DE LA MISI PAR L'ÉLÉVATION DES SALA LETTRES A M. THIERS Rapporteur de la commission de l'Assistance et de la Prévoyance publi SE VEND A PARIS, A L'ADMINISTRATION DE LIBRAIRIE - 1850 << Parmi les enfans, il y en a 485 légitimes, 1,137 naturels. « Sur 1,040 enfans, 621 ont été mis en nourrice, tandis que 419 seulement ont été nourris par leurs mères. « On n'a pu obtenir de renseignements sur 577 autres, dont les mères ont quitté Paris ou ont changé furtivement de demeure. « Il n'a été réellement trouvé à domicile que 874 femmes, mais il a été recueilli des renseignemens sur 1,040. « On n'a donc pu établir, pour la mortalité des enfans, de proportion que sur 1,040 d'entre eux. « Le nombre des décès ayant été de 198, c'est moins de 1 sur 5 114 (19 sur 100). << Ce résultat est satisfaisant; il permet d'espérer que les femmes qui ont gardé leurs enfans ou qui en prennent soin, obtiendront des chances de conservation plus favorables pour l'avenir, que nos nourrices de campagne auxquelles les enfans de l'hospice sont confiés. « Si la mortalité est considérable à l'hospice, elle est plus forte encore à la campagne. « D'après les états annexés à ce rapport, 112,625 enfans ont été apportés à l'hospice, depuis 1816 jusqu'en 1837, c'est-à-dire pendant vingt-deux ans. « Sur ce nombre, . 30,055 sont morts dans l'hospice, 85,686 «La conservation n'a donc été que de 26,939, et la mort a frappé plus des trois quarts des enfans (76 sur 100). Les tables de la mortalité en France font connaître que sur 100 enfans, 46 succombent avant l'âge de 12 ans. La mortalité de nos enfans trouvés est donc plus forte de 30 pour 100 que celle des enfans de toute la France. >> « L'orateur du gouvernement, Regnaud (de Saint-Jean-d'Angely), en présentant au Corps-Législatif la loi de pluviôse an XIII, relative à la tutelle des enfans trouvés et abandonnés, recommandait aux administrateurs de veiller sur l'admission des enfans dans les hospices, devenue, disait-il, trop facile, et il s'exprimait en ces termes : « S'il est de leur devoir de ne pas repousser le <« véritable enfant du malheur, le véritable orphelin, il ne faut pas non plus ac« cueillir trop légèrement cet autre enfant que la paresse, l'immoralité de « son père repoussent de sa famille, où il pourrait le nourrir, s'il voulait tra«< vailler. Il ne faut pas recevoir l'enfant de cette femme qu'embarrasse la pré« sence de sa jeune fille, et qui l'envoie dans l'asile de l'indigence pour faire plus << librement de sa maison la retraite du vice. » (Rapport du conseil général des hospices.) REMACLE, inspecteur général honoraire des établissemens de bienfaisance: «< Des relevés particuliers, malheureusement encore trop rares, mais qui se généraliseront, prouvent que les enfans pauvres qui auraient été mis au tour, s'il avait été ouvert, et que leurs mères ont gardés avec les secours que la charité publique ne refuse à aucune misère, ont trouvé auprès de leurs mères des chances de vie supérieures de MOITIÉ à celles que l'hospice leur eût laissées. << Contrairement à l'opinion commune, si le nombre des infanticides s'est accru de 1825 à 1844 dans une proportion affligeante, sans doute, mais qui, après tout, n'est que celle des autres crimes contre les persones, ce ne sont pas les départemens dans lesquels les tours ont été supprimés qui ont le plus contribué à ce résultat, ce sont les autres.» (Rapport au ministre de l'intérieur.) de gérando : « Les motifs qui poussent une mère à commettre le crime d'infanticide sont des motifs d'une nature toute spéciale, sur laquelle l'existence ou la non existence des tours destinés aux enfans trouvés ne peuvent exercer aucune influence. » CUREL, préfet des Hautes-Alpes : « Quand les enfans ne meurent pas dans les premiers jours de leur arrivée à l'hospice, il faut les envoyer en nourrice, et le plus tôt est le meilleur. Mais où trouver des nourrices pour un si grand nombre, quand les familles riches sont souvent embarrassées pour en trouver une seule? On est obligé de recourir à des meneurs, espèces de courtiers qui parcourent les campagnes, demandent aux plus pauvres des jeunes femmes si elles veulent prendre à leur charge un enfant trouvé, moyennant la faible rétribution que l'hospice donne. S'il était permis d'être rigoureux, les trois quarts de celles qui viennent se faire visiter devraient être refusées..... Mais il n'y a pas à opter on prend celles qui se présentent, parce qu'il n'y en a pas d'autres. Et vous vous étonnez que les trois cinquièmes des enfans meurent dans la première année de leur vie! S'il fallait s'étonner de quelque chose, c'est du nombre de ceux qui survivent. «L'expérience et tous les documens que l'on peut consulter ont mis aujour4'hui entièrement hors de doute cette vérité importante que la suppression des Tours est sans influence sur les infanticides. J'en fournirai également une preuve eclatante pour le département des Hautes-Alpes. « L'empire que l'opinion exerce dans cette circonstance, comme dans beauComp d'autres, est une usurpation en même temps qu'un mal; c'est un pouvoir difficile à restreindre, j'en conviens, mais il faut cependant s'attacher à l'affaiblir. Le progrès dans le bien ne s'obtient pas sans lutte; et si l'on ne peut parvenir à le rendre sensible, on empèche au moins le mal de s'aggraver, ce qui est déjà un bien. >> « L'opinion n'est ici particulièrement, quoi qu'on en dise, qu'une puissance tyrannique et aveugle, invinciblement formée sans l'intelligence des besoins sociaux, beaucoup plus légitimes que son action. « C'est elle qui, dans la question qui nous occupe, est la véritable cause des infanticides. C'est la sévérité irréfléchie de l'opinion. A part quelques exemples qui sont dus à une extrême exaltation et à je ne sais quelle aberration de lanature, exemples qui se reproduisent de temps en temps dans cette infinie variété dé circonstances et d'organisations morales, et qui sont indépendans de toute mesure administrative et de toute institution sociale, je ne vois pas d'autre cause à laquelle on puisse attribuer ce genre de crime. Tous les administrateurs, les économistes les plus éclairés qui ont formé leur conviction à cet égard sur les recherches les plus consciencieuses, sont d'accord pour reconnaître que la fermeture des tours y est étrangère, et les craintes souvent manifestées par plusieurs conseils généraux sont sans fondement. >> « Dans le département des Hautes-Alpes, le nombre des enfans exposés en 1809 et 1810 a été de 35 et de 28. En 1811, il fut de 68, et n'a fait depuis lors que s'accroître jusqu'aux chiffres de 120 et 124. J'ai eu occasion de reconnaître ailleurs des effets semblables. (Question des enfans trouvés.) MARBEAU, ancien adjoint au maire du 1er arrondissement : « Un enfant est exposé; deux ou trois jours après, il part avec sa nourrice, qui le porte à trente ou quarante lieues. Il est soigné de telle manière que, dès la première année, il en meurt 42, 50 et parfois 66 sur 100. Celui qui survit est confié, après le sevrage, à de pauvres gens, moyennant 4, 5 ou 6 franes par mois. On trafique sur lui, on l'exploite, on lui fait produire le plus possible. Au lieu de l'envoyer à l'école, où il ne gagnerait pas un centime, on le dresse à mendier, à marauder; les enfans de son âge le méprisent, le maltraitent; sans parens, sans affection, sans éducation, n'ayant appris qu'à mépriser les hommes, qu'à détester la société, que peut-il être à douze ans? A cet âge, lorsqu'il est en état de gagner de quoi rembourser à la société les avances qu'elle a dû faire pour lui, nous l'abandonnons. « Un manufacturier philanthrope de Melun voulut employer dans sa filature une centaine d'enfans abandonnés; ils brisaient tout, et ne faisaient que du mal; ceux qui vont à l'armée, à la mer, sont généralement de mauvais soldats et de mauvais matelots. Un gendarme disait : « Sur trois vauriens que j'arrête, il y a presque toujours un enfant trouvé. » Bordeaux se réjouissait d'avoir passé quelques années sans exécution capitale; un jour, le terrible appareil est dressé, pour qui? pour un enfant trouvé. Le bagne a 15 enfans abandonnés sur 100 forçats; il ne devrait en avoir que 2 ou 3, mais la chance du crime est sextuple pour eux. Sur 4 abandonnés, 3 meurent avant l'âge de douze ans, et le quatrième semble Rapporteur de la commission de l'Assistance et de la Prévoyance publique. INTRODUCTION a Votre Commission pense qu'une discussion générale est nécessaire sur a les questions traitées dans ce rapport. Si tel des principes généraux de « votre Commission était contesté, si telle des idées qu'elle a condam«nées semblait au contraire devoir être adoptée et donner lieu à des a dispositions législatives, des décisions de l'Assemblée exprimées par « des renvois à la Commission ou des ordres du jour motivés pour« raient amener une solution définitive. Ce n'est qu'après une pareille « épreuve que ces importantes questions devront être considérées comme « résolues. >> Ainsi s'exprime, en ces termes formels, le rapport que M. Thiers a déposé le 26 janvier 1850, au nom de la Commission de trente membres qui avait été élue au commencement de 1849, dans le but suivant, tracé par elle-même : « Vous avez choisi dans votre sein une Commission de trente mem« bres, à laquelle doivent être adressées toutes les propositions relatives |