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Grand (1), saint Césaire d'Arles (2), saint Léon (3), saint Jérôme (4), saint Jean Chrysostome (5), saint Ambroise (6), saint Cyprien (7), Origène (8) et Tertullien (9). Ils s'expriment tous dans le même sens que saint Augustin. C'est aussi l'enseignement des papes et des anciens conciles, et la pratique générale et constante des différentes Églises de l'Orient et de l'Occident, comme on peut s'en convaincre par la lecture des canons sur la pénitence, et des pénitentiels de toutes les parties du monde chrétien.

ARTICLE IV.

De l'absolution.

935. L'absolution sacramentelle est une sentence par laquelle le ministre du sacrement de pénitence remet les péchés. Le confesseur ne déclare pas seulement que les péchés sont remis; la sentence qu'il porte est un jugement, un acte d'autorité qui absout le coupable, en opérant de lui-même, ex opere operato, la rémission des péchés. Que la forme soit indicative ou déprécatoire, le prêtre qui la prononce remet les péchés. « Quoique l'ab« solution du prêtre, dit le concile de Trente, soit une dispensa«<tion du bienfait d'autrui, toutefois ce n'est pas seulement un « simple ministère, ou une simple commission d'annoncer l'Évangile, ou de déclarer que les péchés sont remis, mais un acte « judiciaire, par lequel le prètre, comme juge, prononce la sen«tence (10). » Anathème donc à celui qui dit « que l'absolution « sacramentelle du prêtre n'est pas un acte judiciaire, mais un simple ministère, consistant à prononcer et à déclarer que les péchés sont remis à celui qui se confesse (11). » En effet, NotreSeigneur n'a pas dit à ses apótres: « Les péchés seront remis à « ceux à qui vous les déclarerez remis, et ils seront retenus à «< ceux à qui vous les déclarerez retenus; mais bien: Les péchés « seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront rete"nus à ceux à qui vous les retiendrez. » Aussi, la forme du sacre

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Luc.

(1) Liv. 1x, Moral., c. xxvn. (2) Sermon 1, sur l'Aumône. —(3) Lettre xcI. - (i) Sur Joël. · (5) Homélie XLU, sur saint Matthieu. —(6) Liv. vu, sur saint - (7) Lettre Lv. (8) Homélie in, sur le liv. des Juges. (9) Liv. de la Pénitence, c. VI. — (10) Session XIV, ch. vi. — (11) Si quis dixerit, absolutionem sacramentalem sacerdotis non esse actum judicialem, sed nudum ministerium pronuntiandi et declarandi remissa esse peccata confitenti....; anathema sit. Ibidem, can. Ix.

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ment de pénitence, pour les Latins, consiste dans ces paroles : Je vous absous, etc.; paroles qui expriment parfaitement et le pouvoir du prêtre et l'effet du sacrement.

CHAPITRE III.

Des effets du sacrement de pénitence.

936. Le principal effet du sacrement de pénitence est de réconcilier le pécheur avec Dieu. Il n'est aucun pécheur, eût-il commis tous les crimes dont un homme est capable, qui ne puisse en obtenir l'absolution. Suivant le concile de Trente, le sacrement de pénitence est établi afin que ceux qui se sont souillés de quelque crime comparaissent comme coupables devant le tribunal sacré, et qu'ils puissent étre délivrés de leurs péchés, non pas une fois, mais toutes les fois qu'ils s'y présenteront avec des sentiments de contrition (1); ce qui est conforme à ces paroles de JésusChrist: « Tout ce que vous délierez sur la terre, sera délié dans « le ciel : Quæcumque solveritis (2). » TOUT, sans distinction entre les fautes légères et les fautes graves. Dieu promet le pardon aux pécheurs qui font pénitence: « Que si l'impie, dit le Seigneur, << fait pénitence de tous les péchés qu'il a commis, s'il garde tous « mes préceptes et s'il agit selon l'équité et la justice, il vivra certainement, et il ne mourra point. Je ne me souviendrai plus de toutes les iniquités dont il s'est rendu coupable (3). — Je le « jure par moi-même, je ne veux point la mort de l'impie, mais << qu'il se convertisse en quittant sa voie, et qu'il vive (4). » Que l'impie revienne donc au Seigneur, et qu'il espère en celui qui se plaît à manifester sa miséricorde à l'égard des plus grands pé

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(1) Nam hos (domesticos fidei), si se postea crimine aliquo contaminaverint, non jam repetito baptismo ablui, cum id in Ecclesia catholica nulla ratione liseat, sed ante hoc tribunal, tanquam reos, sisti voluit; ut per sacerdotum senLentiam non semel, sed quoties ab admissis peccatis ad ipsum pœnitentes confugerint, possent liberari. Sess. xiv, ch. 11. —(2) Saint Matthieu, c. xvi, v. 18. — (3) Si autem impius egerit pœnitentiam ab omnibus peccatis suis, quæ operatus est, et custodierit omnia præcepta mea, et fecerit judicium et justitiam, vita vivet, et non morietur. Omnium iniquitatum ejus, quas operatus est, non recordabor in justitia sua, quam operatus est, vivet. Ézéchiel, c. xvII, v. 21 et 22. — (4) Vivo ego, dicit Dominus Deus: nolo mortem impii, sed ut convertatur impius a via sua, et vivat. Ibidem, c. xXXIII, v. 11.

cheurs; qu'il mette sa confiance en celui qui est mort pour le salut de tous les hommes, et qui est la victime de propitiation, nonseulement pour nos péchés, mais encore pour les péchés du monde entier (1).

937. Il est vrai que les livres saints paraissent, en certains endroits, favorables à ceux qui ont prétendu que les péchés les plus graves étaient irrémissibles. Mais quand il est dit dans l'Écriture qu'il n'y a pas de pardon pour tel pécheur, pas de rémission pour tel péché, par exemple, pour le blasphème contre le Saint-Esprit, cela doit s'entendre relativement, et non d'une manière absolue. Il est constant que les auteurs sacrés se servent quelquefois du mot impossible pour exprimer qu'une chose est très-difficile, et qu'ils disent qu'une chose n'arrivera pas quand elle n'arrive que trèsrarement. Cette manière de parler n'est point particulière aux Orientaux ; on la retrouve chez tous les peuples. D'ailleurs, c'est ainsi que l'ont entendu les Pères de l'Église et l'Église elle-même, qui prie pour la conversion de tous les pécheurs, et n'inflige des peines aux plus coupables que dans l'intérêt de leur salut éternel : Ut spiritus salvus sit in die Domini, comme le dit saint Paul en parlant de l'incestueux de Corinthe (2).

938. Toutefois, en remettant la coulpe et la peine éternelle du péché mortel, le sacrement de pénitence re remet pas toujours en même temps toute la peine temporelle. De là, comme nous l'avons dit plus haut, la nécessité de repasser ses années dans l'amertume de son âme, de se purifier de plus en plus par les larmes de la pénitence, et de satisfaire entièrement à la justice divine en ce monde ou en l'autre. Ce n'est qu'après avoir offert une pleine satisfaction, que le pécheur aura droit à la récompense que Dieu a promise à ceux qui sont vraiment pénitents.

La rémission des péchés s'opère, dans le sacrement, par la grâce sanctifiante, qui réconcilie le pécheur avec Dieu, ou le purifie de plus en plus, s'il la reçoit après avoir déjà obtenu le pardon de ses péchés.

939. La réconciliation qui se fait avec Dieu par le sacrement de pénitence est ordinairement suivie, dans les personnes pieuses qui reçoivent le sacrement avec dévotion, de la paix et du repos de la conscience, et d'une abondante consolation de l'âme (3).

(1) 1re épître de saint Jean, c. 1, V. 2. - (2) Éptire aux Corinthiens, c. v. (3) Concile de Trente, sess. XIV, ch. m.

v. 5.

CHAPITRE IV.

Du ministre du sacrement de pénitence.

940. Le ministre du sacrement de pénitence doit être revêtu d'un double pouvoir, du pouvoir d'ordre et du pouvoir de juridiction. Le premier pouvoir est celui que le prêtre reçoit dans l'ordination; le second est celui qui accorde au prêtre le droit d'exercer le pouvoir de l'ordre sur telle ou telle personne. La puissance d'ordre est la même dans tous les prêtres; la puissance de juridiction a des degrés; elle est plus ou moins étendue, car elle dépend de l'ordre hiérarchique et de la volonté des supérieurs.

941. Or, le pouvoir de l'ordre est absolument nécessaire pour l'administration du sacrement de pénitence. Il est de foi que les évêques et les prêtres seuls ont le pouvoir de remettre les péchés. Ainsi l'a défini le concile de Trente contre les novateurs du seizième siècle, les frappant d'anathème pour avoir dit «< que les ⚫ évêques et les prêtres ne sont pas les seuls ministres de l'absolu«tion, mais que c'est à tous et à chacun des fidèles chrétiens que • s'adressent ces paroles de Jésus-Christ: Tout ce que vous délie« rez sur la terre sera délié dans le ciel, et tout ce que vous lie« rez sur la terre sera lié dans le ciel; et celles-ci : Les péchés « seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ils seront rete« nus à ceux à qui vous les retiendrez (1). » Ce décret n'introduit point un nouveau dogme dans l'Eglise; ce n'est qu'une interprétation des paroles de Jésus-Christ, interprétation solennelle et authentique, émanée du tribunal suprême en matière de controverse. En effet, c'est la doctrine des Pères et des conciles de tous les temps. Telle est aussi la pratique générale et constante de l'Église les Grecs pensent comme les Latins; et l'Orient, quoique divisé en plusieurs sectes plus ou moins anciennes, est ici d'accord avec l'Occident.

942. Outre le pouvoir d'ordre qui se communique par le ministère des évêques, les ministres du sacrement de pénitence ont en

(1) Si quis dixerit.... non solos sacerdotes esse ministros absolutionis, sed omnibus et singulis Christi fidelibus esse dictum : Quæcumque ligaveritis, etc ; et quorum remiseritis peccata, etc....; anathema sit. Ibidem, can. x, et ch. V

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core besoin du pouvoir de juridiction pour absoudre validement. A défaut de ce second pouvoir, l'absolution n'est pas seulement illicite, mais nulle et sans valeur. En effet, l'absolution se donne ou se refuse par forme de jugement; c'est une sentence que le prêtre, comme juge, porte au tribunal sacré pour lier ou délier, pour retenir ou remettre les péchés, pour condamner ou absoudre. Or, une sentence, dans l'ordre judiciaire, ne peut être portée que sur ceux qui sont soumis à la juridiction de celui qui prononce. C'est le raisonnement du concile de Trente : « Comme la nature et la « raison de tout jugement veut qu'une sentence ne soit portée que « sur ceux qui sont soumis à celui qui juge, on a toujours été per« suadé dans l'Église, et le saint concile confirme cette vérité d'ailleurs certaine, qu'une absolution prononcée par un prêtre sur « une personne sur laquelle il n'a pas de juridiction ordinaire ou déléguée, doit être de nul effet: nullius momenti (1). » C'est pourquoi, suivant le même concile, il est reçu, comme article de foi, « que le pape et les évêques ont droit de se réserver l'absolu«<tion de certains cas; et que cette réserve ne regarde pas seule a ment la police extérieure, mais qu'elle est un obstacle à ce que « les prêtres puissent vraiment absoudre des cas réservés (2). » Et c'est parce que la réserve des péchés n'a pas seulement lieu pour la police extérieure, mais qu'elle a son effet même devant Dieu, que, « de crainte que quelqu'un ne périsse à l'occasion de la réserve, il a toujours été pieusement observé dans l'Église de Dieu qu'il n'y eût aucun cas réservé à l'article de la mort, et que tout " prêtre pût alors absoudre tout pénitent de quelque péché que ce « fût (3).

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943. Nous trouvons la même doctrine dans le canon Omnis utriusque sexus, du quatrième concile général de Latran, de l'an 1215, ainsi que dans les actes du concile de Florence, de l'an 1439, comme on le voit par le décret d'Eugène IV aux arméniens, dans lequel nous lisons: « Le ministre du sacrement de pénitence est le

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prêtre, sacerdos, ayant l'autorité d'absoudre, ou en vertu de son

⚫ titre, ordinariam, ou par une commission de la part du supérieur, ex commissione superioris. » Ainsi donc l'absolution des péchés, donnée par un évêque ou un curé intrus, c'est-à-dire, par un évêque ou un curé qui ne serait pas institué suivant les lois de l'Eglise en vigueur, serait tout à la fois sacrilége, nulle, invalide. On n'excepte que le cas où, à défaut du pasteur légitime ou d'un prêtre

(1) Sess. XIV, ch. vn. — (2) Ibidem, can. 11. ➡ ► (3) Ibidem, ch. vii.

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