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unis en un : « Je poserai dans les fondements de Sion une pierre, une pierre choisie et éprouvée, une pierre angulaire, précieuse, fondée sur le fondement, sur Dieu même. » Et cette pierre si précieuse et si importante pour construire l'édifice n'y sera pas mise sans contradiction. Car pour vous, ô enfants de Dieu, tirés des Gentils selon les conseils de la prédestination éternelle, ce vous sera une pierre de sanctification semblable à celle sur laquelle Jacob avait dormi de ce sommeil mystérieux, et qu'il sacra avec de l'huile pour être un monument de la gloire de Dieu. Mais ce sera une pierre contre laquelle on se heurtera; et une pierre de scandale aux deux maisons d'Israël, et qui les fera tomber; un piége et une ruine aux habitants de Jérusalem: plusieurs s'y heurteront et ils tomberont, et ils seront brisés, et ils seront pris dans le piége, et ils seront enlacés. » Le Christ devait être cette pierre unique et fondamentale, et néanmoins en même temps il devait être un scandale à Jérusalem; scandale aux Juifs, disait saint Paul. Celui qui se heurtera contre cette pierre et qui tombera dessus sera brisé, et celui sur qui elle tombera sera écrasé et mis en poudre de son poids, dit le Sauveur. Jésus-Christ est notre règle et notre juge. On tombe sur cette pierre, et on se heurte contre cette règle quand on pèche; elle tombe sur nous quand il nous punit: l'un suit l'autre. Le pécheur qui s'est venu briser, et a perdu toute sa force en transgressant la loi de Jésus-Christ, est écrasé par sa juste et éternelle vengeance. (BOSSUET.)

16. Celui qui tombera sur cette pierre sera brisé; et celui sur qui elle tombera sera réduit en poudre. —Que sont devenus et ces rois et ces peuples, et ces puissants et ces sages du siècle, que l'on a vus autrefois déclarer à l'Église une guerre à outrance? Ils ont été vaincus, dispersés, réduits au silence, anéantis. A quoi ont abouti et l'orgueil, et la sanguinaire audace, et les révoltes continuelles de la nation juive? Où est ce Simon le Magicien, qui ouvrit la carrière à l'hérésie et les voies à l'Antechrist? A la suite de ce maître d'erreur, qu'est devenu son disciple Montan, ce trop fidèle imitateur de ses sacriléges séductions? Où sont Marcion et Valentin, Manès et Basilide? Où est aujourd'hui Néron avec ses bûchers, Valence avec ses proscriptions? Tant d'autres maîtres du monde qui les ont égalés dans leur haine contre l'Église, un Julien entre autres, transfuge de ses drapeaux pour passer à ceux de l'idolâtrie, où sont-ils? Que sont devenus Arius, Ammonius et les autres fabricateurs d'hérésies; tous ceux, en un mot, qui résistèrent opiniâtrément aux progrès de la vérité? Ils ne sont plus. Tous ont été

jetés au vent en punition de leurs blasphèmes; l'Église seule subsiste, s'élevant immuable sur tous les débris. Si vous ne croyez pas à ce que je vous dis, croyez du moins à ce que vous voyez. Combien de tyrans ont essayé d'anéantir l'Église ! que de tortures employées contre elle ! chevalets, chaudières ardentes, animaux dévorants, glaives homicides, tout a été vain. Que sont devenus ceux qui lui avaient déclaré la guerre ? Ils ne sont plus; leur nom n'a pu se sauver de l'oubli. L'Église, où est-elle? Elle brille d'un éclat plus vif que celui du soleil. Les édits des persécutions ont passé ; les promesses faites à l'Église sont impérissables. (SAINT JEAN-CHRYSOSTOME.)

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20. Le royaume des cieux est semblable à un roi qui fit les noces de son fils. On voit avec quelle convenance la sagesse éternelle arrange les choses. Rien n'était plus convenable dans le temps qu'on machinait la mort du Sauveur, que de parler comme il a fait aux chefs d'une si noire conspiration, en leur faisant voir quels en seraient les effets et combien funestes à eux-mêmes et à toute la nation. Il était bon aussi de prévenir le scandale de la croix, et faire voir que si le Sauveur était rejeté, s'il devenait un scandale aux Juifs, il n'en serait pas moins, selon les anciennes prophéties, la pierre de l'angle, le fondement de tout l'édifice et l'espérance du monde. Le Fils de Dieu enseigne toutes ces vérités deux jours avant celui de sa mort. Rien n'était plus capable ni de corriger la malice de ses ennemis ni de prévenir le scandale de ses disciples. Ce qu'il va encore ajouter n'est pas moins à propos. Et Jésus répondant leur dit. Ce mot de répondre pourrait marquer qu'il continuait son discours. Le Fils de Dieu qui voyait le fond des cœurs, répondit souvent aux pensées secrètes de ceux qui l'écoutaient, comme il paraît par plusieurs endroits de l'Évangile. Après avoir dit qu'il se choisirait un autre peuple, il n'y avait rien de plus naturel que de rechercher en soi-même les causes les plus générales qui feraient abandonner les Juifs et les moyens qu'il aurait pour remplir sa maison. C'est ce qu'il explique par la parabole suivante: « Le royaume des cieux est semblable à un roi qui fait à son fils un festin de noces. >> Jésus-Christ était l'époux de cette noce. « Celui qui a l'épouse est l'époux, » disait saint Jean-Baptiste en parlant de lui: c'est lui qui était venu pour épouser son Église, la recueillir par son sang, la doter de son royaume, la faire entrer en société de sa gloire. Il fait un grand festin quand il donne sa sainte parole pour être la nourriture des âmes, et qu'il se donne lui-même à tout son peuple comme le pain de vie éternelle. « Il envoya ses serviteurs pour appeler aux noces ceux qui y

étaient conviés, mais ils refusèrent d'y venir; il envoya encore d'autres serviteurs avec ordre de dire: Tout est prêt, venez aux noces. » Ceux qui étaient invités, et qui refusaient de venir, étaient les Juifs qu'il avertit par lui-même et qu'il fit avertir par ses apôtres : que l'heure du festin était venue, qu'ils vinssent promptement ou qu'il en appellerait d'autres. Cela regardait les Juifs; mais cela nous regarde aussi. Nous sommes à présent les invités et nous devons apprendre ce qui empêche les hommes de venir à ce céleste festin. La cause la plus générale, c'est l'occupation et pour ainsi dire l'enchantement des affaires du monde. Jésus ne rapporte pas les affaires extraordinaires qui surviennent dans la vie. C'est le train commun des affaires qui occupe et qui enchante les hommes, de manière qu'ils ne se donnent pas le loisir de penser à leur vocation ni d'écouter Jésus-Christ qui les appelle à son festin. Tous négligeaient sa parole: l'un allait à sa métairie, l'autre à son négoce, et personne ne l'écoutait. (BOSSUET.)

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24. D'autres se saisirent des serviteurs, et, après les avoir accablés d'outrages, ils les tuèrent. C'est en effet ce qui arriva au Sauveur. Les uns ont résisté ouvertement à la prédication de l'Évangile; mais la cause la plus générale de le rejeter fut la négligence. Ils négligèrent: négligence causée par l'occupation des affaires de la vie. Il avait déjà fait cette parabole en une autre occasion, et saint Luc qui nous la rapporte, nous rapporte en même temps les vaines excuses de ceux qui ne venaient pas au festin. Les uns disaient, j'ai acheté une métairie; les autres, j'ai acheté des bœufs pour le labourage; les autres, je me suis marié. Ceux-là ne méprisaient pas ouvertement la parole; mais, occupés des soins du monde, ils allaient et venaient sans songer à rien qu'à leurs affaires. Ils ne disaient pas je n'ai que faire de vous, ni de votre festin; ils s'excusaient avec une espèce de respect. Je vous prie, disaient-ils, excusez-moi pour cette fois. C'était plutôt un délai qu'un refus. Telle est la vie humaine. On venait dire aux Juifs, aux Romains, à tout le monde : une grande chose est arrivée à Jérusalem, la vérité s'y est manifestée et la voie a été ouverte pour le bonheur de la vie future. Que m'importe! Chacun passait son chemin et allait à ses affaires : l'un à la ville, l'autre à la campagne; chacun avait son plaisir ou son petit intérêt. Combien plus étaient enchantés ceux qui n'étaient pas seulement occupés de leurs domestiques comme les particuliers, mais qui, attachés à ce qu'on appelle les grandes affaires du monde, ne disaient das seulement : J'ai acheté une mélairie, ou j'ai pris une femme;

mais j'ai une province, j'ai une armée, j'ai une importante négociation, j'ai l'empire entier à conduire. Qui se souciait en cet état de ce qu'avait dit Jésus-Christ? Ou qui se mettait en peine de s'en informer? Telle est la parabole que Jésus-Christ avait déjà faite et qu'il trouva à propos de répéter peu de jours avant sa mort. Il y ajouta pour les Juifs l'endroit qui les regardait et les noires machinations qu'ils faisaient entre eux pour le perdre. « Quelques-uns firent mourir les serviteurs qui les appelaient au festin, et le roi en colère envoya ses armées et perdit ces meurtriers, et mit le feu à leur ville qui fut réduite en cendres. » Encore une fois, appliquons-nous cette parabole. Tout ce qui conspire contre la justice en quelque manière que ce soit, conspire contre Jésus-Christ. Qui opprime les pauvres, l'attaque; qui n'est pas avec lui est contre lui; qui néglige ses commandements et les foule aux pieds, le crucifie et tient son sang pour impur. Lisez saint Paul, vous en trouverez la sentence dans son épître aux Hébreux. (Bossuet.)

30. Mon ami, comment éles-vous entré ici sans la robe nuptiale?— C'est au Seigneur Jésus seul qu'il appartient d'adresser cette question aux pécheurs. Pour nous, ministres de son temple, nous accueillons tous ceux qui se présentent; préposés à la garde de la porte, nous la tenons ouverte. Peut-être êtes-vous venus ici avec une âme souillée par le péché, peut-être vos intentions sont-elles coupables; vous êtes entrés cependant, vous avez été admis, votre nom est inscrit sur le registre. Voyez-vous cette vénérable enceinte? Voyez-vous l'ordre et la régularité de nos saints exercices! Voyez-vous comme on lit ici avec recueillement les saintes Écritures? Voyez-vous la suite et l'enchaînement des instructions? Que cet aspect touche votre cœur et qu'il éclaire votre esprit! Si vos sentiments ne sont point en harmonie avec ce qui se passe dans ce saint lieu, sortez aujourd'hui sans honte, et de vousmême; demain vous reviendrez mieux disposé. Si vous portez la robe de l'avarice, changez-la pour venir au milieu de nous ; quittez, quittez tout vêtement impur. Déposez vos passions honteuses, prenez la robe blanche de l'innocence et de la pudeur. Je vous en avertis avant que l'époux de nos âmes, Jésus-Christ, ne soit entré dans la salle et qu'il ne remarque vos vêtements souillés par la fange du péché. Vous avez assez de temps; passez quarante jours dans la pénitence. Vous pourrez, dans cet intervalle, vous dépouiller de tout ce qu'il y a d'impur en vous, vous laver de vos fautes, prendre un vêtement sans tache, puis vous reviendrez sans crainte à la table du grand roi. (S. CYRILLE DE JÉRUSalem.)

31. Liez-lui les pieds et les mains, et jetez-le dans les ténèbres extérieures; là seront des pleurs et des grincements de dents. - Par les entraves de la sentence, on lie les pieds et les mains à ceux qui n'ont pas voulu être retenus dans les règles d'une vie meilleure. Ceux qui se sont affranchis des bonnes œuvres, sont maintenant liés dans la peine. On lie les pieds de ceux qui n'ont pas visité les malades, et les mains de ceux qui ont refusé l'aumône à l'indigent. Ceux qui se laissent maintenant lier dans le vice, seront alors liés malgré eux dans les supplices et les tourments. Remarquez cette expression, Jetez-le dans les ténèbres extérieures. C'est qu'il y a des ténèbres intérieures que nous appelons l'aveuglement du cœur, et des ténèbres extérieures qui sont la nuit de la damnation éternelle. Alors le damné sera jeté, non dans les ténèbres intérieures, mais dans les ténèbres extérieures; après être tombé par sa volonté dans l'aveuglement du cœur, il sera, à son grand regret, précipité dans la nuit de la damnation. Là, nous dit l'Évangile, seront des pleurs et des grincements de dents: il faut que dans l'enfer les dents grincent à ceux qui dans cette vie ont élé les esclaves de la gourmandise; que là les yeux pleurent, pour avoir ici dévoré tant d'objets de concupiscence. Il faut que chaque membre ait son tourment, comme chaque vice a eu son esclave. Après cette sentence particulière, le Seigneur en prononce une générale : Beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. Quelle parole terrible! Pour le présent nous sommes tous appelés par la foi, et nous venons tous aux noces du Roi céleste; nous croyons de cœur et nous confessons de bouche le mystère de son incarnation; nous prenons tous part au festin de sa divine parole; mais au jour du jugement le Roi entrera pour voir ceux qui sont à sa table. Que nous soyons appelés, nous le savons; mais sommes-nous élus? nous ne le savons pas. Quoi de plus propre que cette ignorance à nous abîmer dans notre néant! Le plus grand nombre ne commencent pas même à faire le bien; beaucoup, après avoir commencé, ne persévèrent pas. L'un, après avoir passé sa vie dans l'égarement, revient enfin par la pénitence à des voies meilleures; l'autre, au contraire, termine par une chute déplorable une vie qui paraissait excellente. Un autre commence le bien avec ardeur et le con

tinue avec plus de courage encore; un autre qui a mal commencé, se plonge chaque jour plus avant dans l'abîme du vice. Que chacun de nous donc craigne pour lui-même, parce qu'il ignore ce qui l'attend. (SAINT GREGOIRE, pape.)

32. Beaucoup sont appelés, mais peu sont élus. N'entrons point

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