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toutes les circonstances de ce miracle, est forcé d'en reconnaître la vérité. Et, ce qui est encore plus étonnant, continue ce saint docteur, c'est que les deux choses qui naturellement auraient dû être des obstacles à la foi de cette résurrection, savoir, la haine des pharisiens et l'incrédulité des apôtres, sont justement les deux moyens que Dieu a employés pour l'appuyer et la fortifier. Oui, les ennemis de Jésus-Christ les plus passionnés ont, malgré eux, contribué par leur haine même à vérifier le miracle de la résurrection de son corps, et par conséquent à établir notre foi. Car prenez garde : à peine Jésus-Christ a-t-il expiré, qu'ils s'adressent à Pilate; et que lui représentent-ils? Nous nous souvenons que ce séducteur a dit, lorsqu'il était encore vivant : Je ressusciterai trois jours après ma mort; il s'y est publiquement engagé, et il a voulu qu'on éprouvât par là s'il était fidèle et véritable dans ses paroles. Tout le peuple est dans l'attente du succès de cette prédiction; et, si son corps venait maintenant à disparaître, il n'en faudrait pas davantage pour confirmer une erreur aussi pernicieuse que celle-là. Il est donc important d'y pour

voir, et nous venons à vous pour le faire avec plus d'autorité. Allez, leur répond Pilate, vous avez des gardes, usez-en comme il vous semblera bon; je vous donne tout pouvoir. Et aussitôt le sépulcre est investi de soldats; la pierre qui en ferme l'ouverture est scellée; on n'omet rien pour une entière sûreté. Quel effet de cette prévoyance? Point d'autre que d'écarter jusqu'aux moindres doutes et jusqu'aux plus légers soupçons sur la résurrection de JésusChrist. Car, malgré toutes leurs précautions et tous leurs soins, le corps du Sauveur, après trois jours de sépulture, ne s'étant pas trouvé dans le tombeau, que pouvaient dire les pharisiens? Que ses disciples l'avaient enlevé à la faveur de la nuit, et tandis que la garde était endormie? Mais, reprend saint Augustin, comment a-t-on pu approcher du sépulcre, lever la pierre, emporter le corps, sans éveiller aucun des soldats? D'ailleurs, si la garde était endormie, d'où a-t-elle su qu'on l'avait enlevé, et qui l'avait enlevé? et, si elle n'était pas endormie, comment a-t-elle souffert qu'on l'enlevât? Quelle apparence que les disciples, qui étaient la faiblesse et la timidité même, soient

devenus tout à coup si hardis, et qu'au travers des gardes, avec un danger visible de leurs personnes, ils aient osé ravir un corps mis en dépôt sous le sceau public? De plus, quand ils l'auraient osé, à quel dessein voudraient-ils faire croire aux autres une chose dont la fausseté leur aurait été clairement connue? Que pouvaient-ils espérer de là? Car, s'ils avaient enlevé le corps, il leur était évident que JésusChrist n'était pas ressuscité, et qu'il les avait trompés; et, comme ils s'étaient exposés pour lui à la haine de toute leur nation, il était naturel que, se voyant ainsi abusés, bien loin de soutenir encore ses intérêts, ils le renonçassent, déclarant aux magistrats que c'était un imposteur: témoignage que toute la Synagogue eût reçu avec un applaudissement général, et qui leur eût gagné l'affection de tout le peuple; au lieu que, publiant sa résurrection, ils ne devaient attendre que les traitements les plus rigoureux, les persécutions, les prisons, les fouets, la mort même '. »

1 Sermon pour le jour de Pâques, sur la Résurrection de Jésus-Christ.

VI

Le jour même de la résurrection, le Sauveur apparut à Pierre et à deux autres disciples. Ceux-ci se rendaient à Emmaüs, bourgade éloignée de Jérusalem de soixante stades, environ douze kilomètres. Chemin faisant, ils s'entretenaient de ce qui s'était passé les jours précédents. Tandis qu'ils conversaient ensemble, s'interrogeant mutuellement, Jésus s'approcha, et se mit à cheminer avec eux, sans qu'ils le reconnussent. Il leur dit : « De quoi vous entretenez-vous en marchant? et pourquoi êtes-vous tristes? » L'un des voyageurs, nommé Cléophas, lui répondit : «< Êtesvous le seul étranger à Jérusalem, ignorant ce qui est arrivé ces jours derniers? Qu'y a-t-il donc? » demanda-t-il. « Ce qui vient de se passer, reprirent-ils, à l'égard de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en paroles et en actions devant Dieu et devant tout le peuple. Vous ne savez donc pas comment les princes des prêtres et les chefs de

notre nation l'ont livré pour le faire condamner à mort, et comment ils l'ont crucifié? Pour nous, nous espérions qu'il rachèterait Israël; et voilà maintenant le troisième jour que ces faits ont eu lieu. Quelques femmes, toutefois, qui sont des nôtres, nous ont effrayés. Elles sont allées au sépulcre avant l'aube du jour. N'ayant plus trouvé le corps au tombeau, elles nous ont annoncé en outre que des anges leur ont apparu, leur affirmant que Jésus est vivant. Plusieurs des nôtres, à cette nouvelle, ont couru vers la grotte sépulcrale; ils ont reconnu, suivant le rapport de ces femmes, que le sépulcre était vide, et ils n'ont pas retrouvé le corps de Jésus.

- Hommes de peu d'intelligence et de peu de foi! dit Jésus; comment votre cœur est-il si lent à croire ce qu'ont prédit les prophètes? Ne fallait-il pas que le Christ souffrît, et qu'il entrât ainsi dans sa gloire? »

Alors Jésus se mit à leur interpréter les Écritures, commençant par Moïse, sans omettre aucun des prophètes, et leur expliqua tous les passages relatifs au Messie.

Cependant ils étaient arrivés au village vers

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