Page images
PDF
EPUB

sant n'acquiert point une nouvelle vie ni un nouvel être, mais s'avance à la perfection de celui qui lui a donné la naissance; ainsi, soit que nos ames soient couronnées de la gloire de Dieu dans le ciel, soit que nos corps ressuscités par son Esprit saint soient revêtus de l'immortalité du Sauveur, ce n'est pas une nouvelle vie que nous acquérons; mais nous allons, selon l'ordre établi, au dernier accomplissement de cette vie divine et surnaturelle, que nous avons commencée dans le saint baptême. C'est là, fidèles, si nous l'entendons, cette nouveauté de vie dont parle l'apôtre; c'est là la résurrection spirituelle du chrétien à l'image de la résurrection de notre Seigneur. Maintenant ces vérités étant supposées, entrons dans la proposition de notre sujet.

Si la justice des chrétiens en ce monde, aussi bien que leur paix et leur immortalité au siècle futur, ne font qu'une même suite de vie; si d'ailleurs l'apôtre nous a enseigné que la résurrection de nos corps est la maturité et la plénitude, il s'ensuit, comme je l'ai remarqué, que la vie présente ressemble à l'enfance: c'est pourquoi l'apôtre saint Pierre nous dit que nous sommes des « enfans nou» vellement nés (1) » ; d'où je forme ce raisonnement, qui sera la base de tout mon discours. Tout ce que la nature donne à l'homme pendant le progrès de la vie, doit avoir son commencement dans l'enfance: donc si j'apprends de l'apôtre saint Pierre, qu'à l'égard de la vie divine, qui nous est acquise par la résurrection de notre Sauveur, notre pélerinage mortel est comme l'enfance, il faut que tous ces changemens admirables, qui nous rendront con

(1) I. Pet. 11. 2.

formes au Seigneur Jésus, se commencent en nous, dès ce siècle. Or nous avons dit, et il est très-vrai que notre vie nouvelle et la réparation de notre nature consiste à vaincre ces trois furieux ennemis, que le diable nous a suscités; le péché, la concupiscence et la mort, par ces trois divins dons où la grâce nous rétablit; la justice, la paix, l'immortalité: et partant, encore que ces trois choses ne s'accomplissent pas ici-bas, il est clair qu'elles y doivent être du moins ébauchées.

Et voyez en effet, chrétiens, de quelle sorte et par quel progrès Dieu avance en nous son ouvrage pendant notre captivité dans nos corps mortels : il ruine premièrement le péché; la concupiscence y remue encore, mais elle y est fortement combattue et même glorieusement surmontée; pour la mort, à la vérité elle y exerce 'son empire sans résistance, mais aussi l'immortalité nous est assurée : le péché aboli fait notre sanctification; la concupiscence combattue fait notre exercice; l'immortalité assurée fait notre espérance. C'est la vie du vrai chrétien ressuscité avec le Sauveur, que je me propose de vous représenter aujourd'hui avec l'assistance divine. Jésus ressuscité, assistez-nous de votre Esprit saint: et vous, ô fidèles, ouvrez vos cœurs à la parole de votre Maître; et apprenant l'incomparable dignité de la vie nouvelle que Dieu vous donne par son Fils Jésus-Christ, apprenez aussi de l'apôtre que comme Jésus est ressuscité, ainsi devons-nous marcher en nouveauté de vie. Commençons à montrer la ruine du péché par la grâce de la justice qui nous est donnée.

[blocks in formation]

LE JOUR DE PÂQUE.

Comment nous sommes devenus le temple de Dieu : profanation de ce temple. De quelle manière nous devons le purger, en détruisant toutes les marques du culte profane; le consacrer, en le faisant servir à un meilleur usage; l'entretenir, en travaillant chaque jour à son renouvellement.

In quo omnis ædificatio constructa crescit in templum sanctum in Domino in quo et vos coædificamini in habitaculum Dei in spiritu.

Tout édifice construit en Jésus-Christ s'élève comme un temple sacré en notre Seigneur : vous êtes bátis sur le Fils de Dieu, pour étre un temple de Dieu en esprit. Ephes. 11. 21, 22.

Ly a cette différence entre la mort de Jésus-Christ et celle des autres hommes, que celle des autres hommes est singulière, et celle de Jésus-Christ est universelle; c'est-à-dire, que chacun de nous est obligé à la mort, et qu'il ne paye en mourant que sa propre dette. Il n'y a que le Fils de Dieu qui soit mort véritablement pour les autres; parce qu'il ne devoit rien pour lui-même et de là vient que sa mort nous regardant tous, est d'une étendue infinie.

<< Mais comme il est le seul, dit saint Léon, en qui » tous les hommes sont crucifiés, en qui tous les >> hommes sont morts, ensevelis; il est aussi le seul » en qui tous les hommes sont ressuscités » Cùm inter filios hominum solus Dominus noster Jesus extiterit, in quo omnes crucifixi, omnes mortui, omnes sepulti, omnes etiam sint suscitati (1). Si bien que si nous sommes entrés avec lui dans l'obscurité de son tombeau, nous en devons aussi sortir avec lui avec une splendeur toute céleste; et ce tombeau nous doit servir, aussi bien qu'à lui, comme d'une seconde mère, pour nous engendrer de nouveau à une vie immortelle.

C'est à cette sainte nouveauté de vie que j'ai à vous exhorter en ce jour que le Seigneur a fait : et il a même semblé à saint Grégoire de Nazianze (2), que ce n'étoit pas sans Providence que cette fête solennelle du renouvellement des chrétiens se rencontre dans une saison où tout l'univers se renouvelle; afin que non-seulement tous les mystères de la grâce, mais encore tout l'ordre même de la nature concourût à nous exciter à ce mystérieux renouvellement. Dans ce concours universel de tant de causes à prêcher la nouveauté chrétienne; pour consommer un si grand ouvrage, il ne nous reste plus, ames saintes, que de demander à Dieu son Esprit nouveau par l'intercession de Marie. Ave, Maria.

LE Fils de Dieu toujours véritable accomplit aujourd'hui fidèlement, Messieurs, ce qu'il avoit pré- (2) Orat. XLIII. n. 23,

(1) De Passion. Domin. Serm. x11, cap. 111. — pag. 703, 704.

«

dit autrefois aux Juifs infidèles en des termes mystérieux, dont ils n'avoient pas entendu le sens, et qu'ils avoient pris pour un blasphême. « Renversez » ce temple, leur avoit-il dit, et je le redresserai en » trois jours » In tribus diebus excitabo illud (1). « Il vouloit parler, dit l'Evangéliste (2), du temple » sacré de son corps »; Temple vraiment saint et auguste, construit par le Saint - Esprit, consacré d'une huile céleste par la plénitude des grâces, et << dans lequel la Divinité habitoit corporellement (3)». Les Juifs, violens et sacriléges, avoient non-seulement profané, mais abattu et ruiné ce bel édifice; et il n'étoit pas juste que l'ouvrage du Saint-Esprit fût détruit et aboli par des mains profanes. Aussi aujourd'hui ce temple sacré, qui, tout abattu qu'il étoit dans un sépulcre, portoit toujours en lui-même un principe de résurrection, se relève sur ses propres ruines, plus auguste et plus magnifique qu'il ne fut jamais; si bien que nous lui pouvons appliquer ce qui fut dit autrefois du second temple de Jérusalem: Magna erit gloria domús istius novissimæ plusquam primæ (4) : « La gloire de cette se>> conde maison sera plus grande que celle de la pre

>> mière ».

Le renouvellement de ce temple, que l'Eglise célèbre aujourd'hui par toute la terre avec tant de joie, m'a fait penser, chrétiens, que nous avions aussi un temple à renouveler. C'est nous-mêmes qui sommes les temples du Saint-Esprit; si bien que vous devant parler aujourd'hui de la nouveauté chrétienne, par laquelle nous devons nous rendre

(1) Joan. 11. 19. — (2) Ibid. 21. — · (3) Colos. 11. 9. — (4) Agg. 11. 10.

« PreviousContinue »