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RATIONAL

dre et tu retourneras en cendre,» paroles qui furent adressées à Adam (Genèse, chap. m). Job aussi fit pénitence dans la poussière et dans la cendre, comme on le lit dans le livre de Job (dernier chapitre). Le Seigneur dit encore : « Couvrezvous de cendres, dans votre maison de cendre » (Michée, c. 1). On lit dans le livre de Judith (chap. II) que les enfants d'Israël humilièrent leurs ames par les jeûnes et en couvrant leurs têtes de cendres. « Je parlerai à mon Seigneur, dit Abraham, quoique je ne sois que poussière et cendre » (Genèse, chap. XVIII). Mardochée se revêt d'un sac et se couvre la tête de cendres (Esther, chap. IV). Les filles de Sion se couvrent aussi la tête de cendres (Tren., chap. iv). Les pénitents et les mourants, dit le Pontifical, en signe de pénitence et d'humilité, et parce qu'ils ne sont que poussière et cendre, se prosternent dans la cendre ou sur la terre, et ils revêtent le cilice, coutume que nous avons empruntée à l'Ancien-Testament. On lit dans Isaïe (chap. LVIII) que les pénitents se revêtent du sac et de la cendre. << Couvrez-vous de cendre, dit Jérémie, parlant dans le même sens, car vos jours sont accomplis» (cháp. xxv). Jonas (chap. II) parle de même : « Le roi de Ninive, dit-il, se revêtit d'un sac et s'assit sur la cendre. » On voit la même chose (Tren., chap. II) : « Les vierges de Jérusalem, dit-il, se sont ceintes du cilice. » De même, le psaume xxxv dit : Induebat cilicio, « Il se revêtait d'un cilice. >>

XVIII. Cette cérémonie se fait encore pour marquer que, même qu'après l'expulsion d'Adam du paradis la terre fut maudite à cause de son péché; de même, par l'humilité de la de pénitence, notre terre, c'est-à-dire notre libre arbitre, est bénie par la pénitence, de telle sorte qu'elle ne produit point d'épines ni de chardons, mais de dignes fruits de pénitence: Or, on invite généralement tous les hommes à la pénitence lorsque l'on dit, dans l'antienne Immutemur habitu, etc.: Jejunemus et ploremus ante Deum, etc., « Changeons de vêtements, jeûnons et pleurons devant Dieu; » et l'on expose la raison pour laquelle

les hommes doivent jeûner, c'est-à-dire parce que le Seigneur attend qu'ils fassent pénitence; c'est pour cela que l'introït est Misereris omnium, Domine, propter pænitentiam, etc., « Seigneur, tu as compassion de toutes les créatures, et tu leur donnes le temps de faire pénitence. » Il est tiré de la Sagesse (chap. 1). Toutes les oraisons de la messe tendent au même but. L'épître Convertimini, qui est du prophète Joël (chap. II), invite généralement tous les hommes, petits et grands, de l'un et l'autre sexe, à faire pénitence; c'est pourquoi le Prophète dit : «< Sanctifiez le jeûne, publiez une assemblée géné– rale, faites venir tout le peuple, etc. »>

XIX. Suit le répons Miserere mei, Deus, et le capitule qui correspond à l'épître. Il nous montre le triple effet de la pénitence, qui d'abord nous procure la rémission de nos péchés, qui nous confère ensuite la grâce, et enfin foule aux pieds nos ennemis. D'où ces paroles: Dedit in opprobrium, etc., « Il a couvert de confusion et d'opprobre ceux qui me foulaient aux pieds. » Suit le trait Domine, non secundum peccata nostra, etc., qui marque les travaux de la pénitence. On dit ce trait les lundi, mercredi et vendredi de la semaine, jusqu'au dimanche de la Passion, afin que, dans ces jours, désignés pour un jeûne plus rigoureux, nous nous souvenions de la pénitence que nous avons commencée, et que nous proportionnions les prières au jeûne. Dans l'évangile Cum jejunatis, qui est de saint Mathieu (chap. vi), nous apprenons la manière dont nous devons jeûner, dans ce passage : « Pour toi, lorsque tu jeûnes, parfume ta tête et lave-toi le visage,» parce que tout pénitent doit être oint de l'huile spirituelle, qui est la joie du cœur, semblable à un athlète et à un soldat du Seigneur. Ainsi on lit dans l'Ecclésiaste : « Que l'huile ne manque point à ta tête; lave-toi le visage; » c'est-à-dire, que l'extérieur de ta personne indique la joie intérieure dont tu jouis, afin de ne pas faire paraître aux hommes que tu jeûnes; c'est-à-dire, jeûne, non point pour t'attirer le suffrage des hommes, mais celui de

Dieu seul, et ton Père qui voit tout ce qui se passe dans le secret, t'en récompensera. L'offertoire est : Exaltabo, où l'on rend grâces à Dieu pour le pardon des péchés que l'on doit obtenir. La communion est : Qui meditabit, etc., où l'on exhorte les fidèles à méditer la loi de Dieu; elle s'accorde avec l'évangile, parce que méditer la loi, c'est amasser des trésors dans le ciel.

CHAPITRE XXIX.

DU JEUDI.

Parlons maintenant du jeudi. Tous les hommes ont été invités à la pénitence, comme nous l'avons dit dans le dernier chapitre.

I. Mais, comme la pénitence consiste en trois choses, c'està-dire dans la prière, dans le jeûne et dans l'aumône, il s'ensuit qu'on parle, dans les trois jours suivants, de ces trois conditions de la pénitence. Et d'abord, le jeudi, on parle de l'oraison ou prière; aussi l'introït commence-t-il par ces mots : Dum clamarem ad Dominum, etc., « Pendant que je poussais des cris vers le Seigneur, etc. » Or, on prie, quand on prie pour soi ou pour les autres. Et, pour montrer ce que vaut la prière que l'on fait pour soi, suit l'épître Ægrotavit, d'Isaïe (chap. xxxvIII), où l'Eglise nous propose l'exemple du roi Ezéchias, qui, ayant prié pour lui, obtint du Seigneur un surcroît de quinze ans de vie. L'Eglise, pour nous montrer la puissance de la prière faite pour les autres, lit l'évangile Cum intraret Jesus, de saint Mathieu (chap. viii), où il s'agit du centurion, qui pria le Seigneur de guérir son serviteur, dont la guérison lui fut octroyée.

CHAPITRE XXX.

DU VENDREDI.

I. Le vendredi a trait au jeûne, et on y voit quel est le jeûne qui plaît à Dieu, c'est-à-dire le jeûne spirituel, et non le jeûne matériel; l'épître traite de ce dernier jeûne. Elle est d'Isaïe (chap. LVIII): Clama, ne cesses, etc., « Crie, et ne te lasse pas,» y est-il dit. Et plus loin: Quare jejunavimus, etc., « C'est pourquoi nous avons jeûné, et tu ne nous as pas regardés, etc. >> Et le Seigneur répond: Numquid tale est jejunium, etc. : « Le jeûne que je demande consiste-t-il à faire qu'un homme afflige son ame pendant un jour, qu'il fasse comme un cercle de sa tête en baissant le cou, etc.?» comme s'il disait : Je n'aime pas le jeûne où l'on se contente de mortifier le corps; mais le jeûne qui m'est agréable est celui où l'on brise les faisceaux de l'impiété, c'est-à-dire où l'on s'abstient de tout péché, ce qui a lieu quand on a la charité.

II. C'est pour cela que l'on dit l'évangile Audistis quia, etc., de saint Mathieu (chap. v), qui traite de la charité, et où il est dit, quoiqu'on ne le lise pas dans l'Eglise : Dictum est antiquis, etc., « Il a été dit aux anciens : Tu ne tueras pas, et moi je dis : Tu ne te mettras pas en colère. »

CHAPITRE XXXI.

DU SAMEDI.

Le samedi de cette semaine, l'Eglise fait mention de l'aumône et du sabbat, parce que, par les trois moyens précités, c'est-à-dire la prière, le jeûne et l'aumône, on arrive au sab

bat ou repos de l'ame, où l'on a déjà subi la peine du péché quant à ce qui concerne la pénitence; c'est-à-dire que la paix, qui est le repos, et le sabbat ou la tranquillité de l'ame, s'embrassent, c'est-à-dire ne font plus qu'une même chose. C'est ce qui est exposé sans figure dans l'épître (Isaïe, chap. LVIII): << Si tu le délivres de la chaîne, » c'est-à-dire de la chaîne des péchés, et la suite: « tu seras appelé au sabbat des cieux; >> et le reste. On dit la même chose dans l'évangile Cum sero esset, etc. (Math., vi), où il est question des disciples ballottés par la tempête, par où sont désignés les pénitents. Or, le Seigneur étant monté sur leur barque, le calme aussitôt succéda à la fureur des flots; car lorsque Dieu est présent dans le cœur de l'homme, son ame est tranquillisée, et le calme s'y fait.

I. Quoique ce samedi ait une épître et un évangile, comme quelques autres dans le courant de l'année, on n'en fait pas l'office par des chants, pour marquer, suivant quelques-uns, qu'il ne fait point partie du jeûne solennel. Or, nous jeûnons en ce jour, pour arriver au sabbat de l'éternel repos.

CHAPITRE XXXII.

DU PREMIER DIMANCHE DE CARÊME.

etc., que

C'est en ce dimanche, où l'on chante Invocavit me, commence le Carême ou la sainte Quarantaine, qui signifie ou désigne le temps de la pénitence spirituelle.

I. On le nomme Dominica quintana, « cinquième dimanche,» parce qu'il est le cinquième avant Pâques. Nous avons déjà dit, dans la première partie, au chapitre des Peintures, ce que signifient les cinq quadragésimes ou quarantaines (carêmes). Or, on l'appelle quarantaine, quoiqu'il renferme qua

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