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Mais ce n'était point assez pour le prince d'avoir créé une ville nouvelle, d'en avoir embelli beaucoup d'autres, il fallait, pour satisfaire sa grande âme, que de sages institutions, d'utiles établissemens vinssent assurer le bonheur de ses sujets, qu les consoler dans leurs maux.

L'éducation de la jeunesse fixa d'abord l'attention du monarque. Il mettait au rang des grandes affaires de l'état, le soin de perfectionner l'instruction publique. Des écoles gratuites furent donc établies dans les villes principales de la Lorraine; il y ajouta, pour celle de Nanci, des chaires de mathématiques, de philosophie et d'histoire ; et, afin d'aider au développement de ces connaissances utiles, il forma une bibliothèque publique, la première qui ait été ouverte dans cette province. A ce précieux établissement, il joignit une fondation de prix en médailles de la valeur de six cents livres, destinées à ceux des concurrens qui réussiraient le mieux à traiter les sujets proposés sur les sciences et sur les arts. Dès que les talens curent commencé à prendre l'essor, Stanislas, pour les diriger plus sûrement vers l'utilité publique, créa une académie nationale.

Appliqué à réparer les abus qui pouvaient compromettre le repos et la fortune de ses sujets, il voulut remédier aux inconvéniens qu'entraînent, pour les malheureux, l'administration de la justice, et fonda, à Nanci, une chambre de consultation gratuite, dont le but était de prévenir les procès, par des avis sages et éclairés. Cette institution paternelle, dont l'histoire n'offre aucun exemple, était particulièrement destinée aux pauvres; mais tous les citoyens, néanmoins, avaient le droit d'y recourir.

Une bourse de secours fut fondée pour les négocians que des pertes inévitables auraient laissés sans ressources; des sommes de mille écus à dix mille francs leur étaient prêtées pour trois années seulement. L'intérêt, de deux pour cent, était réuni au capital et l'augmentait chaque année; ainsi, le temps, qui détruit tout, ne pouvait qu'ajouter à cet acte de bienfaisance.

Une somme de cent mille écus fut destinée à dédommager les cultivateurs des pertes occasionées par la grêle, l'incendie et les maladies épidémiques. Enfin, des greniers d'abondance, établis à Bar et à Nanci, devaient préserver les malheureux des horreurs de la famine, dans les années de disette.

Pour faciliter le commerce intérieur de ses états, Stanislas fit construire des ponts et tracer des routes. Bientôt on vit s'élever de toutes parts des manufactures nouvelles. Pour seconder les efforts de l'industric naissante, des inspecteurs habiles, envoyés par le roi, parcouraient la Lorraine pour indiquer aux artistes, aux artisans en tous genres, des moyens de perfectionnement. Le prince lui-même se plaisait à visiter les nouveaux établissemens, et par ses éloges, ses encouragemens, il redoublait le zèle des entrepreneurs.

Avec lui, ce qui était un bien devenait possible; tous les malheurs étaient réparables, et c'était avec une munificence vraiment royale, qu'il

venait au secours de ses sujets. La ville de Saint-Diez fut réduite en cendres: Stanislas la fit rebâtir, sans délai, sur les plans de son premier architecte, et cette ville s'éleva de nouveau plus belle qu'elle n'était avant Pincendie.

Stanislas fonda dans sa capitale une école de médecine, et lui donna un jardin des plantes, le premier qui ait été cultivé en Lorraine. Les pauvres, qui jamais n'étaient oubliés, trouvèrent dans des consultations gratuites un adoucissement à leurs maux. Une pharmacie fut encore établie pour leur fournir les remèdes nécessaires, et soixante pauvres malades purent jouir tous les ans des bienfaits des caux de Plombières. - « Je ne veux pas, disait ce bon prince, qu'il y ait un genre de maladie dont mes pauvres sujets ne puissent se faire traiter gratuitement. » Dans ce but, il surveillait les hôpitaux déjà établis, en créa de nouveaux, et multiplia à l'infini les établissemens, les fondations qui devaient procurer quelque soulagement à l'humanité souffrante.

Pourrait-on oublier encore cette attentive bonté qui voulait éviter à la vertu indigente l'embarras, la honte de solliciter un utile secours. Une somme de 2,000 francs est destinée par Stanislas à une fondation d'aumónes secrètes. Il n'attend pas qu'on l'emploie !.... Sa main bienfaisante va prévenir, va chercher le malheur. « Un roi, disait-il, ne doit ja« mais s'informer s'il y a des misérables dans ses états, mais demander où << ils sont. >>

C'était sans faste, sans ostentation qu'il répandait ses bienfaits; on voyait qu'il ne cherchait en cela qu'à satisfaire son cœur aussi le moyen de lui plaire n'était-il pas de lui exagérer le bien qu'il avait fait, mais de lui en montrer qu'il pût faire encore. Il craignait sans cesse que quelque objet de bienfaisance n'eût échappé à sa vive sollicitude. Ayant un jour assemblé ses ministres, il parcourait avec eux cette longue liste de fondations, qui toutes avaient pour but le bien de ses sujets. -« N'avons-nous rien «< oublié ? dit l'excellent prince, cherchons, messieurs, cherchons: je <«< ne me consolerais pas si quelque chose encore manquait au soulagement « de mon peuple. » Après s'être épuisé en vaines recherches, son conseil lui prouve que rien n'a été négligé de nombreuses institutions, d'utiles établissemens ont assuré à la jeunesse une précieuse instruction, à l'agriculture, au commerce, des encouragemens et les moyens de réparer les pertes inévitables. Tous les maux enfin ont trouvé des adoucissemens, tous les malheureux des consolations, et ceux mêmes qui ne les réclamaient pas, des secours!... En un mot, les hommes de tous les âges, et dans toutes les situations de la vie, avaient eu part à ses bienfaits !... « Vous le voyez, sire, disent ses ministres; vous le voyez, rien n'a pu échapper à votre généreuse prévoyance. Eh bien, messieurs, dit Stanislas (paraissant réfléchir), eh bien! une fondation encore !... pour les cas imprévus.

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C'est ainsi que l'amour des peuples, sa passion dominante, était le mo

bile de toutes ses actions. De là, cette insatiable bienfaisance (si l'on peut parler ainsi ); de là, ces projets ingénieux du bien public, aussitôt exécutés qu'ils étaient conçus. Adoré de ses sujets, les étrangers, les souverains eux-mêmes s'accordaient à lui payer le tribut d'estime que lui décernait la renommée; et d'une voix unanime, il fut surnommé le Bienfaisant : titre glorieux que la postérité lui a confirmé !.....

(Vic de Stanislas, par madame de Saint-Ouen.)

RÉCAPITULATION DES FONDATIONS ET PRINCIPAUX ÉTABLISSEMENS FAITS EN LORRAINE, PAR STANISLAS, ROI DE POLOGNE.

Fondation faite à Notre-Dame-de-Bon-Secours, construction de l'église et des bâtimens.

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Fondation en faveur des pauvres attaqués de maladies épidémiques et ayant fait des pertes par la grêle et l'incendie.

Fondation pour des enfans orphelins, à l'hôpital de SaintJulien, à Nanci.

(Cet hôpital fut augmenté d'un bâtiment considérable.) Fondation pour les pauvres malades des Etats de Lorraine, à l'hôpital de Plombières.

Fondation à l'hôpital de Lunéville pour les opérations de la taille

Fondation de bouillon en faveur des pauvres malades dans les lieux où le roi a des bâtimens

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Maison des religieux de la Charité, ordre de Saint-Jeande-Dieu, fondée à Nanci.

171,924 fr.

300,000

218,150.

81,106

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47,225

72,000

131,234

Séminaire royal des Missions, faubourg Saint-Pierre, à

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Construction de l'église de Saint-Remy - Lunéville, et

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Frères des écoles chrétiennes établis à Maréville, et fon

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Fondation d'une bourse de secours pour le corps des marchands à Nanci.

.

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140,000

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Places pour six gentilshommes au collége royal de SaintLouis, à Metz ..

Places pour douze jeunes demoiselles aux Dames-du-SaintSacrement, à Nanci, avec des pensions de 600 et 300 liv.

à leur sortie..

Pension faite au collége de Bar, pour continuer l'instruction de la jeunesse.

10,666 fr.

Ecoles gratuites à Commercy.

13,200

Ecoles chrétiennes fondées à Bar.

26,400

Pension pour douze gentilshommes lorrains qui s'attacheront au service militaire de France.

10,666

Fondation en faveur des curés et vicaires infirmes du

diocèse de Toul

48,000

Fondation en faveur des pauvres honteux des villes de Lorraine et Barrois.

200,000

Fondation en faveur des malheureux de la ville de Nanci et de ses faubourgs, pour les cas imprévus.

100,000

On a lieu de s'étonner que, pendant une longue suite d'années, on n'eût point songé à rendre au bon Stanislas un témoignage public d'amour et de reconnaissance. Plusieurs personnes en avaient cependant conçu la pensée. Dès 1803, M. Blau (inspecteur de l'Université) avait exprimé le vœu de voir ériger une statue à ce modèle des rois, et l'Académie royale des sciences avait depuis pris à cet égard une honorable initiative. En 1823, M. le vicomte de Villeneuve- Bargemont, préfet de la Meurthe, jugeant le moment favorable pour provoquer une souscription, à l'effet d'élever un monument à Stanislas, publia la circulaire ci-après.

CIRCULAIRE A MM. LES SOUS-PRÉFETS ET MAIRES, RELATIVEMENT A LA SOUSCRIPTION ÉTABLIE DANS LE DÉPARTEMENT DE LA MEURtie, pour ÉLEVER, A NANCI, UNE STATUE AU ROI STANISLAS-LE-BIENFAISANT.

Nanci, le 12 mars 1823.

Messieurs, depuis long-temps les habitans de l'ancienne province de Lorraine manifestaient le vœu aussi légitime qu'honorable de voir élever au roi Stanislas, bienfaiteur de cette contrée, un monument public qui attestât leur reconnaissance et leur amour.

Personne n'ignore quels sont les titres de cet excellent prince à la vénération et à l'affection de ses anciens sujets. Dans les trois départemens qui composent l'ancienne Lorraine, la plupart des villes, et quelquefois de pauvres villages, attestent encore sa munificence royale, son admirable sagesse, ou sa touchante humanité. La ville de Nanci, surtout, offre à tous les yeux et à tous les cœurs la preuve de l'affection particulière de

Stanislas, qui s'était plu à l'embellir par des édifices magnifiques, et à l'enrichir de toutes les institutions propres à honorer et à fortifier la religion, répandre les lumières utiles, faire fleurir les sciences et les arts, et enfin soulager tous les genres d'infortune.

Et cependant lorsque la voix si pure de la postérité a justifié les noms de Bienfaisant et de Délices de la Lorraine, que des contemporains décernèrent à Stanislas, rien ne signale aux regards la reconnaissance de cette province; aucun monument public ne présente à l'admiration et au respect de ses habitans les traits révérés de ce bon roi. Les citoyens ne peuvent les contempler que dans l'église qui renferme ses cendres, ou dans l'intérieur de quelques-uns des édifices publics, élevés par ses soins.

L'étranger qu'appelle la curiosité dans cette cité remarquable, s'étonne de cet oubli, et sa surprise est, en quelque sorte, un reproche. Le moment est arrivé de le faire cesser et d'acquitter une dette sacrée.

C'est lorsque la France semble à l'envi rétablir tous les monumens détruits par le vandalisme révolutionnaire; c'est lorsqu'elle s'occupe d'en élever de nouveaux à ses plus grands rois, comme à ses plus grands hommes; c'est, enfin, lorsqu'une généreuse émulation anime, à cet égard, les provinces, les villes, et même de simples particuliers, que le vœu des anciens sujets de Stanislas devait être proclamé et exaucé. La Lorraine ne peut être étrangère au noble mouvement qui inspire le reste du royaume, et ce n'est pas en vain qu'un appel y sera fait pour élever, au moyen d'une souscription, une statue à l'aïeul maternel de notre bien-aimé monarque Louis-le-Désiré, qui porte aussi le nom de Stanislas, comme il en possède les vertus, les lumières et l'amour pour ses peuples.

Organe des vœux de mes administrés, j'ai prié Son Exc. le ministre de l'intérieur de les soumettre à l'approbation du roi. Sa Majesté a daigné les agréer et autoriser qu'une souscription fût ouverte dans le département de la Meurthe, de la Meuse et des Vosges, à l'effet d'élever une statue au roi Stanislas sur la place dite de la Carrière, à Nanci.

Pour arriver au but honorable qui m'est proposé aujourd'hi, je viens de prendre l'arrêté que vous trouverez à la suite de la présente lettre, et dont je confic les dispositions à votre zèle.

J'invite MM. les maires à donner à ces deux actes la plus grande publicité.

Je crois n'avoir pas besoin, messieurs, d'exciter votre empressement et vos soins sur un objet qui appelle tous les sentimens nobles et généreux. Les amis de la religion, les ministres des autels, les magistrats, les savans, les artistes, tous les citoyens, surtout les protecteurs des pauvres, et peut-être les pauvres eux-mêmes (objets de la sollicitude si tendre de Stanislas), voudront à l'envi payer un tribut d'amour à sa mémoire. Il n'est aucune famille chez laquelle la tradition n'ait perpétué le souvenir d'un bienfait du bon roi. Il n'est aucun citoyen qui ne jouisse encore tous les jours de ses travaux immortels, et qui ne doive être heureux de

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