de diminuer la part proportionnelle de chaque créancier dans la répartition des deniers provenant de la faillite. Détournement d'actif commis par des individus faisant le commerce sous un faux nom. Dans le § 3 de l'art. 593, enfin, le Code de commerce assimile aux banqueroutiers frauduleux « les individus qui, faisant le commerce sous le nom d'autrui ou sous un nom supposé, se seront rendus coupables de faits prévus en l'art. 591 ». C'est là plutôt un commentaire de l'art. 591 qu'une incrimination spéciale, puisque, d'une part, le nom seul ne suflit pas pour donner, à celui qui ne fait pas le commerce, la qualité de commerçant, et que, d'autre part, quel que soit le nom sous lequel le failli aura exercé le commerce et commis les détournements, c'est lui, et non pas le nom qu'il prend, qui est le commerçant et le banqueroutier. Il n'y a rien là qui diffère de la situation de toute personne dont un malfaiteur aura pris le nom. Stipulation, par un créancier ou par un syndic d'une faillite, d'avantages particuliers à son profit. - Les art. 597 à 599 du Code de commerce disposent : 597. « Le créancier qui aura stipulé, soit avec le failli, soit avec toutes autres personnes, des avantages particuliers à raison de son vote dans les délibérations de la faillite, ou qui aura fait un traité particulier duquel résulterait en sa faveur un avantage à la charge de l'actif du failli, sera puni correctionnellement d'un emprisonnement qui ne pourra excéder une année et d'une amende qui ne pourra être au-dessus de 2,000 fr. - L'emprisonnement pourra être porté à deux ans si le créancier est syndic de la faillite. 598. « Les conventions seront, en outre, déclarées nulles à l'égard de toutes personnes, et même à l'égard du failli. Le créancier sera tenu de rapporter à qui de droit les sommes ou valeurs qu'il aura reçues en vertu des conventions annulées. 599. « Dans le cas où l'annulation des conventions serait poursuivie par la voie civile, l'action sera portée devant les tribunaux de commerce. » C'est là un véritable détournement au préjudice de la masse que l'avantage stipulé diminue d'autant, et une telle fraude ne pouvait rester impunie. L'aggravation de peine contre le syndic était nécessaire, puisqu'il commet de plus un abus de confiance, en profitant de sa position pour se faire favoriser au préjudice de ceux mêmes dont il doit défendre les intérêts. Malversation par un syndic de faillite. - Enfin, complétant la répression en matière de faillite, l'art. 596 prononce contre le syndic qui se sera rendu coupable de malversation dans sa gestion, les peines de l'art. 406 du Code pénal. Cette peine est d'un emprisonnement de deux mois au moins, de deux ans au plus, et d'une amende qui ne pourra excéder le quart des restitutions et des dommagesintérêts qui seront dus aux parties lésées, ni être moindre de 25 fr. Le coupable pourra être en outre, à compter du jour où il aura subi sa peine, interdit, pendant cinq ans au moins et dix ans au plus, des droits mentionnés en l'art. 42 du Code pénal. Dispositions générales en matière de banqueroute. - L'art. 604 du Code de commerce permet, au failli qui aura intégralement acquitté en principal; intérêts et frais, toutes les sommes par lui dues, d'obtenir sa réhabilitation. Mème après sa mort, le failli, aux termes de l'art. 614 du même Code, pourra être réhabilité. Mais l'art. 612 refuse ce bénéfice au banqueroutier frauduleux «< Ne seront point admis à la réhabilitation les banqueroutiers frauduleux, les personnes. condamnées pour vol, escroquerie ou abus de confiance, les stellionataires, ni les tuteurs, administrateurs ou autres comptables qui n'auront pas rendu et soldé leur compte. Pourra être admis à la réhabilitation le banqueroutier simple qui aura subi la peine à laquelle il aura été condamné. » L'art. 600 ordonne l'affiche et la publication des arrêts et jugements de condamnation « 600. Tous arrêts et jugements de condamnation rendus, tant en vertu du présent chapitre que des deux chapitres précédents, seront affichés et publiés suivant les formes établies par l'article 42 du Code de commerce, aux frais des condamnés. >> Ces formes, indiquées par l'art. 42 du Code de commerce, sont les mêmes que celles pour les annonces judiciaires. SECTION VI. DU FAUX EN ÉCRITURE DE COMMERCE OU DE BANQUE. Nous avons, au titre « du faux » et à la section « des monnaies et de leurs équivalents», rapporté d'abord les dispositions des art. 147 et 148 du Code pénal sur le faux en écriture de commerce en général, puis, en particulier, sur l'application de ces articles à la contrefaçon et à l'altération des effets de commerce considérés comme équivalents de la monnaie. Il nous reste à considérer les art. 147 et 148 dans leur application aux écritures de commerce autres que les effets. Les écritures de commerce sont l'objet d'une sanction pénale plus sévère que les écritures privées, parce qu'elles ont en effet un caractère public: ce sont de véritables titres pour les tiers aussi bien que pour le commerçant lui-même. Là est écrite, jour par jour, l'histoire de ses opérations commerciales et la situation de ses affaires; s'il meurt, s'il fait faillite, s'il liquide, c'est là que tous les intéressés doivent trouver tous les renseignements dont ils ont besoin. Le Code de commerce, par son art. 12, dispose que « les livres de commerce, régulièrement tenus, peuvent être admis par le juge pour faire preuve entre commerçants pour faits de commerce » ; ces livres, aux termes des art. 13 à 15 du même Code, peuvent servir de preuve contre celui qui les a tenus, ou être représentés, d'après les ordres du juge, dans le cours d'une contestation, ou dans des affaires de succession, communauté, partage de société, et en cas de faillite. Dans ce dernier cas, c'est en grande partie à l'aide des écritures de commerce que le syndic peut se rendre compte de l'état des affaires du failli: aussi avons-nous vu que le seul fait de faire disparaître les livres suffit pour constituer la banqueroute frauduleuse. La falsification ou l'altération des livres est pour le moins aussi dangereuse que leur destruction. Et comme, indépendamment des livres proprement dits, d'autres écritures sont tenues pour la constatation des actes de commerce, le Code pénal a voulu incriminer les faux de cette espèce dans tous les cas, et quelle que fût l'écriture incriminée, pourvu qu'elle ait un caractère commercial, condition qu'il appartient au juge de rechercher et qu'il doit constater. Nous n'avons pas besoin d'ajouter que les caractères constitutifs du faux en général doivent également se réunir, sans quoi il n'y aurait point de fait punissable. Nous prions le lecteur de se reporter, en ce qui concerne la doctrine des trois éléments prétendus spéciaux à ce crime, à ce que nous avons exposé au titre « du faux ». Par « écritures de commerce ou de banque », on doit entendre toutes celles qui se rapportent à des actes de commerce ou de banque, ce qui comprend, outre les lettres de change, billet à ordres, chèques, etc., toute écriture constatant un acte de commerce ou s'y rattachant, sans distinguer si l'opération commerciale est faite avec un Français ou un étranger : les registres, les livres, les carnets, les lettres missives, notes, mentions écrites, tout ce qui est écrit, enfin, jusqu'à une simple étiquette, peut constituer, si les autres éléments d'incrimination s'y appliquent, le crime prévu par l'art. 147 du Code pénal. L'usage, aux termes de l'art. 148, est puni comme le crime lui-même. Faux en écriture de commerce ou de banque. — Il nous suffira de rappeler ici que l'art. 147 du Code pénal punit ce crime des travaux forcés à temps et que l'art. 164 du même Code ajoute à cette peine une amende de 100 fr. à 3,000 fr., qui peut être portée jusqu'au quart du bénéfice retiré ou espéré du crime. Usage fait sciemment d'écritures de commerce ou de banque contrefaites ou falsifiées. Les peines, comme on sait, sont les mêmes dans ce cas que pour le faux. TITRE X. - Navigation commerciale. La terre ne suffit pas à l'activité humaine. Depuis le jour où le premier sauvage creusa le premier canot d'écorce, l'homme a inventé la navigation: il a compris qu'il fallait se laisser aller au courant de ces « chemins qui marchent », et c'est ainsi que débordant du plateau central de l'Asie où elle avait pris naissance, l'humanité s'est épanchée sur la terre en suivant le cours des fleuves. Il est à peu près certain que ce mouvement a suivi la loi générale de toute migration, de toute colonisation. Tant qu'un mouvement d'émigration se continue avec la même intensité et dans le même sens, l'établissement de chaque groupe d'émigrants se fait d'autant plus loin du point de départ que la migration est plus récente. Et en effet, ces longues files d'hommes ne se mettent en mouvement que pour aller chercher l'espace, le climat, la nourriture, la sécurité qui leur manquent. Ils marchent sur une longue file et non sur un front étendu, parce que c'est une condition nécessaire pour marcher en grand nombre. En tête de cette immense colonne, les premiers qui trouvent sur leur chemin un lieu propre à s'y établir, s'arrêtent et laissent passer les autres; ceux qui ne marchaient qu'au second rang prennent la tête et continuent le voyage, jusqu'à ce qu'ils trouvent à leur tour un établissement: et ainsi le fleuve humain, déposant incessamment sur ses deux rives une alluvion d'hommes, descend vers la mer en peuplant le monde. Supposons que ce mouvement se continue assez longtemps pour que les sociétés humaines s'avancent jusqu'aux bords de la mer: là, devant l'immensité, il faut bien que l'homme s'arrête: il s'arrête en effet, mais il contemple la mer d'un air pensif, et, derrière l'horizon morne, il devine d'autres terres. Il est là, dominé par la grandeur de ce spectacle, attiré par le mirage de l'inconnu; il est un des derniers venus sur la terre; il est né précédé de plusieurs générations dont l'intelligence et l'expérience sont héréditairement accumulées en lui; pour venir s'établir là, il lui a fallu traverser toute la chaîne des établissements antérieurs au sien; il les connaît tous, tandis que les autres hommes ne connaissent pas d'autres établissements que ceux qu'ils ont laissés sur leur passage. L'homme primitif des bords de la mer (dans les grands continents, bien entendu), forme donc la race la plus intelligente et la plus puissante: il est là comme l'oiseau au bord du nid, prêt à s'élancer et ne sachant pas déployer ses ailes. Mais le fleuve humain continue à rouler vers les mers des flots de générations nouvelles, et bientôt, sur toutes les plages, s'accumulent des peuples de plus en plus nombreux, de plus en plus intelligents, et il se fait comme une pression qui semble les pousser dans la mer. C'est alors qu'on voit se détacher de la plage le premier canot qui ait vogué sur l'océan. Mais croit-on que le navigateur qui le montait fût un de ces génies audacieux qui sortent des rangs de l'humanité pour accomplir des actes surhumains? Croit-on que ce premier essai de navigation maritime ait été accompli en présence d'une foule assemblée sur la plage pour assister à un spectacle inconnu? Non sans doute, et en se servant d'une barque pour traverser une anse, une baie, un golfe, un bras de mer, les premiers matelots, descendus des hautes terres en se laissant aller au cours des grands fleuves, n'avaient qu'à se rapprocher des bords pour passer de l'embouchure du fleuve à la côte maritime. L'art de la navigation n'est donc pas sorti tout armé du cerveau d'un homme de génie : il s'est formé peu à peu, par l'effet du temps, de l'expérience, de l'audace réfléchie, de la science. Lors donc qu'Horace nous dit : Illi robur et æs triplex Primus. il nous peint une image saisissante, mais il exprime une idée parfaitement fausse, parce que ce primus dont il parle n'a jamais existé; et qu'au surplus, s'il s'était jamais trouvé un fou assez fou pour se jeter seul, dans une barque qu'il ne sût pas manœuvrer, à travers cette mer furieuse, bouleversée par les ouragans, bouillonnante de monstres marins et hérissée de rochers mortels, il est probable que son sort cût à jamais ôté aux autres hommes toute envie de l'imiter. Mais cet homme, que le poëte croyait voir dans le passé, il était dans l'avenir. Horace avait deviné son génie, mais il ne savait pas son nom: ce nom c'est CHRISTOPHE COLOMB. Il faut donc voir dans la navigation une conquête de l'homme et, dans ces fleuves et ces mers qu'il sillonne de la proue de ses navires, un nouveau champ pour son activité. Et quand on considère tout ce qu'il a fallu de courage et de génie, seulement pour arriver à traverser les mers; quand on pense aux dangers et aux difficultés de toutes sortes que les premiers navigateurs ont rencontrés sur des plages inconnues, au milieu de peuples sauvages ou barbares, une seule chose paraît au-dessus: c'est le trésor de civilisation et de richesse dont nous sommes redevables à la navigation. De nombreuses dispositions pénales se rattachent à cette matière, qui se divisera d'abord tout naturellement en navigation fluviale et navigation maritime. Nous traiterons d'abord de la navigation fluviale. La loi réserve au Gouvernement la police et l'administration de la navigation fluviale. Le principe qui domine toute cette matière, et qui résulte de la nature des choses mêmes, est que ce droit ne peut s'exercer que sur les cours d'eau navigables, puisque, hors de ces cours d'eau, l'objet d'un règlement sur la navigation n'existe plus. En matière de péage de bac, sur une rivière non navigable, la Cour de cassation a cependant reconnu au Gouvernement le droit de percevoir un péage, ce qui suppose le droit d'établir un bac sur ces cours d'eau, et c'est ainsi que l'administration le pratique. Mais il faut remarquer qu'il ne s'agit pas ici de navigation, mais de voirie et de police, matières rentrant incontestablement dans les attributions administratives. Nous traiterons successivement: de la police des cours d'eau; des bacs et bateaux; des bateaux à vapeur. Contravention à la police des cours d'eau navigables ou flottables. - Les règlements relatifs à la police des fleuves et rivières navigables ou flottables sont attribués aux préfets par les lois des 6-11 septembre 1790, 7-14 octobre 1790, 28 pluviose an vIII, et 29 floréal an xi. Les conseils de préfecture sont compétents pour réprimer les contraventions et prononcer les peines portées par ces lois. Contravention à la police des cours d'eau non navigables ni flottables. C'est encore aux préfets qu'il appartient de réglementer la police de ces cours d'eau. Mais les lois des 12-20 août 1790 et du 28 pluviôse an vIII n'ayant point édicté de peine en cas d'infraction aux arrêtés pris par les préfets, c'est la peine de l'art. 471 n° 15 du Code pénal qui les sanctionne. Par suite, les tribunaux de police ont seuls compétence pour prononcer sur ces infractions. Contravention à la loi du 9 juillet 1836, relative aux droits de navigation |