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le terrain de la morale. Nous n'avons pas à rappeler ici que la Philosophie chrétienne renferme une morale aussi élevée que pure et sainte, que ses principes moraux disposent et conduisent à la perfection et à la sainteté, et que sous sa salutaire influence se sont formés et se forment, et se développent de grands caractères moraux.

» Pourrions-nous dire la même chose de la Philosophie allemande? Certainement non. Cette philosophie, saturée de Panthéisme conduit nécessairement à la glorification et à la divinisation de l'homme; comme conséquence, à la négation de la liberté humaine et de la distinction entre le bien et le mal moral, et, pour le dire une fois pour toutes, au renversement de tout ordre. Il est certain que quelques-uns de ses coryphées et de ses partisans se sont arrêtés et s'arrêtent encore dans leur marche, épouvantés pour ainsi dire devant les conséquences et les doctrines pratiques qu'ils voyaient surgir du sein du Panthéisme; mais d'autres, plus logiques et plus hardis, se chargèrent d'exposer au grand jour les doctrines morales renfermées dans les entrailles du Panthéisme.

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Puisque nous avons pris la Philosophie hégélienne comme point de comparaison, voyons les doctrines et les tendances morales de cette Philosophie mises en relief par ce qu'on appelle la gauche égélienne, c'est-à-dire par l'école qui s'est chargée d'aller résolûment jusqu'aux dernières conséquences de la philosophie de Hégel. Ecoutons les paroles de Heine, un des principaux représentants de la gauche hégélienne, dont nous venons de parler.

<< Dieu est identique avec le monde; il se manifeste dans les plantes, qui vivent d'une vie cosmo-magnétique, sans avoir conscience d'elles-mêmes, se manifeste dans les animaux, lesquels dans le rêve de leur vie sensuelle expérimentent une vie plus ou moins silencieuse. Mais Dieu se manifeste dans l'homme de la manière la plus admirable. Dans l'homine la Divinité arrive à révéler cette conscience d'elle-même par l'intermédiaire de l'homme. Toutefois ceci ne se vérifie point dans les hommes et par les hommes isolés; mais dans l'ensemble de l'humanité, de sorte qu'un homme seul en particulier comprend et représente une particule du Dieu-monde; mais tous

les hommes, pris collectivement, comprennent et représentent entièrement le Dieu-Monde dans l'idée et dans la réalité. Par conséquent Dieu est le véritable héros de l'histoire universelle. L'histoire n'est plus que sa pensée éternelle, son action éternelle, sa parole, ses actes, de sorte qu'on peut dire avec raison que l'humanité entière est une incarnation de Dieu. Par conséquent la fin de toutes nos institutions modernes est la réhabilitation de la matière, sa réinstallation dans tous ses droits, sa reconnaissance religieuse, sa sanctification morale. Nous recherchons le bien-être de la matière, parce que nous savons que la Divinité de l'homme se manifeste également dans sa forme corporelle. Nous voulons fonder une démocratie de Dieux terrestres, égaux en félicité et en sainteté. Nous voulons enfin le nectar et l'ambroisie, des manteaux de pourpre, la volupté des parfums, des danses, des nymphes, de la musique et des comédies1. »

Telles sont, en résumé, les théories sociales, historiques et morales qui ressortent nécessairement du fond du Panthéisme, quand celui-ci est porté à ses dernières conclusions naturelles et logiques. En effet, quand Dieu est tout et que tout est Dieu, il est clair que l'homme a le droit d'agir selon sa volonté et ses désirs; tout lui est permis, parce qu'il a droit à tout, sans coërcition ni assujettissement d'aucune sorte. La liberté morale, le bien et le mal, le mérite et le démérite, la vertu et le vice, sont des mots qui manquent de sens, parce que dès le moment qu'on suppose que Dieu est tout et que l'homme est Dieu, tout est une manifestation divine, tout est nécessaire, tout est bon2.

Si les doctrines se connaissent et se jugent par leurs conséquences et leurs applications, comme l'arbre par ses fruits, il est facile de reconnaître, après les courtes réflexions que nous faisons ici, la vérité de nos affimations, par rapport à la supériorité de la Philosophie chrétienne sur la Philosophie alle

De l'Allemagne depuis Luther.

Voir dans les Annales les expressions Panthéistes de plusieurs auteurs chrétiens, le vrai Panthéisme chrétien, la divinisation réelle de l'homme, opérée par le Verbe-Christ quand il est venu élever l'homme jusqu'à lui par l'Incarnation, t. VI, p. 42 (6o série). A. B,

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mande, non-seulement sur le terrain de la science et de la métaphysique, mais encore sur celui des conséquences morales et religieuses. Et avant de terminer cet article, qu'il nous soit permis d'exprimer l'opinion que le Panthéisme a eu peut-être plus d'influence qu'on ne le croit généralement sur la corruption moderne de notre époque. La vérité est que ces doctrines, après s'être emparées de la plupart des intelligences, se sont plus ou moins infiltrées dans toutes les branches de la science et de la littérature. Et vu les conséquences et les tendances de ces doctrines, il est probable que c'est à elles que l'on doit en grande partie l'affaiblissement des caractères énervés qui constituent la dégradation morale de notre société moderne.

>> Cette tendance sensualiste au luxe et aux plaisirs, cette soif insatiable de l'or et des richesses, cet empire des intérêts matériels et terrestres sur les intérêts moraux et éternels, cet oubli des véritables destinées de l'homme dans le temps et dans l'éternité, et surtout ce mépris sauvage et stupide de la vie et de la mort, qui se révèle et se manifeste par les suicides, conséquence logique du droit souverain que, en vertu du principe panthéiste, l'homme s'attribue sur lui-même, peuvent être considérés avec trop de fondement, comme des manifestations plus ou moins immédiates et apparentes, mais logiques, nécessaires et légitimes des doctrines et théories panthéistes, lesquelles, comme nous l'avons vu, portent, caché dans leur sein, le virus de l'athéisme et du sensualisme, et comme conséquence le renversement de tout ordre moral.

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Cette feuille 2o La Hoja popular (La Feuille populaire). populaire, qui est remise gratuitement à tous les souscripteurs à la Defensa de la Sociedad en double exemplaire, a pour rédacteur une femme qui signe Micarla de Silva. Elle contient des histoires et des scènes morales, des fables et d'autres poésies, et beaucoup d'adages ou locutions vulgaires. Ce petit journal, rédigé avec élégance et simplicité, porte d'heureux fruits, surtout parmi les habitants des campagnes auxquels il s'adresse. Il a pour but de combattre les pernicieux effets de la propagande anti-religieuse parmi le peuple.

3 Revista popular de Barcelona. L'Espagne, comme la France, compte un très-grand nombre de Semaines religieuses,

qui sont très utiles et combattent avec succès les mauvaises doctrines que les journaux impies et à bon marché propagent parmi le peuple. Celle de Barcelone est rédigée avec beaucoup d'esprit et de talent par un prêtre d'un très-grand mérite, M. Félix Sarda. Elle existe depuis huit ans, et elle est trèsrépandue dans la péninsule ibérique, dans les colonies espagnoles, en Amérique et même en France. Petit in-4° de 32 pages, formant chaque année deux volumes; chaque numéro est orné d'une gravure fort jolie représentant des monuments remarquables ou reproduisant des toiles des grnds maîtres.

Elle l'emporte incontestablement pour le luxe typographique sur la plupart de nos Semaines religieuses de France, et elle peut noblement rivaliser pour le fond avec celles qui sont parmi nous les mieux rédigées.

Le premier article roule ordinairement sur des questions morales ou dogmatiques, surtout sur des questions d'actualité, où l'on réfute les erreurs modernes. Ensuite vient une homélie sur l'évangile du dimanche, ou la vie abrégée du saint du jour; puis les échos du Vatican, qui mettent le lecteur au courant des affaires religieuses de Rome. Un correspondant espagnol domicilié dans la capitale donne une revue très-spirituelle et souvent humoristique de Paris. Des histoires morales, des légendes, de délicieuses pièces de poésie intéressent vivement les lecteurs de cette charmante revue. Elle est terminée par une chronique générale, des articles bibliographiques et une liste des souscripteurs pour le denier de saint Pierre. Car en Espagne, où la foi a jeté de si profondes racines, on se montre très-attaché au Saint-Siége, et malgré les efforts de la propagande impie, la charité catholique y opère des prodiges.

L'abbé BLANC,

Curé de Domazan (Gard)

(La suite au prochain cahier.)

VI SÉRIE. TOME XVI.-No 96; 1878 (95° vol. de la coll.)

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Compte-Rendu.

COMPTE RENDU A NOS ABONNÉS.

Nous n'avons pas besoin de faire observer que le principal Document conteou dans ce volume est le Bref de S. S. LÉON XIII sur les Vestiges des dogmes chrétiens tires des anciens livres chinois du P. Prémare. Ce Bref est une de ces illuminations que le Verbe-Christ, qui veille sur les besoins de son Eglise, fait surgir de la bouche de son Vicaire pour diriger les savants chrétiens et non-chrétiens. C'est pour cela qu'il a réveillé les peuples morts, Egyptiens, Assyriens, Tourariens et Chinois, tous, nos ancêtres, tous, nos frères, mais dispersés, égarés depuis Babel. Nos savants ont fait et font encore des études trèslouables sur les langues et l'histoire de tous ces peuples, mais faute de savoir que la Parole du Verbe, par lequel le Père nous a créés, a enseigné, dès le commencement, ce que l'homme devait croire et devait faire, dogme et morale, c'est-dire la Religion unique et universelle, ils ne nous donnent que des fragments, dont ils ne savent où placer l'origine, ou plutôt dont ils placent l'origine, on peut dire dans les nuages ou dans les ténèbres, mais en réalité dans l'homme même, et à la fin en eux-mêmes, comme si c'était sur quelques feuilles du printemps actuel qu'avait pu être écrite l'histoire du commen

cement.

S. S. Léon XIII enseigne à ces savants et à ces ignorants, non-chrétiens ou chrétiens:

1° Que les Chinois et autres peuples ne tiennent si fort à leurs doctrines,

2° Que parce qu'ils ignorent que la Religion chrétienne a été révélée au premier père des hommes. Il respecte leurs livres et les appelle sacrés, à cause des restes des enseignements du Verbe. Leur erreur est en quelque sorte excusée. Jamais semblables paroles n'étaient sorties de la bouche de Pierre.

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