'esprit vague et universel comme le néant ou l'absolu; je suis en suspens, je suis comme n'étant pas.
Page 209 - Lorsque, dans le silence de l'abjection, l'on n'entend plus retentir que la chaîne de l'esclave et la voix du délateur, lorsque tout tremble devant le tyran, et qu'il est aussi dangereux d'encourir sa faveur que de mériter sa disgrâce, l'historien paraît, chargé de la vengeance des peuples. C'est en vain que Néron prospère. Tacite est déjà né dans l'empire; il croît inconnu auprès des cendres de Germanicus, et déjà l'intègre Providence a livré à un enfant obscur la gloire du maître...
Page 671 - Rien ne surpasse, pour l'intérêt déchirant, l'exécution à mort et le spectacle de ces deux religieuses si belles, contraintes de prendre les grands verres de ciguë que leur présentent les prêtres délégués par l'archevêque de Naples. Les mou-vements convulsifs de ces jeunes filles et les paroles qui leur échappent quand elles embrassent celles de leurs amies qui avaient préféré se donner la mort avec un poignard n'ont rien d'égal dans aucune tra-gédie.
Page 606 - Car vous avez beau me prêcher, je ne puis pas avoir un autre tempérament que le mien, ni une autre esthétique que celle qui en est la conséquence.
Page 852 - N'importe, bien ou mal, c'est une délicieuse chose que d'écrire, que de ne plus être soi, mais de circuler dans toute la création dont on parle. Aujourd'hui par exemple, homme et femme tout ensemble, amant et maîtresse à la fois, je me suis promené à cheval dans une forêt, par un après-midi d'automne, sous des feuilles jaunes, et j'étais les chevaux, les feuilles, le vent, les paroles qu'ils se disaient et le soleil rouge qui faisait s'entrefermer leurs paupières noyées d'amour.
Page 619 - ... la sève pousser dans les plantes, les coraux rouler dans les solitudes de l'Océan. Et dans la sympathie de cette effusion contemplative, nous aurions voulu que notre âme, irradiant partout, allât vivre dans toute cette vie pour revêtir toutes ses formes, durer comme elles, et, se variant toujours, toujours pousser au soleil de l'éternité ses métamorphoses ! Mais l'homme n'est fait pour goûter chaque jour que peu de nourriture, de couleurs, de sons, de sentiments, d'idées.
Page 636 - Cet état est contemplation et non stupeur ; il n'est ni douloureux, ni joyeux, ni triste; il est en dehors de tout sentiment spécial comme de toute pensée finie. Il est la conscience de l'être et la conscience de l'omnipossibilité latente au fond de cet être.
Page 7 - Je désire... que vous lui disiez que frappée du caractère et de la franchise que je lui ai reconnus dans les deux jours que nous avons passés ensemble, je désire fort pouvoir savoir par lui ce que nous avons à faire dans la position actuelle.

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