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Y-L'ORPHELINAGE COMPOSÉ. La garantie du bonheur des enfants est jouissance principale pour les père et mère : l'état conjugal ne garantit en aucun cas ce bien-être des orphelins. Les précautions de tutelle et curatelle ne suffisent nullement à préserver l'orphelin de lésion et spoliation.

Il y a plus l'enfant est souvent orphelin négatif, dans les cas très-fréquents où des père et mère inhabiles dissipent le patrimoine qui devait lui échoir. Il est aussi malheureux et peut-être plus que s'il était orphelin positif par leur décès prématuré; d'où il suit que l'état conjugal expose les enfants à deux orphelinages, sans garantie contre les lésions qui en doivent résulter. Aucun de ces vices ne peut se reproduire dans l'état sociétaire, qui pourtant ne spécule pas sur le lien conjugal.

Corollaire. S'il est vrai que cette union maritale soit un gage de bonheur, d'où vient qu'une jeune veuve, qui jouit de quelque aisance, est réputée très-heureuse, plus qu'elle ne pouvait l'être du vivant de son mari, et que l'opinion chez les deux sexes proclame le bonheur des jeunes veuves, surtout quand elles savent conserver leur liberté, ne pas tomber de Charybde en Scylla, du joug d'un mari sous le joug d'un hâbleur sentimental, mais se réserver l'indépendance en amours et le droit de changer d'amants?

Telle est la classe de femmes civilisées dont chacun vante le bonheur. Il n'en existe donc ni pour les femmes, ni pour les hommes dans le lien conjugal. En effet, la jeune femme n'est réputée heureuse que lorsqu'elle est veuve, ou lors-> qu'elle a un mari assez débonnaire pour se départir des droits conjugaux, ne voir dans les alentours de l'épouse aucune liaison suspecte, l'élever au rang de LICENCIÉE en mariage, libre sous la tutelle d'un maître fictif. Telles sont les deux sortes de jeunes femmes citées comme heureuses; mais, dans l'une ou l'autre condition de veuve ou licenciée, le bonheur de la jeune femme consiste à échapper au joug conjugal. Ce lien constitue donc le malheur et non le bonheur des femmes, dans le cas où les statuts en sont strictement observés.

Quant aux hommes, si on recueille leurs votes, on en trouvera les 7/8es en jérémiades sur les tribulations du mariage, surtout chez le pauvre, qui ne connaît du ménage que les misères. Mais à consulter les riches mêmes, qui n'ont à se

plaindre ni d'inconduite, ni de lésion sur la dot, ni de mauvais caractère d'une épouse, on en voit encore la grande majorité s'écrier: « Quelle folie, quelle galère que ce mariage : >> ah! si c'était à refaire, on ne m'y prendrait pas! >>

Ce lien perpétuel fut donc imaginé pour le malheur des hommes et des femmes; les rares exceptions confirment le principe général. Il faut le redire sans cesse à tant d'ergoteurs qui allèguent des exceptions pour des règles.

Résumant sur cette analyse, je demanderai quel mari peut se flatter d'échapper à ces 16 disgrâces, dont souvent une seule suffit à faire le malheur de sa vie? Sur 100 individus mariés depuis 10 ans, n'en trouvera-t-on pas 99 qui auront à se plaindre, non pas d'une seule, mais de deux ou trois de ces disgrâces? Quelle source de leurre, en fait de bonheur, que ce lien de mariage, à moins de grande fortune! Quelle pauvreté de génie dans cette politique et cette morale, qui, en opposition au sérail vexatoire pour les femmes, n'ont su imaginer qu'un lien vexatoire pour les femmes et les hommes à la fois! tant il est vrai que la civilisation reproduit en mode composé tous les vices qu'on voit en mode simple dans l'état barbare!

En indemnité de ces misères conjugales dont on pourrait doubler et tripler le tableau, la morale promet aux époux des jouissances paternelles. Quelle garantie en offre-t-elle? et à supposer une famille en plein accroissement, voyons de combien de mécomptes est menacé un père civilisé.

On en va juger par une table synoptique des levains de discorde que la civilisation crée entre les enfants et les pères, dans les régions les plus vantées pour leur morale et leur saine doctrine, comme l'Europe moderne, la Grèce antique et la Chine, tant prônée par l'abbé Raynal.

C'est ici de ces vérités qu'il faudrait taire, si l'on n'apportait le remède au mal; mais la découverte de l'antidote n'étant pas douteuse, les pères devront lire avec plaisir le tableau de leurs mécomptes et de leurs torts, soit pour se convaincre de la déraison qui règne dans les calculs et devoirs d'affection réciproque entre enfants et pères, soit pour reconnaître combien l'on avait besoin d'une science autre que la philosophie, et d'une société autre que la civilisation, pour arriver à un équilibre passionnel en relations de famille.

Gamme des germes de discorde entre Pères
et Enfants civilisés.

!

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Vices d'autorité abusive.

1. Partialité injuste jusqu'au ridicule.

2.

Dégoûts causés par l'abus de l'autorité paternelle. 3. Frustration, exhérédation en faveur des préférés.

Vices de Mécanique faussée.

4. Monotonie de la vie de famille, fatigante pour l'enfant que l'instinct pousse à la vie sériaire.

5. Ignorance des enfants en bas âge sur les titres de paternité. 6. Contraste qu'ils remarquent dans l'adolescence entre les prétentions des pères et les motifs illusoires dont elles s'appuient.

7. Délais et expectative d'hoirie.

8. Suggestion d'époux mécontents l'un de l'autre par suite d'avarice ou vexation; item des voisins, parents et valets.

Vices de cupidité dénaturée..

9. Abandon des naturels, dits bâtards.

10. Vente des enfants, quand la loi y souscrit. 11. Mutilation physique et morale des enfants. 12. Exposition et infanticide,

★ INÉGALITÉ tierce des dosES D'AFFECTION RÉCIPROQUE.

L'examen des germes de discorde remplirait un immense chapitre il est force de le renvoyer aux équilibres de famillisme, et se borner à quelques lignes sur le K et le .

:

K Incompatibilité de caractères et de goûts.

Les pères civilisés ignorent qu'il existe une échelle de 810 caractères formant 415 titres bien distincts en hommes; 395 en femmes; plus, quelques transcendants hors de gamme.

Il est donc très-possible qu'un homme qui a six enfants,

et à plus forte raison celui qui n'en a que deux, rencontre en eux des titres et penchants fort antipathiques avec lui. La nature les jette au hasard sur la masse, comme le semeur jette sans choix les grains de blé. De là vient qu'un père juge trèsvicieux des enfants qui ne le sont point du tout, et qui, au contraire, peuvent être d'un titre plus élevé et plus précieux que le sien. Il n'en résulte pas moins entre eux une incompatibilité qui disparaîtra en Harmonie, où les 810 titres sont tous utilisés, et où chaque père, voyant sous ses yeux l'emploi fructueux de tous, ne blâme ni ne reprimande un enfant, pour disparate de goûts avec ses père et mère.

Entretemps l'ignorance, qui règne aujourd'hui sur le clavier général des caractères, devient une source de discordes familiales aussi fréquentes que mal fondées; c'est un désordre inévitable en civilisation; un vice inhérent à l'état morcelé ou insociétaire appelé doux ménage, bien rude pour les couples sans fortune qui composent le grand monde.

Inégalité tierce des doses d'affection réciproque.

Les pères se plaignent sans cesse de n'être pas aimés autant qu'ils aiment, ne pas obtenir moitié de l'affection qu'ils croient leur être due. Ils vont accuser la nature d'injustice criante, en apprenant qu'elle veut, en civilisation, limiter la tendresse filiale au tiers de la paternelle. Eux-mêmes connaîtront bientôt la justice de cette loi, et sa nécessité en équilibre général, où, le père obtiendra un retour d'affection filiale en dose de quatre pour trois : il recueillera en ce genre plus qu'il n'aura semé, quoique dégagé des soins d'éducation.

Quant à présent, les pères n'obtiennent en retour d'affection qu'un pour trois; dose tierce et insuffisante sans doute : encore ce faible lot est-il celui des pères aimés, des plus heureux : il en est une foule qui n'obtiennent pas 1/6o de retour, grand nombre pour qui l'enfant n'a que de l'indifférence, et quelquefois de l'aversion, déguisée ou non. Il importera de leur bien démontrer cette disgrâce, puisqu'elle touche à sa fin et que le remède en est découvert.

Il en sera de même des douze autres disgrâces dont je diffère l'analyse elle prouvera que la politique et la morale sont au superlatif d'impéritie, en voulant établir le bonheur familial dans les ménages morcelés ou insociétaires, en fon

dant leurs présomptions sur quelques familles riches qui sont l'exception et non la règle, et qui encore ne s'élèvent pas, enc ce genre de bonheur, au quart du charme familial dont jouira chaque père en Harmonie.

8 3. RELIGION. Il conste, d'après les tableaux précédents,

Que nos usages engendrent, en relations d'amour et de famille, tous les désordres anti-politiques et anti-moraux ; · exclusion de toute vérité, et déception des époux et des pères dans leurs espérances de bonheur.

En principe, on ne saurait se refuser à convenir :

4. Qu'il faut spéculer sur un changement de période so- * ciale, et par suite un changement de mœurs et usages, si l'on veut établir la vérité et l'unité dans les relations industrielles, domestiques ou familiales.

2. Qu'on ne peut établir la vérité dans les relations majeures (ambition et amitié), si on ne l'introduit pas dans les relations mineures (amour et famillisme), dont la fausseté gangrène de proche en proche tout l'ensemble du système social.

On adhèrera facilement à ces deux principes; mais quel ques personnes scrupuleuses pourront critiquer l'application.. que j'en fais, les usages que l'état sociétaire substitue aux nôtres, usages renvoyés à la troisième génération d'Harmonie, mais dont l'exposé est nécessaire dans une théorie d'équílibre passionnel, où il faut spéculer sur le futur comme sur [ le présent.

-Plus d'un père pourra répugner à penser que sa troisième [4 ou 5e] génération adopterait des mœurs contraires aux lois religieuses actuelles sur la chasteté, le mariage, la fidélité conjugale, etc.

Il est à propos de rassurer sur ce sujet les personnes pieuses. Une courte dissertation va lever les scrupules et récon-:: cilier avec les mœurs d'Harmonie même les consciences les plus timorées.

On objecte : « Que le mariage exclusif et permanent étant » l'état voulu par Dieu, ordonné dans ses commandements,

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