Page images
PDF
EPUB

tion réelle. Ils admettaient les représentations de ce dieu, rendaient à ces représentations même un culte; mais c'était surtout Dieu qu'ils adoraient.

Après le Yémen, le Hedjâz est la seule partie de l'Arabie qui ait une histoire propre, et encore cette histoire est-elle bien loin de présenter un récit suivi. Pour en reconstituer quelques lambeaux, c'est aux annales juives et assyro-chaldéennes qu'il faut surtout avoir recours. Les premières notions. recueillies sur ce sujet apprennent que le Hedjâz était peuplé par les Djorhom de race jectanide, auxquels étaient récemment venus se joindre les Catoûra, lorsqu'Ismaël, fils d'Abraham, ou mieux ses descendants, les Ismaélites, s'y établirent. Ces derniers, unis aux Djorhom, chassèrent bientôt les Catoûra et se développèrent lentement à côté, et sous la protection de leurs puissants alliés, jusqu'au moment où l'empire des Djorhom, qui avait duré plusieurs siècles, se trouvant affaibli par les victoires de Nabuchodorossor, ils purent se fondre avec eux, les dominer même à leur tour. Gardiens de la sainte Caâba, ils formèrent le groupe le plus important de la population de l'Arabie.

Bien que les Arabes des temps anciens aient été tout aussi cultivateurs que nomades, les déserts qui séparent les parties cultivables de leur pays les forçaient à de perpétuels déplacements; ce qui leur a inspiré, comme à tous les peuples voyageurs, un goût marqué pour la poésie. Tout devint chez eux thème de légendes, leur histoire même s'en ressent au point qu'il est presque impossible aujourd'hui

d'y distinguer la fiction de la réalité. Si cette tendance a ses inconvénients, il est juste de reconnaître qu'elle prête à leur histoire un charme qu'on ne retrouve dans les annales d'aucun autre peuple. Cette poésie, qui n'est pas sans valeur puisqu'elle est une forme de l'élévation des idées, est malheureusement le seul contingent que, tant qu'ils sont restés en Arabie, les Arabes aient apporté au perfectionnement de l'intelligence humaine. Aucun progrès scientifique ne leur est dû jusqu'à l'époque de leur grand développement.

Au point de vue religieux, ce qu'on a dit des habitants du Yémen, on peut le répéter pour toutes les populations de l'Arabie. Le monothéisme, tout défiguré qu'il fût sur un grand nombre de points, était la croyance dominante. Pour tout Arabe, Allah était le Dieu unique, le Dieu tout-puissant, le grand Dieu; et l'introduction d'une sorte de spiritualisme devait trouver plus tard dans cette croyance une base qui la faciliterait singulièrement.

A côté du monothéisme, le fétichisme était pratiqué sur une large échelle. Des arbres particuliers, des pierres, la plupart aréolithiques comme celles de la sainte Caâba, étaient adorés à l'égal des dieux, et devenaient l'occasion de nombreux pèlerinages dont le but réel était certainement l'établissement et la conservation de relations commerciales, première nécessité pour un peuple absolument privé d'industrie. Les Arabes des premiers temps historiques croyaient vaguement à l'immortalité de l'âme ; mais il n'est sorti de leurs institutions aucune

grande idée morale qui ait sa place dans les progrès réalisés par l'humanité durant les prolégomènes de l'histoire. Ils eurent des qualités morales sérieuses; mais elles furent pendant de longs siècles comme un feu couvant sous la cendre dont la flamme ne jaillit, plus tard, qu'au contact du christianisme.

CHAPITRE II

INDIENS.

Il n'existe pas d'appellation géographique qui ait été employée d'une manière aussi variée que le mot Inde. Les territoires auxquels elle a été appliquée se sont étendus des frontières orientales de la Perse actuelle aux mers de Chine; et, bien souvent, pendant le cours de l'histoire, les Européens surtout, pour ne parler que de l'ancien monde, ont désigné sous le nom de l'Inde, les pays situés à l'orient de l'Arabie, comprenant la vallée de l'Indus, la presqu'île hindoustanique, Ceylan, l'Indo-Chine et même les îles asiatiques de l'archipel malais. Pour les anciens Iraniens, le Hindou, l'Inde, commençait aux frontières orientales de l'Iran et ne comprenait que le bassin de l'Indus. Les Grecs ont étendu cette dénomination au bassin du Gange et à la presqu'île qui existe au sud de ce fleuve, y compris l'île Taprobane. L'appellation Inde ainsi comprise a le mérite de circonscrire le champ des investigations historiques en ne se rapportant qu'à une région où se groupèrent des peuples d'origine semblable. Les populations de l'Indo-Chine et de la Malai

sie, sur lesquelles on ne possède du reste que de bien rares notions historiques, proviennent, en grande partie, d'une source absolument différente.

Il est difficile de se rendre compte de l'histoire indienne, si l'on n'envisage un moment la configuration géographique de la vaste région dans laquelle elle se développa. L'Indus, dont le bassin forme une de ses principales divisions, la première qu'on rencontre en venant de l'occident, conduit à la mer des Indes, mer Érythrée des anciens, les eaux recueillies par lui ou par ses affluents sur le versant occidental du plateau central de l'Asie ou mieux des montagnes de l'Indou-Kousch, du Kaschmyr et de l'Himalaya. Il est la grande voie commerciale et en même temps la grande route des migrations entre le nord de la Perse, le Turkestan et la mer Indienne. Les pays qu'il arrose sont d'une grande richesse et jouissent de ce privilège de donner place aux productions les plus variées. Les hautes vallées de l'Indou-Kousch et de l'Himalaya présentent une température glaciale, tandis qu'au sud des montagnes, à partir de Peschawer, le climat devient tempéré pour être ensuite de plus en plus chaud, et tropical enfin un peu avant l'embouchure du fleuve.

A l'est de l'Indus, séparé de lui par le désert des Radjepoutes et les premières montagnes en avant de l'Himalaya, s'étend d'occident en orient le bassin du Gange. Ce grand fleuve, du moins dans sa partie navigable, ne parcourt pas des pays aussi variés que ceux que traverse l'Indus; mais, presque

« PreviousContinue »